| ÉCRASEMENT, subst. masc. A.− Domaine concr. 1. Action d'écraser, de s'écraser. a) Usuel. On entendait un bruit d'écrasement, celui que ferait une locomotive en broyant une rangée de barriques (Romains, Hommes bonne vol.,1932, p. 260).La façon dont il appuyait sur certaines voyelles (...) rappelait l'écrasement de l'archet sur les cordes basses d'un violoncelle (Martin du G., Thib.,Épil., 1940, p. 763). Rem. On rencontre ds la docum. a) Écrasade, subst. fém. Synon. de écrasement. Le païen le saisit alors par la ceinture, le souleva au-dessus de sa tête et le lança à terre, à l'écrasade [= pour provoquer son écrasement] − coup défendu! (La Varende, Esculape, 1949, p. 36). N'est attesté par aucun dict. gén. b) La forme région. écrase, subst. fém. Grande quantité. « Il y en a une écrase » (...) Ce mot équivaut à cette locution populaire, employée aujourd'hui, « à tout casser, à bois rompre » (Coulabin, Dict. loc. pop. Rennes, 1891). b) Emplois spéc. − CHIR. Procédé opératoire qui permet de sectionner les tissus vivants sans effusion de sang et en réduisant l'étendue des surfaces traumatiques (d'apr. Littré-Robin 1865). On sait la valeur de l'écrasement musculaire dans la pathogénie de la gangrène gazeuse chirurgicale (Veillon dsNouv. Traité Méd.,fasc. 1, 1926, p. 369). ♦ Écrasement linéaire. Méthode d'amputation nécessitant l'utilisation d'une chaîne progressivement serrée pour sectionner les tissus. − PHONÉT. Disparition involontaire d'une ou de plusieurs syllabes dans un mot ou une locution du langage fam. Ex. : m'sieu (monsieur), ptêt (peut-être), spa (n'est-ce pas) (d'apr. Rob. et Quillet 1965). − PHYS. Résistance à l'écrasement. ,,Résistance maximum que présentent les matériaux à des efforts qui tendent à les rompre par un effort de compression`` (Chabat 1881). Dès que la charge d'écrasement [d'une pierre] atteint le tiers environ de la charge de rupture, des fissures commencent à se produire (J. Cahen, Bruet, Carrières,1926, p. 54). c) Entassement de personnes. Et il [Rougon] se rappela alors cette après-midi de juin (...) les quais emplis d'un écrasement de foule (Zola, E. Rougon,1876, p. 215).Et son imagination toujours bouillante lui représente la scène, l'horrible étouffement corps à corps, ces écrasements de la place Louis XV (A. Daudet, Rois,1879, p. 238). 2. État de ce qui est écrasé. On ne prêterait plus attention maintenant au léger écrasement de sa figure (Colette, Cl. école,1900, p. 168): 1. Tout au plus, à examiner de près les caractères du billet, adressé à un fournisseur, aurait-on remarqué la nervosité de la plume à l'écrasement des pleins et à la brusquerie des fins de mots.
Bourget, La Geôle,1923, p. 180. B.− Au fig. 1. Action de défaire, de mettre en déroute un adversaire. Plus notre attitude sera rigoureuse, plus l'écrasement de toute résistance de la population sera rapide (Malraux, Espoir,1937, p. 749).Le jeune P..., à l'O. W. I., me parlait tout à l'heure de Berlin où il se trouvait en 1939, au moment de l'écrasement de la Pologne (Green, Journal,1943, p. 47): 2. Il reste « en l'air » [le communisme], privé de support par suite de l'écrasement des tentatives faites par le bolchevisme pour propager directement la révolution de Russie en Europe.
Bloch, Destin du Siècle,1931, p. 22. Rem. On rencontre ds la docum. le synon. écrasage, subst. masc. (attesté seulement dans le sens concr. de « action de broyer, d'écraser des graines, des fruits » ds qq. dict. gén.). Pensez : par l'écrasage de la Serbie, il deviendrait le Bismarck de l'Œsterreich (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 93). ♦ Tir d'écrasement. L'ennemi fait une certaine dépense de munitions. Mais, (...) dans l'état actuel de la technique, ce n'est pas un véritable tir d'écrasement (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 25). 2. Attitude qui consiste à rabaisser quelqu'un, à humilier. Je ne puis voir du courage dans l'écrasement d'un être qui ne peut se défendre (Gide, Journal,1931, p. 1071). 3. Attitude par laquelle on subit le poids de quelque chose. Ils recourent tous deux aux effets physiques de la grandeur et de l'intensité, par quoi ils peuvent étonner les sens et l'esprit jusqu'à l'écrasement (Valéry, Variété III,1936, p. 84).Et souvent ils se retournèrent avidement pour deviner l'écrasement d'un paysage encore tout couvert des voiles denses de la nuit (Gracq, Argol,1938, p. 146): 3. À un premier degré, le plus habituel, le « mal de l'espace-temps » se manifeste par une impression d'écrasement et d'inutilité, en face des énormités cosmiques.
Teilhard de Chardin, Le Phénomène humain,1955, p. 252. 4. Écrasement de la hiérarchie, de l'éventail des salaires. Réduction de l'écart entre les catégories inférieures et supérieures d'une échelle des rémunérations (d'apr. Lar. Lang. fr.). Prononc. et Orth. : [ekʀazmɑ
̃]. Ds Ac. 1932. Étymol. et Hist. 1. 1611 « action d'écraser » (Cotgr.); 2. fig. a) av. 1719 écrasement de l'amour-propre ([Mme] de Maintenon ds Boiste 1819; b) 1871 « abattement, anéantissement » (Zola, Fortune Rougon, p. 25); 3. 1857 chir. écrasement linéaire (Journ. de méd. et de chir. pratiques, XXVIII, 408 ds Quem. Fichier). Dér. du rad. de écraser*; suff. -ment1*. Fréq. abs. littér. : 323. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 9, b) 484; xxes. : a) 1 046, b) 476. Bbg. André (P.). Le Vocab. du violoniste. Vie Lang. 1972, p. 685. − Bruneau (C.). N. créés au moy. du suff. -ment. In : [Mél. Orr (J.)]. Manchester, 1953, p. 27. − Quem. Fichier. − Termes techn. fr. Paris, 1972, p. 30, 36; p. 38 (s.v. écrasage). |