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ABÎMEMENT, subst. masc.
I.− [L'obj. du verbe corresp. désignerait la même pers. que le suj.] Action de s'abîmer dans ou en; état qui en résulte (cf. abîmer I B 2) :
1. Avril un jeudi. Temps d'orage. Absorption complète. Refus de parler. Tout l'après-midi son chapeau de paille lui barrant la vue il reste assis en face d'un arbre, dans une immobilité tristement farouche. 8 avril. Il est touché presque par cela seul : les couleurs de la nature et surtout les aspects du ciel. Des concentrations, des enfoncements, des abîmements en lui-même, où il y a une tristesse si immense et faite de choses si terribles qui se passent au-dedans de lui que je me sens envie de pleurer en le regardant. E. et J. de Goncourt, Journal,avril 1870, p. 553.
2. L'abîmement dans leur malheur domestique avait été si grand pour ces deux femmes que ni l'une ni l'autre ne s'était aperçue que la bague manquait à la main qui avait l'habitude de la porter. J. Barbey d'Aurevilly, Histoire sans nom,1882, p. VII (Quem. 1961).
II.− [L'obj. du verbe corresp. désignerait une chose] Action d'abîmer; état qui en résulte (cf. abîmer II) (Néol. de sens) :
3. Il attaque la note juste et cela va. Il tenait son sol il s'y cramponnait il s'y asseyait il n'en voulait plus sortir. (...) il ramasse toutes ses forces et forçant son manque de salive, − cette terreur des chanteurs, qui ferme toutes les muqueuses et les fait avvilito, comme disent les italiens, − (...) il chante son duo et est applaudi. Toujours un reste de cette émotion le suivant dans toutes ses représentations et lui donnant la crainte du levare − c'est-à-dire d'être remplacé dans son rôle − et lui faisant chaque fois rendre son dîner : abîmement de son estomac et rire de ses compagnons. E. et J. de Goncourt, Journal,août 1858, p. 506.
Stylistique − Mot rare. Dans l'ex. 1 il est au bout d'une série en gradation ascendante qui met en relief sa valeur de superl. notamment par rapport à son synon. plus courant : concentration (enfoncement est un néol. de sens). Valeur le plus souvent péj.
Étymol. − Début xviies. « action de s'abstraire et de s'absorber en », terme relig. (St Francois de Sales, Amour de Dieu, L. VI, 1rerédact. (V, 412) ds Hug. : Et voudroyent ... avoir perseveré en ce meslange, ou plustots abismement d'eux mesme en Dieu). Dér. de abîmer*, étymol. 1; suff. -ment2*. HISTORIQUE I.− Entré dans la lang. au début du xviies. (cf. étymol.) avec le sens I dans une accept. relig.-mystique, qui semble avoir disparu av. 1789. Résurgence de ce sens au xixes. (1870), mais dans une accept. profane, cf. sém. I. II.− Néol. de sens attesté en 1858 (cf. sém. II et abîmer, hist. II B 2 a).
STAT. − Fréq. abs. litt. : 2.