| ADJONCTION, subst. fém. Action d'adjoindre, d'ajouter; résultat de cette action. A.− [En parlant de pers.] 1. Lang. cour. : 1. À côté de Jacob (...) apparaît, à une haute antiquité, le clan de Joseph (...) qui semble désigner une addition ou adjonction de congénères, qui sont venus après coup s'annexer à Israël.
E. Renan, Hist. du peuple d'Israël,t. 1, 1887-1892, p. 112. 2. Si les Courvoisier donnaient un dîner de famille ou un dîner pour un prince, l'adjonction d'un homme d'esprit, d'un ami de leur fils, leur semblait une anomalie capable de produire le plus mauvais effet.
M. Proust, À la recherche du temps perdu,Le Côté de Guermantes, 2, 1921, p. 468. Rem. Adjonction dans cet emploi désigne le procès dans sa durée, p. oppos. à addition qui peut aussi indiquer le résultat de l'opération; addition peut d'autre part de moins en moins s'appliquer à des pers. et n'envisage pas nécessairement une union étroite. 2. Spéc., DR. (admin. municipale, jurys, élections), vx ,,Se dit de l'appel éventuel que la loi adresse dans des cas déterminés à des citoyens qu'elle revêt extraordinairement de certaines fonctions.`` (Blanche 1857) : 3. Le premier travail porta sur les listes électorales : je les compulsai, assisté du sous-préfet. L'arrondissement était pauvre : il n'offrait que cent trois censitaires à 200 fr et au-dessus. Pour compléter le nombre de cent cinquante électeurs exigé par la loi, il avait fallu faire une adjonction de quarante-sept noms choisis parmi les cotes inférieures, et descendre jusqu'à 83 fr 75 c.
L. Reybaud, Jérôme Paturot,1842, p. 320. Rem. Il n'est pas certain que dans cet ex. le mot adjonction soit pris dans son accept. spécifiquement jur.; le cont. répond cependant exactement à la déf. − Adjonction des capacités. Adjonction ,,des hommes qui ont fait la preuve légale d'un certain degré de connaissance et d'aptitude, aux listes des électeurs censitaires.`` (Blanche 1857) : 4. Vaucorbeil poursuivit : − « Au moins, donnez-nous l'adjonction des capacités. » Bouvard n'allait pas jusque-là.
G. Flaubert, Bouvard et Pécuchet,t. 1, 1880, p. 52. − Terme de Palais. ,,Jonction d'une pers. à une autre... Il n'y a qu'à prononcer une adjonction de Commissaires.`` (Ac. 1798-1878). B.− [En parlant d'inanimés] 1. Emploi cour. : 5. Une gamme mineure construite sur la même tonique qu'une gamme majeure doit donc porter à l'armure trois signes d'abaissement de plus ou (...) trois signes de haussement de moins. Tout naturellement cette altération s'opère suivant le cas ou par la suppression des dièses ou par l'adjonction des bémols; ...
J.-G. Kastner, Grammaire musicale,1837, p. 41. 6. Ce prix de Balzac, après différentes transformations et adjonctions, est devenu le prix d'éloquence ...
Ch.-A. Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 2, 1842, p. 73. 7. La médecine, a dit Hippocrate, est l'adjonction de ce qui manque, et le retranchement de ce qui redonde.
C. Bernard, Principes de médecine expérimentale,1878, p. 132. 8. ... l'article à bon marché se borne à l'efficacité simple; l'adjonction de la beauté, ou de ce qui est prétendu tel, exige un supplément de prix et constitue l'objet « de luxe »; c'est une superfluité facultative.
R. Huyghe, Dialogue avec le visible,1955, p. 36. Rem. 1. Anton. suppression (ex. 5), retranchement (ex. 7). 2. Le plur. prend facilement un sens concr., marquant le résultat de l'action (ex. 6). 2. Emplois spéc. a) DROIT − LÉGISL. FINANCIÈRE. Adjonctions budgétaires, ,,mesures financières étrangères au budget, que les parlementaires de la IIIeRépublique faisaient adopter en les y incorporant.`` (Lar. encyclop.). − En matière de propriété, l'adjonction a lieu lorsque deux choses mobilières qui appartiennent à différents maîtres et qui ont été unies de manière à former un seul tout, sont néanmoins séparables, en sorte que l'une puisse subsister sans l'autre. L'ensemble appartient au propriétaire de la chose principale à charge d'indemniser l'autre propriétaire (d'apr. Réau-Rond. 1951). b) RHÉT., vx. ,,Figure dite aussi zeugma, où plusieurs propositions ont en commun un mot exprimé dans l'une et sous-entendu dans les autres.`` (DG). Prononc. : [adʒ
ɔ
̃ksjɔ
̃]. Cf. joindre. Enq. : /adʒõksiõ/. Étymol. ET HIST. − 1. 1247 « union entre personnes (ici mariage) » (Huon de Cambrai, Li Regrés Nostre Dame, éd. A. Langfors, 107, 8 ds T.-L. : Ne doit avoir redemption Qui par malvaise entention Veut fauser cele ajonction). − 1357 ds Gdf. Compl.; 2. a) 1285-1314 dr. « fait d'ajouter (un bien à un autre) » (Ch. de Ph. le B., B.N. 9785, fo53a ds Gdf. Compl. : Adjonction d'un fief a un autre); b) 1306 dr. « bien ajouté à un autre, dépendance » (Charta composit. inter Carolum comit. Carnot. et Capitul. Carnot. ann. 1306 ds Du Cange, s.v. adjunctiones : ... les mesons canoniaus, que les chanoines ont à present hors dou cloistre, avecques toutes les Adjonctions).
Empr. au lat. adjunctio (terme de rhét. dep. Rhét. Heren., 4, 38 ds TLL s.v., 704, 49 au sens de « figure qui consiste à placer en tête ou à la fin d'une phrase à plusieurs membres le verbe qui porte sur chacun d'eux »; log. dep. Cic., Inv., 2, 171, ibid., 704, 64, au sens de « addition qui restreint une pensée, exception »), au sens 2 a « action d'ajouter une chose à une autre », Aug., Psalm., 65 § 20 ds TLL s.v., 704, 80 : « offeram... boves cum hircis », adiunctione ipsa salvantur hirci : per se non possunt, adiuncti bobus accipiuntur; cf. en lat. médiév., ca 1260-1270, Albert. Magn. Elench., 1, 2, 5, p. 544b ds Mittellat. W. s.v., 195, 5 : accipere ex ipsa adiunctione orationum multiplicitatem significationum; au sens 2 b dr., synon. de incrementum dep. le début du iiies., Paul., Sent., 3, 6, 49 ds TLL s.v., 704, 82 : adiunctiones, quas fundo... testator ex diversis emptionibus applicaverat; cf. 615-620, Form. Wisig., 9, p. 580, 11 ds Mittellat. W. s.v., 195, 17 : possessionem... cum... iure eius atque adiunctionibus ad memoratum locum pertinentibus. STAT. − Fréq. abs. litt. : 69. BBG. − Bar 1960. − Barr. 1967. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Blanche 1857. − Cap. 1936. − Ed. 1913. − Fér. 1768. − Gramm. t. 1 1789. − Pol. 1868. − Réau-Rond. 1951. − Romeuf t. 1 1956. − Spr. 1967. |