| PART1, subst. fém. I. − Partie (de quelque chose). A. − Partie d'un tout considérée sans idée de répartition ou d'attribution particulière. Synon. partie, fraction, fragment.Il élève à ces mots sa redoutable épée. La tête du géant en deux parts est coupée (Delille, Énéide, 1804, p.273).Oui, il y avait dans le malheur une part d'abstraction et d'irréalité (Camus, Peste, 1947, p.1289).Cette part de liberté, d'inexprimable, de mystère, ce contact direct et purement sensible avec les choses, qui doivent faire se déployer les forces instinctives du lecteur (Sarraute, Ère soupçon, 1956, p.116): 1. Après avoir usé ses journées à calculer des conjonctions et des positions d'étoiles, il employait la meilleure part de ses nuits à les suivre dans le ciel.
Stendhal, Chartreuse, 1839, p.17. − Loc. adv. Pour une part. En partie, dans une certaine mesure. Moi aussi, je me suis cru responsable pour une part dans cette affreuse aventure (Bourget, Disciple, 1889, p.217). ♦ Pour une bonne part, pour une grande part, pour une large part. Dans une large mesure. Synon. en grande/majeure partie*.Nous sommes faits, pour une grande part, de tous les événements qui ont eu prise sur nous (Valéry, Variété III, 1936, p.281). B. − 1. Portion (d'un tout divisé) attribuée à quelqu'un ou affectée à quelque chose. V. chacun ex. 30: 2. Un soir, à table, je m'avisai de mettre à la dérobée une pincée de poivre sur la part de tarte à la crème réservée à la vieille Mélanie qui raffolait de sucreries.
A. France, Pt Pierre, 1918, p.125. − P. métaph. Ô l'amour d'une mère (...)! Pain merveilleux qu'un dieu partage et multiplie (...)! Chacun en a sa part et tous l'ont tout entier! (Hugo, Feuilles automne, 1831, p.717). SYNT. Part de chasse, de gibier; abandonner, demander, exiger, recevoir, réclamer sa part; choisir la plus grosse, la plus petite part; faire plusieurs parts dans ses dépenses, dans son horaire, dans sa vie; réduire la part de son budget consacré aux loisirs. − Locutions ♦ Part proportionnelle*. ♦ Part du lion. V. lion I D 1 a.Il prélève la part du lion; puis il court au parquet pour dénoncer Rivard (G. Leroux, Parfum, 1908, p.57). ♦ Part du pauvre. Part de repas, notamment de la galette des Rois, qui était mise de côté pour l'arrivée éventuelle d'un pauvre. Synon. vieilli part de la Vierge.Il en coupa [du pain] un morceau représentant la part de la Vierge ou la part du pauvre (...) et le plaça avec un verre de vin au milieu de la table (Sue, Myst. Paris, t.3, 1842, p.86). ♦ La part à Dieu! [Expr. de mendiant, pour inciter au partage avec les indigents] La part à Dieu! les petiots vous la demandent. Vous qu'avez trop, donnez un peu (Richepin, Chemineau, 1907, p.153). ♦ Part à deux! (fam.). [Pour inciter à un partage équitable] Il avait dû commencer par leur dire: «Part à deux...» Il se croyait le plus fort. Mais rien qu'en se faisant connaître d'eux, l'imbécile s'était livré et ne pouvait plus ne pas mettre les pouces (Mauriac, Noeud vip., 1932, p.218). ♦ Jouer part franche. V. franc3I B. ♦ Ne pas jeter sa part aux chiens. V. chien1II B 1. 2. En partic. [En parlant d'une chose abstr.] Élément qui revient en propre à quelqu'un dans la répartition d'une chose non mesurable; ce qu'il possède ou acquiert en propre. Chacun a sa part de joies et de peines: 3. Ne pas se laisser à l'avance accabler par la crainte des contrariétés... Des contrariétés, des ennuis... des épreuves, nous en recevons tous notre part, et nous n'en mourrons pas!...
Châteaubriant, Lourdines, 1911, p.140. 3. Spécialement a) DR. CIVIL. Fraction d'un patrimoine revenant à chacun des cohéritiers. Synon. quotité, quote-part.Part en nature de biens meubles et immeubles; part héréditaire. Si (...) le Duc avait un héritier mâle, la part de succession de Madame de Bedfort devait être de cent mille écus d'or (Barante, Hist. ducs de Bourg., t.4, 1821-24, p.393). ♦ Part d'héritage. V. héritage A 1 b ex. de Barrès. ♦ Part afférente. V. afférent I B et ex. 4.Part avantageuse. V. avantageux I A spéc. ♦ Part virile. ,,Dans un groupement, évaluation des droits de chacun des membres obtenue en divisant la valeur totale par le nombre des membres`` (Jur. 1981). b) DR. COMM. ♦ Part (sociale, d'intérêt). ,,Droits possédés par un associé dans une société en nom collectif, en commandite simple ou à responsabilité limitée`` (Barr. 1974). Dans la SARL, les parts ne peuvent être cédées à des tiers qu'avec le consentement de la majorité des associés représentant au moins les trois quarts du capital social (Bern.-Colli1981). ♦ Part de fondateur, part bénéficiaire. ,,Titres émis par les sociétés anonymes en rémunération de services rendus et qui donnent droit en général à une quote-part des bénéfices sociaux`` (cida 1973). Porteur de parts. c) DR. FISCAL. ,,Élément de calcul de l'impôt sur le revenu dont sont passibles les personnes physiques et variant en fonction de la situation de famille des contribuables`` (Admin. 1972). L'impôt est calculé d'après le système du «quotient familial». Il est fonction du taux applicable à chacune des tranches qui composent le revenu imposable et dont les limites dépendent du nombre de parts correspondant à la situation et aux charges de famille du contribuable (Guide pratique du Contribuable Paris, 1986, p.132, col.1). d) MAR. Être, naviguer à la part. Dans la petite navigation, notamment dans la pêche côtière, être rétribué au prorata du produit de la pêche (d'apr. Le Clère 1960). e) THÉÂTRE (à la Comédie-Française). Sociétaire à part entière. Sociétaire rétribué au prorata des recettes ou des bénéfices. (Dict.xxes.). Les plaisanteries dont elles se servent pour invectiver (...) sont tirées du vocabulaire de la maison, et les mots: pensionnaire, part entière, four, m'as-tu vu, entrent dans leurs emportements (Fargue, Piéton Paris, 1939, p.96). − P. anal. ou au fig. À part entière
α) Loc. adj. ♦ [En parlant d'une pers.] Qui jouit totalement des droits et avantages attachés à une qualité. Citoyen, Français à part entière (Gilb.1980). ♦ [En parlant d'une chose] Qui est de même valeur qu'une autre chose du même ordre. La cigarette, le tabac et l'alcool sont des drogues à part entière (Gilb.1980).
β) Loc. adv. Entièrement, totalement. Les femmes ne sont pas à part entière dans l'Église (Gilb.1980). 4. Participation effective (de quelqu'un) dans une oeuvre commune. Payer sa part de frais; fournir sa part d'efforts, de travail dans une entreprise collective. Quant à Gédéon Spilett, il prenait sa part du travail commun, et n'était pas le plus maladroit (Verne, Île myst., 1874, p.175): 4. Je suis venu vers vous parce qu'on m'a dit que vous aviez eu une grande part dans les décisions prises.
Camus, Peste, 1947, p.1288. C. − Loc. verb. 1. Avoir part à qqc. [Le suj. est une pers.] Être mêlé à, participer physiquement ou moralement à. Avoir part, peu de part, une grande part aux bénéfices. Les ouvriers de l'arsenal de Toulon, inculpés d'avoir eu part à l'assassinat de M. de Castelet (Marat, Pamphlets, C'est un beau rêve, 1790, p.230). ♦ Avoir part au gâteau. V. gâteau A 3 a. ♦ [À la forme négative] Hamlet veut faire jurer à sa mère, sur l'urne qui renferme les cendres de son époux, qu'elle n'a point eu de part au crime qui l'a fait périr (Staël, Allemagne, t.3, 1810, p.237). ♦ [Avec l'art. déf.] Il reste à expliquer (...) la part qu'Atar-Gull eut à cet événement tragique (Sue, Atar-Gull, 1831, p.29). ♦ Avoir sa part dans. Jouer un rôle dans: 5. ... la camaraderie de combat, nouée sur le champ de bataille d'Abbeville (...) a eu sa part dans la décision que j'ai prise de continuer à combattre aux côtés des alliés jusqu'au bout et quoi qu'il arrive.
De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p.610. 2. a) Faire la part belle à qqn/qqc. Avantager, faire une place de choix à. Synon. donner, faire la partie belle*.Cet article d'Albert de Mun (...) qui traite Jaurès avec convenance, lui fait la part belle (Barrès, Cahiers, t.7, 1909, p.232). b) Faire la part de (qqc.). Prendre en considération, tenir compte de. Faire la part du hasard, de l'imprévu, de l'exagération. Dans l'exposé de ce projet d'emprunt, il a été fait une très large part à l'artillerie lourde (Barrès, Cahiers, t.11, 1917, p.275): 6. On n'a pas assez fait la part des bouleversements produits dans la carrière de Beethoven par ces ouragans de la politique et par les ruines qu'ils ont laissées dans la vie sociale.
Rolland, Beethoven, t.1, 1937, p.36. ♦ Faire une large part, une part trop petite à (qqc.). ♦ Faire la part du feu. V. feu1I C. ♦ Faire la part des choses. Tenir compte des contingences, ne pas être trop exclusif. Il faut savoir faire la part des choses (Aymé, Jument, 1933, p.62). ♦ Faire la part de (... et de ...). Discerner, distinguer ce qui revient à, ce qui relève de. Faire la part du bien et du mal. Qui fera ici la part de la fraternité vraie, de la connaissance vraie? (Alain, Propos, 1921, p.232). c) Faire sa part à (qqc.). Conférer, reconnaître à (quelque chose) l'importance qui lui revient. Le rhétoriqueur fait sa part au langage une fois pour toutes, et se trouve ensuite libre de traiter d'amour ou de peur, d'esclavage ou de liberté (Paulhan, Fleurs Tarbes, 1941, p.166). 3. Faire part de qqc. à qqn. Faire connaître, informer de. Synon. communiquer, faire savoir*.Faire part de sa pensée, de son opinion, de ses projets à qqn: 7. Un jour, Stephen, par son travail, se trouva dans une position honorable dans les lettres. Il partit à cheval pour faire part de cette bonne nouvelle à une tante de Magdeleine.
Karr, Sous tilleuls, 1832, p.314. − En partic. Informer officiellement suivant les règles du savoir-vivre, selon les usages. Synon. annoncer.Faire part d'une naissance, d'un mariage, d'un décès. M. et MmePhilippe Lenouvel ont le plaisir de faire part de la naissance de leur deuxième enfant, Sophie (Le Figaro, 19-20 janv. 1952, p.2, col. 3). ♦ (Billet, lettre de) faire-part*. Vx. Billet, lettre de part. V. billet I A 2. 4. Prendre (une) part à a) Jouer un rôle actif dans, participer personnellement à. Prendre part à l'élaboration d'un projet, à des décisions, à des délibérations, à un vote, à une expédition, à des réjouissances: 8. On l'avait exclu des jeux de plein air; sa maladresse était une certitude de défaite pour son camp; les capitaines d'équipe eux-mêmes demandèrent qu'il fût dispensé de prendre part aux jeux.
Larbaud, F. Marquez, 1911, p.48. b) S'associer par la pensée, par le coeur à (une circonstance joyeuse ou douloureuse pour quelqu'un). Synon. partager.Prendre part au deuil, à la douleur, à la joie, à la peine, au succès de qqn. Elle apprit qu'un jeune disciple de M. Tao désirait lui témoigner la part qu'il prenait à son deuil (A. France, Vie littér., 1891, p.90). II. − Partie d'un lieu. A. − Vieux 1. Direction. Synon. côté.Les jurés ne savent plus de quelle part est la vérité, de quelle part est le paradoxe et le sophisme (Joigneaux, Prisons Paris, 1841, p.264). 2. Loc. fig. De bonne part. De source certaine. Synon. de bonne source*, de source* sûre, de première main*.Déjà voilà le fils aîné du duc d'Orléans, je sais cela de bonne part, et vous le garantis plus sûr que si les gazettes le disaient (Courier, Pamphlets, Disc. souscr. acquis. de Chambord, 1821, p.76). B. − 1. Loc. adv. a) de lieu. [Avec un adj. indéf.] − Autre part. Ailleurs, dans un autre endroit. Il regarde, de table en table, s'avance en dérangeant les installations pour vérifier tous les convives de cette salle. Aïe! il ne connaît personne. Autre part, c'est pareil. Il n'a pas de chance (Barbusse, Feu, 1916, p.158). − Nulle part. V. nul I A 1 e. − Quelque part ♦ En un lieu qu'on ne peut ou ne veut préciser. Quelque part, mais où? Quelque part en France; j'ai déjà vu cette tête quelque part. Voulez-vous profiter de mon taxi? Il se fait tard. Puis-je vous déposer quelque part en passant? (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p.51).Quelque part que (vx). Quel que soit l'endroit où. Quelque part qu'on le rencontre, on est sûr de le trouver, un carton sous le bras (Jouy, Hermite, t.4, 1813, p.233). ♦ En partic. Dans un texte; chez un auteur. Cette manière d'être perpétuellement infidèle à l'infidélité de nos raideurs et de nos accommodements dont Péguy écrit quelque part qu'elle est la vertu première du fidèle (Mounier, Traité caract., 1946, p.64). ♦ P. euphém., fam. Aux cabinets. Synon. au petit coin, au petit endroit, là où le roi va seul*.Aller, s'isoler quelque part. Des fois, (...) pressé d'arriver quelque part évidemment, (...) je traverse à grands pas une haute allée (Verlaine, OEuvres compl.,t.4, Mém. veuf, 1886, p.179).Au derrière. Synon. (p.euphém.) où je pense (v. penser).Toutes les fois que ce gredin-là me tutoie, c'est comme si je recevais un coup de pied quelque part (Sardou, Rabagas, 1872, iii, 9, p.138).Loc. verb., pop. Avoir qqn/qqc. quelque part. Être excédé de, considérer avec mépris. Synon. avoir qqn au cul* (trivial), en avoir plein le cul* (trivial), en avoir plein* le dos (fam.), en avoir assez*, en avoir marre* (fam.), en avoir ras-le-bol* (fam.), faire fi* de, prendre en grippe*.Ah! l'argent! mon pauvre chien, je l'ai quelque part! Vois-tu, je danse dessus, l'argent! Je crache dessus! Et elle prenait une mine de dégoût (Zola, Nana, 1880, p.1335).Discussion violente [entre madame et l'homme qui vient pour le gaz]. On entend: «Malappris. −Vous êtes une idiote. −(...) le dirai à mon mari. −Votre mari, je l'ai quelque part...» (Courteline, Vie mén., Invite Monsieur, 1891, p.76). b) P. ext. − D'autre part. [En début de phrase, comme marque d'articulation forte] D'ailleurs, de plus, en outre, par ailleurs. V. autre I C ex. 44. − De part en part. En pénétrant entièrement, en traversant d'un côté à l'autre. S'il avait riposté, le capitaine était percé de part en part (Zola, Cap. Burle, 1883, p.58). − De part et d'autre (de). D'un côté comme de l'autre (de). Paris est mollement jeté sur ses collines, de part et d'autre de son fleuve (Romains,Hommes bonne vol.,1932,p.28).Au fig. Moment de gêne de part et d'autre. Quand leurs regards se rencontrent, ils échangent une petite salutation accompagnée d'un sourire forcé (Feydeau, Dame Maxim's, 1914, iii, 3, p.57).[Avec valeur de réciprocité] Se dire les quatre vérités de part et d'autre. De part et d'autre, on se saluait courtoisement, sans même essayer de se dérober à un entretien (Aymé, Jument, 1933, p.17). − D'une part..., d'autre part/de l'autre. [Pour mettre en parallèle ou opposer deux idées, deux faits, deux aspects d'une situation, l'un des éléments pouvant être sous-entendu] Synon. d'un côté..., d'un autre côté, de l'autre (v. côté III F).V. autre I C. − De toute(s) part(s). De tous les côtés à la fois. Synon. de tout côté, de tous (les) côtés (v. côté III E).Navire qui fait eau de toutes parts. On se cogne de toute part à des impossibilités, et il faut jouer l'aisance (Amiel, Journal, 1866, p.280).La langue littéraire dépasse de toutes parts les limites que semble lui tracer la littérature (Sauss.1916, p.41). − En bonne, en mauvaise part ♦ Prendre qqc. en bonne, en mauvaise part. Trouver bon, mauvais, interpréter en bien, en mal. Synon. prendre, recevoir bien, mal; prendre du bon, du mauvais côté*.Prendre un conseil, une remarque en mauvaise part. Le fond de ce petit, c'est une honnête indifférence, ou peut-être croit-il qu'il est bien de tout prendre de moi en bonne part, même mes colères (Renard, Journal, 1901, p.700). ♦ En partic. Interpréter, prendre un mot en bonne, en mauvaise part. Donner à un mot un sens favorable ou péjoratif. Il me reproche «que la civilisation et la morale sont des mots toujours pris en mauvaise part dans mon ouvrage» (Fourier, Nouv. monde industr., 1830, p.39). − Pour ma, ta, sa, etc., part. En ce qui me/te... concerne. Synon. quant à/pour* ce qui est de moi/toi, pour mon compte.Lui, pour sa part, promenait sur ma chancelante personne un regard tout pénétré d'étonnement et de malice (Milosz, Amour. initiation, 1910, p.11). 2. De la part de (qqn) a) [Pour indiquer la pers. qui est à l'origine d'une décision, de qui émane un ordre] De la part du roi. J'étais venue vous faire une commission de la part de Lili, Madame. Elle vous fait dire qu'elle a été désolée de ne pas pouvoir aller à la gare (Bourdet, Sexe faible, 1931, i, p.247). b) En se recommandant de, au nom de. C'est de la part de qui? (à la porte ou au téléphone). Venir de la part de qqn; dites-lui bien des choses de ma part. J'irai de la part de madame, si madame veut, s'écria la femme de chambre (Mérimée, A. Guillot, 1847, p.92). c) Venant de. C'est délicat de sa part; cela m'étonne de sa part; il n'y a aucune mauvaise foi de sa part. Et vous venez la voir ici; c'est bien gentil de votre part (Dumas fils, Dame cam., 1848, p.43). 3. À part a) Loc. adv. − À l'écart; séparément, de côté. Servir la sauce à part; examiner une question à part; mettre, prendre qqc. à part. Nous dînions à la table d'hôte; mais vous, les Fondaudège, vous étiez servis à part (Mauriac, Noeud vip., 1932, p.42). − [En parlant de pers.] En particulier; seul à seul. Après le dîner, il me prit à part pour me demander comment il se faisait que l'Empereur fût si fort sur ces matières (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t.1, 1823, p.407). − THÉÂTRE. [Comme indication scénique, souvent en italique, précisant que les propos sont tenus à l'écart des autres personnages en scène mais de connivence avec le spectateur] Synon. en aparté.Vasconcellos à part: Tâchons de le sonder. (haut). D'où vient que l'on me prête cet acharnement contre le duc? (Lemercier, Pinto, 1800, ii, 7, p.58). − Mis à part ou p.ell. à part. Abstraction faite de, sans tenir compte de. Plaisanterie, blague à part. Badinage à part, quoique ma réponse soit très sérieuse, je me réserve pour écrire un jour ma vie (Restif de La Bret., M. Nicolas, 1796, 12): 9. Je veux ma tranquillité... En dehors de ça, je me fiche de tout, la vertu mise à part bien entendu, et pourvu que ma femme n'emporte pas la caisse.
Zola, Pot-Bouille, 1882, p.236. b) Loc. adj. Les papiers de M. Thibault étaient classés avec méthode. Les «oeuvres» occupaient un meuble à part (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p.1325). ♦ Tirage*, tiré* à part ♦ À cheval* hargneux étable à part (proverbe). c) Loc. verb. [Le suj. désigne des pers. et p.plaisant. une pers.] Se mettre délibérément à l'écart d'un groupe. Faire chambre à part (v. chambre I A 2 a), faire lit à part (v. lit I B 2 b); faire bande à part. P. anal. Faire cause à part. On disait à Vienne que nous voulions nous séparer de l'alliance et faire cause à part avec la Russie (Chateaubr., Mém., t.3, 1848, p.203). − Qui est différent des autres, qui présente des particularités. Synon. spécial.Occuper une place à part; un esprit, un être, un monde, un peuple à part: 10. Le père de Louis l'appelle «chaussée» Clignancourt, et non pas «rue» comme les autres. Louis ne sait pas pourquoi, mais il ne s'étonne pas que cette rue merveilleuse ait une désignation à part.
Romains, Hommes bonne vol., 1932, p.181. − En partic. Exceptionnel. Je me plaisais avec toutes [les jeunes filles], parce que chacune avait pour moi, comme le premier jour, quelque chose de l'essence des autres, était comme d'une race à part (Proust, Sodome, 1922, p.1113). d) Loc. prép. − Excepté, en dehors de, sauf, nonobstant: 11. Je relis l'oraison funèbre d'Henriette de France. À part l'admirable portrait de Cromwell et certaine phrase du début (...), je n'y trouve pas beaucoup d'excellent, du moins à mon goût.
Gide, Voy. Congo, 1927, p.699. ♦ À part ça (fam.). À part ça, comment vont les affaires? Mais à part ça... j'espère que ça va comme vous voulez? (Ponchon, Muse cabaret, 1920, p.81). − À part moi, soi, lui (elle), loc. adv., vieilli. En moi-(soi-)même, en mon (son) for intérieur. Ils ne savent donc pas la sanglante torture, De se dire, à part soi: j'ai fait une oeuvre impure (Barbier, Ïambes, 1840, p.62). e) Loc. conj., pop. À part que. Sauf que. À part qu'elle volait trop et qu'elle manquait un peu de décence, elle était tout de même une drôle de fille, moins rosse qu'on n'aurait cru (Zola, Terre, 1887, p.324). Prononc. et Orth.: [pa:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.I. Partie, point de l'espace. Côté, direction; parti. A. Notion de côté, de direction. Loc. 1. a) de [ma, ta...] part «en ce qui [me, te...] concerne, de [mon, ton...] côté» 842 précédé de l'adj. poss. de sua [ms. suo] part (Serments de Strasbourg ds Henry Chrestomathie, p.2, 20); 1119 de sa part (Philippe de Thaon, Comput, 1930 ds T.-L.); b) de [la] part [de] indique la personne de qui provient une chose, au nom de qui elle est faite «au nom de, venant de, en provenance de»
α) ca 1100 part précédé de l'adj. poss. (Roland, éd. J. Bédier, 361: De meie part ma muiller saluez); 1150 de sue part (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 1992); ca 1170 de sa part (Marie de France, Lais, éd. J. Rychner, Deus Amanz, 139);
β) de [la] part suivi d'un subst. ca 1100 de part Deu (Roland, 2847); ca 1140 de part sun pere (Geoffroi Gaimar, Estoire des Engleis, éd. A. Bell, 95); ca 1165 de le part Dé (Guillaume d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 2852); 1174-76 de la part le rei (Guernes de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 305), v. aussi par3; 2. fin xes. de totas part «venant de tous les côtés» (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 154); ca 1050 de tutes parz (St Alexis, éd. Chr. Storey, 574); 3. a) [d'une part; d'autre part] marque une transition, une opposition entre deux parties d'un récit, entre deux idées
α) fin xes. deˑ ll'altra part (Passion, 345: Nicodemus deˑ ll'altra part Mult unguement hi aportat); 1130-40 de l'altre part (Wace, Conception N.-D., éd. W. R. Ashford, 669); 1174-87 d'autre part (Chrétien de Troyes, Perceval, éd. F. Lecoy, 2732); 1176-81 id. (Id., Chevalier à la charrette, éd. M. Roques, 1291);
β) 1155 de l'une part ... de l'altre part (Wace, Brut, 6691, 6695); b) [d'une part, d'autre part]
α) indique une situation dans l'espace: ca 1100 d'une part (Roland, 3433); ca 1140 id. (Voyage de Charlemagne, éd. G. Favati, 370); ca 1135 d'autre part (Couronnement de Louis, éd. Y. Lepage, réd. AB, 917); ca 1170 id. (Chrétien de Troyes, Erec, éd. M. Roques, 355); ca 1274 d'une part et d'autre (Adenet le Roi, Berte, éd. A. Henry, 1967: Et d'une part et d'autre mainte vigne plantée); 1624 de part et d'autre (Coutumes de Gorze, § 40 ds Nouv. Coutumier gén., éd. A. de Richebourg, t.2, p.1091a: les voisins de part et d'autre [d'une terre]); 1671 id. «des deux côtés, de partout» (Pomey);
β) 1559 fig. d'une part et d'autre «dans les deux camps de combattants» (Amyot, trad. de Plutarque, Hommes illustres, Romulus, § 8, éd. G. Walter, t.1, p.44); 1668 de part et d'autre cont. jur. (Racine, Les Plaideurs, II, 14: Il faut de part et d'autre avoir un avocat); c) ca 1160 autre part «dans un autre endroit» (Eneas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 1051); 4. à part a)
α) ca 1100 metre [aucun] a une part «mettre de côté par un choix, un tri» (Roland, 1115); 1651 p.ell. amour à part... (Corneille, Nicomède, I, 2);
β) 1160-74 [en parlant d'une pers.] (ester) a une part «(être) à l'écart» (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 3852); av. 1362 traire [aucun] a part (Bersuire [ms. Bibl. nat. fr. 20312 ter] fol. 72 rods Littré); fin xives. parler [a aucun] a part «seul à seul» (Eustache Deschamps, OEuvres, éd. Queux de Saint-Hilaire et G. Raynaud, t.5, p.109, 6);
γ) 1636 empl. adj. «particulier, différent des autres» (Corneille, Illusion comique, V, 2: Leur gloire a son brillant, a ses règles à part); 1690 «séparé des autres, distinct» (Fur.: à un cheval hargneux il luy fait une estable à part);
δ) 1788 à part loc. prép. (Fér. Crit.); b) a par(t) suivi d'un pron. pers.
α) 1205-50 a par soi «tout seul» (Renart, éd. E. Martin, XXIII, 1241); ca 1276 a par vous (Adam de La Halle, Jeu de la Feuillée, éd. E. Langlois, 197); xiiies. a par li (Prestre mis au lardier ds Nouv. Rec. de fabliaux, éd. A. de Montaiglon et G. Raynaud, t.2, p.25); 1606 faire quelque chose a part soy (Nicot);
β) 1330 disoit a par luy «en lui-même, dans son for intérieur» (Hugues Capet, éd. de La Grange, 1101); id. pensoit tout a par [leçon du ms. unique, corrigée en part par l'éd.] lui (ibid., 1980); ca 1470 se lamentoit a part lui (Georges Chastellain, Chron., éd. Kervyn de Lettenhove, t.3, p.239); av. 1533 (Clément Marot, Elégies, XIII ds OEuvres, éd. C. A. Mayer, p.236: Toute la nuyct, je disois a par moy); 5. quelque part ca 1100 quel part + subj. loc. prép. «où que, par où que» (Roland, 2034); 1remoitié xiies. quel part? «où?» (Psautier Oxford, éd. Fr. Michel, CXXXVIII, 6); 1459 quelque part que loc. prép. «partout où» (Coutumes de duché de Bourgogne, § IX ds Nouv. Coutumier gén., éd. A. Bourdot de Richebourg, t.2, p.1177a); 1530 quelque part, quelque aultre part loc. adv. (Palsgr., p.823a); 6. nulle part ca 1160 de nulle part «d'aucun côté, en aucun endroit» (Eneas, 199); 1176-81 nule part (Chrétien de Troyes, Chevalier au lion, éd. M. Roques, 3427); 7. de part en part a) 1480-90 «entièrement» (Guillaume Coquillart, Monologue des Perruques ds OEuvres, éd. M. J. Freeman, p.328); b) ca 1590 «d'un côté au côté opposé» percer de part en part (Montaigne, Essais, I, XLVIII, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p.291); 8. 1530 prendre en bonne part «interpréter en bien» (Palsgr., p.747a); 9. 1538 chascun pour sa part «chacun en ce qui le concerne» pro sua quisque parte (Est., s.v. pars). B. Camp, cause; parti, faction. Emplois libres 1. a) ca 1130 Deu nos prenge a sa part «Dieu nous prenne parmi les siens, Dieu nous protège» (Li ver del juise, éd. E. Rankka, 479); b) ca 1140 en parlant de combattants (Gaimar, Estoire des Engleis, 414: Ocis i fud li rei Guntier E d'ambes parz maint chevalier); c) 1160-74 le par «parties» (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 1765); fin xives. les pars «les parties plaidantes, les plaideurs» (Eustache Deschamps, OEuvres, MXXXV, 22, t.5, p.312); 2. 1408, 1ersept. faire pars «susciter des partis, des factions» (Ordonnances des rois de France, t.9, éd. Secousse, p.371) cf. de part et d'autre fig. supra I A 3 b β. II. Notion de partage, de participation A. ce qui revient à quelqu'un 1. sans idée de partage réel, participation à des biens qui se transmettent sans être réellement partagés a) fin xes. aver part ab (Passion, 504: Fraindre devem noz voluntez, Que part aiam ab Deu fidels); b) 1130-40 aveir part en «s'intéresser à» (Wace, Ste Marguerite, éd. E. A. Francis, 437 [ms. A, 1267]); ca 1165 avoir part de (Guillaume d'Angleterre, 2223); 1erquart xiiies. que Dieus i ait part (Courtois d'Arras, éd. E. Faral, 483); 1538 avoir part a «participer, concourir à» (Est., s.v. pars, participo); c) 1176 avoir part an [aucune] «avoir des rapports charnels avec» (Chrétien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 3138); d) 1559 faire part de «faire savoir» (Amyot, op.cit., Alexandre, t.2, p.341), v. faire-part; 2. partie, portion attribuée lors d'un partage, d'une distribution a) ca 1140 [partage de terres] (Geoffroi Gaimar, op. cit., 4377); 1155 part de la terre (Wace, Brut, 14519); ca 1170 la tierce part de s'hérité (Marie de France, op. cit., Eliduc, 629); ca 1180 (Id., Fables, IV, 28, éd. K. Warnke, p.19: Li chiens i vient, sa part en porte); 1erquart xiiies. faire part [d'aucune rien a aucun] «donner une part de quelque chose à quelqu'un, l'y faire participer» (Renclus de Molliens, Miserere, 42, 3 ds T.-L.: Onques au ladre n'en fist part [l'enfrun vilain]); b) spéc. 1710 «quotité revenant à quelqu'un dans une affaire» (Dancourt, Femme d'intrigues, V, 2 ds Coll. des théâtres fr. Comédies en prose, t.1, 1829, p.415); 1721 mar. être à la part (Trév.); c) 1813 faire sa part à (qqc.) «lui reconnaître un domaine déterminé» (Royer-Collard in Fragments philos., p.194 ds Rob.); 1823 faire la part à (id.) «le mettre en ligne de compte» (Boiste: il faut ... faire la part aux ennuis, aux dégoûts); 1835 faire la part de (Ac.: En faisant la part du bonheur, du hasard; faire la part de la critique; faire la part du diable); 1842 faire la part du feu fig. (Ac. Compl.). B. Partie d'un tout sans idée d'affectation, de distribution: ca 1100 «partie d'un pays» (Roland, 3332: De la contree unt porprises les parz); ca 1140 (Geoffroi Gaimar, op. cit., 2194: Mais [del] païs grant part guasterent); 1269-78 «partie de la lune» (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 16841); 1535 part ... part (Rabelais, Gargantua, éd. R. Calder et M. A. Screech, LI, 42-43, leçon du ms. B: viz De laquelle les marches estoient part de porphyre, part de pierre Numidicque, part de marbre) v. plupart (la). C. Origine; nature. Ce qui échoit à quelqu'un, héritage, lignée: ca 1100 malvais hume de male part «de basse origine» (Roland, 2135); 1160-74 de bonne part «loyal, franc» (Wace, Rou, II, 1952); ca 1213 de romain part [cf. FEW t.7, p.673b, note 6] (Li fet des Romains, éd. L. F. Flutre et K. Sneyders de Vogel, 280, 18). Du lat. pars, partis «part, portion, lot; partie» (parte ... parte; magna parte; nulla parte; pro mea parte); au plur. «parts, parts bénéficiaires»; «partie, point de l'espace, côté» (una in parte; ex altera parte; à basse époque in parte, in partem «à part»); p.ext., souvent au plur. devenu synon. de regio, Blaise Lat. chrét. Pars, le plus souvent au plur. a développé divers sens spéc. dans les lang. techn.: −«partie du corps» (et p.euphém. partes «parties sexuelles»); −«partie d'un nombre» (duae partes «les deux tiers»); −«côté, cause, parti» (a parte accusatoris; in altera parte esse), spéc. «parti politique»; −dans la lang. du théâtre: «partie d'une pièce confiée à un acteur; rôle (partes agere)», et, p.ext. «munus, officium», v. Ern.-Meillet. Dans la loc. a par(t) suivie d'un pron. pers., part semble avoir été substitué à l'a. fr. par, prép., qui, non précédé de a et suivi du pron. pers. signifiait déjà «isolément; tout seul» (ca 1100, Roland, 3065: Cil sunt par els en un val...; 1121-34 par sei «de lui-même, tout seul» Philippe de Thaon, Bestiaire, v. par1II 2). Fréq. abs. littér.: 26417. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 37225, b) 35270; xxes.: a) 33071, b) 41794. Bbg. Greive (A.). Frz. part, partie, parti. Bonn, 1961, pp.77-86. _ Guiraud (P.). Mél. d'étymol. arg. et pop. Cah. Lexicol. 1970, t.17, no2, pp.12-13. _ Quem. DDL t.19. |