| ÉVOCATION, subst. fém. A.− [Gén. avec un compl. prép. introd. par de désignant une pers. ou une chose absente] 1. Vx. Action de faire apparaître (quelque chose) par la magie. L'évocation des âmes, l'évocation des esprits (Ac.1835, 1878).C'étaient des bruits sans nom inconnus à l'oreille, Comme la voix d'un mort qu'en sa tombe réveille Une évocation (Gautier, Albertus,1833, p. 125).Marcel et Octave demeurèrent d'abord muets (...) devant cette sorte d'évocation d'un génie malfaisant (Verne, 500 millions,1879, p. 241). − P. méton. Ce qui apparaît : 1. Il semblait que ce fût une évocation qui vous parlait à travers la cloison de la tombe. Si l'on était dans de certaines conditions voulues, bien rares, l'étroite lame d'un des volets s'ouvrait en face de vous, et l'évocation devenait une apparition.
Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 574. − P. ext. Action d'interpeller (quelqu'un) dans un discours, une prière. Vainement elle prenait demeure dans les plaies saignantes de Jésus-Christ, se réfugiait dans sa passion; vainement elle redoublait d'appels, d'évocations et de supplications (Goncourt, MmeGervaisais,1869, p. 268). 2. [Avec un compl. prép. introd. par de désignant une réalité se rapportant au passé] Action de rappeler (quelque chose) à la mémoire par ses propos; p. méton. les propos eux-mêmes. L'évocation des jours anciens. L'évocation d'un temps, d'une époque disparue (Ac.1932).(Quasi-) synon. rappel.Ce mot, « crime » dépassait la mesure de ce que pouvait accepter Marius, déjà très ému par la brusque évocation de Waterloo (Hugo, Misér.,t. 1 1862, p. 801).Les meneurs politiques ont la manie de l'évocation des souvenirs (Vigny, Mém. inéd.,1863, p. 87). 3. [Le déterminé désigne une réalité ne se rapportant pas au passé] Fait de rendre (quelque chose) présent à l'esprit (de quelqu'un) par ses propos. L'évocation d'une idée, d'une image. Synon. mention.On aimait mieux entendre parler d'une épouse dont l'évocation avait un fumet d'intimité (Aymé, Uranus,1948, p. 151). B.− DR. Fait de porter une cause d'une juridiction à une juridiction supérieure. La Cour de Cassation est chargée de statuer sur les demandes en évocation (Ac.) : 2. ... le conseil intervient sans cesse par voie d'« évocation », enlève d'entre les mains des juges ordinaires l'affaire où l'administration est intéressée, et l'attire à lui.
Tocqueville, Ancien Rég. et Révol.,1856, p. 123. − Spécialement 1. DR. CRIMINEL a) Obligation imposée à la Cour d'appel de statuer sur le fond, lorsqu'elle annule (pour vice de forme, etc.) un jugement correctionnel même si, lorsque l'annulation est prononcée, l'affaire n'est pas en état de recevoir une solution définitive (d'apr. Cap. 1936). b) Faculté accordée à la Chambre des mises en accusation d'étendre d'office l'information à des faits et personnes qui n'étaient pas englobés dans les poursuites (d'apr. Cap. 1936). 2. Vx. ANC. DR. Droit d'évocation. Droit dévolu au roi, qui lui permettait d'appeler devant lui tout litige. Pour qui sont tous ces privilèges en matière judiciaire, les attributions, les évocations, les lettres de surséance, etc. (Sieyès, Tiers état,1789, p. 57).Autrefois le pouvoir royal avait la ressource des évocations... Notre manie d'égalité tuera ce temps-ci... (Balzac, Splend. et mis.,1846, p. 461). Prononc. et Orth. : [evɔkasjɔ
̃]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Début xives. [date du ms.] de le souveraine evocastion [superne voca(s)tionis] (Traduction d'une charte de Baudoin ds Livre Roisin, éd. Brun-Lavainne, p. 220); 1348 sur tierce evocacion (ds Varin, Arch. admin. de Reims, II, 1182 ds DG); 2. 1680 « action d'évoquer les esprits » (Rich.); 3. 1828 « remise en mémoire, allusion » (Sainte-Beuve, Tabl. poés. fr., p. 139). Empr. au lat. class. evocatio « action d'appeler, de convoquer, de citer » spéc. « évocation des ombres, des enfers »; le sens 3 d'apr. évoquer*. Fréq. abs. littér. : 407. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 84, b) 341; xxes. : a) 855, b) 961. |