| AVÉRER, verbe trans. I.− Emploi trans., rare A.− [Le suj. désigne une pers.] Reconnaître la vérité d'une chose; savoir, comprendre quelque chose avec exactitude : 1. Il [Leroux] s'est mis à endoctriner des femmes et des ouvriers, à avoir des dévotes et des séides. Tous moyens lui sont devenus bons... Dès que j'ai eu bien avéré ce point, il n'a plus été pour moi qu'un charlatan...
Sainte-Beuve, Les Cahiers,1869, p. 46. B.− [Le suj. désigne une pers. ou un inanimé] Faire reconnaître la vérité d'une chose par des paroles, un comportement, une action, un écrit. Avérer un fait : 2. D'après cette note sur les paioti que j'ai tirée de l'histoire de l'abbaye de saint Denys de MmeFélicie d'Aysac, ils n'avaient pas, en effet, de costume; mais voici d'autres documents qui avèrent qu'il n'en a pas toujours été ainsi.
Huysmans, L'Oblat,t. 1, 1903, p. 192. II.− Emploi pronom. [Le suj. désigne un animé ou un inanimé] Se montrer dans sa réalité, après vérification. A.− Emploi abs., rare : 3. L'échec de la manœuvre, faute d'ampleur, s'avérait, ...
Joffre, Mémoires,t. 1, 1931, p. 434. − Littéraire : 4. Oui! Mais l'eau ne veut pas que quelqu'un la révèle,
(...)
Et la voilà, pour que rien d'elle ne s'avère,
Qui s'est enfuie au fond de sa maison de verre.
Rodenbach, Le Règne du silence,1891, p. 43. B.− Autres constr. 1. [Avec un attribut du suj. (adj., subst., ou expr. à valeur adj.)] :
5. ... on commençait à faire parler les écrans et comme Jacques s'avérait phonogénique on lui donnait des tas d'espoirs.
Queneau, Loin de Rueil,1944, p. 172. 6. Chose surprenante, la nouvelle courante faite, comme on voit, de pièces et de morceaux, s'avéra une réussite, et marqua nettement une tendance dodécaphoniste.
P. Schaeffer, À la recherche d'une mus. concr.,1952, p. 42. 7. Par contre, l'étude des solutions étendues s'est avérée de la plus haute importance.
Hist. gén. des sc.,t. 3, vol. 1, 1961, p. 287. 2. [Avec un inf. se rapportant au suj.] :
8. ... en 1912, on découvrit aux États-Unis de petits cristaux de ce minéral qui s'avérèrent appartenir au système triclinique, si rare dans la nature; ...
A. et N. Metta, Les Pierres précieuses,1960, p. 94. 3. Il s'avère que : 9. Au contrôle, il s'avère que la défaite d'Adoua est de 1896, l'assassinat du roi Umberto 1erde 1900 et la naissance du prince de Turin de 1904.
Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 239. Rem. 1. Étant donné que le verbe avérer comprend le rad. « vrai » (lat. verus), la plupart des grammairiens déclarent incorrect l'emploi d'expr. comme s'avérer vrai, faux, exact, inexact. Hanse 1949 observe : ,,Je n'hésiterais pas à dire : il s'avère intelligent, ce produit s'avère excellent. [Dans les syntagmes ci-après] il y a en fait catachrèse, c'est-à-dire oubli du sens premier. (...). J'hésiterais à dire : cette nouvelle s'avère vraie, inexacte ou peu probable``. L'usage cour. les impose cependant de plus en plus, du moins dans une lang. peu châtiée. 2. Certains dict. (Lar. 19e, DG, Ac. 1932, Thomas 1956, Rob.) signalent l'emploi trans. avérer comme vieilli ou ne se rencontrant qu'au part. passé. Selon Thomas 1956, la forme s'avérer a été relancée ,,par les snobs du siècle dernier...``. 3. Synon. avérer, constater, vérifier. ,,Vérifier, c'est employer les moyens de se convaincre ou de convaincre quelqu'un qu'une chose est véritable (...), Avérer, c'est prouver d'une manière convaincante qu'une chose est vraie ou réelle : avérer un crime. (...) Constater, c'est vérifier ou avérer d'une manière authentique et solide`` (Lar. 19e). 4. On rencontre dans la docum. le néol. avérément, adv. (Grousset, L'Épopée des croisades, 1939, p. 112; suff. -ment2*). Véritablement, manifestement, réellement. Un patriarche avérément simoniaque (Id., ibid.). PRONONC. ET ORTH. : [aveʀe]. Pour la conjug., cf. abréger. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1125 « réaliser, accomplir » (Ph. de Thaon, Bestiaire, éd. Walberg, 557 : Tut at Deus averé Par la sue bunté Quant que sainte escripture Nus diseit par figure) − 1584 (Ronsard, Bocage Royal [III, 214] ds Hug.); 2. a) ca 1260 « reconnaître, faire reconnaître pour vrai » (De Jost. et de plet, XIX, 6, § 1 ds Gdf. Compl. : Et l'offre a prover et a averer); 1549 adj. avéré « reconnu pour vrai » (Est.); b) 1836 pronom. « apparaître comme vrai » (Land. : S'avérer).
Empr. au lat. médiév. a(d) verare attesté dep. 815 (De Monsabert, Ch. de Nouaillé, no. 10, p. 18 ds Nierm .s.v.), dér. du lat. vērus « vrai » (Plaute, Amph., 1, 1. 45 ds Forc. Lexikon s.v. 961c); lat. ad- (cf. préf. a-1); dés. -are (v. -er); plutôt que dér. de l'a. fr. voir « vrai » (Dauzat 1968; Bl.-W.5), issu lui-même de vērus, et dont la graphie ver (p. ex. La Passion du Christ ds Bartsch, Chrestomathie de l'a. fr., p. 8 : zo fu granz signa tot per ver) représente une forme occitane non diphtonguée qui correspond aux formes d'oïl veir/voir (p. ex. Alexis, éd. G. Paris, strophe 112, vers 561 : veirs miracles). STAT. − Fréq. abs. littér. : Avérer. 80. Avérément. 1. BBG. − Dupin-Lab. 1846. − Noter-Léc. 1912. − Pierreh. Suppl. 1926. − Spr. 1967. Vie Lang. 1960, p. 501. |