| VILLAGE, subst. masc. A. − 1. Agglomération rurale; groupe d'habitations assez important pour former une unité administrative, religieuse ou tout au moins pouvant avoir une vie propre. Synon. bled (fam.), bourgade, commune, patelin (fam.).Grand, gros, petit village; village agricole, isolé, perdu; village alsacien, breton, lorrain; cimetière, église, place du/d'un village; curé, maire du village; retourner au village; quitter, revoir son village. Les maisons du village serrées autour de leur clocher (Genevoix, Raboliot,1925, p. 52): Sans doute, la dernière molécule sociale, à savoir le village, est bien encore un clan transformé. Ce qui le prouve, c'est qu'il y a entre les habitants d'un même village des relations qui sont évidemment de nature domestique et qui, en tout cas, sont caractéristiques du clan.
Durkheim, Divis. trav.,1893, p. 159. ♦ Idiot*, innocent* du village. ♦ Village urbain, urbanisé. Village dont l'aménagement, les équipements se rapprochent de ceux d'une ville. Synon. village-centre (infra C 1).Drôle d'îlot libertaire que ce village urbain en transit, où la colère et la violence rôdent au ras du pavé et où se réfugient et se croisent une multitude de minorités: pauvres, alcooliques, punks, immigrés, loubards (Le Nouvel Observateur, 21 janv. 1980, p. 5, col. 1). − HIST. [Au Moy. Âge] Village royal. Bourg qui comprenait une habitation royale. Paderbora, Neuf-Héristal, Salz, Francfort étaient des villages royaux (Ac. Compl.1842). − Expr. proverbiales fig. ♦ Faire regarder à qqn le grand chemin de son village (vieilli). Congédier quelqu'un. (Ds Littré). ♦ Il ne faut point se moquer des chiens qu'on ne soit hors/sorti du village. V. chien1II B 4 b. 2. [P. oppos. à ville] a) Loc. adj., souvent péj. [Le plus souvent avec valeur caractérisante; en parlant d'une pers., d'une manière d'être ou de faire] De village. De campagne. Synon. campagnard, paysan, villageois ; anton. citadin.Barbier, curé, médecin de village; fête, noce de village. Ce n'est pas seulement l'aspect d'un paysage enchanteur qu'on vient chercher dans ce dernier endroit [les Vosges], c'est la vue d'un de ces génies bruts, de ces Pascal de village, qui semblent deviner les arts que les autres apprennent (Jouy, Hermite,t. 4, 1813, p. 113).Faut-il être bête! Ne pas voir l'évidence! Politique de village (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 246). b) Loc. et expr. fig., fam., péj. − Loc. Coq de village. V. coq1B 1. − Expr. gén. proverbiales, vieilli ♦ Être parée comme une épousée* de village. ♦ À gens de village, trompettes de bois. ,,Il ne faut aux ignorants, aux grossiers, que des choses proportionnées à leur état, à leur goût, à leur intelligence`` (Ac. 1798-1878). ♦ Être bien dans son village, être de son village. Être très naïf, ne pas connaître les usages du monde. Synon. être bien de son pays1*.[Calyste:] les femmes de Paris sont bien heureuses, elles ont toutes des hommes de génie à adorer et qui les aiment. − Eh! bien, vous êtes encore de votre village, dit en riant Félicité (Balzac, Béatrix,1839, p. 120). ♦ Ce n'est qu'un sot, il sera marié au village. ,,Se dit d'un homme qui a trop peu de capacité pour faire fortune`` (Ac. Compl. 1842). ♦ Il vaut mieux être le premier au village que le second à/dans Rome. J'aime mieux, comme César, être le premier au village que le second dans Rome (Musset, On ne badine pas,1834, ii, 2, p. 31).V. second I B 1 a ex. de Bernardin de Saint-Pierre. 3. [Ailleurs qu'en Europe occidentale] Village indigène; chef de village. On se traîne parmi les décombres, dans le village arabe ruiné qu'on appelle Balbek (Lamart., Voy. Orient,t. 2, 1835, p. 161).L'homogénéité du sol dans le nord de la Chine est propice aux agglomérations: les unes ne dépassent pas les proportions de hameaux, les autres sont de gros villages agglomérés (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum.,1921, p. 190). Rem. En français d'Afrique, le mot a gardé une grande valeur symbolique, il désigne le lieu privilégié et le garant des valeurs traditionnelles les plus authentiques, la patrie spirituelle de ceux qui y sont nés (d'apr. Invent.). Aller au village. ,,Se rendre dans son village natal (opposé à aller en brousse)`` (ibid.). 4. P. anal. ,,Quartier d'une ville lorsqu'il est considéré comme formant un tout homogène avec une vie propre, des habitudes, des relations étroites entre ses habitants`` (GDEL). Le quartier des Batignolles à Paris est un village (GDEL). − Arg. (des casernes). Village nègre. ,,Groupement circulaire de cagnas`` (Esn. Poilu 1919, p. 541). À mi-chemin d'un coteau (...) on a placé l'infirmerie et les cuisines: c'est le ,,village nègre`` (Péricard,Face à face,p. 941, ds Esn. Poilu 1919, p. 541). 5. PSYCH., PSYCHOL. Test du village. ,,Technique projective (...) d'analyse de la personnalité et de l'affectivité, qui utilise un matériel miniature avec lequel le sujet doit construire à sa fantaisie un village, sur un plateau, en temps libre`` (Mucch. Psychol. 1969). B. − P. méton. Ensemble des habitants d'un village. Rassembler le village; être la risée du village. Le village dormait déjà, tout noir dans la nuit (Zola, Germinal,1885, p. 1246).Un curé qui leur arrive passé minuit (...) et qui disparaît sans avoir seulement montré le bout de son nez, laissant tout le village dans le souci! (Bernanos, Crime,1935, p. 816). C. − P. anal. 1. En compos. a) [Village, 1erélém. de compos. entrant dans la formation de subst. comp. dont le 2eélém. indique une fonction, une caractéristique du village] ♦ Village-centre. Synon. village urbain (supra A 1).À côté des villages purement agricoles et des villages de résidence pour les travailleurs urbains (villages-dortoirs) apparaît une catégorie de village « urbanisé » plus complètement: le village-centre ou centre rural (George1984). ♦ Village-dortoir. Village constitué essentiellement d'habitations dont les habitants travaillent en ville. Un immense village-dortoir construit à la hâte dans les années 60 pour accueillir les rapatriés d'Afrique du Nord (Le Monde,27 janv. 1972ds Gilb. 1980).Supra ex. de George 1984. .Village-hôtel. Ensemble d'hôtels constitué d'habitations regroupées sur le modèle des villages et possédant ses propres équipements. Deux villages tout neufs [au Club Méditerranée]. Wengen, un hôtel dans l'Oberland bernois et les Almadies, un village-hôtel à Dakar (Elle, 11 oct. 1976, p. 149, col. 1). ♦ Village-retraite. Ensemble d'habitations destinées aux retraités dans les villages. Des retraités quittent les grandes agglomérations trop coûteuses pour s'installer à la campagne soit individuellement, soit dans des « villages-retraite » (Ph. Saint-Marc, Socialisation de la nature,1971ds Gilb. 1980). ♦ Village S.O.S. Synon. village d'enfants (infra).À la maison, les enfants vivent d'une vie très familiale, les grands aidant les petits et la « mère » (à la fois éducatrice et maîtresse de maison) s'occupant de tout ce qui concerne « ses » enfants. Ces derniers vont aux heures scolaires à l'école ou aux ateliers du village S.O.S. (Lafon1969). ♦ Village-vacances. Synon. village de vacances (infra).La municipalité achève la construction d'un village-vacances dont les premiers pavillons étaient tous loués cet été (Le Monde,23 sept. 1970ds Gilb. 1980). b) [Village, 2eélém. de compos. entrant dans la formation de subst. comp. dont le 1erélém. indique une fonction, une caractéristique du village] Station-village. Station de ski constituée d'habitations regroupées sur le modèle des villages et possédant ses propres équipements. La station-village de Lillehammer: 400 kilomètres de pistes, mais aussi des restaurants, des cinémas et des night-clubs (Le Point, 13 nov. 1978, p. 53, col. 1). 2. Village de + subst. ♦ Village d'enfants. Synon. village S.O.S. (supra).Le « Mouvement pour les villages d'enfants » a été fondé en France en 1958. Mais sa préhistoire (...) remonte à 1943, année où (...) MmeS. Masson, assistante sociale de son état, avait commencé à recueillir, dans une maison de Levallois, des orphelins et à les élever comme frères et sœurs, en les traitant comme ses propres enfants (P. Germa, Depuis quand?1982, p. 337). ♦ Village de toile*. Village de vacances. V. vacance. Prononc. et Orth.: [vila:ʒ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. [1235 lat. médiév. villagium « groupe d'habitations rurales » (doc. ds Du Cange)] 1385 villaige (E. Deschamps, Le Miroir de mariage ds
Œuvres, éd. G. Raynaud, t. 9, p. 44); 1390 village (J. Froissart, Chron., III, éd. A. Mirot, t. 14, p. 92). Dér. de l'a. et m. fr. vil(l)e « ferme » (att. dep. fin xiies., Moniage Guillaume, éd. W. Cloetta, II, 2777), du lat. villa « id. » (ville*); suff. -age*. Fréq. abs. littér.: 8 266. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 9 249, b) 11 082; xxes.: a) 14 934, b) 12 341. Bbg. Bruppacher (V.). Zur Geschichte der Siedlungsbezeichnungen im Galloromanischen. Vox rom. 1961, t. 20, pp. 140-159. − Chautard Vie étrange Argot 1931, p. 474. − Dossiers de mots: tourisme. Néol. Marche. 1979, no12, pp. 190-191. − Quem. DDL t. 15, 24, 36. |