| ![]() ![]() ![]() ![]() ASSOIFFÉ, ÉE, part. passé, adj. et subst. I.− Part. passé de assoiffer*. II.− Emploi adj. A.− Qui éprouve une forte soif; qui souffre de la soif : 1. Il n'osait plus boire. L'alcool surexcitait son délire, suscitait devant ses yeux des spectacles abominables de pourriture. Il tomba malade, dans l'ignoble réduit où il logeait maintenant. Il fut là, couché trois jours, à souffrir, brûlé, assoiffé, se tournant et se retournant, et réfléchissant si intensément que le temps lui en parut court.
Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 187. − P. ext. 1. [En parlant de la terre, de la végétation] Qui manque d'eau : 2. Les puits se sont comblés, les canaux ont été envahis par le sable; parfois encore un faible bruit, un grincement de poulie monte dans le silence : on tire de l'eau quelque part, et ce grincement de poulie semble le cri de cette terre assoiffée, le dernier soupir de la volonté mystique qui s'est déployée autrefois si puissamment dans ces lieux, et qui ne se résigne pas à mourir.
J. et J. Tharaud, La Fête arabe,1912, p. 162. 2. Rare et p. anal. [En parlant d'un obj. concr.] :
3. C'était un vieux coffre, vêtu de peau de sanglier qui s'époilait et garni de serrures en cuivre assoiffées d'huile.
Huysmans, Les Sœurs Vatard,1879, p. 113. B.− Au fig. Qui désire passionnément quelque chose. Synon. affamé, altéré, avide de. 1. [Le compl. introd. par de est un subst.] a) [En parlant d'un inanimé concr.] Assoiffé d'argent, d'honneurs (Ac. 1932) : 4. Longtemps il avait été entendu qu'industrialisme et machinisme feraient le bonheur du genre humain. Aujourd'hui l'on mettrait volontiers sur leur compte les maux dont nous souffrons. Jamais, dit-on, l'humanité n'a été plus assoiffée de plaisir, de luxe et de richesse. Une force irrésistible semble la pousser de plus en plus violemment à la satisfaction de ses désirs les plus grossiers.
Bergson, Les Deux sources de la mor. et de la relig.,1932, p. 310. b) [En parlant d'un inanimé abstr.] Assoiffé d'infini : 5. La porte de la maison était ouverte. Elle s'y engouffra, entraînant à sa suite toute la bande furieuse, ivre de colère, assoiffée de vengeance, qui l'eût infailliblement mise en pièces si les hommes ne s'étaient brusquement levés devant cette invasion subite et n'avaient mis en déroute le troupeau gloussant.
Pergaud, De Goupil à Margot,1910, p. 245. 2. [Le compl. introd. par de est un inf.] rare : 6. C'est encore M. Pierre Lièvre qui fait remarquer comment, en souvenir sans doute de Richelieu, Corneille a de plus en plus glissé vers une apologie du pouvoir personnel, de la dictature royale. Il ne veut pas d'un Richelieu auprès d'un Louis XIII, et il a sans doute méconnu cette grande figure. Ce qui le séduit, c'est toute grande âme assoiffée de dominer, et c'est pourquoi Stendhal l'aimait si fort.
Brasillach, Pierre Corneille,1938, p. 294. 3. [L'adj. est en constr. abs.] rare. Qui est en proie à des désirs violents et nombreux : 7. ... ma bouche était là et elle était pleine de désirs; − mais ma bouche est restée fermée, et mes mains n'ont pu se tendre parce qu'elles étaient jointes pour la prière; − et mon âme et ma chair sont restées désespérément assoiffées. − L'heure est désespérément passée.
Gide, Les Nourritures terrestres,1897, p. 242. Rem. Dans certains ex., l'adj. qualifiant un terme abstr. n'a plus qu'une valeur intensive ou superl. Désir assoiffé (G. Bataille, L'Expérience intérieure, 1943, p. 75). III.− Emploi subst. A.− Personne qui a grand-soif ou, dans la lang. pop., qui a toujours soif : 8. Quel talent aussi, cette phrase courte, acérée, sans incidentes ou presque, souffletant la parade et le mensonge, courant au but comme l'assoiffé à la fontaine!
L. Daudet, Bréviaire du journ.,1936, p. 84. B.− Au fig. Personne qui aspire ardemment à la possession d'un bien d'ordre matériel, spirituel ou moral : 9. Mais quels sont ceux-ci qui s'avancent, portant leurs cœurs au-devant d'eux, comme des flambeaux? Ce sont les héroïques, les affamés de la vertu, les assoiffés de la justice. Certes, ils se sont gardés des chutes grossières. Mais ils jugent que c'est peu. Ils veulent cette pureté essentielle qui est l'entrée dans l'intelligence supérieure.
Psichari, Le Voyage du centurion,1914, p. 188. Rem. Emploi attesté ds Nouv. Lar. ill. ,,un assoiffé de plaisirs`` et ds Rob. ,,Les assoiffés d'un renouveau dramatique.`` STAT. − Fréq. abs. littér. : 67. |