| ACCOUCHEMENT, subst. masc. A.− Action d'accoucher. ,,L'accouchement est l'ensemble des phénomènes qui aboutissent à l'expulsion, par les voies naturelles, d'un ou de plusieurs fœtus, parvenus à maturité ou à l'âge de la viabilité.`` (Pratique médico-chirurgicale, t. 1, 1953, p. 48). 1. La faiblesse de la femme n'entre pas seulement dans le système de son existence comme élément essentiel de ses relations avec l'homme; mais elle est sur-tout nécessaire, ou du moins très-utile, pour la conception, pour la grossesse, pour l'accouchement, pour la lactation de l'enfant nouveau né, pour les soins qu'exige son éducation pendant les premières années de la vie.
P. Cabanis, Rapports du physique et du moral de l'homme, t. 1, 1808, p. 295. 2. ... il est certain que tous les peuples ont regardé la lune comme un astre qui influait sur la naissance, la génération et la mort de tous les êtres. Elle est la Vénus des insulaires de la mer du Sud, qui la célèbrent dans leurs chansons. Les Grecs et les Latins l'invoquaient, pour les accouchements, sous le nom de Lucine et d'Ilithye, et enfin, pour la mort, sous le nom d'Hécate.
J.-H. Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 374. 3. − Je voudrais pourtant comprendre ce qui t'attire − reprit-il enfin sur un ton d'agressive ironie en s'arrêtant devant moi. − Est-ce la grossesse? Est-ce l'accouchement? ... Je puis t'affirmer que cela n'a rien de particulièrement délicieux. (...). − Est-ce l'enfant lui-même? Son allaitement? Le plaisir de changer les langes? de jouer à la poupée?
A. Gide, Geneviève,1936, p. 1405. 4. Perdre un gosse, c'est toujours triste, − d'autant plus triste que cela représente tant de peines gâchées. Les soucis et les douleurs de la gestation, de l'accouchement, de l'allaitement, crac! La mort n'en tient pas compte, la mort ne les connaît pas.
H. Queffelec, Le Recteur de l'île de Sein,1944, p. 119. 5. La méthode d'accouchement « sans douleur » est de tenter d'obtenir sinon une suppression, du moins une atténuation de la douleur et une amélioration de la marche physiologique du travail par une action à base essentiellement psychologique...
Rapport, Protection maternelle infantile, fasc. 58-6 bis, p. 29. Rem. 1. Princ. syntagmes. a) Avec un adj. : atroce accouchement(J. Lemaitre, Les Contemporains, 1885, p. 265); accouchement clandestin (H. Stendhal, Le Rouge et le noir, 1830, p. 437); accouchement difficile (cf. ex. 6 inf. et Alain-Fournier, Le Grand Meaulnes, 1913, p. 315); accouchement heureux et rapide (A. Maurois, Ariel ou la Vie de Shelley, 1923, p. 263); accouchement laborieux (cf. ex. 6 inf. et H. de Balzac, Les Illusions perdues, 1843, p. 584); accouchement long et pénible (A. Maurois, Climats, 1928, p. 249); accouchements artificiels (A. Maurois, Climats, 1928, p. 258); accouchements naturels (Voyage de La Pérouse autour du monde, t. 4, 1797, p. 54); accouchement prématuré (R. Martin du Gard, Devenir, 1909, p. 197); accouchement « sans douleur » (cf. ex. 5 sup.). b) Avec un compl. subst. : clinique d'accouchement (A. Gide, Ainsi soit-il, 1951, p. 1187); maison d'accouchement(G. Flaubert, L'Éducation sentimentale, t. 2, 1869, p. 234); heure de l'accouchement (V. Hugo, Le Rhin, 1842, p. 276); moment de l'accouchement (P. Cabanis, Rapports du physique et du moral de l'homme, t. 1, 1808, p. 299); complications de l'accouchement (F. Widal, Lemierre ds F. Widal, P.-J. Teissier, G.-H. Roger, Nouveau traité de médecine, fasc. 3, 1920-1924, p. 253)); douleurs de l'accouchement (cf. ex. 4 sup.); effort de l'accouchement (J.-E. Blanche, Mes modèles, 1928, p. 155). c) Avec un verbe : assister à un accouchement(Code civil, 1804, p. 12); présider à un accouchement (P. Ricœur, Philosophie de la volonté, 1949, p. 74); faire les accouchements (H. de Balzac, Le Cousin Pons, 1848, p. 102). 2. Assoc. paradigm. a) Synon. parturition, terme méd. cependant moins empl. que parturiente désignant la femme qui accouche; enfantement, terme gén. qui caractérise à la fois l'acte d'accoucher, et la gestation (cf. ex. 7 inf.). b) Accouchement est naturellement associé aux termes touchant le mystère de la vie : conception (ex. 1), génération (ex. 2), grossesse (ex. 1, 3) ou gestation (ex. 4), allaitement (ex. 3, 4) ou lactation (ex. 1), avortement ou accident; aux termes rel. au moment de l'accouchement : travail, délivrance (ex. 5). B.− P. ext. et au fig. [Avec ou sans cont. exprimant la compar. avec l'accouchement d'une femme] Élaboration pénible et lente : 6. Enfin nous tenons un ministère! Enfin un ministère nous est né! Certes ce n'a pas été sans peine! L'accouchement a été laborieux et difficile. Plusieurs mois ont à peine suffi à cet enfantement; qu'importe, au surplus? Le temps fait-il rien à l'affaire? Ce ministère introuvable, il est enfin trouvé! Enfin le voici mis au monde et venu à terme!
− Mais est-il né viable? Vivra-t-il?
A. de Musset, Revue des Deux Mondes,14 oct. 1832, p. 237. 7. Je suis, quand j'écris, dans la situation d'un enfantement interminable, d'un travail puerpéral qui se contrarierait obstinément lui-même, et ne garderait que la souffrance de l'accouchement sans s'accorder la délivrance finale. La parturition sans son fruit, l'éternelle angoisse de la fausse présentation est une sensation spéciale qu'il faut avoir éprouvée pour en connaître l'ennui disons mieux, la torture. C'est pourquoi je déteste imprimer, et même composer.
H.-F. Amiel, Journal intime,12 févr. 1866, p. 132. 8. Ah! La dure chose de se mettre avec rien du tout d'idées devant une feuille de papier blanche et d'en faire douloureusement cent, deux cents, cinq cents lignes, et combien de cigarettes fumées pour éloigner, pour retarder ce césarien accouchement de la cervelle.
E. et J. de Goncourt, Journal,avr. 1881, p. 108. 9. Un deuxième acte à la manière du deuxième du voleur. On dirait l'accouchement au forceps d'une mère qui s'aide de son mieux, se prête avec complaisance aux désirs gradués des docteurs. Un dernier cri magnifiquement jeté par Réjane et l'aveu vient. C'est de l'art intelligent, ce n'est pas de la vie.
J. Renard, Journal,1908, p. 1203. Rem. Au xixes., l'emploi fig. est plus fréq. qu'au xxes.; avec une rech. d'effet iron. (cf. l'expr. : l'accouchement de deux vaudevilles ds E.-J. Delécluze, Journal, 1828, p. 29). Prononc. : [akuʃmɑ
̃]. Enq. : /akuʃmɑ
̃/. Étymol. ET HIST. − 1. a) 1181-98 « action d'accoucher » (Paraphr. du Ps. Eructavit, B. N. 902, fo160b ds Gdf. Compl. : Del gesine et del acochement); av. 1628 au fig. « production de l'esprit » (Malherbe, II, 724 ds Lex. de la lang. de Malherbe par Regnier, Paris 1869, p. 14 : Le monde, devant qu'il fût lassé de tant d'accouchements (de productions), pouvoit produire les choses en meilleur état qu'il n'a fait depuis); b) 1835, Ac. : Accoucher. Il se dit aussi de l'action d'aider une femme à accoucher; faire un accouchement. Ce chirurgien connaît bien la bonne méthode des accouchements. Faire un cours d'accouchements. 2. 1447 « action de s'aliter » (Loi accordée au village de Douchi, A. du roy. belge, Cart. de l'abbaye de S. Pierre de Gand ds Gdf. Compl. : Lors hoyrs remanans et aiant cause seront et demoront quite envers ledit seigneur, au jour du trespas d'yceulx, pour lequel milleur cattel ou wage qu'il plaira mieulx prendre audit seigneur, sur les biens muebles appartenans à yceulx aubains au jour de leur ackoukement pour avoir apres leur trespas de ceste maladie). − 1611 (Cotgr. : Accouchement. A lying downe in bed).
1 dér. de accoucher* 2; 2 dér. de accoucher* 1; suff. -ment*; a évincé l'a. fr. gésine. STAT. − Fréq. abs. litt. : 203. Fréq. rel. litt. : xixes. : a) 338, b) 285; xxes. : a) 289, b) 246. BBG. − Bar. 1960. − Bénac 1956. − Blanche 1857. − Bouillet 1859. − Criqui 1967. − Divin. 1964. − Garnier-Del. 1961 [1958]. − Lavedan 1964. − Littré-Robin 1865. − Nysten 1814-20. − Piéron 1963. − Privat-Foc. 1870. − Quillet Méd. 1965. − Réau-Rond. 1951. − St-Edme t. 1 1824. − Théol. cath. t. 1 1909. − Tondr.-Vill. 1968. |