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ÉCRIER (S'), verbe pronom.
A.− Pousser spontanément des cris sous l'effet d'une émotion, d'un état physique ou moral ressenti très intensément. Elle le mordit, [Vitalis] au point qu'il s'écria presque (Toulet, J. fille verte,1918, p. 12).Un moment après le baudet vient à braire. À cette voix venue des airs, les gens renversent la tête, l'aperçoivent, s'écrient. On accourt comme au feu (Pourrat, Gaspard,1930, p. 269):
1. .. regardez, Brulette, et ne vous écriez pas; voilà le mouchoir dont je lui [à Huriel] ai essuyé la figure et que je croyais mouillé de sueur. J'ai vu, en arrivant ici, qu'il était tout trempé de sang... Sand, Les Maîtres sonneurs,1853, p. 185.
[Le suj. désigne un animal] Pousser son cri. Quand le rossignol s'écrie au bois (Quinet, Ahasvérus,1833, 3ejournée, p. 216).
B.− P. ext.
1. Prononcer quelques paroles d'une voix forte en manifestant une émotion, un sentiment spontané, etc. Synon. s'exclamer.Hé! David, il était temps, s'écria Kobus tout joyeux, encore dix minutes, et je t'envoyais chercher par les gendarmes; nous t'attendons depuis une demi-heure (Erckm.-Chatr., Ami Fritz,1864, p. 27).Qui m'appelle, s'écria une voix sèche et furieuse, qui m'appelle? (Barrès, Colline insp.,1913, p. 257).
P. anal. [Ds le langage intérieur] Énoncer avec énergie. Toutes deux paraissaient s'écrier intérieurement : « qu'il est beau » (Flaub., Éduc. sent.,t. 2, 1869, p. 45).
2. Émettre, publiquement et sous une forme énergique un avis, une opinion :
2. Non, il n'y eut jamais autant de poètes et plus de poésie qu'il y en a en France et en Europe au moment où j'écris ces lignes, au moment où quelques esprits superficiels ou préoccupés s'écrient que la poésie a accompli ses destinées, et prophétisent la décadence de l'humanité. Lamartine, Des destinées de la poésie,1834, p. 414.
En partic., gén. en emploi abs. [Le suj. désigne en gén. l'opinion publique] Approuver ou désapprouver vivement une idée, une opinion, une œuvre. Synon. s'indigner, se récrier, se révolter.Le succès soudain qu'elles [les Méditations poétiques de Lamartine] obtinrent fut le plus éclatant du siècle depuis le génie du Christianisme; il n'y eut qu'une voix pour s'écrier et applaudir (Sainte-Beuve, Portr. contemp.,t. 1, 1846-69, p. 292).
C.− Au fig. Exprimer avec force, de manière écrite, un avis, une idée, une opinion. M. Béraud qui, dans « Gringoire », s'écrie : « à bas la guerre! » (Guéhenno, Journal« Révol. », 1938, p. 263):
3. Aussi bien un homme comme Gustave Hervé, d'autant plus chaud partisan d'un ordre moral et militaire qu'il s'en était davantage écarté dans le passé, mettait-il en lui sa confiance et s'écriait-il dans une brochure bien connue : « c'est Pétain qu'il nous faut. » Le Procès du Maréchal Pétain,t. 1, 1945, p. 25.
En partic. [En parlant d'un écrivain] Exprimer un idéal, un élan de l'âme. Il faut de toute urgence qu'il s'écrie [Francis Carco] en vers spontanés fonciers, émus à vous ouvrir le cœur (Colette, Pays. et portr.,1954, p. 223).
P. métaph., littér. et poét. L'Océan (...) quand mon écume naissait avec le monde, (...) alors je croyais. (...) Je marchais devant mon maître, et chacun de mes flots s'écriait : seigneur! seigneur! (Quinet, Ahasvérus,1833, 4ejournée, p. 298).
Rem. S'écrier est synon. de crier.
Prononc. et Orth. : [(s)ekʀije], (je m')écrie [ekʀi]. Ds Ac. 1694-1932. Homon. s'écrit, du verbe écrire. Étymol. et Hist. 2emoitié Xes. escrided Jesus granz criz (Passion de Clermont, éd. d'A. S. Avalle, 314); ca 1100 a icest mot sunt Franceis escriet (Roland, éd. J. Bédier, 1180); ca 1100 réfl. s'escriet (ibid., 891). Dér. de crier*; préf. é-*. Fréq. abs. littér. : 12 343. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 24 267, b) 28 632; xxes. : a) 13 096, b) 8 563.