| ÉCHAFAUDER, verbe trans. A.− Emploi trans. 1. Rare, emploi abs. Dresser un échafaudage. Il a fallu échafauder pour terminer ce mur (Ac.1835-1932). 2. Usuel. Échafauder qqc. a) Dresser en échafaudage. Il échafauda encore quatre ou cinq charpentes, puis monta de nouveau sur le barrage (Hugo, Travaill. mer,1866, p. 319). − P. anal. Une de ces grandes tribunes échafaudées pour les dames (Goncourt, MmeGervaisais,1869, p. 79).Toutes [les femmes] (...) avaient échafaudé une haute coiffure extravagante parmi laquelle couraient des feuilles de vigne en papier doré (E. de Goncourt, Élisa,1877, p. 110). b) P. ext. (cf. échafaudage B 2).Superposer de manière plus ou moins organisée, plus ou moins stable. Gênes n'a rien perdu à mes yeux de ce qu'elle était dans mes souvenirs : magnifiques peintures, nature admirable, palais et jardins échafaudés les uns sur les autres (Sand, Corresp.,t. 2, 1812-76, p. 141).Conformément aux mêmes idées il a dressé, aligné, échafaudé des blocs ou simplement amoncelé des pierres pour abriter des sépultures (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum.,1921, p. 27): 1. ... madame Aurélie elle-même (...) dénombrait de son côté les vêtements de soie (...) Clara était chargée de veiller aux tas, de les ranger et de les échafauder, de manière à ce qu'ils tinssent le moins de place possible, le long des tables.
Zola, Au Bonheur des dames,1883, p. 653. c) Au fig. (cf. échafaudage B 3) − Utiliser pour construire ou étayer quelque chose. Tous ces raisonnements que vous échafaudez pour vous prouver à vous-mêmes que votre âme n'est pas immortelle (Martin du G., J. Barrois,1913, p. 484). − [En réf. au caractère provisoire et relativement instable de l'échafaudage] Combiner, construire, élaborer (quelque chose), de manière peu solide, non convaincante. Échafauder une théorie, un système, une doctrine, une argumentation; échafauder un projet. Il échafauda une combinaison de mensonges qui lui permit de s'absenter (Martin du G., Thib.,Belle sais., 1936, p. 1040).Beaucoup d'hypothèses peuvent être échafaudées, mais elles n'auront que peu de valeur scientifique, tant que des preuves certaines ne viendront pas les étayer (Hist. sc.,1957, p. 1484): 2. Trois mois avaient suffi à cet homme vomi par l'enfer pour échafauder, inventer un nouveau plan, une nouvelle machination...
Ponson du Terrail, Rocambole,t. 3, 1859, p. 317. 3. Une politique est une construction conçue par des hommes, échafaudée sur des idées et souvent bousculée par les événements.
L'Industr. fr. du bois,1955, p. 37. B.− Emploi pronom. 1. Vx. [À valeur réfl.] Construire un échafaudage et y monter. Je couchais sous quelques planches qu'on m'avait prêtées pour m'échafauder contre le rocher (Lamart., Tailleur pierre,1851, p. 453).Les mineurs défaîtent la galerie et, en s'échafaudant, amorcent un montage (Haton de La Goupillière, Exploitation mines,1905, p. 293). 2. Usuel. [À valeur passive] a) [En parlant d'un échafaudage, d'une construction provisoire] Être construit. Et voilà que sur le cirque, devenu bassin, un décor s'échafaude (Cocteau, Portr. souv.,1935, p. 72). − Péj. S'entasser sans ordre. On voit des glaçons (...) s'immobiliser au plus léger obstacle et s'échafauder les uns sur les autres (Renard, Lanterne sourde,1893, p. 110).Voici la pleine ville (...) les quais (...) les hauts immeubles au-dessus s'échafaudant sur le roc (Butor, Modif.,1957, p. 193). − P. métaph. Devinerions-nous par quel caprice toutes ces inégalités se sont échafaudées de cette façon les unes sur les autres (Poincaré, Valeur sc.,1905, p. 28). b) Au fig. Toutes les preuves du procès s'échafaudaient sur des périphrases cicéroniennes (Hugo, N.-D. Paris,1832, p. 365).Aussi (...) l'organisation de la défense nationale doit-elle s'échafauder sur de nouvelles bases (Lubrano-Lavadera, Législ. et admin. milit.,1954, p. 31).Ainsi s'échafaude une hiérarchie de pouvoirs commandée par des intérêts particuliers (Perroux, Écon. XXes.,1964, p. 622). Prononc. et Orth. : [eʃafode], (j')échafaude [eʃafo:d]. Enq. : /eʃafod,D/ (il) échafaude. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. Ca 1260 eschaufauder « dresser des échafauds » (E. Boileau, Livre Mestiers, éd. G.-B. Depping, 2epart., titre XVIII, p. 323); 1464 eschaffaulder « projeter » (Maistre Pathelin, éd. R. T. Holbrook, 421). Dér. de échafaud*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 73. DÉR. 1. Échafaudement, subst. masc.Action d'échafauder, son résultat. Synon. échafaudage.P. anal. Une musique militaire m'avait (...) révélé ses échafaudements harmoniques (Arnoux, Contacts all.,1950, p. 30).Au fig. Et moi qui perds mon temps près de vous dans des échafaudements ridicules (Gide, Caves,1914, p. 841).− 1reattest. 1914 (Gide, loc. cit.); de échafauder, suff. -ment1*; déjà attesté en 1384 au sens de « échafaudage » (Comptes du Château de Clamecy, éd. L. Mirot, p. 10). − Fréq. abs. littér. : 1. 2. Échafaudeur, subst. masc.a) Personne qui échafaude. Au fig. Les échafaudeurs de systèmes ont horreur des objections (Arnoux, Juif Errant,1931, p. 210).b) Mar. Celui qui (à Terre-Neuve) établit l'échafaud pour le séchage des morues (cf. échafaud A).Attesté ds Lar. 19e-20e, Guérin 1892 et Quillet 1965.− 1resattest. a) 1292 eschaufaudeeurs « constructeur d'échafaudage » (Taille, ap. Géraud, Paris sous Phil. le Bel ds Gdf.), attest. isolée; à nouv. Forest. 1946; b) 1859 « celui qui établit l'échafaud pour faire sécher les morues » (Bonn.-Paris); de échafauder, suff. -eur2*. |