| ÉCROU2, subst. masc. Acte, procès-verbal constatant qu'une personne a été remise à un directeur de prison et indiquant notamment le nom du détenu, la date et les motifs de son incarcération. Élisa, était enfin habillée en détenue, avec sur le bras le double numéro de son écrou et de son linge (Goncourt, Élisa,1877, p. 166):J'ai quelques amis, quelque influence; je puis obtenir main levée de l'arrêt.
− Il n'y a pas eu d'arrêt.
− De l'écrou, alors.
− En matière politique, il n'y a pas de registre d'écrou : parfois les gouvernements ont intérêt à faire disparaître un homme sans qu'il laisse trace de son passage; des notes d'écrou guideraient les recherches.
A. Dumas père, Le Comte de Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 143. ♦ Bureau d'écrou. Bureau où l'écrou est établi. Quatre gendarmes l'avaient enlevé et le portaient au bureau d'écrou (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 247). ♦ Levée d'écrou. Acte constatant la mise en liberté d'un détenu; élargissement, libération d'un prisonnier. Le condamné quitte le prétoire les poignets libres, tandis qu'un acquitté en sort encore enchaîné, pour accomplir les formalités de la levée d'écrou (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 489).Lever l'écrou. Malvina était là, elle venait de faire lever mon écrou; j'étais libre (Reybaud, J. Paturot,1842, p. 440). ♦ Ordre d'écrou. Ordre d'incarcération. Je trouvai sur ma table une enveloppe traversée d'un « confidentiel » au tampon gras. J'ouvris, je lus, je relus et restai écrasé : c'était un ordre d'écrou au nom de Conan (Vercel, Capit. Conan,1934, p. 217). ♦ Registre (livre) d'écrou. Registre où sont mentionnés les emprisonnements. Le pauvre diable me fait de la peine (...) vous me montrerez son livre d'écrou. − Certainement (...) mais je crois que vous trouverez contre lui des notes terribles (A. Dumas père, Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 153).Les juges s'étant assis autour d'une table dans le guichet de la prison, le registre d'écrou devant le président (Erckm.-Chatr., Hist. paysan,t. 2, 1870, p. 45). Rem. On rencontre ds la docum. a) Un emploi de écrou avec le sens de « pièce administrative ». C'étaient ses parchemins, à elle [Angélique], cette pièce administrative, cet écrou où il n'y avait qu'une date suivie d'un numéro (Zola, Rêve, 1888, p. 199). b) Un emploi méton. pour « cachot, prison ». Élisa avait entendu refermer sur elle la porte de l'écrou (Goncourt, Élisa, 1877, p. 172). Au fig. Toutes les médiocrités impuissantes qui, enfermées sous l'écrou de l'inédit, appellent la muse marâtre et l'art bourreau (Murger, Scènes vie boh., 1851, p. 9). Prononc. et Orth. : [ekʀu]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1168-75 [ou 1ertiers du xiiies., R. Bossuat ds Bibl. de l'École des Chartes, t. 111, pp. 297-300] escroe fém. « morceau, bande de parchemin; cédule » (M. de Sully, Sermons, éd. C. A. Robson, 55, 32); fin du xiies. escroue (Sermons S. Grégoire sur Ezéchiel, 1, 5 ds T.-L. [lat. : notariorum schedas]); 2. a) 1499 fém. « registre de prisonniers » (Edit de Louis XII ds F. Ragueau, E. de Laurière, Glossaire du droit français [éd. L. Favre, 1882]); b) 1611 escrou masc. (Cotgr.); 3. 1611 escroue « état de la dépense de bouche de la maison du roi » (ibid.), rare apr. le xviiies. De l'a. b. frq. *skrôda « bout, lambeau », cf. m. néerl. schrode, de même sens (Verdam). STAT. − Écrou1 et 2. Fréq. abs. littér. : 116. BBG. − Sain. Sources t. 2 1972 [1925], p. 290. |