| ASSIETTE2, subst. fém. A.− Pièce de vaisselle à fond plat dans laquelle chacun met ou reçoit ses aliments à table. SYNT. a) Assiette creuse, plate, ébréchée, fêlée, cassée, chaude, sale, vide; assiette de faïence, de porcelaine, d'étain; assiette à dessert, à soupe. b) Avoir le nez dans son assiette, baisser les yeux sur son assiette. ♦ Assiette montée. Assiette munie d'un pied, contenant des desserts divers (fruits, petits fours, dragées, etc.). − Fam. Casseur d'assiettes. Fanfaron, querelleur. C'est un énergumène, un casseur d'assiettes (Gracq, Un Beau ténébreux,1945, p. 37).Assiette au beurre, vieilli. Source d'avantages, de profits : 1. Le 4 juin [1888] (...) lorsque le général Boulanger (...) vint déclarer à l'Assemblée Nationale qu'il fallait changer l'assiette du gouvernement, le député Hubbard s'écria : Oui, l'assiette au beurre!
L. Larchey, Dict. hist. d'arg.,Nouv. Suppl.,1889, p. V. − Arg., au plur. Assiettes plates : 2. Assiettes plates, « civils ou militaires qui ne vont pas au front » (Dauzat, Arg. de la guerre, 135). Double déformation de porcelaine de Limoges, richement décorée, mais qui ne va pas au feu, appliqué aux officiers d'État-Major.
G. Esnault, Notes complétant et rectifiant« Le Poilu tel qu'il se parle »,1956. B.− P. méton. Le contenu d'une assiette. Une assiette de bouillon : 3. ... nous partageâmes une assiette d'amandes amères, dont j'avais entendu vanter la propriété pour modérer les fumées du vin.
Brillat-Savarin, Physiol. du goût,1825, p. 321. ♦ Assiette anglaise. Plat composé de viandes froides. − Fam. Piquer l'assiette. Manger habituellement chez les autres (cf. pique-assiette). PRONONC. ET ORTH. : [asjεt]. Fér. 1768 et Fér. Crit. t. 1 1787 proposent la graph. assiete avec un seul t. ÉTYMOL. ET HIST.
A.− 1. 1260 dr. « fait d'assigner une rente sur un fonds de terre » (Cart. St Evroul, Richel. 1. 11056, fo193 vods Gdf. : Combien que plusours des membres d'icelle aient esté et soient comprisez es assietes fectez par le roy nostre dit seigneur en temps passé a plusours princes, et que iceulx princes aient eu et aient encore lours juridicions surs iceulx membres); 1694 id. assiette de rente « fonds sur lequel une rente est assignée » (Corneille); 2. a) 1270-85 « répartition des impôts » (Ph. de Beaumanoir, Coutumes Beauvaisis, éd. Beugnot, 25, 17 ds T.-L. : l'assiete des coz qui sont fet por le commun porfit, doit estre assize par le serement de bone gent); 1482 « fixation de l'impôt » (Lettres de Louis XI, éd. Von Vaësen et Charavay, V, 269 ds Soc. de l'hist. de France d'apr. Bartzsch, p. 100 : L'assiette desdiz impostz n'estoit pas egalle); 1690 (Fur. : Assiette. On dit en termes des Eaux & Forests, Faire l'assiette des ventes, quand les Officiers vont marquer aux Marchands les bois dont on leur a vendu la couppe); b) 1394 synon. de taille (Cart. de Flines, DCCXXIV, Hautcœur ds Gdf. : Payer leurs portions de certaine ayde, taille et assiete), d'où 1474 « impôt » (Lettres de Louis XI, éd. Von Vaësen et Charavay, V, 269 d'apr. Bartzsch, p. 91 : L'assiette et impost mis sus pour le paiement des gens d'armes).
B.− 1. xives. « position topographique d'une ville » (Bercheure, fo11 vods Littré : Pour ce qua la cité estoit moult fort de murs et de asiete); 1513 « situation » (Lemaire de Belges, Illustr. III, 1 ds Hug.); d'où 1630 « point d'appui, manière de placer une chose pesante sur une autre pour la rendre ferme et solide » (D'Aubigné,
Œuvres, éd. Réaume et De Caussade, III, 426); 2. 1580 man. « situation du cavalier sur la selle » (Montaigne, Essais, I, 48 ds Rob. : Je ne démonte pas volontiers quand je suis à cheval, car c'est l'assiette en laquelle je me trouve le mieux); 1694 mar. (Corneille); 3. 1580 fig. « état, disposition d'esprit » (Mont. liv. I, ch. XLIII, p. 173 ds Gdf. Compl. : Remuant son jugement, tantost en cette assiette tantost en cette la); 4. 1809 « position sociale ».
C.− 1. 1378 « service dans un repas » (Chron. S. Denis, t. VI, p. 385 ds Gdf. Compl. : Et combien que le roy eust ordené 4 assiettes de 40 paires de mes) − xvies. ds Hug.; 1393 « place, rang occupé à table » (Ménagier, II, 4 ds Gdf. Compl. : Deux maistres d'hostel pour faire lever et ardener l'assiette des personnes); 2. 1507 « vaisselle large et plate sur laquelle on place les mets » (N. de Lachesnaye, Condamn. de Bancquet, p. 289, ibid. : Apportez l'assiette, apportez).
Prob. issu de assĕdita, part. passé fém. substantivé de adsĕdere, fait sur sedeo; assĕdita tiré du part. passé pop. seditum pour sessum, le suff. -itum étant très employé pour former les part. passés; cf. vendo, venditum, vendita, vente; *seditus est supposé par l'existence en lat. médiév. de sediturus, pour sessurus (Vita B. Augusti novelli tome 4, Maii, p. 622 ds Du Cange); le [è] de adsĕdita s'est diphtongué avant la chute de la voyelle post-tonique, c.-à-d. avant la constitution de l'entrave et la voyelle post-tonique est à son tour tombée avant la sonorisation du -t, qui a pu aussi se maintenir; l'hyp. avancée par DG selon laquelle assiette serait le subst. verbal de asseoir (tiré de la 3epers. du sing. du prés. ind. en a. fr. assiet) est peu vraisemblable; les subst. verbaux tirés du prés. ind. sont en effet gén. masc., surtout s'ils ne sont pas terminés par -e; on comprend mal comment ce masc. assiet serait devenu le fém. assiette (v. Meunier, Étymol. du mot assiette ds R. Ling. rom., 1927, pp. 313-317). STAT. − Fréq. abs. littér. : 1 699. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 712, b) 3 199; xxes. : a) 3 512, b) 2 790. BBG. − Ac.-Gastr. 1962. − Bach.-Dez. 1882. − Barb.-Cad. 1963. − Barber. 1969. − Barr. 1967. − Baudr. Chasses 1834. − Blanche 1857. − Bruant 1901. − Burn. 1970. − Cap. 1936. − Chabat t. 1 1875. − Chesn. 1857. − Dainv. 1964. − Dam.-Pich. Gloss. 1949. − Delorme 1962. − Dumas 1965 [1873]. − Dupin-Lab. 1846. − Esn. 1966. − France 1907. − Gay t. 1 1967 [1887]. − Gruss 1952. − Jal 1848. − Jossier 1881. − Laborde 1872. − Lal. 1968. − Lar. mén. 1926. − Lasnet 1970. − Le Breton 1960. − Le Clère 1960. − Lemeunier 1969. − Lep. 1948. − Meunier (J. M.). Étymol. du mot assiette. R. Ling. rom. 1927, t. 3, pp. 313-317. − Mont. 1967. − Mots rares 1965. − Noël 1968. − Noter-Léc. 1912. − Plais. 1969. − Pol. 1868. − Pujol 1970. − Regula (M.). Etymologica. In : [Mél. Gamillscheg (E.)]. München, 1968, p. 480. − Rog. 1965. − Romeuf t. 1 1956. − Sandry-Carr. 1963. − Soé-Dup. 1906. − Will. 1831. |