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ÉPOUVANTAIL, subst. masc.
A.− Objet ayant le plus souvent la forme grossière d'un mannequin vêtu d'oripeaux, placé en évidence dans les champs ou les jardins pour détourner les oiseaux et les empêcher de s'attaquer aux semences et cultures. Épouvantail à oiseaux, à moineaux; mettre des épouvantails sur les cerisiers. Il faut mettre là un épouvantail (Ac.1878, 1932).Femmes et enfants sont enrôlés pour nettoyer les champs et pour aider à la récolte, tandis que les plus petits jouent le rôle d'épouvantails (Lowie, Anthropol. cult.,1936, p. 45).Une jaquette d'alpaga trop large, pendue à ses épaules maigres comme des hardes à un épouvantail (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 341).
P. anal. et fam. ,,C'est un épouvantail à moineaux, ou simplement, c'est un épouvantail. Se dit d'une personne habillée ridiculement`` (Ac. 1932). Il [Gourgaud] ne regrettait pourtant rien, sauf de ne pas avoir pu rejoindre cet épouvantail de Bourin (Magnane, Bête à concours,1941, p. 412).
[Dans des apostrophes plus ou moins injurieuses] Tiens ton cheval, crie la laveuse, tiens-le, fils de ta mère. − C'est ton savon, épouvantail de figuier (Giono, Gd troupeau,1931, p. 146).
B.− Au fig. [En parlant de pers. ou de choses, d'idées d'institutions, etc.] Ce (celui) qui inspire de vaines ou, d'excessives terreurs, ce qui fait horreur ou inquiète fortement, parfois sans raison. (Quasi-)synon. croquemitaine, hantise.Dans ce lieu morne [la Bastille] La minute est bourreau, l'heure est épouvantail (Hugo, Fin Satan,1885, p. 933).Il y a une centaine d'années, l'acte chirurgical était encore un épouvantail, un suprême recours (Valéry, Variété V,1944, p. 44):
1. Pour le moment, elle se trouve en train d'accoucher. La catastrophe, la vérole et l'enfant, les deux épouvantails de la profession. On échappe rarement à l'un et à l'autre péril; souvent on les additionne. Arnoux, Crimes innoc.,1952, p. 185.
Ce qui est mis en avant, ce qui est utilisé pour effrayer. (Quasi-)synon. fantôme, spectre.Chut!... il n'y a pas de colonel... Mais il me fallait un épouvantail pour maintenir mon mari dans le devoir (Labiche, J'invite le colonel,1860, III, 6, p. 346).Les fameux condamnés à mort sont des épouvantails et des marionnettes inventés par les pires politicailleurs (Duhamel, Maîtres,1937, p. 154):
2. Mais des « types » encore plus grossièrement bâtis, les schémas les plus simples, le héros positif et irréprochable et le traître, feront même mieux l'affaire, étant pour ces masses, dont ces romanciers sous-estiment la sensibilité et la lucidité, des miroirs à alouettes magnifiques ou de très efficaces épouvantails. Sarraute, Ère soupçon,1956, p. 152.
Prononc. et Orth. : [epuvɑ ̃taj]. Ds Ac. 1694-1932. Au plur. des épouvantails. Étymol. et Hist. 1180-90 espoëntaus (A. de Paris, Alexandre, éd. ds Elliott Monographs, 555); 1556 fig. « ce qui épouvante, terrifie » (Ronsard, Hymne de Pollux et de Castor, 306 ds Œuvres complètes, éd. P. Laumonier, t. 8, p. 306). Dér. du rad. de épouvanter*; suff. -ail*. Fréq. abs. littér. : 134. Bbg. Steiner (A.). An unnoticed evidence of French argot in the early thirteenth century. Mod. Lang. Notes 1943, t. 58, pp. 121-125.