| ARABESQUE, subst. fém. et adj. I.− Emploi subst. A.− B.-A. Ornement d'architecture, de peinture, de sculpture, représentant uniquement des motifs géométriques ou végétaux chez les Arabes, mais également des figures d'hommes et d'animaux chez les Anciens et les artistes européens. Dessiner une arabesque (Ac. 1878), peindre en arabesque : 1. ... il faut tous les soins vigilants des jardiniers pour que leur végétation envahissante (des lierres) ne cache point sous son vert manteau les arabesques et les rinceaux finement sculptés dans la pierre blanche du cadre et des meneaux des fenêtres.
Malot, Sans famille,1878, p. 452. − Spéc. Arabesque (de lignes). Ensemble de lignes directrices d'un tableau, d'une sculpture. Rem. Attesté ds Lar. encyclop., Quillet 1965. − P. anal. Ligne directrice : 2. ... du moins faut-il que je sois au clair quant à la ligne, à l'arabesque de l'avant-propos (j'ai dans les journaux, relus tout à l'heure par Louise des éléments précieux à mettre en œuvre, mais mieux vaut pour l'instant que je les laisse spontanément réaffleurer dans la trame même, et que je me donne une direction, ...)
Du Bos, Journal,1927, p. 173. − P. ext. 1. Élément décoratif employé dans certains arts mineurs (broderie, orfèvrerie, serrurerie, etc.) ou ligne sinueuse rappelant ces ornements : 3. ... entre le joug et le front des bœufs il y a un petit coussinet de cuir brodé de fleurs rouges et d'arabesques éclatantes.
Hugo, Le Rhin,1842, p. 137. 2. Spéc., ARTS GRAPH. Lettre enjolivée : 4. Il n'aimait vraiment de ses compagnons de hasard que les insoumis, les déserteurs, ceux dont le livret matricule portait les belles arabesques noires et rouges des punitions pour inconduite habituelle, ...
Nizan, La Conspiration,1938, p. 81. Rem. On rencontre le subst. « l'arabesque » au masc., par ellipse de « genre, style arabesque ». (Attesté ds la plupart des dict. gén. du xixeet du xxesiècle). B.− P. anal. 1. Tout ce qui rappelle ces ornements artistiques : 5. La nuit, scène plus étonnante! commence l'illumination féerique des mouches luisantes, qui, par milliards de millions, font des arabesques fantasques, des fantaisies effrayantes de lumière, des grimoires de feu.
Michelet, L'Oiseau,1856, p. 82. 2. Spéc. dans certains domaines techn. a) CHORÉGR. Figure de danse ou attitude présentant certaines ressemblances avec ces motifs décoratifs. Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. du xixeet du xxesiècle. b) LITT. Fantaisies de l'imagination et du style d'un écrivain : 6. Pour que l'idée laissât des traces, je me proposais de la revêtir de toutes les ciselures de mon style, d'y prodiguer ces arabesques capricieuses qui sont le sceau de l'artiste, son cachet et son blason; ...
Reybaud, Jérôme Paturot,1842, p. 61. c) MUS. ... le premier violon l'orne (un thème) d'une arabesque bouclée (J. Chantavoine, Les Symphonies de Beethoven,1932, p. 69). C.− Au fig. [À propos d'une pers. ou d'un inanimé] :
7. Moi je suis une arabesque en marqueterie; il y a des morceaux d'ivoire, d'or et de fer; il y en a de carton peint; il y en a de diamant; il y en a de fer-blanc.
Flaubert, Correspondance,1846, p. 262. II.− Emploi adj., B.-A. [En parlant d'un inanimé] Propre à ce genre artistique : 8. ... elle [lady Stanhope] y créa artificiellement un jardin charmant à la mode des Turcs; jardin de fleurs et de fruits, berceaux de vignes, kiosques enrichis de sculptures et de peintures arabesques, ...
Lamartine, Voyage en Orient,t. 1, 1835, p. 216. − P. anal., LITT. [En parlant du style] Qui présente des enjolivements : 9. Et je m'efforce pour te parler de déguiser même le marasme, sous l'effort bête d'un style arabesque d'écrire...
Valéry, Correspondance[avec Gide], 1891, p. 140. − Au fig., péj. : 10. ... on n'entendait que le bruit sourd et confus de la dialectique péripatéticienne, dégradée par toutes les petites inventions du bel esprit arabesque et de la subtilité monastique...
Cousin, Hist. de la philos. mod.,1847, p. 381. Rem. On rencontre dans la docum. le néol. arabesqué, ée, adj. (Flaubert, Correspondance, 1850, p. 154; suff. -é*). Qui possède des ornements ou des dessins rappelant, de près ou de loin, les arabesques. Des tapis verts, arabesqués de galon. PRONONC. : [aʀabεsk]. Passy 1914 note une durée mi-longue pour la 2esyllabe. ÉTYMOL. ET HIST.
A.− 1555 adj. « propre aux arabes » (B. Aneau, Tresor de Evonime ds Delb. Rec. ds DG : Langue et doctrine arabesque); 1580 jument arabesque (Mont., liv. I, ch. XXVIII, p. 188 ds Gdf. Compl.); d'où 1661 à l'arabesque « à la manière arabe » (Corneille, Tois. d'or, V, 6 ds Rob. : Feuillages à l'arabesque); qualifié de ,,vieux`` ds Rob.
B.− 1611 subst. orn. (Cotgr.); p. ext. 1839-45 « ligne sinueuse, qui rappelle l'arabesque » (H. de Balzac, Béatrix, p. 210 : La presqu'île du Croisic est bordée de roches granitiques... La fantaisie s'est amusée à composer là d'interminables arabesques où les figures les plus fantastiques s'enroulent et se déroulent); 1838 danse (Ac. Compl. 1842); av. 1872 mus. « en parlant des variations d'un violoniste » (Th. Gautier, Carn. de Venise ds DG : Les arabesques d'or).
A empr. à l'adj. ital. arabesco « arabe, qui est propre aux Arabes » attesté dep. 1353 (Boccace [1313-1375] Dec. 10-9 [494] ds Batt.); B empr. au subst. ital. arabesco « ornement formé de plantes, de branches, de feuillages... entrelacés » attesté dep. le xvies. (Caro, Lettere inedite [1827-1830] 3-93, ibid.); le terme de mus. ital. arabesco ou arabesca est attesté dep. le xviiies. (Algarotti [1717-1764] Opere scelte I, 233, ibid.); le terme de danse est signalé par Batt. sans attest. (voir Wind, 151 et 120; Kohlm., p. 28 et Sarauw, p. 22). STAT. − Arabesque. Fréq. abs. littér. : 303. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 498, b) 500; xxes. : a) 219, b) 463. Arabesqué. Fréq. abs. littér. : 1. BBG. − Bach.-Dez 1882. − Bal.-Maq. 1968. − Bible 1912. − Boillot (F.). Rép. des métaph. et mots fr. tirés des n. de villes et de pays étr. Paris, 1929, passim. − Bouillet 1859. − Bruant 1901. − Cagnon (M.), Smith (S.). Le Vocab. de l'archit. en France de 1500 à 1550. Cah. Lexicol. 1971, no18, p. 99. − Canada 1930. − Chabat 1881. − Chesn. 1857. − Cost. 1899. − Franck 1875. − Gay t. 1 1967 [1887]. − Giteau 1970. − Jossier 1881. − Julia 1964. − Kuhn 1931, p. 130, 223, 230. − Le Breton Suppl. 1960. − Le Roux 1752. − Lévy (C.). Arabesque. Fr. mod. 1960, t. 28, pp. 181-195. − Littré-Robin 1865. − Marcel 1938. − Noël 1968. − Noter-Léc. 1912. − Privat-Foc. 1870. − Rheims 1969 (s.v. arabesqué). − Sar. 1920, p. 22. − Springh. 1962. |