| ÉCHAPPÉE, subst. fém. A.− [L'échappée est un mouvement] 1. Action d'échapper ou de s'échapper : 1. La proue du navire tranchait la masse épaisse des vagues avec un froissement affreux, et au gouvernail des torrents d'eau s'écoulaient en tourbillonnant, comme à l'échappée d'une écluse.
Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 1, 1848, p. 357. − Spéc., MUS. L'échappée est une note mélodique, étrangère à l'accord qui la supporte, succédant par mouvement conjoint à une note intégrante de cet accord, et s'enchaînant par mouvement disjoint à une note suivante (Dupré, Harm. analyt.,t. 2, 1936, p. 127). 2. Action d'échapper à quelqu'un ou à quelque chose. Il eût considéré cette échappée comme un collégien considère les vacances qui le délivrent de l'asservissement des maîtres (Huysmans, Marthe,1876, p. 82). a) Au fig. Écart de conduite. C'est une échappée de jeune homme. Il a fait plusieurs échappées (Ac.) : 2. Sans doute, il [Pascal] faisait parfois des voyages à Marseille, découchait; mais c'étaient de brusques échappées, avec les premières venues, sans lendemain.
Zola, Le Docteur Pascal,1893, p. 129. b) Spécialement − CHASSE. ,,Chasser à l'échappée se dit des chiens qui sont hors de la piste du gibier`` (Littré). Chien qui chassent l'échappée (DG). − SP. Le fait de distancer un peloton de coureurs. Faire une échappée. Les cinq fugitifs creusent l'écart. Il semble que ce soit l'échappée décisive (Comment parlent les sportifsds Vie Lang.,1952-54, p. 176). B.− P. méton. [L'échappée est une distance] Espace libre bien que très étroit entre deux obstacles. Échappées d'horizon (Zola, E. Rougon,1876, p. 257): 3. ... l'œil du professeur peut, de temps à autre, saisir les échappées de vue que le hasard seul n'a pas ménagées.
Brillat-Savarin, Physiol. du goût,1825, p. 185. − Spécialement ♦ ARCHIT. ,,Hauteur libre entre le nez d'une marche et une partie de construction située au-dessus d'elle, linteau de porte, sous-face de plancher`` (Noël 1968). ,,Espace ménagé pour le tournant des voitures à leur entrée dans une cour ou dans une remise`` (Ac.). ♦ PEINT. ,,Se dit d'une perspective − de ciel ou de lointain − entrevue par un espace libre, réservé à cet effet`` (Adeline, Lex. termes art, 1884). Échappée de vue. P. anal. : 4. De huit heures du matin à deux heures de l'après-midi, par le temps clair, mon rez-de-chaussée bénéficie, entre deux falaises de maisons neuves, d'une échappée de soleil.
Colette, La Vagabonde,1910, p. 41. Au fig. Il y a dans cette étude historique des échappées sur d'autres sujets (Ac.). − Loc. Par échappées. Par intervalles. Solitaire d'ailleurs au milieu de Paris, il [Monsieur Desmarets] ne voyait le monde que par échappées (Balzac, Ferragus,1833, p. 29). Prononc. et Orth. : [eʃape]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. [1475 eschappée (texte de la Suisse romande ds Delb. Rec. d'apr. DG)]; 1490 eschappée « fait d'échapper, fuite » (Martial d'Auvergne, Matines de la Vierge, éd. Y. Le Hir, 1111); 1666-67 les pauvres gens n'avoient de leurs amours Encor joui sinon par échappées (La Fontaine, Contes, La Gageure des trois commères, éd. A. D. Régnier, t. IV, p. 302, 49); 1704 échappée de lumière, échappée de l'escalier (Trév.). Part. passé fém. substantivé de échapper*. Fréq. abs. littér. : 615. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 041, b) 1 008; xxes. : a) 932, b) 625. Bbg. Archit. 1972, p. 37. − Wind 1928, pp. 7-8. |