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ÉTOUFFER, verbe.
I.− Emploi trans.
A.−
1. Faire mourir en empêchant la respiration, soit par une forte compression du cou, soit en appliquant quelque chose sur le nez et la bouche.
a) [Le suj. désigne une pers.] Un jeune naturaliste, qui en étouffa un [un oiseau] pour l'empailler, m'a dit qu'il resta malade de cette lutte acharnée, et plein de remords; il lui semblait qu'il eût fait un assassinat (Michelet, Oiseau,1856, p. 191).Il [l'Espagnol] décida de le tuer [le vieux seigneur] quand il dormirait après son dîner et de l'étouffer avec son oreiller (Barrès, Cahiers, t. 4, 1905, p. 84):
1. Fatima eut un horrible battement de cœur. Elle croyait maintenant à la trahison de don José comme à la lumière du soleil, et elle fut tentée de passer ses bras autour du cou de l'infâme pour l'étouffer. Ponson du Terr., Rocambole,t. 4, 1859, p. 190.
Expr. Que la peste, le diable l'étouffe. Juron invoquant la malédiction. Que le diable étouffe le procureur de la nation d'Allemagne! (Hugo, N.-D. Paris,1832, p. 25).
Spéc., SÉRICICULTURE. Tuer les vers à soie en les asphyxiant dans un four. Et que suis-je, moi, que le paysan qui étouffe les vers dans son four, avant qu'ils ne percent et ne gâtent le cocon? (Claudel, Repos 7ejour,1901, III, p. 853).
b) [Le suj. désigne une chose concr. ou abstr.] Elle [maman] avait peine à respirer et demandait sans cesse qu'on la relevât sur ses oreillers; l'enflure semblait l'étouffer (Michelet, Mémorial,1822, p. 216):
2. Zampa monta sur l'échafaud d'un pas assez ferme; mais lorsqu'il eut aperçu le collier de fer destiné à l'étouffer et la chaise sur laquelle on l'allait faire asseoir, la peur de la mort le prit et il se mit à trembler de tous ses membres. Ponson du Terr., Rocambole,t. 4, 1859p. 192.
2. Rendre la respiration difficile, gêner quelqu'un dans ses fonctions respiratoires.
a) [Le suj. désigne une pers.] Ces gens à sentiments qui vous étouffent pour vous embrasser (Balzac, Corresp.,1821, p. 102).Il [Lafcadio] (...) tendit l'argent à la pauvre mère qui maintenant étouffait ses fils de baisers (Gide, Caves,1914, p. 725):
3. Le premier gouverneur dont j'aie conservé un souvenir un peu distinct fut un Allemand nommé Stroelin, qui me rouait de coups, puis m'étouffait de caresses pour que je ne me plaignisse pas à mon père. Constant,Cahier rouge, 1830, p. 1.
b) [Le suj. désigne une chose concr.] Villefort déboutonna violemment sa redingote qui l'étouffait, passa une main livide sur son front et rentra dans son cabinet (Dumas père, Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 653).« Pour recommencer quand nous serons plus forts? », ne pouvait s'empêcher de dire Alexis, que les pommes de terre étouffaient, surtout qu'il n'y avait pas de vin (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 219):
4. Elle [Hélène de Rieu] luttait âprement contre l'âge qui l'engraissait et la ridait; frottée d'onguents et d'huiles de toilette, sanglée dans des corsets qui l'étouffaient, elle s'imaginait rajeunir. Zola, M. Férat,1868, p. 116.
c) [Le suj. désigne une chose abstr.] Ma foi je n'en puis plus; la chaleur m'étouffe (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 184).On apporta le pain du goûter; je ne pus manger; une invincible émotion m'étouffait, ma bouche était desséchée, mes mains tremblaient (Du Camp, Mém. suic.,1853, p. 92).J'ai peine à écrire en cet instant, et le souvenir de ce triple passé sans lendemain m'oppresse et m'étouffe! (Sand, Hist. vie,t. 4, 1855, p. 380):
5. Toute la journée, Dantès alla et vint dans son cachot, le cœur bondissant de joie. De temps en temps cette joie l'étouffait. Dumas père, Monte-Cristo,t. 2, 1846p. 182.
Fam. Ce n'est pas la religion / l'admiration qui l'étouffe. La religion/l'admiration ne risque pas de le gêner (parce qu'il n'en a pas, ne s'en soucie pas). L'amour filial ne l'étouffait pas (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 112):
6. Un matin, Monsieur entra dans le cabinet de toilette au moment où Madame essayait devant moi un corset de satin mauve avec des fleurettes jaunes et des lacets de soie jaune. Le goût, ce n'est pas ce qui étouffait Madame. Mirbeau, Journal femme,1900, p. 349.
3. P. anal. [Le suj. et le compl. d'obj. désignent tous deux une plante] Gêner la croissance, le développement d'une plante en la privant de l'oxygène qui lui est nécessaire. Le chêne-liège est un gros vilain arbre en été. Son feuillage est rude et terne; son ombre épaisse étouffe toute végétation autour de lui (Sand, Hist. vie,t. 4, 1855p. 35).Je m'écarte du sentier pour observer de près le drame végétal d'un arbre énorme que s'apprête à étouffer lentement un ficus (Gide, Retour Tchad,1928, p. 998).Cf. cornichon ex. 1.
B.− P. ext. et au fig.
1. Éteindre un feu, un incendie par privation d'air. Il [Rougon] ne quitta pas la cheminée tout de suite. Il demeura par terre, tenant la pelle, sous laquelle il étouffait la flamme, de peur d'incendie (Zola, E. Rougon,1876, p. 47):
7. Je cherchai, en tâtonnant, cette feuille inutile, je la trouvai, je la tordis, et, la présentant à la flamme mourante, je l'allumai. Mais, sous mes doigts, comme par magie, à mesure que le feu montait, je vis des caractères jaunâtres sortir du papier blanc et apparaître sur la feuille; alors la terreur me prit : je serrai dans mes mains le papier, j'étouffai le feu... Dumas père, Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 229.
2. [Le compl. d'obj. désigne un bruit, un son]
a) Empêcher un son de se propager, de se faire entendre. Étouffer un bâillement, une plainte, un sanglot, un soupir :
8. Satou, fit-elle [Tahoser] en frappant l'une contre l'autre ses mains délicates pour imposer silence à la musicienne, qui étouffa aussitôt avec sa paume les vibrations de la harpe, ton chant m'énerve, m'alanguit... Gautier, Rom. momie,1858, p. 200.
P. métaph. Étouffer la voix de l'innocence et de la vérité (Robesp., Discours,Sur la guerre, t. 8, 1792, p. 197).On voulait étouffer le bruit de ma détention, et quelques heures suffirent pour élever un gibet et trouver un bourreau (Janin, Âne mort,1829, p. 102).
b) [Le suj. désigne un bruit, un son] Couvrir, dominer un autre son. La guerre était debout dans le lycée, le tambour étouffait à mes oreilles la voix des maîtres (Vigny, Serv. et grand. milit.,1835, p. 13).Tout à coup, une mélodie énergique et suave, capricieuse et une à la fois, enveloppe, étouffe, éteint, dissimule le tapage criard (Baudel., Paradis artif.,1860, p. 332).
c) [Le suj. désigne une chose] Assourdir un son. Un épais tapis aux tons riches et sombres étouffait le bruit de mes pas (Gide, Si le grain,1924, p. 353):
9. Dans le monde hors de la maison, la neige efface les pas, brouille les chemins, étouffe les bruits, masque les couleurs. Bachelard, Poét. espace,1957, p. 53.
3.
a) [Le compl. d'obj. désigne une chose abstr.] Supprimer quelque chose, l'empêcher de se développer, de se manifester. Étouffer un sentiment, la vérité; étouffer une conspiration, l'insurrection, la révolution. C'est le propre de l'éducation de développer les facultés, le propre de l'esclavage c'est de les étouffer (Laclos, Éduc. femmes,1803, p. 429).Le despotisme étouffe la liberté de la presse (Constant, Esprit conquête,1813, p. 196):
10. ... il a insulté son supérieur. Celui-ci, généreusement, a cherché à étouffer l'affaire. Il a nié ce que chacun savait, mais, comme le scandale était immense, M. Tonski a été envoyé, simple soldat, à la frontière persane. Gobineau, Pléiades,1874, p. 99.
SYNT. Étouffer l'amour, une ardeur, la compassion, un désir, une émulation, une passion, une pensée, un regret, un remords, un ressentiment, la sensibilité.
Étouffer qqc. dans l'œuf. L'arrêter avant tout développement :
11. ... les plus nobles familles ne pensent point déchoir en déléguant auprès d'eux [les cadres militaires] leurs jeunes hommes dans des fonctions qui touchent de fort près aux pratiques de l'espionnage, et dont l'effet a été longtemps d'étouffer dans l'œuf toute tentative de conspiration armée. Gracq, Syrtes,1951, p. 9.
b) [Le compl. d'obj. désigne une pers.]
Empêcher de se développer, de s'épanouir. Enfin parut le notaire, un panama sur la tête, un lorgnon dans l'œil, car l'officier ministériel n'étouffait pas en lui l'homme du monde (Flaub., Bouvard,t. 1, 1880, p. 48):
12. Les révolutionnaires de son temps étaient devenus des bourgeois; les surhommes, des hommes à la mode. Les indépendants d'autrefois essayaient d'étouffer les indépendants d'aujourd'hui. Rolland, J.-Chr.,Nouv. journée, 1912, p. 1470.
Donner une impression de gêne, oppresser. Mon oncle comprit sans doute les pensées qui m'étouffaient (Zola, Contes Ninon,1864, p. 243):
13. Cette fois, Autheman avait pris la résolution d'en finir, de dire ce qui l'étouffait depuis trois ans; et il attendait, allant et venant sur les dalles... A. Daudet, Évangéliste,1883, p. 114.
Emploi abs. Ce sentiment-là étouffe quand on ne l'exprime pas (Staël, Lettres L. de Narbonne,1792, p. 18).Tant mieux pour toi que l'officiel soit enfin parti. Il y a des gens dont la présence étouffe. Je suis aise pour toi de ce débarras (Flaub., Corresp.,1847, p. 41).Cf. asphyxier ex. 4.
C.− Emplois spéc.
1. ART CULIN. Synon. rare de étuver.Étouffer, étuver : c'est faire cuire dans un vaisseau bien clos, pour empêcher l'évaporation (Audot, Cuisin. campagne et ville,1896, p. 113).
2. MAR. Étouffer une voile. La serrer avec ses bras, ses mains, contre le mât afin de l'empêcher de prendre le vent. En halant sur le halebas, le foc s'abat sur son bout dehors; on étouffe la toile et il n'y a plus qu'à la serrer (Galopin, Lang. mar.,1925, p. 73).
3. Arg. et lang. fam.
a) Cacher, dissimuler. Moi qui ai pourtant quelque mille francs, que j'étouffe (Mallarmé, Corresp.,1862, p. 31).Où qu'ils m'ont étouffé ma voiture? (France, Crainquebille,1904, p. 21).
En partic. [Au jeu] Dissimuler son gain. Croupier, étouffe des deux mains. Étouffe d'affût pour tézigue (Larch.Nouv. Suppl.1889, p. 97).
P. ext. Subtiliser, escamoter. Déjà quatre hommes et un boucher se disputaient certaines tripes à venir. − C'est toi eh vendu! qui l'as étouffé hier l'aloyau (Céline, Voyage,1932, p. 28).En faisant tout seul, au garage, son plein d'essence, il étouffait régulièrement un bidon (Simonin, Bazin, Voilà taxi!1935, p. 173).
b) Boire d'un trait. Synon. asphyxier (cf. ce mot I) :
14. Il [Auguste] devait de l'argent à ce copain. Celui-ci, le matin, tout en étouffant son pierrot de vin blanc, avait tiré de sa poche huit ou neuf bouchons et il s'était dit : nom d'un bonhomme, on a rien bidonné, depuis hier au soir! Huysmans, Sœurs Vatard,1879, p. 174.
Étouffer une bouteille. ,,La boire, la faire disparaître jusqu'à la dernière goutte, − dans l'argot du peuple`` (Delvau 1866, p. 138).
II.− Emploi pronom.
A.− Emploi pronom. réfl.
1. [Le suj. désigne une pers.]
a) Mourir par asphyxie. Au cours de pertes de connaissance brutales, le malade (...) peut s'étouffer en dormant et en mangeant (QuilletMéd.1965, p. 334):
15. J'ai connu un habile médecin qui était tellement de mon avis qu'il faillit s'étouffer en expérimentant sur lui-même combien de temps on pouvait rester dans un four... Vigny, Journ. poète,1835, p. 1032.
P. métaph. On peut craindre qu'avec des ressources infinies de courage (...) la France ne s'étouffe comme un feu mal disposé (Renan, Réf. intellect.,1871, p. 49):
16. L'amour, peu à peu, s'éteignit par l'absence, le regret s'étouffa sous l'habitude; et cette lueur d'incendie qui empourprait son ciel pâle se couvrit de plus d'ombre et s'effaça par degrés. Flaubert, MmeBovary,t. 1, 1857, p. 142.
b) Perdre momentanément la respiration. S'étouffer de chaleur, de poussière. Tous deux [Gustave et Flory] s'étouffèrent de rire (Zola, Argent,1891, p. 88).
2. [Le suj. désigne une chose concr.] S'arrêter par manque d'air. Le moteur partait très bien, mais cent mètres plus loin, il ne donnait plus sa force, il s'étouffait, quoi! Le silencieux était bouché (Bernanos, Joie,1929, p. 584).
3. Au fig. [Le suj. désigne un bruit, un son] Cesser d'être perceptible, se perdre. Pendant que les clameurs retombées s'étouffaient lourdement sous l'indestructible silence, monta un cri de chien qui hurle à la mort (Malraux, Cond. hum.,1933, p. 244):
17. ... dans le brouillard épais, le clairon Gaude sonna la diane, de tout son souffle. Mais l'air était si noyé d'eau, que la sonnerie joyeuse s'étouffait. Zola, Débâcle,1892, p. 227.
B.− Emploi pronom. réciproque. [Le suj. désigne une pers.] S'empêcher mutuellement de respirer. Tels se pressent les deux guerriers, tels ils s'étouffent dans leurs bras serrés par les nœuds de la colère (Chateaubr., Natchez,1826, p. 163).
Au fig. [Le suj. désigne une chose abstr.] S'empêcher mutuellement d'exister :
18. J'aurais voulu pouvoir mêler les jouissances épurées de l'esprit aux jouissances fiévreuses du corps; mais d'où vient qu'elles semblent s'exclure ou qu'elles s'étouffent mutuellement? Sand, Lélia,1833, p. 171.
P. ext. [Le suj. désigne une pers.] Se presser, se serrer les uns contre les autres :
19. Il [Gamelin] regarde la foule quitter à grands pas la place de Grève. Et, quand il tourne la tête, ses yeux voient que la salle, où les conseillers s'étouffaient tout à l'heure, est presque vide. France, Dieux ont soif,1912, p. 295.
III.− Emploi intrans.
A.−
1. [Le suj. désigne une pers., un animal ou une plante] Mourir par manque d'oxygène :
20. ... Pascal eut une nouvelle crise d'angine de poitrine. Elle dura près de cinq minutes, il crut qu'il étoufferait, sans avoir eu la force d'appeler sa servante. Zola, D. Pascal,1893, p. 284.
2. [Le suj. désigne une pers.] Respirer avec difficulté, suffoquer. Dès que les larmes me viennent aux yeux, les sanglots me prennent à la gorge, j'étouffe, ma respiration s'exhale en cris ou en gémissements (Sand, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 70):
21. Folcoche se tord toujours, inconsciente, les deux mains sur le foie. Sa respiration siffle. Dois-je le dire, mais nous respirons mieux depuis qu'elle étouffe. H. Bazin, Vipère,1948, p. 84.
Spéc. Avoir trop chaud. Est-ce un grand bonheur d'habiter une chambre, Où l'on étouffe en juin, où l'on gèle en décembre? (Ponsard, Honn. et argent,1853, IV, 5, p. 99):
22. Dans cet hémisphère opposé, bien qu'au mois de janvier, nous nous trouvions dans cet instant sous les ardeurs brûlantes de l'été; nous étouffions. Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 2, 1823, p. 498.
Étouffer de qqc.Être oppressé par quelque chose, perdre momentanément la respiration. Étouffer de colère, de fumée, de rage, de rire. La cour était pleine; à peine un espace restait-il au milieu pour la danse. On étouffait de poussière et de chaleur (Gide, Feuilles,1896, p. 84).
B.− P. métaph. ou au fig.
1. [Le suj. désigne une pers.] Éprouver une impression d'ennui, de malaise. Dans les écrits de Marx, j'étouffe. Il y manque quelque chose, je ne sais quel ozone, indispensable à la respiration de mon esprit (Gide, Feuillets,1937, p. 1288):
23. Il y a des moments dans la vie où l'on éprouve l'irrésistible besoin de changer d'air; on ne peut y tenir, on étouffe. J'étouffais à Marseille. Je ne fais pas allusion à la température. Ce serait une mauvaise plaisanterie au mois de mars et tu te souviens de m'avoir vu y demeurer en plein été (...). Non, je suis parti parce que, moralement, j'en avais par-dessus la tête. Miomandre, Écrit sur eau,1908, p. 235.
2. [Le suj. désigne une chose concr., en partic. une ville] Se trouver dans un espace limité, trop restreint. Une petite ville [Carcassonne] achève de mourir, après avoir, pendant des siècles, étouffé en sécurité (Hourticq, Hist. art,Fr., 1914, p. 94).
Rem. On rencontre ds la docum. étouffe-chrétien, subst. masc. Mets d'une consistance épaisse. Tu pourrais encore, Tomazover, nous fabriquer de ces « étouffe-chrétiens » dont à Kobjercyn nous marquions les jours fastes (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 159).
Prononc. et Orth. : [etufe], (j')étouffe [etuf]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1230 estofer « asphyxier (un animé) » (Gaidon, 202 ds T.-L.); 2. 1285 « empêcher (des plantes) de se développer » (Parabole du Semeur, ms. Bibl. Metz d'apr. FEW t. 12, p. 318a); 3. 1564 au fig. « empêcher (un sentiment, une opinion, etc.) de s'exprimer » (Indice de la Bible, Marc, 4b 19 : estouffent la parole); av. 1664 étouffer les semences d'une guerre civile (N. Perrot d'Ablancourt ds Trév. 1704); 4. 1575-1615 estouffer « rendre (un son) moins perceptible » (D'Aubigné, Tragiques, éd. Ch. Read, I, p. 40); 5. 1767 cuis. (Dict. port. de cuis., XI ds Quem. DDL t. 2). Altération de l'a. fr. estoper « obstruer » (étouper*) sous l'infl. de l'a. fr. estofer « rembourrer » (étoffer*). Fréq. abs. littér. : 3 185. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 3 971, b) 5 167; xxes. : a) 6 000, b) 3 777.
DÉR. 1.
Étouffage, subst. masc.Action d'étouffer quelqu'un. V. aceinturage ex.Spéc. a) Sériciculture. ,,Opération par laquelle on étouffe les chrysalides dans leur cocon pour les empêcher de le percer au moment de l'éclosion`` (Fén. 1970). Les cocons destinés à fournir la soie. Ces derniers sont soumis à l'étouffage; on les maintient à une température de 70opendant un quart d'heure. Cette opération se fait généralement dans une étuve. La chrysalide est tuée avant la formation du papillon (Blanquet, Technol. mét. habill.,1948, p. 24).La plupart des dict. gén. enregistrent le sens en apic. Action d'étouffer les abeilles. b) Arg. et lang. fam. [Correspond à étouffer I C 3 a] Au jeu, ,,soustraction par un grec de la mise d'un ponte sur le tapis`` (France, 1907, p. 84). Dans les cercles, nombre de croupiers se livrent à l'étouffage (France, 1907,p. 84). [etufa:ʒ]. 1resattest. 1845 sériciculture (Besch.) 1881 arg. (Rigaud, Dict. arg mod., p. 157); du rad. de étouffer, suff. -age*. Fréq. abs. littér. : 1.
2.
Étouffeur, euse, subst.Celui, celle qui provoque, qui produit l'étouffement. P. métaph. Le vaste étouffeur des plaintes et des râles, L'océan, échouait dans les nuages pâles D'affreux sacs noirs faisant des gestes effrayants (Hugo, Légende,t. 2, 1859, p. 460).Ce magistrat qui avait déjà jugé de façon fort sévère la conduite des étouffeurs de vérité dans l'affaire Zola (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 321).La plupart des dict. gén. enregistrent le sens en zool.,,Nom vulgaire des grands serpents, du boa particulièrement`` (Littré). [etufœ:ʀ], fém. [-ø:z]. 1resattest. 1722 adj. région. « qui étouffe [en parlant du temps] » (I. Girard, Journ. inédits de J. Desnoyers et d'I. Girard, 90 ds Quem. DDL t. 15); 1775 subst. « boa constrictor » (Valm., s.v. giboya) − 1901, Nouv. Lar. ill. 1801, 23 sept. id. « personne qui étouffe » (Mercure de France ds Brunot t. 10, p. 762, note 1 : l'Étouffeur Laharpe); du rad. de étouffer, suff. -eur2*. Fréq. abs. littér. : 3.
BBG. − Arveiller (R.). R. Ling. rom. 1965, t. 29, p. 377.