| BAS-BLEU, subst. masc. et adj. A.− Emploi subst., péj. Femme savante, d'une pédanterie ridicule. Avoir la réputation d'un bas-bleu; pérorer comme un bas-bleu; le pédantisme d'un bas-bleu : 1. − Un bas-bleu! d'une instruction à épouvanter, qui a tout lu! qui sait tout (...) en théorie, s'écria Canalis à un geste que fit La Brière, une enfant gâtée...
Balzac, Modeste Mignon,1844, p. 248. 2. Dans certains Mémoires écrits par une femme et considérés comme un chef-d'œuvre, telle phrase qu'on cite comme un modèle de grâce légère m'a toujours fait supposer que pour arriver à une telle légèreté l'auteur avait dû posséder autrefois une science un peu lourde, une culture rébarbative, et que, jeune fille, elle semblait probablement à ses amies un insupportable bas bleu.
Proust, Le Côté de Guermantes 1,1920, p. 186. 3. Il paraît que Tristan Derême est en ce moment l'amant de Mmede Noailles. Il a bien de la chance. Pas pour le bas-bleu! Pour la femme.
P. Léautaud, Journal littér.,t. 4, 1922-24, p. 325. B.− Emploi adj. : 4. Les gens de lettres? La plaie de la métropole. Et si l'on apprenait son passage à Londres, gare à ces dames bas-bleu, « esthétiques », artistes-amateurs, qui donnent des thés, bâclent des bouquins, et dont les filles composent des poèmes, forment un album d'autographes! « Nous n'avons rien de comparable à votre mot français raseuses! »
Blanche, Mes modèles,1928, p. 176. Prononc. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [bɑblø]. Dub. transcrit la 1resyll. par [a] ant. 2. Forme graph. − Écrit avec un trait d'union dans Ac. 1932; cf. aussi Rob., Lar. encyclop., Quillet 1965, Dub.; pour les dict. hist. : Besch. 1845, Lar. 19e, Guérin 1892, DG, Lar. 20e. Écrit sans trait d'union dans Nouv. Lar. ill. Étymol. ET HIST. − Av. 1786 infra; 1821 (Jouy, Hermite de Londres, II, 73 dans Bonn., p. 7 : Elle parlait avec enthousiasme d'une assemblée de bas bleus qui avait eu lieu la veille chez Lady Learnedlove).
Calque de l'angl. blue-stocking (Barb. Infl., p. 28; Bonn., op. cit.; Brunot t. 6, p. 1235; Mack t. 1, p. 195, 204), attesté au même sens dep. 1757 (Mrs Montague, Let. in Doran Lady of Last C. dans NED) où il désigne les membres du club littéraire qui se réunissait chez Mrs Montague et dont un des principaux tenants Mr Benjamin Stillingfleet portait, en réaction contre la tenue habillée habituelle dans ce genre de réunion des bas de laine bleue; d'où l'appellation de « The Blue Stocking Society »; des membres de cette société le nom passa aux femmes de cette coterie (1790-1807) puis à n'importe quelle femme affectant des prétentions littér. (1804 dans NED). Le fr. bas bleu est certainement attesté bien av. 1821 car il est empl. dans un cont. angl. en 1786 (Hannah More, Bas bleu, Advertisement cité par Mack. t. 2, p. 37 et 198), 1801, 1808, 1821 (NED). STAT. − Fréq. abs. littér. : 55. DÉR. Bas-bleuisme, subst. masc.,néol., péj. « Pédanterie ridicule de femmes de lettres sans talent ». ,,Plus il y a de talent dans une femme, quand par rareté il y en a, moins il y a de bas-bleuisme`` (Barbey d'Aurevilly, La Plume, no35, p. 173 dans Rheims 1969).− Écrit en un seul mot dans Nouv. Lar. ill. − 1reattest. 1867 (A. Delvau, Dict. de la lang. verte); dér. de bas-bleu, suff. -isme*. BBG. − Behrens Engl. 1927, p. 41. − Darm. Vie. 1932, p. 48. − Mat. Louis-Philippe 1951, p. 271. |