| PÉRIPHRASE, subst. fém. A.− RHÉT. Figure dans laquelle on substitue au terme propre et unique (mot usuel ou nom propre) une expression imagée ou descriptive qui le définit ou l'évoque. Synon. circonlocution.Le soleil, que Dubartas, ce classique ancêtre de la périphrase, n'avait pas encore nommé le grand-duc des chandelles (Hugo, N.-D. Paris,1832, p. 275).Il affectait de plus en plus une allure rigoriste et guindée. Alix le désignait par cette périphrase : « Mon frère, l'éminent pasteur » (Daniel-Rops, Mort,1934, p. 520): 1. Il ne prononçait jamais, avec elle, le mot mariage, à la fois à cause du ridicule de ce mot, et dans l'esprit où certaines peuplades primitives, par crainte, ne nomment pas leurs dieux, n'en parlent que par périphrases.
Montherl., Démon bien,1937, p. 1285. SYNT. Périphrase académique; périphrase ampoulée, élégante, embarrassée, obscure, précieuse; parler, s'exprimer par périphrases; user de périphrases. − P. ext. Périphrase diplomatique. Manière de s'exprimer indirectement, par allusions ou euphémismes. − Expr. Sans périphrases. Sans détours, d'une manière directe. André, qui avait agi spontanément, fut presque gêné d'être là : il brusqua : après quelques mots de surprise, il offrit sans périphrases de l'accompagner. Elle chercha un prétexte de refus (Martin du G., Devenir,1909, p. 103). B.− GRAMM. Périphrase (grammaticale). Groupe de mots dont on se sert, dans les langues à tendance analytique, pour exprimer un seul signifié : 2. Je remarquais (...) qu'il y a des noms propres en italien pour mille circonstances particulières de l'amour qui, en français, exigeraient des périphrases à n'en plus finir : par exemple l'action de se retourner brusquement, quand du parterre on lorgne dans sa loge la femme qu'on veut avoir, et que le mari ou le servant viennent à s'approcher du parapet de la loge.
Stendhal, Amour,1822, p. 169. Rem. ,,Les formes verbales composées sont un cas particulier de la périphrase (dite périphrase prémorphologique), qu'il s'agisse d'un auxiliaire avec participe (...) ou d'un semi-auxiliaire avec infinitif ou participe...`` (Mounin 1974). Prononc. et Orth. : [peʀifʀ
ɑ:z]. Ac. 1694, 1718 : periphrase; dep. 1740 : pé-. Étymol. et Hist. 1529 « tour de phrase employé comme équivalent du mot propre » (Fr. de Bonivard, Jardin d'antiquité, fo88 rod'apr. FEW t. 8, p. 246a). Empr. au lat. periphrasis « id. », lui-même empr. au gr. π
ε
ρ
ι
́
φ
ρ
α
σ
ι
ς « id. », dér. de π
ε
ρ
ι
φ
ρ
α
́
ζ
ω « exprimer par circonlocution » (de π
ε
ρ
ι- « autour de » et φ
ρ
α
́
ζ
ω « expliquer »). Fréq. abs. littér. : 80. DÉR. 1. Périphraser, verbe intrans.,vx, avec parfois une nuance péj. S'exprimer, parler par périphrases. Allons au fait, je n'ai pas le temps de périphraser (Littré).Au part. prés. en empl. adj. Une intonation riche de sentiment et qui me frappa fort chez un homme si plein de mesure et d'habitudes périphrasantes et diplomatiques (Stendhal, H. Brulard,t. 1, 1836, p. 429).− [peʀifʀ
ɑze], (il) périphrase [peʀifʀ
ɑ:z]. Ac. 1694, 1718 : pe-; dep. 1740 : pé-. − 1reattest. 1551 « s'exprimer, parler par périphrases » (B. Aneau, Le Quintil Horatian, p. 205 ds Quem. DDL t. 6); de périphrase, dés. -er. 2. Périphraseur, subst. masc.,péj. Celui qui s'exprime, qui parle par périphrases. Nous signalons aux périphraseurs du dernier siècle, pour leur confusion, ces deux vers sur le baromètre, (...) : Ils montent, épiant l'échelle où se mesure L'audace du voyage au déclin du mercure (Lemaitre, Contemp.,1885, p. 63).Empl. adj., rare. [En parlant d'une chose] Qui a le caractère de la périphrase. Ces vers mythologiques, pompeux, périphraseurs, vous paraissent tellement surannés, hors de propos (A. Daudetds Journal Officiel,13 mars 1876, p. 1770, col. 2 ds Littré).− [peʀifʀ
ɑzœ:ʀ]. − 1resattest. a) subst. 1845-46 (Besch. : celui qui a la manie des périphrases, qui ne parle que par périphrases), b) adj. 1876 « qui a le caractère de la périphrase » (A. Daudet, loc. cit.); de périphraser, suff. -eur2*. BBG. − Colǒn (G.). À propos du parfait périphrastique vado + inf. en cat., en prov. et en fr. Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1975, t. 13, no1, pp. 31-66. − Dietrich (W.). Der periphrastische Verbalaspekt in den romanischen Sprachen. Tübingen, 1973, 381 p. − Gougenheim (G.). Ét. sur les périphrases verbales de la langue fr. Paris, 1971, 387 p. − Henrichsen (A.-J.). Les Périphrases verbales du fr. mod. R. rom. 1967, nospéc. 1, pp. 45-56. − Nicolau (M.). Rem. sur les orig. des formes périphrastiques passives et actives ds les lang. rom. B. ling. 1936, t. 4, pp. 15-30. − Nilsson-Ehle (H.). Le Cond. « fut. du passé » et la périphrase devait + inf. St. neophilol. 1943, t. 16, pp. 50-88. − Spang-Hanssen (E.). Qq. périphrases passives du fr. mod. R. rom. 1967, nospéc. 1, pp. 139-147. − Werner (E.). Die Verbalperiphrase im Mfrz. Frankfurt am M.-Bern, 1980, 576 p. |