| * Dans l'article "BADINER,, verbe." BADINER, verbe. I.− Emploi intrans. A.− [Le suj. désigne un animé, et gén. une pers. ou un attribut de la pers.] 1. Folâtrer, s'amuser, se livrer à des jeux puérils ou galants : 1. Le vaste domaine sémantique du terme Wan n'en apparaît que plus digne d'intérêt. Il inclut d'abord le jeu enfantin et toute variété de divertissement insouciant et frivole, que peuvent évoquer par exemple les verbes folâtrer, batifoler, badiner.
Jeux et sp.,1968, p. 178. − Fréq. Badiner avec. ♦ Badiner avec qqn (ou avec un animal) : 2. Le marin, déjà saisi par de violents désirs, fut jaloux de faire tomber la réserve qu'on lui opposait (...) Il crut pouvoir y réussir en badinant avec l'inconnue à la faveur de cette amabilité française, de cet esprit parfois léger, parfois sérieux, toujours chevaleresque, souvent moqueur...
Balzac, Les Chouans,1829, p. 124. ♦ Badiner avec qqc.L'agiter légèrement et par jeu : 3. En arrivant à la porte de Caen, on examina pendant dix minutes les passeports des deux voyageurs, et, comme Leuwen se fâchait, un homme d'un certain âge, grand et fort, et badinant avec un énorme bâton, et qui se promenait sous la porte, l'envoya faire f... en termes fort clairs.
Stendhal, Lucien Leuwen,t. 3, 1836, p. 101. − [Avec un jeu de mots sur le subst. badine] :
4. don juan. − Si j'ai envie de badiner avec toi, c'est au moyen d'une vraie badine, maître sot, d'une badine à te houspiller les reins.
J. Richepin, Théâtre chimérique,1896, p. 307. − MAN. ,,Ce cheval badine avec son mors, il joue avec son frein`` (Ac.1835). Rem. Attesté dans les princ. dict. gén. du xixeet du xxesiècle. ♦ Badiner avec + un inanimé abstr.Prendre à la légère, ne pas attacher d'importance à : 5. Il disait : « On ne badine pas avec l'amour, mais on badine avec l'actualité ». Saisir l'actualité est un art et il faut du temps pour l'acquérir.
L. Daudet, Bréviaire du journ.,1936, p. 234. 2. Plaisanter, prononcer des paroles badines sur un ton enjoué. Parler en badinant : 6. Il plaisantait sur le suicide avec elle. Véronique disait en badinant qu'elle avait choisi de mourir, s'il lui arrivait d'y songer, sur un lit de tubéreuses.
Jouhandeau, M. Godeau intime,1926, p. 81. ♦ Badiner sur qqc.Traiter à la légère un sujet sérieux. − Fam. Vous badinez! (ou tu badines!). Vous plaisantez, vous ne parlez pas sérieusement! : 7. Toi, mon vieux rat, m'ennuyer? Allons donc! Tu badines, tu plaisantes. Dis plutôt que tu t'ennuyais de m'écrire, et non pas que tu t'es arrêtée dans la crainte de m'ennuyer.
Flaubert, Correspondance,1843, p. 132. Rem. Pour les accept. 1 et 2, et sans qu'on puisse toujours les distinguer, on rencontre fréq. des tournures négatives du type « il ne badine pas » « il ne badine pas avec (ou sur) ». Il est strict sur, il n'a pas l'habitude de plaisanter avec : 8. Ah! il ne badine pas, notre père zélateur, mais s'il est si sévère, c'est qu'il veut nous épurer et, vous savez, si l'on écoutait avec soin ses conseils, si l'on consentait très réellement à se mortifier, l'on finirait par devenir un vrai moine.
Huysmans, L'Oblat,t. 2, 1903, p. 264. − Expr. proverbiales. On ne badine pas avec le feu. Il ne faut pas jouer avec le feu, afin d'éviter l'incendie et, au fig. Il ne faut pas prendre de risques inutiles pouvant avoir des conséquences fâcheuses (cf. Leclercq, La Scène double ou Il ne faut pas badiner avec le feu, 1835, p. 360).On ne badine pas avec l'amour (cf. ex. 5 et la pièce d'A. de Musset qui porte ce titre [1834]). 3. Écrire dans un style badin, raconter une histoire plaisante ou traiter un sujet sérieux sur un mode plaisant. a) [Le suj. désigne une pers.] :
9. Pour gloser, badiner et railler par derrière
De façon à charmer notre pays malin,
Il faut beaucoup de verve, un esprit juste et fin
Et surtout une voix légère.
Ai-je ce don, suis-je bien inspiré,
Et mon vers, comme Horace, aura-t-il démontré
Qu'un ris franc perce mieux que des clameurs moroses?
Barbier, Satires,1865, p. 143. − Badiner avec, badiner sur.,,[Il] a badiné agréablement sur cette question`` (Sainte-Beuve, Causeries du lundi,t. 9,1851-62, p. 475). − Rare. Badiner de.Railler, se moquer de : 10. ... Ces mathématiciens badinaient de l'ontologie et de la logique (...); toutes les sciences (...), à peine délivrées du cauchemar philosophique, levèrent le pied contre celle qui avait été leur mère.
Proudhon, De la Création de l'ordre dans l'humanité,1843, p. 112. b) P. méton., dans le domaine de la vie intellectuelle, artistique, voire spirituelle.,,... le style, joyeux parfois, léger, qui sait sourire et badiner...`` (Verlaine,
Œuvres posthumes,t. 3, Deux poètes anglais,1896, p. 192) : 11. On ne peut être plus avenante ni plus spirituelle, ni de meilleur ton. Elle a de l'enjouement et point de licence; sa dévotion badine agréablement; et cette manière de railler, au nom du Christ est une piquante nouveauté.
Adam, L'Enfant d'Austerlitz,1902, p. 402. 12. ... les violoncelles avec les seconds violons chantent un nouveau motif gai, léger (...) le cor répond très doux comme en badinant, à ce gracieux motif (...) [Larghetto 2eSymphonie].
J.-G. Prod'homme, Les Symphonies de Beethoven,1921, p. 50. B.− [Le suj. désigne un inanimé concr.] − Fam. et vieilli. [La partie d'un vêtement vaporeux, comme la dentelle, la mousseline, etc.] Flotter, voltiger, s'agiter légèrement dans un mouvement agréable et seyant : 13. Comme elle [la princesse] vit d'Arthez (...) occupé des jeux de sa robe, et d'une jolie petite fronçure qui badinait sur le busc (...) elle reprit l'ordre de ses pensées comme si elle se parlait à elle-même.
Balzac, Les Secrets de la Princesse de Cadignan,1839, p. 339. − P. anal., littér. [En parlant des cheveux] :
14. La furtive allure de Rosita, sa gracieuse manière de poser, en marchant, son pied fin et les deux petits rouleaux de cheveux qui badinaient sur son épaule, du jour au lendemain j'en fis un souvenir.
Colette, Chambre d'hôtel,1940, p. 216. ♦ [En parlant du vent, des nuages, d'une voile, etc.] :
15. Il étoit à peu près neuf heures du soir; le soleil se couchoit par un temps superbe; le foible vent qui nous poussoit expira dans la voile que nous vîmes badiner.
J. de Maistre, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, t. 1, 1821, p. 2. 16. C'était l'aube déjà vermeille à l'Orient avec de petits nuages joufflus et frottés de vermillon qui badinaient au zénith.
A. Arnoux, Les Gentilshommes de ceinture,1928, p. 43. II.− Emploi trans., vieilli. [Suj. et compl. désignent gén. une pers.] Plaisanter, taquiner, amuser, tromper par jeu : 17. N'est-ce pas une cruelle plaisanterie que vous me faites? Et votre lettre n'est-elle pas déjà le fruit amer d'un grand défaut? Quel plaisir une âme généreuse peut-elle prendre à badiner un malheureux qui vous demanderait de la pitié, afin d'exciter un sentiment quelconque, si celui-là avait quelque chose de consolant.
Balzac, Correspondance,1832, p. 150. − [En constr. incise] :
18. « Ton petit mari devine l'épreuve à laquelle tu veux le soumettre. Va, il aimerait toujours sa femme, quand elle deviendrait muette. Amuse-moi, badine ce petit mari : il s'en venge soir et matin sur ta bonbonnière; il la caresse, il l'interroge; elle lui dit que tu aimes comme une folle le petit mari qui t'adore... »
Restif de La Bretonne, M. Nicolas,1796, p. 56. − P. plaisant. Badiner ses narines : 19. [M. de B.] rejoignit ses ongles, en fit un bouquet dont il badina ses narines, − flaira le pouce.
G. d'Esparbès, Les Derniers lys,1898, p. 218. PRONONC. : [badine], (je) badine [badin]. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1549 « plaisanter avec enjouement, faire le badin » (Est.); 2. 1680 emploi absol. [en parlant d'ajustements de toilette] (Rich. : Badiner. Ce mot se dit des petits ornements qu'on atache, & veut dire avoir quelque petit mouvement agréable. Il faut que cela badine un peu); d'où 3. 1690 part. présent empl. subst. badinant (Fur. : Badinant [...] Quelques-uns appellent ainsi un cheval qu'on mene aprés un carrosse attelé de six chevaux, afin qu'on le puisse mettre à la place de quelqu'un des autres qui ne sera plus en état de servir. On l'appelle aussi le volontaire), qualifié de ,,vieilli`` dep. Ac. 1835; d'où 1701 p. anal. plais. (Trév. : [...] Au Parlement de Paris on appelle badinant, le Conseiller qui est le neuvième dans sa chambre, & qui n'est de grands Commissaires que quand l'un des huit plus anciens que lui est absent), sort de l'usage avec la disparition de ce parlement en 1790.
Dér. de badin* étymol. 2; dés. -er. STAT. − Fréq. abs. littér. : 115. DÉR. Badineur, subst. masc.,néol. Personne badine, aimant à rire et à plaisanter. L'éternel badineur lui-même devient grave (Amiel, Journal intime,1866, p. 474).− 1reattest. 1866, id.; dér. de badiner*, suff. -eur2*. − Fréq. abs. littér. : 1. |