| ![]() ![]() ![]() ![]() ALERTÉ, ÉE, part. passé et adj. I.− Part. passé de alerter*. [En liaison avec l'auxil. être] − Être alerté ♦ Être en état d'alerte : 1. Le nouveau poste était un ancien hôtel de briques rouges, à un étage; deux sentinelles, une de chaque côté de la porte, baïonnette au canon. Tchen savait que la police spéciale était alertée depuis trois jours, et ses hommes brisés par ce guet perpétuel.
A. Malraux, La Condition humaine,1933, p. 246. 2. − « Je n'ai pas seulement rencontré des Français », poursuivit Jacques. « J'ai vu aussi des Belges, des Allemands, des Russes... Les milieux révolutionnaires sont alertés, partout. On a compris que la menace est grave. Partout, on se groupe, on cherche un programme d'ensemble. La résistance s'organise, prend corps. (...) »
R. Martin du Gard, Les Thibault.L'Été 1914, 1936, p. 236. ♦ Être mis en éveil : 3. Il somnole... Mais c'est alors que souvent il est alerté et tenu malgré lui en éveil : il ne sait quoi se passe au plus secret de sa chair... Ce peut n'être presque rien, − si peu de chose, en vérité, qu'il ne sait en décrire les symptômes au docteur. Même pas une vraie souffrance : simplement « il sent son cœur », il ne perd jamais conscience de ces battements trop forts, irréguliers; ...
F. Mauriac, Journal1, 1934, p. 64. 4. J'avais vécu longtemps dans l'illusion d'un accord général, alors que, de toutes parts, les jugements, les flèches et les railleries fondaient sur moi, distrait et souriant. Du jour où je fus alerté, la lucidité me vint, je reçus toutes les blessures en même temps et je perdis mes forces d'un seul coup.
A. Camus, La Chute,1956, p. 1514. ♦ Être prévenu : 5. Ce n'était pas tout à fait cela que Léon attendait : il attendait qu'on lui donnât un rendez-vous. Mais enfin le médecin était « alerté »... Sa lettre était « très amicale »...
H. de Montherlant, Les Célibataires,1934, pp. 813-814. II.− Adjectif A.− Averti d'un danger, d'une situation critique. − MILIT. [S'applique à une formation milit.] En état d'alerte, prêt à intervenir : 6. Cependant, alertée sur ses terrains, la Royal Air Force était prête. Dans le peuple, beaucoup, désireux de sortir d'une tension presque insupportable, en venaient à souhaiter tout haut que l'ennemi risquât l'attaque.
Ch. de Gaulle, Mémoires de guerre,L'Appel, 1954, p. 88. − Par métaph. : 7. L'électricité alertée part de l'une ou de l'autre extrémité, dévore la distance, traversant le poste de raccordement de deux réseaux à Pessac, près Bordeaux, et renforce ici le courant affaibli, ou le rétablit là, interrompu. On dirait qu'on lui fait signe...
J. de Pesquidoux, Le Livre de raison,t. 1, 1925, p. 196. ♦ Nuit perpétuellement alertée. Nuit passée en continuel état d'alerte : 8. Journal du Capitaine Delvert (2-5 juin). Vendredi 2 juin. − Nuit d'angoisse perpétuellement alertée. Nous n'avons pas été ravitaillés hier. La soif surtout est pénible. Les biscuits sont recherchés... etc. Le bombardement ininterrompu, l'incendie dans le voisinage du dépôt de grenades, les assauts quotidiens, le manque de vivres, le manque d'eau, le manque de sommeil, ...
H. Bordeaux, Les Derniers jours du fort de Vaux,1916, pp. 181-182. − P. anal. [S'applique à un groupe soc. en situation de conflit] :
9. Nous prendrons en main, nous autres socialistes, les intérêts de la veuve et des malheureux orphelins. La classe ouvrière de Sérianne, restera alertée, et veillera à ce que la municipalité fasse entièrement son devoir...
L. Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 175. B.− Alarmé par la menace précise d'un danger et, p. ext., d'une difficulté quelconque : 10. Il n'y avait plus à en douter; trois quarts d'heure avaient suffi pour que Haynes repérât l'avarie, pour alerter les navires en mer et les postes côtiers, pour décider de la manœuvre à exécuter, pour donner les ordres à Grayson, pour amorcer l'ouvrage et pour calmer les passagers alertés. Pour du travail, c'était du bon travail!
É. Peisson, Parti de Liverpool,1932, p. 205. C.− [La not. de danger s'atténuant jusqu'à disparaître totalement] 1. [S'applique à une pers., à son esprit, à ses forces...] a) Mis en éveil, rendu attentif : 11. MmeThéo, alertée par téléphone, leur a découvert un logement fort agréable où ils emménagèrent aussitôt.
A. Gide, Journal,1940, p. 22. 12. Mais d'autres, alertés par l'interprétation d'Ungaretti, pourront renverser la situation. Dans un tel renversement d'une fable endormie en ses traditions, il y a comme un rajeunissement de la fonction fabulatrice.
G. Bachelard, La Poétique de l'espace,1957, p. 128. b) Tendu dans l'attente d'un événement, même heureux, de caractère exceptionnel : 13. Toutes mes forces alertées dans l'attente de l'instant merveilleux.
J. Bousquet, Traduit du silence,1935-1936, p. 58. 14. Quand je reviens par la pensée à ces journées si apparemment vides, c'est en vain que je cherche une trace, une piqûre visible de cet aiguillon qui me maintenait si singulièrement alerté. Il ne se passait rien. C'était une tension légère et fiévreuse, l'injonction d'une insensible et pourtant perpétuelle mise en garde, comme lorsqu'on se sent pris dans le champ d'une lunette d'approche − l'imperceptible démangeaison entre les épaules qu'on ressent parfois à travailler, assis à sa table, le dos à une porte ouverte sur les couloirs d'une maison vide.
J. Gracq, Le Rivage des Syrtes,1951, p. 39. 2. Prévenu, informé, mis au courant : 15. Quand l'état de la maison exigeait quelque réparation, Jérôme, alerté, frappait dans ses mains et rassemblait les enfants mâles. Tout le monde aussitôt devenait, dans la tribu, maçon, forgeron ou couvreur.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Suzanne et les jeunes hommes, 1941, p. 129. Rem. Dans cette acception subsiste la not. de changement de situation, d'attente ou d'intervention. STAT. − Fréq. abs. litt. : 104. |