| ÉMANATION, subst. fém. Action d'émaner; résultat de cette action. A.− Dans le domaine phys.Émission de particules impondérables qui se dégagent d'un corps, sans que celui-ci diminue sensiblement de substance. Émanation de particules, d'acide carbonique. Jamais un Alibert n'avait tenu compte des émanations du fumier (Bosco, Mas Théot.,1945, p. 43). SYNT. Émanation gazeuse, ammoniacale; émanation de la chaleur, de la lumière; théorie de l'émanation des particules lumineuses; émanation dangereuse, mortelle; émanation fétide, pestilentielle, putride; émanation subtile, faible, volatile; émanation d'un poêle; vicié, suffoqué par des émanations; respirer, sentir, ressentir une émanation; s'apercevoir d'une émanation. − Spécialement ♦ CHIM. Gaz inerte radioactif produit lors de la désintégration du radium, du thorium ou de l'actinium. Émanation du radium; émanation radioactive. Le thorium et ses composés émettent non seulement des rayons mais encore une émanation constituée par des particules extrêmement ténues (MmeP. Curie, Radioactiv.,t. 1, 1910, p. 133). ♦ GÉOL. Émanations volcaniques. Synon. fumerolles. − P. méton. Odeur d'une émanation (agréable ou désagréable). Des orangers en fleurs répandaient leurs suaves émanations (Sand, Indiana,1832, p. 73).Là, on respire les émanations d'une tannerie (Mérimée, Carmen,1847, p. 18): 1. De la montagne, le vent apporte des émanations de terre mouillée, des parfums exotiques de plantes, d'indéfinissables senteurs de « pays chauds ».
Loti, Journal intime,1882-85, p. 143. − P. métaph. : 2. ... elle [cette créature] a plu à mon cœur par un agrément mystérieux de son contact et de sa présence, par une secrète et irrésistible émanation de sa personne qui m'ont conquis comme engourdissent certaines fleurs.
Maupassant, Notre cœur,1890, p. 467. B.− Dans le domaine spirituel, moral. 1. Ce qui tire son origine de (quelqu'un, quelque chose). Synon. manifestation, expression.La royauté de droit divin est une émanation du catholicisme, formée par la distinction du spirituel et du temporel (Proudhon, Confess. révol.,1849, p. 72).Cela sort de moi j'allais dire comme une émanation mais c'est un mot bien prétentieux (Montherl., Pitié femmes,1936, p. 1105): 3. On n'interpose pas entre le chef et le peuple un organisme de conciliation ou de médiation, mais l'appareil justement c'est-à-dire le parti qui est l'émanation du chef et l'outil de sa volonté d'oppression.
Camus, L'Homme révolté,1951, p. 227. 2. Spécialement a) MÉTAPHYS. Doctrine, théorie de l'émanation. ,,Action par laquelle Dieu produirait l'univers des esprits et des corps, comme par un écoulement nécessaire de sa nature`` (Foulq.-St-Jean 1962). Émanation divine. Ils [les philosophes alexandrins] pensaient : que le monde sort d'abord de Dieu et en descend par l'émanation, et qu'ensuite il y retourne par l'amour (J. Simon, Devoir,1854, p. 210).Le brahmanisme, devenu une théorie d'émanation sans fin (Renan, Église chrét.,1879, p. 149): 4. Ce fut la grande tristesse de Dieu de voir que ses anges, des émanations de lui-même, désertaient son paradis pour aimer les filles des hommes.
Barrès, Un Homme libre,1889, p. 232. b) OCCULT. [Sténio :] Viola! s'il y a quelque émanation de vous dans ces fleurs (...) ne pouvez-vous pénétrer jusqu'au cœur de Lélia? (Sand, Lélia,1833, p. 94). − En partic. ,,Fluide immatériel, capable, en certains cas, de se transformer en matière, et émis par le corps des médiums`` (Lar. Lang. fr.). Rem. La docum. atteste émanateur, trice, adj. Qui a un pouvoir d'émanation. La lumière omniprésente des métaphores émanatrices (Jankél., Je-ne-sais-quoi, 1957, p. 87). Emploi subst. ,,Appareil facilitant la volatilisation de certains produits`` (Lar. Lang. fr.). Synon. vaporisateur. Prononc. et Orth. : [emanasjɔ
̃]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1579 théol. (Feu-Ardent, opuscules de S. Ephrem, 52 vods R. Hist. litt. Fr., t. 11, p. 499); 1611 « tout ce qui sort, procède de quelque chose ou quelqu'un » (Cotgr.); 2. 1755 phys. « émission ou exhalaison de particules impalpables qui s'échappent d'un corps » (Encyclop. t. 5); 1900 chim. « gaz radioactif » (M. Ruthesford d'apr. MmeP. Curie, Radioactiv., t. 1, 1910, p. 201). Empr. au lat. chrét.emanatio « action de procéder de quelqu'un, quelque chose (spéc. de Dieu) ». Fréq. abs. littér. : 447. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 877, b) 666; xxes. : a) 409, b) 548. |