| ÉDEN, subst. masc. A.− [Avec l'art. déf.] Paradis terrestre, dépeint dans la Bible comme la demeure du premier couple humain. La condamnation prononcée contre l'homme, dans l'éden (Huysmans, Oblat,t. 1, 1903, p. 256).Une misérable image de l'éden, avec le Chérubin à l'épée flamboyante, entre l'Euphrate et le Tigre (Barrès, Cahiers,t. 11, 1914-18, p. 34): 1. ... ces gigantesques tiges
Des arbres de l'éden sont les sacrés vestiges,
Du saint jardin ces lieux ont conservé le nom; ...
Lamartine, La Chute d'un ange,1838, p. 814. B.− [Avec l'art. (in) déf. ou au plur.] Au fig. Lieu de délices, orné surtout par la nature, où l'on vit dans l'innocence et la simplicité primitives; état de bonheur parfait. (Quasi-)synon. paradis; anton. enfer.Six cents francs de rente et ses leçons lui firent [au maître de musique] un Éden (Balzac, Fille Ève,1839, p. 73): 2. ... à Mexico les courses de taureaux les avaient écœurés; en revanche les villages indiens du Honduras et du Guatémala leur semblaient de poétiques édens.
Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 533. Rem. Sur ce subst., Hugo a créé les deux termes édénisation et édéniser. a) Édénisation, subst. fém. Action d'édéniser, de s'édéniser. Ils [les sauvages de la civilisation] voulaient la fin des oppressions (...), le pain pour tous, l'idée pour tous, l'édénisation du monde, le Progrès (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 41). b) Édéniser, verbe trans. Transformer en un lieu de bonheur et de vertu, semblable à l'Éden. Elle [Déruchette] ne fait pas autre chose que d'être là, cela suffit, elle édénise la maison, il lui sort par tous les pores un paradis (Hugo, Travaill. mer, 1866, p. 92). Prononc. et Orth. : [edεn]. La finale se prononce en [-εn] comme celle de : abdomen, cyclamen, dolmen, gluten, hymen, lichen, pollen, spécimen. Mais Besch. 1845 propose, en outre, la prononc. [edε
̃] que Mart. Comment prononce 1913, p. 138 signale ds Delille, fréquemment pour rimer avec jardin et que Nyrop Phonét. 1951, § 207 signale ds Hugo (Odes et ballades). Mart. Comment prononce 1913 note également que, ds les Juives de R. Garnier, éden rimait avec Adam. Enq. : /eden/. Le mot est admis ds Ac. 1762-1932. Peut s'écrire avec majuscule (cf. Balzac, loc. cit.). Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1235 topon. biblique (Bible fr. de l'Université de Paris, ms. Paris BN fr. 899, fo1 vo[Gen. 4, 16] : la contree d'Orient qui a nom edem); b) 1547 Eden « paradis terrestre » (Marg. de Navarre, Les Marguerites, Comed. du Desert II, 225-226 ds Hug. : Adam, Qui [...] Feut chassé d'Eden); 1553 jardin d'Eden « paradis terrestre » (Bible, impr. Jean Gerard, Gen 3 d ds FEW t. 20, p. 25a, s.v. ēden); 2. 1794 p. ext. « lieu de délices » (Chénier, Élégies, p. 150). Empr. à l'hébr. bibliqueēden, nom du lieu du paradis terrestre, presque toujours traduit à tort par τ
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́ « mollesse, douceur, délicatesse » dans la version des Septante et voluptas « volupté, délices » ou deliciae « délices » dans la Vulgate (principalement dans la loc. gan ēden « jardin d'Éden » [Gen. 2, 15; 3, 23, 24], Septante π
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ς, Vulgate paradisus voluptatis, d'où l'emploi du type paradis de délices dans les trad. de ces passages en a. fr. et m. fr., v. Trénel infra) en raison d'une confusion avec le nom commun hébr. adānim « délices », plur. de ēden (II Sam. 1, 24; Ps. 36, 9; Jér. 51, 34). La trad. correcte jardin d'Éden au lieu de jardin de délices ou paradis de délices pour désigner le paradis terrestre n'est apparue qu'au xvies. avec les traducteurs de la Réforme, qui remontaient jusqu'au texte hébr. (J. Trénel, L'A.T. et la lang. fr. du Moy. Âge, pp. 75-77; Bible Suppl., s.v. paradisus, t. 6, col. 1177-1181). Fréq. abs. littér. : 203. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 363, b) 516; xxes. : a) 310, b) 89. DÉR. Édénisme, subst. masc.État de bonheur qui, selon certains systèmes sociologiques, aurait constitué la première des huit périodes dont se compose l'histoire complète de l'humanité, et qui aurait précédé l'état sauvage proprement dit. L'Humanité, selon Fourier, se fourvoie depuis la période d'édénisme (Proudhon, Créat. ordre,1843, p. 435).− [edenism̥]. − 1reattest. 1843 id.; de éden, suff. -isme*. BBG. − Quem. 2es. t. 1 1970 (s.v. édénisme). |