| SATISFACTION, subst. fém. A. − Vieilli ou littér. 1. Action par laquelle on donne ou on obtient réparation d'une offense ou d'un tort. Donner, faire à qqn une satisfaction. La menace est là. M. Gorka a été offensé et il lui faut une satisfaction (Bourget, Cosmopolis, 1893, p. 260). − En partic. Duel opposant l'offenseur et l'offensé. Papillon: (...) et que j'en veux réparation, (...). Ernest: (...) je suis prêt à vous donner satisfaction (...). Vous avez le choix des armes (Dumas père, Chasse et amour, 1825, 14, p. 56): 1. Je porte une épaulette; monsieur le baron de Goelher ne peut plus me refuser une satisfaction qu'il me faut à l'instant. Quoique insulté, je lui laisse le choix des armes et l'attends aux portes de ce palais avec des pistolets et une épée. − Éric Burkenstaff, lieutenant au 6ed'infanterie.
Scribe, Bertrand, 1833, III, 1, p. 173. 2. Spécialement a) POL. Concession, dédommagement destiné à régler un différend entre deux pays. L'Autriche donna des satisfactions; les conférences de Seltz eurent lieu; mais cet incident retarda l'expédition d'Égypte de quinze jours (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 720).Le duc de Pologne fut extrêmement surpris d'apprendre qu'un Landgrave de Thuringe était venu de si loin envahir son pays, à la tête d'une si puissante armée, et lui envoya des offres de satisfaction pécuniaire; mais Louis les repoussa (Montalembert, Ste Élisabeth, 1836, p. 98). b) RELIG. Réparation de l'offense faite à Dieu dans le péché. Synon. pénitence.Mais il n'étoit plus dès lors nécessaire de fléchir la justice d'un tel dieu, par des abstinences, des jeûnes, des expiations et des satisfactions (Bonald, Législ. primit., t. 1, 1802, p. 195). ♦ Réparation sacramentelle. ,,Réparation qu'impose le confesseur au pénitent qu'il absout`` (Marcel 1938). B. − Action de satisfaire. 1. Action de satisfaire quelqu'un. Tu verras qu'il y a autant de plaisir dans la privation comme ça que dans la satisfaction (Verlaine,
Œuvres compl., t. 4, L. Leclercq, 1886, p. 120). ♦ [Dans une loc. verb.] Le duc d'Aquitaine promit que leur maître aurait satisfaction, pourvu que d'abord il voulût jurer la paix (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 34). 2. Action de satisfaire quelque chose. Satisfaction d'un besoin moral, matériel; satisfaction des revendications. L'instinct se précipite sur son objet dont il exige la satisfaction immédiate (Mounier, Traité caract., 1946, p. 665): 2. On lui arracha à grand'peine la promesse d'un suprême effort. − Soit, fit-elle: mais accordez-moi la satisfaction que je demande en retour. Faites-moi voir cette femme, près de lui; je veux me rendre compte. Je saurai s'il a raison.
Vogüé, Morts, 1899, p. 405. C. − État affectif fait de plaisir et de soulagement, éprouvé par celui qui a obtenu ce qu'il souhaitait. Synon. contentement, joie, plaisir1.Avoir beaucoup de satisfaction dans son travail. Quelle satisfaction pour elle que de l'avoir engagé à une démarche d'où sa réputation et sa fortune se trouveraient accrues (Flaub., MmeBovary, t. 2, 1857, p. 11).Fix, dans son coin, éprouvait une indicible satisfaction (Verne, Tour monde, 1873, p. 82). − Dire, exprimer, montrer, témoigner sa satisfaction. Après la signature de la convention financière, l'empereur ne put s'empêcher de lui marquer sa satisfaction: « Je suis heureux, lui dit le tsar, de ne plus être sous la botte des Allemands » (Barrès, Cahiers, t. 11, 1915, p. 123).Mon père, me voyant déjà académicien dans quelques années, respirait une satisfaction que M. de Norpois porta à son comble (Proust, J. filles en fleurs, 1918, p. 453). − Percevoir, ressentir de la satisfaction. Il éprouva quelque satisfaction en voyant le ton, la mise, les manières du grand alsacien en livrée, bien ganté, qui vint apporter de gros souliers fourrés à ses trois maîtresses (Balzac, Mais. Nucingen, 1838, p. 615). − [Dans des loc. verb.] ♦ Donner satisfaction. Satisfaire, être satisfaisant. Donner satisfaction à ses employeurs. Pour donner satisfaction aux auditeurs, les directeurs artistiques des stations d'émissions durent puiser à pleines mains dans le répertoire du théâtre (Annuaire radio, 1933, p. 109).Mais mes nouvelles activités me donnèrent peu de satisfaction (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p. 222). ♦ Avoir, obtenir satisfaction. Être satisfait. Le centre gauche de la chambre élective a satisfaction dans la nomination de M. Royer-Collard (Chateaubr., Mém., t. 3, 1848, p. 88). − Satisfaction de ♦ Satisfaction de qqn (pour qqc.).Ma satisfaction est complète (Sainte-Beuve, Poisons, 1869, p. 66).La satisfaction de Flaubert pète et éclate dans des violences de paroles, sous lesquelles la gentille MmeDaudet paraît peureusement rapetisser (Goncourt, Journal, 1876, p. 1107). ♦ Satisfaction de qqc.Le plaisir de chanter, si puissant en Allemagne, était une satisfaction de gymnastique vocale (Rolland, J.-Chr., Révolte, 1907, p. 438).En associant à votre bonheur quelque vive satisfaction de la langue et du ventre (Duhamel, Confess. min., 1920, p. 68). ♦ (Avoir la) satisfaction de + inf.Nous avons dû nous retirer avec la seule satisfaction d'avoir entendu les clameurs fantastiques de la foule (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1913, p. 342).On prête l'oreille pour avoir la satisfaction d'en entendre [un obus] − ou de ne pas en entendre − (Barbusse, Feu, 1916, p. 237). SYNT. Satisfaction de l'âme, de l'amour-propre, de l'appétit, des besoins, de la chair, du cœur, de l'esprit, de la conduite, de la conscience, du corps, de la curiosité, du désir, du goût, de l'instinct, de l'intérêt, de l'intelligence, de l'orgueil, des sens; amère, complète, dernière, entière, évidente, extrême, haute, immense, légère, petite, pleine, profonde, propre, vive satisfaction; satisfaction absolue, charnelle, brutale, immédiate, intérieure, intense, matérielle, morale, naïve, orgueilleuse, parfaite, personnelle, profonde, totale. − De satisfaction ♦ Loc. adj. [Précédé d'un subst. exprimant une manifestation du comportement] Cri, grognement, geste, murmure, regard, ricanement, signe, soupir de satisfaction. Il laissa échapper un mouvement de satisfaction (Balzac, Cous. Bette, 1846, p. 311).Il se laisse glisser au milieu des oreillers et allonge les bras avec un soupir de satisfaction (Martin du G., J. Barois, 1913, p. 256). ♦ Loc. adv. Et Rantzau descend lentement l'escalier en se frottant les mains de satisfaction (Scribe, Bertrand, 1833, ii, 12, p. 170). − [Dans des loc. adv.] À la satisfaction générale, sans aucune satisfaction. Enfin la toile tomba à la grande satisfaction du vicomte de Morcerf (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 475).Je regardais avec satisfaction dans la glace mon visage encadré d'anglaises (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p. 12). D. − Gén. au plur. [Précédé d'un art. indéf.] Plaisirs, joies; circonstances qui procurent de la joie. Satisfactions basses, égoïstes, médiocres; petites satisfactions; satisfactions matérielles; satisfactions d'amour-propre, de vanité. Vous comprenez aussi que vous devez quelques satisfactions à mon repos que vous avez si cruellement détruit (Du Camp, Mém. suic., 1853, p. 132).Son aîné, Florent (...) lui donnait de grandes satisfactions: il était très doux, travaillait avec ardeur, remportait les premiers prix (Zola, Ventre Paris, 1873, p. 639). Prononc. et Orth.: [satisfaksjɔ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1155 « acte par lequel on obtient la réparation d'une offense » (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 10695); ca 1250 théol. chrét. « acte destiné à réparer envers Dieu l'offense du péché » (Règle cistercienne, 622 ds T.-L.: faire satisfaction); 2. 1611 « soulagement, plaisir obtenu par l'accomplissement de ce qu'on désire » (Cotgr.); 3. 1671 donner satisfaction « contentement que donne une personne qui répond à ce qu'on attend d'elle » (Pomey); 1853 témoigner sa satisfaction (Delacroix, Journal, p. 75); 4. 1844 « action d'assouvir un besoin, un désir » (Mérimée, Conjur. Catilina, p. 249); 5. 1893 obtenir satisfaction (DG); 1933 donner satisfaction « satisfaire des désirs, des revendications » (Annuaire radio, p. 109). Empr. au lat.satisfactio « action d'acquitter (dette...) », « excuse, justification, disculpation, amende honorable », « satisfaction, réparation ». Fréq. abs. littér.: 3 138. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 3 677, b) 4 524; xxes.: a) 4 396, b) 5 139. Bbg. Greimas (A. J.). De la colère: ét. de sém. lex. Doc. Gr. Rech. sémio-ling. 1981, t. 3, n o27, p. 14. |