| ÉPIDÉMIE, subst. fém. A.− MÉDECINE 1. Augmentation inhabituelle et subite du nombre d'individus atteints d'une maladie transmissible existant à l'état endémique dans une région ou une population donnée; apparition d'un nombre plus ou moins élevé de cas d'une maladie transmissible n'existant pas normalement à l'état endémique dans une région donnée (p. oppos. à endémie) (d'apr. Méd. Biol. t. 2 1971). Épidémie dévastatrice, régnante; grande, terrible épidémie; propagation, transmission des épidémies. Les épidémies sont un fléau; mais elles ne sont pas les seuls maux dont les vivants soient menacés dans leur chair (Faral, Vie temps st Louis,1942, p. 86): 1. Les centres endémiques du typhus et de la fièvre récurrente correspondent à des foyers permanents de saleté ou de misère. Quant aux grandes épidémies que causent parfois ces maladies, elles éclatent lorsque des perturbations économiques viennent rompre les habitudes d'hygiène qu'a peu à peu créées la civilisation moderne.
Brunhes, Géogr. hum.,1942, p. 289. − P. compar. [En parlant d'une chose considérée comme un mal phys. ou mor.] Une barbe rongée par cette lèpre étrange qui s'abat quelquefois, comme une épidémie, sur toutes les statues d'un quartier (Sartre, Nausée,1938, p. 46).Un matérialisme sordide s'était répandu dans le pays comme une épidémie (Sartre, Mort âme,1949, p. 238). Rem. 1. On parle aussi d'épidémie à propos des animaux. Le deuil morne d'un troupeau frappé d'épidémie (Zola, Germinal, 1885, p. 1298). On voit parfois les corneilles ou les daims succomber sous des épidémies inexplicables (Giraudoux, Électre, 1937, I, 3, p. 42). En méd. vétér., le terme approprié est toutefois épizootie (d'apr. Villemin 1975). 2. On rencontre ds la docum. le dér. épidémicité, subst. fém. Caractère épidémique d'une maladie. Ces fièvres endémiques, prématurées dans leur apparition, contractèrent presque soudainement un véritable caractère épidémique. On ne pouvait raisonnablement attribuer leur existence, encore moins leur épidémicité et la gravité qu'elles ont eue, aux causes ordinaires et propres à ce genre de maladies, à l'impaludation (Dr. L. Marchant, in Actes de l'Acad. royale des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Bordeaux, VI, 91 − C.H. ds Quem. DDL t. 8). 2. P. ext. Multiplication considérable de cas de toute maladie (transmissible, carentielle ou autre; intoxication) ou de tout autre phénomène biologique ou social (accident, divorce, suicide, etc.). Après six mois de vie en commun, une épidémie de divorce s'abattit tout à coup sur les ménages (Murger, Scènes vie boh.,1851, p. 174).Une folie, une épidémie de folie, (...) sévit en ce moment dans la province de San-Paulo (Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Horla, 1886, p. 1117): 2. Quoiqu'il faille compter avec ce que Gœthe appelait « le destin allemand de se rendre toutes choses difficiles », l'épidémie de suicides qui affecta le pays entier, entre les deux guerres, en dit long sur le désarroi des esprits.
Camus, Homme rév.,1951, p. 223. B.− Au fig. [En parlant de tout autre phénomène hum. jugé comme un mal collectif] Ce qui touche rapidement et dans un même lieu un grand nombre de personnes en se propageant comme une épidémie. Synon. contagion, engouement, entraînement, mode. 1. [En parlant d'attitudes mentales] Qu'y a-t-il au fond de cette immense épidémie d'« infranchise »? (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 157).Et se sentir atteint par cette épidémie morale, qui propage dans les peuples la puissante folie des pensées collectives, le souffle de la guerre! (Rolland, J.-Chr.,Maison, 1909, p. 1066). 2. [En parlant de comportements collectifs] L'épidémie de destruction née du siège de Paris (Zola, Débâcle,1892, p. 625): 3. isabelle. − Ah? oui, parce que tu veux travailler, toi aussi, bien entendu!
philippe. − Il faudra bien!
isabelle. − Décidément, c'est une épidémie! ... enfin! ...
Bourdet, Sexe faible,1931, III, p. 466. Prononc. et Orth. : [epidemi]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. Ca 1256 ypidime (A. de Sienne, Regime du Corps, éd. L. Landouzy et R. Pépin, p. 60, 4); après 1349 epydimie, epydemie (G. de Machaut, Jugement du roi de Navarre, éd. Hœpffner, 346, 473). Empr. au lat. médiév. epidemia, epidimia (1250 ds Latham), gr. ε
̓
π
ι
δ
η
μ
ι
́
α « épidémie »; les formes en -di- en raison de la prononc. du η en gr. de basse époque. Fréq. abs. littér. : 324. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 274, b) 365; xxes. : a) 431, b) 689. Bbg. Gohin 1903, p. 364. − Rog. 1965, p. 110. |