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AIR1, subst. masc.
I.− Fluide gazeux, invisible, inodore, pesant, compressible et élastique, qui entoure le globe terrestre et dont la masse forme l'atmosphère; un des quatre éléments de la physique ancienne.
A.− Gén. au sing. L'air en tant que milieu naturel.
1. L'air en tant qu'il est respiré :
1. ... j'ai respiré ces airs tièdes et énergiques des vagues et des glaciers; rien n'a pu me rendre cette jeunesse flétrie dans mon cœur, bien que sur ma figure elle trompe encore quelquefois mes propres yeux. A. de Lamartine, Raphaël,1849, p. 174.
2. L'air agit chimiquement sur le contenu de la graine et le rend propre à servir de nourriture première à la plante. Toute graine enfouie trop profondément est privée du contact de l'air, elle pourrit et ne germe pas. Les graines doivent être assez recouvertes pour être maintenues humides, et assez peu pour rester sous l'influence de l'air. Gressent, Traité complet de la création des parcs et des jardins,1891, p. 694.
3. Ces cellules se laissent traverser par l'oxygène de l'air, et par l'acide carbonique du sang veineux (...) L'air atmosphérique, avant de les atteindre, traverse le nez, l'arrière-gorge, le larynx, la trachée, et les bronches où il s'humidifie et se débarrasse des poussières et des microbes qu'il transporte avec lui. Mais cette protection naturelle est devenue insuffisante depuis que l'air des villes a été pollué par les poussières du charbon, les vapeurs d'essence, et les bactéries libérées par la foule des êtres humains. A. Carrel, L'Homme, cet inconnu,1935, p. 78.
Rem. Syntagmes fréq. un air automnal, brumeux, chaud, débilitant, empesté, ensoleillé, frais, froid, glacé, humide, impur, insalubre, irrespirable, limpide, lumineux, malsain, marécageux, marin, maritime, moite, nauséabond, pestilentiel, pluvieux, pollué, printanier, pur, rafraîchi, raréfié, sain, salin, salubre, vicié, vif, vivifiant, volcanique... (L'adj. est toujours postposé sauf dans qq. syntagmes comme bon air, grand air, mauvais air); l'air de la campagne, des champs, des cimes, de cristal, du jour, du matin, de la mer, des montagnes, de la nuit, du soir...; la douceur, la griserie, l'inclémence, la langueur, la limpidité, la moiteur, la pureté, la salubrité de l'air ...; l'action, l'altération, la décomposition, l'exhalaison, l'expiration, l'insufflation, l'ionisation, la pesanteur, la pression, la respiration de l'air ...; aspirer, exhaler, expirer, expulser, insuffler de l'air, manquer d'air, renouveler l'air ...; le volume d'air; l'air se dilate, se réchauffe...
Locutions
a) Le bon air. L'air pur et sain :
4. − Il ne faudra pas travailler aujourd'hui, chéri... Nous prendrons un jour de vacance, au bon air... Ça te remettra... Veux-tu? R. Martin du Gard, Devenir,1909, p. 115.
P. oppos. Air confiné. ,,L'air des enceintes dans lesquelles séjournent des êtres vivants, et qui se trouve par conséquent plus ou moins vicié.`` (Littré).
b) Prendre, aspirer un(e) bol(ée) d'air, faire une cure d'air. Aller dans un lieu où l'air a une valeur curative :
5. Malgré la gêne monétaire où vivait le ménage, MmeMéridier trouva le moyen de fournir à la petite Jacqueline la cure d'air à la montagne dont elle avait besoin. J. Malègue, Augustin ou le Maître est là,t. 1, 1933, p. 193.
c) Littér. D'air. Léger, transparent. L'air en tant que transparent et interprété comme symbole de l'inconsistance, voire de l'inexistence d'une chose :
6. Ce que vous me dites des toilettes modernes me réjouit. Je me prépare à voir nos belles dames habillées d'air. Ainsi s'habillait une princesse de Kandahar, à qui son père reprochait d'être trop décolletée. P. Mérimée, Lettres à Madame de Beaulaincourt,1870, p. 42.
7. Il [un homme] m'a si peu sentie, si peu devinée, que j'ai eu l'impression d'être (...) le fantôme d'air qu'il allait traverser. Colette, L'Entrave,1913, p. 2.
2. L'air en tant qu'il circule et se meut autour des hommes et des choses (air a un sens voisin de vent) :
8. ... il se croyait à la campagne; et un rhume de cerveau lui apporta, comme un « coup d'air » pris dans un wagon où la glace ferme mal, l'impression délicieuse qu'il avait vu du pays; ... M. Proust, À la recherche du temps perdu,Le Côté de Guermantes 1, 1920, pp. 9-10.
9. La brume monte peu à peu au flanc des pâturages, jusqu'à ce que la lente oscillation de l'air la repousse à mi-côte. G. Bernanos, Monsieur Ouine,1943, p. 1471.
Rem. Syntagmes fréq. appel, bouffée, chasse, coup, courant, déplacement, filet, onde, retour, ride, souffle, vague, vibration d'air...; caresse, morsure, mouvement, roulis, tremblement de l'air...
Locutions
a) MAR. Air de vent (cf. aire* de vent).
b) Se mettre entre deux airs. Se mettre dans un courant d'air :
10. − Mon cher maréchal! cria-t-elle en l'accompagnant au perron, levez les glaces, ne vous mettez pas entre deux airs, faites cela pour moi!... H. de Balzac, La Cousine Bette,1846, p. 301.
c) Donner de l'air. Aérer absol. : de l'air. S'emploie pour réclamer l'aération d'une pièce, d'un appartement, d'un local quelconque :
11. dona lucrezia, éperdue. − On étouffe ici! De l'air! De l'air! J'ai besoin de respirer un peu! V. Hugo, Lucrèce Borgia,1833, II, part. 1, 3, p. 89.
d) Se donner de l'air :
12. Elle dut écarter le haut de sa robe pour se donner de l'air. H. Pourrat, Gaspard des montagnes,À la belle bergère, 1925, p. 122.
e) Fam. Le fond de l'air :
13. Il s'indignait ou se gaussait d'expressions comme : « le fond de l'air ». Qu'y faire? L'expression a raison contre lui; elle exprime excellemment ce qu'elle a mission d'exprimer; et, lorsque sa mère lui disait : « Mon enfant, couvre-toi; le fond de l'air est froid », elle entendait par là qu'il ne se fallait point fier à la température des endroits abrités où le soleil avait pu quelque peu tiédir l'air, mais qu'en lieux découverts où, dès qu'un souffle s'élevait, etc... En trente mots je parviens mal à exprimer ce que raconte si simplement cette banale phrase. A. Gide, Journal,1910, p. 311.
f) Vx. Un air de feu. Souffle d'air chaud près du feu :
14. Nous pendant ce temps, nous n'étions pas là, nous étions restés dehors à nous chauffer avec les gens de peu, un petit air de feu ne fait pas mal par ces temps humides et frissonnants du mois de mars. P. Claudel, Un Poète regarde la Croix,1938, p. 37.
g) Proverbialement, p. compar. Être libre comme l'air. Être libre d'aller où l'on désire, de faire ce que l'on veut sans entrave, sans rien qui retienne :
15. Mais, en vérité, ce n'est pas là votre situation, vous n'êtes pas prisonnier, par Dieu! Vous êtes libre comme l'air. A. de Vigny, Servitude et grandeur militaires,1835, p. 159.
3. L'air en tant qu'élément extérieur aux habitations.
Loc. fréq.
a) (Exposé) à l'air (p. oppos. à enfermé, recouvert ...) :
16. Elle était dorée comme le blé mûr, fonçant à la nuque, aux reins, aux aisselles, couleur de brique aux bras et aux jambes, si souvent exposés à l'air, couleur de feu sur l'étroit rectangle décolleté par sa tunique de sport et qui avait reçu, comme son nez, un coup de soleil. H. de Montherlant, Le Songe,1922, pp. 43-44.
b) Vivre à l'air. Vivre au sein de la nature :
17. Presque nu, sans sabots, avec un morceau de pain noir, il garde une vache ou des oies, il vit à l'air, il joue. Les travaux agricoles auxquels on l'associe peu à peu, ne font que le fortifier. J. Michelet, Le Peuple,1846, p. 92.
c) À l'air libre (var. dans l'air libre, en air libre). Être, sortir à l'air libre. Être dehors, généralement après avoir été enfermé :
18. Pourtant je suffoquais un peu, habitué que j'étais, je l'ai dit, à ne me sentir bien qu'en air libre, oppressé par l'atmosphère factice de ce lieu. A. Gide, Thésée,1946, p. 1439.
d) Prendre l'air. Sortir hors de chez soi, aller se promener. Se dit aussi de substances qui ont été altérées par le contact avec l'air :
19. Voilà! Je comptais cet été sur un peu d'argent pour prendre l'air. G. Flaubert, Correspondance,1861, p. 456.
e) Le grand air. S'emploie surtout dans les expr. Vivre au grand air, aller au grand air. Vivre dehors, au contact de la nature, là où l'air est supposé pur et vivifiant :
20. Parmi toutes ces figures brunes, hâlées par le grand air et le soleil, sa figure était la plus brune et la plus hâlée; ses vêtements montraient de nombreuses cicatrices; un plan de son gilet de laine déchiré lui retombait sur l'épaule; des mocassins avaient remplacé ses bottes de printemps. L. Hémon, Maria Chapdelaine,1916, p. 84.
f) Au plein air, en plein air. Au sein de la nature, hors d'une habitation :
21. Hélas! Le malheureux n'a jamais en d'enfance; Il n'a pas grandi libre et joyeux en plein air, Au murmure des pins, sur le bord de la mer; ... A. Brizeux, Marie,1840, p. 12.
Emploi subst. Le plein-air. Lieu où l'on pratique un sport en plein air :
22. Je ferme les yeux et tout cela reprend vie, ce petit matin percé de bruine, cette solitude, ce silence, cette fille qui n'était plus fraîche courant dans ce plein-air désolé. H. de Montherlant, Les Olympiques,1924, p. 286.
Néol. Sports qui sont pratiqués en plein air. Une séance de plein air.
MUS. Orchestre de plein air, musique de plein air :
23. Nota. La prétention de substituer l'Harmonie à l'orchestre symphonique est loin de notre pensée. (...) Mais qu'il nous soit permis d'affirmer qu'un orchestre de plein air comme celui que nous préconisons peut produire une impression profonde sur un auditoire non prévenu. T. Dureau, Instrumentation et orchestration,1905, p. 7.
PEINT. École de peinture :
24. Depuis le salon des refusés, l'école du plein air s'était élargie, toute une influence croissante se faisait sentir; malheureusement, les efforts s'éparpillaient, les nouvelles recrues se contentaient d'ébauches, d'impressions bâclées en trois coups de pinceau; et l'on attendait l'homme de génie nécessaire, celui qui incarnerait la formule en chefs-d'œuvre. É. Zola, L'Œuvre,1886, p. 213.
B.− L'air en tant qu'espace au-dessus du niveau du sol.
1. En l'air :
25. On ne la fait pas, la guerre aux femmes, aux enfants? Vous ne le savez pas, qu'il en crève de faim et de froid des milliers tous les jours, là-bas? C'est plus loyal, peut-être, que de foutre un paquebot la quille en l'air? M. Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 320.
Rem. Assoc. les plus fréq. jeter, regarder, sauter, tirer en l'air...
CHORÉGR. Dégagé en l'air.
TOURNAGE. Tour en l'air, tournage en l'air.
2. Lieu où volent les oiseaux et autres volatiles :
26. Des grives que le vent d'est amenait, des oiseaux de passage qui émigraient du nord au sud, traversaient l'air au-dessus du village et s'appelaient constamment, comme des voyageurs de nuit. E. Fromentin, Dominique,1863, p. 10.
27. Et ce fut le soleil : la lumière qui donne tant d'aise au cœur, la belle lumière emplissant la lande, et là-haut les campagnes de l'air où se jouaient deux aigles. H. Pourrat, Gaspard des montagnes,Le Pavillon des amourettes, 1930, p. 250.
3. AVIATION
a) Espace aérien. Conquête de l'air, transport par air :
28. Une telle beauté d'héroïsme rayonnait du poète infirme, quand il évoquait les victoires de l'esprit, devancières d'autres victoires, la conquête de l'air, le « dieu volant » qui soulevait les foules et comme l'étoile de Bethléem, les entraînait à sa suite, extasiées, vers quels lointains espaces ou quelles revanches prochaines! R. Rolland, Jean-Christophe,La Nouvelle journée, 1912, p. 1492.
Prendre l'air. Décoller :
29. Aucun avion de Vichy n'avait pris l'air jusqu'au milieu de la journée. Ch. de Gaulle, Mémoires de guerre,L'Appel, 1954, pp. 105-106.
Par l'air, (par les airs), ou de préférence par air. Par la voie des airs :
30. De telles bombes pourraient cependant se révéler trop lourdes pour le transport par air. B. Goldschmidt, L'Aventure atomique,1962, p. 32.
Trou d'air. Espace où, passagèrement, l'air est moins dense :
31. Un remous ou un trou d'air précipita l'oiseau de toile. Alain, Propos,1931, p. 1035.
Mal de l'air. Malaises (nausées, vomissements, etc.) qui se manifestent chez certains passagers lorsqu'un avion est secoué par des mouvements analogues à ceux qui produisent le mal de mer.
Médecine de l'air. Partie de la médecine qui étudie les problèmes biologiques posés par le vol.
b) P. méton. Ministère de l'air, Armée de l'air, École de l'air, hôtesse de l'air.
Rem. 1. Syntagmes fréq. nappe d'air...; fendre l'air, les airs; flotter, planer, tournoyer, voler, voltiger dans l'air, dans les airs. 2. Le plur. les airs est littér. :
32. Ainsi quand deux esprits, errants au sein des airs, Ont vomi la tempête et soulevé les mers (...), Tranquilles au-dessus et des vents et des flots, Sur leur char nébuleux ils goûtent le repos. P.-M.-F.-L. Baour-Lormian, Ossian,La Bataille de Témora, 1827, p. 168.
33. Le garde sourit, et, semblable à une flèche aiguë décochée d'un arc mogol, notre homme fendit de nouveau les airs en rasant les boutiques. A. de Musset, «Le Temps» en 1830 et 1831, 1831, p. 60.
4. L'air en tant qu'il amortit. Coussin d'air, matelas d'air, boudin d'air :
34. Les salves venaient de loin, étouffées, à cause des murs, du matelas d'air; entre elles et moi, la nuit, il y avait ce petit chahut de cuivre à droite, à gauche, tout autour. Mon vieux, je sentais l'étendue de la prison à l'éloignement du son des sous. A. Malraux, L'Espoir,1937, p. 624.
C.− Au sing., SC. et TECHN.
1. [Accompagné d'un adj. déterminatif]
a) Vx. Air sert à désigner divers gaz particuliers. Air fixe (gaz carbonique), air inflammable (hydrogène), air méphitique (azote), air vital, air pur ou déphlogistiqué (oxygène).
b) Air sert à désigner l'air obtenu après diverses transformations industrielles.
Air brûlé. Air ayant passé sur les foyers de combustion.
Air comprimé :
35. ... la seule préparation de l'air comprimé destiné à la transmission de force se traduit, dans les conditions ordinaires de l'industrie minière, par une perte initiale d'un tiers de l'énergie motrice... J.-N. Haton de La Goupillière, Cours d'exploitation des mines,1905, p. 531.
36. Les autobus démarraient plus vite, grimpaient mieux les côtes, fréquentes en cette ville de collines. Les tramways électriques, les derniers tramways à air comprimé ou à vapeur trouvaient devant eux de longs morceaux de voie libre. J. Romains, Les Hommes de bonne volonté,Le 6 octobre, 1932, p. 204.
Air inactif :
37. ... pour cela on y fait le vide, et on laisse ensuite rentrer de l'air inactif séché et filtré. MmeP. Curie, Traité de radioactivité,t. 1, 1910, p. 287.
Air liquide. Liquide bleu pâle obtenu en liquéfiant l'air et contenant principalement de l'oxygène liquide et de l'azote liquide.
Air ozoné ou ozone :
38. La préparation industrielle de l'ozone, ou mieux de l'air ozoné, s'effectue exclusivement par l'action de l'effluve; ... Ch.-A. Wurtz, Dict. de chimie pure et appliquée,2esuppl., t. 3, 1892-1908, p. 439.
Air secondaire :
39. Il est [le jour] chauffé par combustion de gaz de gazogènes dans de l'air secondaire réchauffé à 700odans des appareils Cowper. L. Guillet, Traité de métallurgie générale,1923, p. 14.
Rem. 1. Parfois air est suivi d'un compl. de n. introd. par la prép. de, qui spécifie la fonction industrielle de l'air. Mécan. air d'injection... :
40. ... il faut que l'air de balayage introduit dans le cylindre [du moteur] agisse (...) à la manière d'un piston qui refoule devant lui les gaz... P. Dumanois, Moteurs à combustion interne,1924, p. 230.
Rem. 2. Théâtre, bande d'air :
41. On appelle bande d'air, plafond ou frise ces parties de décor qui réunissent à chaque plan les extrémités supérieures des châssis et qui sont destinées à arrêter les regards du spectateur. G. Moynet, La Machinerie théâtrale,Trucs et décors, 1893, p. 67.
2. [Comme compl. de n.]
a) Air sert à former des syntagmes désignant des engins fonctionnant à l'aide de l'air (prép. à).
MÉD. Dans le fonctionnement d'instruments de chirurgie ou dans les pansements faits aux malades :
42. Gynécologie (...) Pessaire à air de Gariel. Collin, Catalogue d'instruments de chirurgie,1935, p. 295.
MUS. Dans la construction et le fonctionnement d'instruments de musique :
43. ... harmoniums (...) à air refoulé (à la française) ... Catalogue Kasriel (musique), 1936, p. 3.
Rem. 1. Autres syntagmes bateau à air; chambre à air; cloche à air; condensateur à air; écluse à air; insufflateur à air chaud; machine frigorifique à air; manomètre à air; pompe à air; sas à air; thermomètre à air; carabine, émulseur, locomotive, manomètre, moteur, pilon, pistolet, traction à air comprimé... 2. Lorsque air est déterminé par l'art. le, la prép. est normalement par :
44. ... on a (...) dans une partie de l'étuve un chauffage par l'air, et, dans l'autre partie, un chauffage par la fumée. L. Ser, Traité de physique industrielle,t. 2, 1890, p. 433.
b) Air sert à former des syntagmes désignant des appareils ayant pour objet de traiter l'air (prép. de). Aspirateur d'air, chambre d'air, cloche d'air, éjecteur d'air.
II.− Au fig.
A.− [Les différents emplois analysés sous A 1 et A 2 notamment se prêtent à des emplois fig. variés]
1. Air (milieu physique). Climat affectif, moral :
45. Un souffle d'épouvante, un air chargé de deuil Plane autour du croisé qui ne prie et ne chasse, Et qui s'est clos, vivant, dans ce morne cercueil. Ch.-M. Leconte de Lisle, Poèmes tragiques,Le Lévrier de Magnus, 1886, p. 115.
46. Il voyait une saine et libre nature, opprimée, qui se débattait contre ses chaînes, qui aspirait à une vie franche, large, au plein air de l'âme, et puis, qui en avait peur, qui combattait ses instincts, parce qu'ils ne pouvaient s'accorder avec sa destinée et qu'ils la lui rendaient plus douloureuse encore. R. Rolland, Jean-Christophe,Le Buisson ardent, 1911, p. 1406.
47. L'indécis est un anémié psychique qu'il faut sortir au grand air de l'action. E. Mounier, Traité du caractère,1946, p. 418.
2. Air (vent qui circule).
LITTÉRATURE :
48. Il y a tant de dialogues que cela ressemble à du théâtre, mais c'est ainsi que le livre s'est présenté à moi. Je ne veux à aucun prix l'alourdir d'explications. La page trop dense m'ennuie. Il faut qu'il y ait de l'air. J. Green, Journal,1949, p. 251.
MUS. [En parlant d'un morceau de mus.] :
49. On pense « harmonies » on oublie « harmoniques » (...) Cet oubli crée dans l'œuvre un manque d'air, un manque de fluidité et de résonances... G. Migot, Lexique de quelques termes utilisés en musique,1935, p. 83.
PEINT. ,,Atmosphère dans laquelle les figures représentées sur un tableau semblent se mouvoir. On dit qu'une toile manque d'air pour indiquer que la figure paraît plaquée sur la toile et qu'elle ne peut donner l'illusion de la réalité.`` (J. Adeline, Lexique des termes d'art, 1884) :
50. Au fond de la scène, par la croisée d'où s'épand le jour, l'œil aperçoit la maison d'en face, les grandes lettres d'or que l'industrie fait ramper sur les balustres des balcons, sur l'appui des fenêtres, dans cette échappée sur la ville. L'air circule, il semble que le lourd roulement des voitures va monter avec le brouhaha des passants battant le pavé, en bas. C'est un coin de l'existence contemporaine, fixé tel que. Le couple s'ennuie, comme cela arrive dans la vie, souvent; une senteur de ménage dans une situation d'argent facile, s'échappe de cet intérieur. M. Caillebotte est le peintre de la bourgeoisie à l'aise, du commerce et de la finance, pourvoyant largement à leurs besoins, sans être pour cela très riches, habitant près de la rue Lafayette ou dans les environs du boulevard Haussmann. J.-K. Huysmans, L'Art moderne,1883, p. 111.
B.− Emplois fig. de diverses loc.
1. Battre l'air. ,,Agir inutilement.`` (J.-F. Rolland, Dict. du mauvais langage, 1813, p. 6).
2. Dans l'air (qqc. est dans l'air). [En parlant d'une idée, d'un événement, etc. qu'un gd nombre d'esprits s'attend à voir prendre corps] La révolution était dans l'air (Ac. t. 1 1932); Il y a de l'orage, de la bagarre dans l'air ... :
51. Il y avait dans l'air de cette époque une foule d'idées à l'état nébuleux, de problèmes à l'état d'espérances, de générosités en mouvement qui devaient se condenser plus tard et former ce qu'on appelle aujourd'hui le ciel orageux de la politique moderne. E. Fromentin, Dominique,1863, p. 246.
52. Le jeune homme d'alors, séduit aux enchantements de poètes purs et maudits, hésitant sur le seuil de cette littérature inquiétante dont tout le monde lui enseignait les périls et lui dénonçait les folies, pressentait dans l'air de son temps cette excitante émotion, cette disposition intime que l'on éprouve au concert cependant que l'orchestre s'essaie, et que chaque instrument cherche pour soi-même, et pousse librement sa note. P. Valéry, Variété 4,1938, p. 18.
3. Donner de l'air. Rajeunir :
53. Même un paralysé atteint d'agraphie après une attaque (...) aurait compris que Mmede Cambremer appartenait à une vieille famille où la culture enthousiaste des lettres et des arts avait donné un peu d'air aux traditions aristocratiques. M. Proust, À la recherche du temps perdu,Sodome et Gomorrhe, 1922, p. 945.
Se donner de l'air. Se libérer :
54. [Jean]. − Manassé n'est pas au théâtre? − Il se donne de l'air. Je crois qu'il flirte avec la nouvelle figurante... L. Daudet, Médée,1935, p. 141.
4. En l'air.
a) Être en l'air.
[En parlant d'une armée, d'un régiment ...] (Être) sans appui, sans protection :
55. Toute la soirée, M. de Vineuil avait paru très inquiet (...). Il sentait son régiment en l'air, trop en avant, bien qu'il eût reculé déjà... É. Zola, La Débâcle,1892, p. 203.
Dans la lang. cour. Se sentir en l'air, rester en l'air. (Être) sans résultat :
56. ... c'est qu'aujourd'hui, dans ce soir d'été, convaincu de ses échecs de politique et d'amour, se sentant de toutes parts « en l'air », auprès de sa mère encore il se retrouve tout naturellement... M. Barrès, Leurs figures,1901, p. 299.
P. ext. Inachevé :
57. C'est [le manque d'un dessein suivi] ce qui donne au romantisme son caractère « en l'air », d'inachèvement et de transports (...) pour rien. L. Daudet, Études et milieux littéraires,1927, p. 7.
b) (Parler de qqc.) en l'air, (accuser qqn) en l'air. Sans appui dans la réalité, sans fondement. Paroles, contes, promesses en l'air :
58. Et il ne l'accusait pas en l'air, il donnait des preuves, publiant très haut le souvenir de ses propres entretiens avec Saint-Cyran, toutes ces extravagances, auxquelles il trouvait jadis un sens orthodoxe, ou qu'il se refusait de prendre au sérieux. H. Bremond, Hist. littéraire du sentiment religieux en France,t. 4, 1920, p. 79.
Subst. + en l'air.Sans solidité :
59. − Isabelle, vous perdez la tête! Comment vous iriez vous enfermer, là-bas, dans cette vieille maison?... C'est une idée en l'air, je l'espère bien! P. Reider, Mademoiselle Vallantin,1862, p. 33.
Tête en l'air. Personne très étourdie.
c) [En parlant d'une pers. ou d'un groupe de pers.] En émoi, en ébullition :
60. Toute la Suisse fut en l'air. Les messieurs de Berne, de Fribourg, de Soleure, qui se doutaient bien qu'on en voulait à leurs écus, au lieu de renoncer à de vieux privilèges sur d'autres cantons, firent marcher des troupes contre nous. Erckmann-Chatrian, Histoire d'un paysan,t. 2, 1870, p. 457.
d) Locutions
IMPR. En l'air. ,,Appel du linotypiste pour signaler au mécanicien que la distribution de sa machine est arrêtée.`` (Chautard 1937).
Avoir un pied en l'air. Attendre :
61. Il serait dangereux de laisser trop longuement à tout ce monde-là le pied en l'air. P. Claudel, Le Soulier de satin,1944, II, 1, p. 1043.
Tirer en l'air. ,,Habler, se vanter, mentir avec audace.`` (J.-F. Rolland, Dict. du mauvais langage, 1813, p. 6).
Fam. Jeter, envoyer, ficher, flanquer qqc. en l'air. Le détruire, y renoncer :
62. Ce lettré qui a pris tous ses grades, jette volontiers en l'air son bonnet de docteur... A. France, La Vie littéraire,t. 2, 1890, p. 172.
Pop. Foutre en l'air. Même sens :
63. Je n'ai pas envie que ce bougre de sans-soin aille foutre tout en l'air! P. Claudel, Protée,2eversion, 1927, I, 5, p. 375.
Cracher en l'air pour que cela vous retombe sur le nez. Faire une action qui se retourne contre son auteur.
Arg. Envoyer, flanquer, foutre, mettre en l'air. Cambrioler, tuer :
64. C'que je comprends pas, c'est l'entrée des caracos dans le cirque [dans l'intrigue]! Et pourquoi ils l'ont mis [Riton] en l'air de cette façon [en le torturant]? A. Simonin, Touchez pas au grisbi,1953, p. 170.
Rem. Mettre en l'air signifie aussi « mettre en désordre ».
Foutre les tripes en l'air. Tuer :
65. Je veux les voir, les roussins!... Je leur fouterai les tripes en l'air... Je veux leur manger le cœur. O. Méténier, La Lutte pour l'amour,Études d'argot, 1891, p. 207.
Metteur en l'air. Assassin.
Monte-en-l'air. Voleur par escalade.
Être en l'air. Être sans argent.
5. Fendre l'air :
66. Fendre l'air, s'enfuir avec vîtesse, disparoître tout-à-coup à la vue. Il fend l'air, se dit aussi par hyperbole d'un homme vaniteux et hautain, qui prend un ton bien au-dessus de sa condition. J.-F. Rolland, Dict. du mauvais langage,1813, p. 6.
6. Mettre à l'air. Faire montre de quelque chose avec ostentation :
67. Césaire, très bavard, très galant, mit toutes ses grâces à l'air pour éblouir la Parisienne. A. Daudet, Sapho,1884, p. 108.
Région. Sous la forme ,,mettre à l'ar [= air], ébruiter, divulguer.`` (Verr.-On. t. 1 1908, p. 45).
7. Prendre l'air du bureau. ,,Ce qui paraît en bien ou en mal des sentiments, des dispositions de ceux à qui l'on a affaire. J'allai prendre l'air du bureau et je m'aperçus qu'il m'était contraire.`` (Ac. t. 1 1932) :
68. Les musiciens sont mieux traités à mon avis. Les deux dernières années de leur pension, ils les passent à Paris... Ils peuvent, comme on dit, prendre l'air du bureau... P. Mérimée, Mélanges historiques et littéraires,1855, p. 339.
8. Vivre de l'air du temps. Être dans la misère, sans argent pour subsister :
69. Il peut tenir à ses richesses, à ses gratifications et d'ailleurs il le faut bien, puisqu'il a de nombreuses charges et qu'un poète ne vit pas de l'air du temps. R. Brasillach, Pierre Corneille,1938, p. 310.
9. Loc. pop. et arg.
a) Fam. Avoir un courant d'air dans la cervelle. Ne pas savoir ce que l'on dit, ce que l'on fait :
70. Dieu, que je suis sotte! Voulez-vous ne pas pleurer? Comme si ça comptait, ce que je dis! Vous savez bien, enfant battue, que Claudine a un courant d'air dans la cervelle... Colette, Claudine s'en va,1903, p. 51.
b) De l'air! S'emploie pour inviter à partir une personne dont la présence n'est pas souhaitée :
71. Locution usitée pour (...) inviter le contradicteur à disparaître de votre vue (...) Tes salades, j'en ai quine... de l'air! A. Simonin, Le Petit Simonin illustré,Dict. d'usage, 1957, p. 22.
c) Un nom à courants d'air. Un nom long, compliqué et généralement à particule :
72. Il doit s'agir de faits assez graves, car la bonne dame, qui porte un nom à courant d'air, − entre parenthèses, − m'a écrit une lettre angoissée et pleine de réticences. P. Bourget, Nos actes nous suivent,1926, p. 139.
d) Se déguiser, se transformer en courant d'air. S'enfuir se sauver :
73. Si tu lui proposes de tirer les conséquences de ce qu'il dit, il prétend qu'il est d'accord naturellement pour ne pas avoir l'air de se dégonfler, mais dès que tu as le dos tourné, il se transforme en courant d'air : j'en ai fait dix fois l'expérience. J.-P. Sartre, La Mort dans l'âme,1949, pp. 261-262.
e) Se donner de l'air, jouer la fille de l'air, se pousser de l'air. Se sauver :
74. Il s'agit de se donner de l'air (de se sauver [de Pontanezen, dépôt préalable du bagne de Brest]). Tout est préparé. Raban, Marco Saint-Hilaire, Mémoires d'un forçat, ou Vidocq dévoilé,t. 1, 1828-1829, p. 164.
f) Prendre de l'air. S'en aller, s'esquiver.
g) Mettre de l'air dans l'estomac. Assassiner, tuer.
h) Manquer d'air. Manquer de courage, d'audace ou être déconcerté.
i) Pomper l'air. Ennuyer, importuner.
Rem. Dans la lang. pop. air peut prendre le genre fém., de même que air2et air3:
75. − L'air est malsaine ici, dangéreuse à respirer. M. Genevoix, Raboliot,1925, p. 163.
Prononc. − 1. Forme phon. : [ε:ʀ]. 2. Homon. et homogr. : air2, air3, aire, ère, erre verbe, erre subst., ers, hère, Aire n. propre géogr., R lettre. 3. Dér. et composés : airage, plein-air.
Étymol. ET HIST. − 1. 1119 « fluide gazeux, constituant l'atmosphère » (Ph. de Thaun, Comput. éd. Mall, 2802 ds T.-L. : la terre dedenz pent, L'airs tut entur s'estent); 2. 1275 « air en mouvement, vent » (Adenet Le Roi, Bueves de Commarchis, éd. A. Scheler, 786 ds T.-L. : Nus airs n'i puet venir de quel part que il vente). Du lat. aer, -eris (attesté dep. Ennius, Ann., 454 ds Oxford lat. dict., s.v., 69 a) au sens 1 dep. Pl., As., 99, ibid., 69 b : jubeas... me piscari in aere; au sens 2 ds Lucr., 5, 717, ibid. : cum primum... uiolentior aer puppibus incubuit.
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