| VRAI, VRAIE, adj., subst. masc. sing. et adv. 1reSection. Adjectif I. A. − Qui est conforme à la réalité, à la vérité ou qui lui correspond; à quoi ou à qui on peut légitimement donner son assentiment. 1. [En parlant d'une chose] a) PHILOS., lang. des sc. [En parlant d'un jugement ou de son énoncé] − Qui s'accorde avec son objet, avec la réalité; qui satisfait aux lois de l'esprit. [Pascal] cherche des idées vraies, des idées qui recouvrent du réel; il veut la vérité, une vérité vivante qui comble le cœur en conquérant la raison (Massis, Jugements, 1923, p. 240).V. aberration ex. 15, admissible ex. 10, proposition II A 1 ex. de P. Curie. − Qui correspond à un certain ensemble de rapports, lui est associé et forme avec lui un ensemble cohérent. En mathématiques, quand j'ai posé les définitions, et les postulats qui sont des conventions, un théorème ne peut plus être que vrai ou faux (H. Poincaré, Valeur sc., 1905, p. 226).V. faux1I A 1 a ex. de Poincaré, de Ruyer et ex. 1. b) Lang. cour. [P. oppos. à faux1, erroné, contesté] Que l'on juge conforme à ce qui existe ou a existé. Point de vue vrai; affirmation, connaissance, indication vraie. Le sentiment religieux, en s'affaiblissant de nos jours, a laissé se substituer insensiblement à l'idée de stabilité que commande le dogme, celle d'un progrès indéfini dans la liberté. Cette idée flatte les hommes et c'est assez pour qu'ils la croient vraie (A. France, Vie fleur, 1922, p. 538).V. analogue ex. 14, croire ex. 6, nom I A 1 c α ex. de Hugo. − [Avec compl. prép. de] Tout ce qui est vrai d'une époque ou d'un personnage ne sert pas toujours à les mieux connaître (Valéry, Variété[I], 1924, p. 184). − Fam. [Avec redoublement expr. de vrai] [Un superbe reportage sur Tokyo] qui permet, enfin, de se faire une vraie de vraie idée (Télérama, 18 févr. 1987, p. 62, col. 1). − En partic. [Avec la volonté plus ou moins manifeste de ne pas déformer la vérité; p. oppos. à faux1, mensonger, fallacieux, inventé] Argument, renseignement vrai; anecdote, histoire, information, nouvelle, relation vraie. V. croyable ex. 2, fausseté ex. 1: 1. Tandis que ma raison flairait la supercherie ou découvrait le mensonge, mon âme s'abandonnait sans réserve aux vérités miraculeuses, indiscutables de l'amour; le sentiment acceptait pour vrai ce que la raison rejetait comme faux; le Mensonge humain parlait, mais celui qui l'écoutait était Amour, le joyeux, le profond, le triomphant Amour!
Milosz, Amour. init., 1910, p. 154. − Loc. et expr., fam. ♦ Loc. conj. [Le plus souvent dans la lang. parlée] Aussi vrai que ou, plus rarement, aussi vrai comme + ind.[Pour donner plus de force à ce qu'on affirme, pour enchérir sur sa bonne foi] Aussi vrai que Dieu existe; aussi vrai que deux et deux font quatre. Si nous avons de l'embêtement, aussi vrai comme je m'appelle La Guillaumette, je me fais porter au rapport en radinant au quartier et je raconte au colonel tout comme c'est que c'est arrivé (Courteline, Train 8 h. 47, 1888, p. 101).V. aussi1ex. 7 et 8.Vrai comme + ind.Même sens. Tu l'entendais dire après la croûte: « J'y dirai, vrai comme v'là un quart de vin là. » Et l'instant d'après: « Si j'y dis pas, c'est qu'jamais y a un quart de vin là » (Barbusse, Feu, 1916, p. 141). ♦ (Être) trop beau pour être vrai. [Exprime le doute qu'on a sur la crédibilité d'une nouvelle trop agréable ou inattendue] Écoute. Dis-moi ça à l'oreille tout bas... Tu as encore... Ce serait trop beau pour être vrai (Romains, Hommes bonne vol., 1932, p. 297).[Exprime le doute sur la fiabilité d'une découverte trop facile] Publié après sa mort, son livre De rebus mathematicis hactenus desideratis [de Orontius Finaeus (1494-1555)], abondait en découvertes merveilleuses concernant non seulement la quadrature, mais la construction des polygones réguliers et la trisection de l'angle. Tout cela était trop beau pour être vrai, et ce fut vite réfuté (Gds cour. pensée math., 1948, p. 104). ♦ S'il/si elle le dit, (c'est que) cela/ça doit être vrai, c'est que c'est vrai. [Marque l'ignorance de celui qui parle et en même temps une certaine confiance qu'il accorde à l'auteur de l'affirm.] Ils disaient tous les deux que le meeting s'annonçait très bien. « S'ils le disent, ça doit être vrai » pensais-je en descendant l'avenue Wagram; j'étais tout de même inquiète (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 203). ♦ (Dire/se dire/c'est) la vérité* vraie. SYNT. Vrai à la lettre, au fond, dans la forme, dans le principe, en soi, en théorie; vrai d'un bout à l'autre, à cinquante pour cent, à moitié; vrai dans une certaine mesure, dans la mesure où, en un sens, jusqu'à un certain point, pour une part, sans restriction; vrai à une époque, en un lieu, à l'égard de qqn; absolument, entièrement, incontestablement, nécessairement, parfaitement, parfois, particulièrement, de plus en plus, plus ou moins, plus que jamais, rigoureusement, sans doute, strictement, sûrement, surtout, tout à fait, universellement vrai; croire, supposer (qqc.) vrai; admettre, affirmer, considérer qqc. comme vrai; prendre, reconnaître, refuser, retenir, tenir qqc. pour vrai; demeurer, devenir vrai. c) [Dans une tournure impers.]
α) [Précédé de ce, cela ou, plus rarement, de ceci] − [Dans des énoncés affirm.] − Si, si, je te jure, je sais que ça peut paraître fou, mais je te jure, y'avait une de ces lumières autour [d'une soucoupe volante]! J'ai ce truc gravé dans la tête. Tu me crois pas, hein?... − Je te crois, j'ai dit. − N'empêche que c'est vrai (Ph. Djian, Zone érogène, 1984, p. 54).V. apparence ex. 16, réel I B 3 ex. de Ponson du Terrail. ♦ [En tête de phrase ou en incise, pour reconnaître, admettre ou (feindre de) concéder la vérité, la réalité de ce qui précède ou de ce qui suit] C'est pourtant, c'est bien vrai; c'est ben vrai (pop.); c'est rudement vrai (fam.). − (...) n'est-il pas vrai que l'ancien évêque de Luçon, Mgr Corlazeau, les prenait pour des hommes [des chênes] ? − Tu te souviens donc de cela? fit entendre, d'une voix tout heureuse, M. des Lourdines en regardant son fils avec émotion; cela est, ma foi, vrai!... très vrai! (Châteaubriant, Lourdines, 1911, p. 202).V. apparence ex. 4.P. ell. [En réponse dir. dans un dialogue] V. infra ex. de Nerval.[Avec redoublement expr.] Vrai de vrai. V. infra ex. de Gyp. ♦ Fam. [Dans des tours exclam., dans un dialogue, pour marquer le rappel, le souvenir soudain de qqc.] Ah!/ah, mon Dieu!/ah oui!/ah! tiens, c'est vrai; à propos/mais c'est vrai. − Tiens, c'est vrai, au fait! Où est-il donc, Passelieu? Je n'avais pas même remarqué [son absence] (Hermant, M. de Courpière, 1907, ii, 1, p. 13).Tarrou se frappa le front, comme illuminé par une vérité soudaine: − Ah! c'est vrai, j'oubliais, vous seriez arrêté sans cela (Camus, Peste, 1947, p. 1345).[Pour enchérir sur ce qu'on est en train de dire ou pour relancer une explication] C'est vrai aussi! c'est vrai, quoi! après tout, c'est vrai! Tu te rends pas compte de tout le boulot que j'ai, moi ici. Non, c'est vrai, c'est plus possible! (Cl. Sarraute, Allo Lolotte, c'est Coco, 1987, p. 25).Voilà quinze ans que tu rêves d'avoir un père et, maintenant, tu ne sais pas ce que tu vas lui dire! − C'est vrai, quoi! Je vais m'amener là. Qu'est-ce que tu veux que je lui dise? « Salut, je suis ta fille, comment ça va? » (Chr. Aventin, Le Cœur en poche, 1989, p. 175). ♦ Cela/ce n'est que trop vrai. [Exprime la certitude d'un fait ou d'un état de fait que l'on déplore par ailleurs] L'Opéra refusait obstinément l'ouvrage, jugé trop long − ce qui n'était hélas que trop vrai (Dumesnil, Hist. théâtre lyr., 1953, p. 133). ♦ Cela/ceci/c'est si/tellement vrai que. [Pour renforcer l'affirm. qui vient d'être énoncée] L'architecture a été la grande écriture du genre humain. Et cela est tellement vrai que non seulement tout symbole religieux, mais encore toute pensée humaine a sa page dans ce livre immense et son monument (Hugo, N.-D. Paris, 1832, p. 212).V. incontestablement ex. ♦ C'est vrai que. [Suivi de l'ind. pour reconnaître la réalité d'un fait ou, plus rarement, du cond. pour concéder son éventualité] Ils n'avaient pas prévu que vous voudriez tout mettre [un héritage] à mon nom, tout de suite... Mais est-ce qu'il est trop tard?... C'est vrai qu'ils pourraient nous attaquer en justice... à moins de leur dissimuler... Ah! ce que j'ai été bête! je suis bien puni (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 228).J'avais choisi d'être rassuré; et c'était bien vrai, au fond, que je me croyais immortel (Sartre, Mots, 1964, p. 164).P. ell., fam. Ah! vrai que ça m'embête, Henri, qu'on parte sans toi! Qu'est-ce que tu vas devenir, tout seul? J'ai bien envie de rester (Fallet, Paris au mois d'août, 1982 [1964], p. 20). − [Dans des énoncés nég., pour refuser ou nier complètement la vérité d'une affirm., la réalité d'un fait, équivaut à c'est faux] Ce n'est pas vrai, ou, fam., c'est pas vrai. Messieurs, on a insinué qu'on avait voulu offrir à Hitler la culpabilité de la France, qu'on avait voulu faire le procès des responsabilités de la France. Ce n'est pas vrai. Je vous le démontre. D'autres hommes l'ont voulu et le Maréchal s'y est opposé (Procès Pétain, t. 2, 1945, p. 1049).V. feinter B ex. de Queneau.Rare. Ce n'est pas vrai que + subj.Je te demande pardon. Je t'ai menti: ce n'est pas vrai que je sois content, ce soir (Mauriac, Mal Aimés, 1945, ii, 6, p. 198). − [En réplique, pour nier catégoriquement ou de manière véhémente une affirm., équivaut à vous mentez, tu mens] Cela/ça/ce n'est pas vrai! ou, fam., c'est (même) pas vrai! J'avais coutume de faire enrager MmeRenard en prétendant la connaître, c'te Colombine. C'est pas vrai, je la connais pas, je ne l'ai jamais vue (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Trou, 1886, p. 579).V. exister ex. 18. − [Dans des énoncés interr. ou interro-nég.] ♦ Fam. C'est vrai? [Dans un dialogue, appelle une confirmation de ce qu'on voit ou pense] C'est sûr? est-ce possible? c'est sérieux? La môme (...): Non, c'est vrai? c'est à vous, ce grand fils? Le duc: Oui, madame (Feydeau, Dame Maxim's, 1914, ii, 3, p. 37).P. ell. − « Où vont-ils donc ces bateaux-là? » hasarda Jacques. − « Ça dépend. Lequel? » − « Ce gros-là? » − « À Madagascar. » − « Vrai? On va le voir partir? » (Martin du G., Thib., Cah. gr., 1922, p. 629).[Avec invers. du suj., en interr. dir.] Madame Garabis se tourna vers moi: − Est-ce vrai?... − demanda-t-elle sèchement. − Vrai de vrai! (Gyp, Souv. pte fille, 1928, p. 291).Cela est-il vrai? (vieilli). La bouquetière: (...) quand j'ai vu que c'était une comédie pour tromper un honnête gentilhomme, je me suis échappée (...) et je suis allée, comme tous les soirs, vendre mes fleurs sur la place du Môle (...). Fabio: Cela est-il bien vrai? La bouquetière: Si vrai, que je vous dis adieu, seigneur (Nerval, Filles feu, Corilla, 1854, p. 677).C'est-il vrai? c'est-y vrai? (pop.). En entendant ces mots, la fille des Troglodytes s'appuya sur son balai comme la Minerve au Décret sur sa lance, demeura pensive et, jetant sur moi un regard consterné, elle s'écria: − C'est-il, Dieu, vrai? (A. France, Vie fleur, 1922, p. 348).C'est-il pas vrai? c'est-y pas vrai? (pop.). − (...) On ne peut pas être et avoir été... C'est comme ça... − Ben sûr!... Faut se faire une raison (...) C'est-il pas vrai, dites, monsieur Lanlaire? − Ah! dame! (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p. 79). ♦ Ce n'est pas vrai! ou, fam., c'est pas vrai! [En réplique dans un dialogue, pour exprimer la stupeur, la réprobation face à une nouvelle] Fanny: Je vais avoir un enfant. Le docteur vient de me le dire. Honorine: Ah! mon Dieu! Ah! mon Dieu! (...) Ce n'est pas possible! Ce n'est pas vrai! (...) Va-t'en, fille malhonnête! (Pagnol, Fanny, 1932, i, 2etabl., 6, p. 92).[Pour exprimer la surprise, l'étonnement] − (...) Quand elle est arrivée à Paris de sa cambrousse en Bretagne, elle a eu le béguin pour un petit gars, un émigré, un Polak, je crois. Il était gentil, ils avaient décidé de se marier. − C'est pas vrai! − Je te jure que si (Chr. Aventin, Le Cœur en poche, 1989, p. 165).Fam. C'est pas vrai! [Exprime l'agacement, la lassitude en face d'une situation ou dans une conversation] C'est incroyable! c'est pas possible! Alors, on peut pas savoir d'où tu viens, là, il est bientôt minuit... Et où tu vas? Non, mais c'est pas vrai! Tu vas quand même pas aller prendre ta douche sans passer voir le bébé (Cl. Sarraute, Maman coq, 1990 [1989], p. 5). ♦ [Dans un dialogue; suivi de que + ind. ou en position anaphorique suivi du suj. réel exprimé] Fam. C'est vrai ce qu'on raconte? c'est donc vrai ce qu'on dit? c'est vrai ça? Dis, c'est vrai que MmeBergen est malade? Pourquoi ne vas-tu pas la voir? (Peyré, Matterhorn, 1939, p. 189).Tante Aline m'a dit que tu savais lire l'heure, c'est vrai cette histoire? (Triolet, Prem. accroc, 1945, p. 46).Expr. C'est vrai ce mensonge-là? [Pour signifier à qqn qu'on ne le croit pas] La porte s'ouvrit après une pause. La voix continua par la fente: − Malade? C'est un truc pour que j'ouvre. C'est vrai ce mensonge-là? − Paul est malade, dépêchez-vous, il grelotte sur la banquette (Cocteau, Enfants, 1929, p. 27).[À la forme interro-nég.; pour se justifier, souvent avec colère, face à l'incrédulité des autres] C'est pas vrai que le chef Favret nous avait donné vingt-cinq francs? C'est pas vrai que j'ai dit dans le train à Croquebol: « Mon salaud, nous allons tirer une bordée et cavaler à Bar-le-Duc? » (Courteline, Train 8 h. 47, 1888, p. 246).− Ben quoi, caporal, tu rigoles, c'est pas vrai, c'qu'on dit? − Y a un peu de vrai (Barbusse, Feu, 1916, p. 43).[Pour appeler une réponse rassurante à une question inquiète, pessimiste] Virelade: Ce n'est pas vrai, Élisabeth, que tu as songé, fût-ce une minute, à m'abandonner? Jure-le-moi... Élisabeth, avec une lassitude infinie : Je suis revenue (Mauriac, Mal Aimés, 1945, iii, 8, p. 254).[Avec invers. du suj.; en interr. dir.] Est-ce vrai que + ind.− Est-ce vrai que tu vas te promener toujours seule dans les bois? − Oui, c'est vrai (Colette, Cl. école, 1900, p. 167).
β) [Précédé de il est] − [Dans des énoncés affirm.] ♦ [En incise, pour concéder une vérité] Tout ce que tu m'as raconté, j'étais venu te le raconter − avec d'autres mots, il est vrai (Sartre, Nausée, 1938, p. 190).V. exactitude C ex. de France.[Dans le cadre d'une oppos., le 2e terme est le plus souvent coordonné par mais] J'aime encore le vin et les femmes; c'est assez, il est vrai, pour faire de moi un débauché, mais ce n'est pas assez pour me donner envie de l'être (Musset, Lorenzaccio, 1834, v, 7, p. 270). ♦ Il est vrai de + inf.Leur imagination était tellement tourmentée que deux dragons se jetèrent tout habillés dans le Nil et se noyèrent. Il est vrai de dire pourtant que, si on n'avait ni pain ni vin, les ressources qu'on se procurait avec du blé, des lentilles, de la viande et quelquefois des pigeons, fournissaient du moins à la nourriture de l'armée (Gourgaud, 1842ds Rec. textes hist., p. 104).V. naturellement C 1 ex. de Murger. ♦ Il est (bien, très, toujours, malheureusement) vrai que + ind.[Pour affirmer la certitude d'un fait] Il est toujours vrai qu'une joie partagée est une joie multipliée (Becquet, Organ. loisirs travaill., 1939, p. 71).V. fidèle ex. 6, sincère ex.[Pour concéder la vérité d'un fait ou pour préciser, justifier l'affirm. qui précède; peut dans ce cas être également suivi du cond.] Je ne sais pas si j'ai ce qu'on appelle un cœur sec; j'ai trop d'indignation, de dégoût, pour le croire, et peu m'importe. Il est vrai que j'ai depuis longtemps réprimé, dans cet organe, tout ce qui risquait de l'attendrir (Gide, Faux-monn., 1925, p. 1196).V. amour ex. 141. ♦ [Dans le cadre d'une oppos.] Il n'en est/demeure/reste pas moins vrai que + ind. ou, plus rarement, cond.Synon. de malgré* cela, néanmoins.On renonça dès lors peu à peu à l'idée d'arriver à l'unification par l'adoption universelle du calendrier grégorien (...). Il n'en est pas moins vrai que les orthodoxes se seraient honorés en ne faisant pas obstacle à l'adoption d'une réforme qui était un progrès véritable (Chauve-Bertrand, Question calendrier, 1920, p. 100).« La comtesse entra et s'assit », est une phrase à laquelle on peut donner en la plaçant où il faut une plénitude admirable, un son dramatique, (...). Il n'en reste pas moins vrai que tout ce qui entre dans le domaine des portes qu'on ouvre, des lettres qu'on remet, des escaliers qu'on descend, présente à l'écrivain scrupuleux des soucis inénarrables (Green, Journal, 1939, p. 211).Vieilli. Toujours est-il vrai que + ind.Même sens. − Tu passeras bien longtemps (...) à tirer sur rien (...), avant d'être seulement caporal. − C'est égal, dis-je encore, si j'avance lentement, toujours est-il vrai que j'avancerai (Vigny, Serv. et grand. milit., 1835, p. 99). ♦ Vieilli ou littér. Il n'est que trop vrai de + inf., il n'est que trop vrai que + ind.[Pour confirmer la réalité d'un fait qu'on déplore] De grâce, monsieur le chevalier, laissons en paix ces pauvres riens d'antan; ne me pressez point de vous les faire connaître. Il n'est que trop vrai de dire qu'ils furent écrits avec une plume trempée dans le Phlégéton (Milosz, Amour. init., 1910, p. 174).Il n'était, certes, que trop vrai que le niveau de vie des personnels des services publics souffrait beaucoup de l'inflation (...). Mais ce que réclamaient, pour eux, les syndicats ne pouvait être accordé, sous peine d'effondrement du budget et de la monnaie (De Gaulle, Mém. guerre, 1959, p. 277).Il n'est que trop vrai. [En réplique, dans un dialogue] Mon cher monsieur (...) Est-il vrai, comme on l'a prétendu, qu'il y ait encore des brigands en Grèce? − Il n'est que trop vrai, répondit-il gravement (About, Roi mont., 1857, p. 3). ♦ Tant il est vrai que + ind.V. tant I A 3 b. − [Dans des énoncés nég.; exprime le doute qu'on a sur une attitude ou sur des propos] Il n'est pas vrai que + subj.− Comment ça se fait que tu n'es pas au journal, à cette heure-ci? demanda Lambert. − Il y a des ennuis avec le journal. − Quels ennuis? Il n'était pas vrai que Lambert ne s'intéressât pas au journal (...); mais il écouta le récit d'Henri avec une attention indignée (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 242). − [Dans des énoncés interr., interro-nég. ou cond.] ♦ Rare. [En interr. dir.] Il est donc vrai? Sully: (...) Il est donc vrai? demain votre départ s'apprête? Le roi: Oui, demain (Legouvé, Mort Henri IV, 1806, i, 2, p. 343). ♦ Vieilli ou littér. [En incise] N'est-il pas vrai? Synon. de n'est-ce pas?[Pour prendre le lecteur à témoin] Si l'on en croit ces nouveaux patriotes, non seulement le patriotisme serait le monopole d'un parti, mais il serait la propriété exclusive de (...) certaines sectes du parti (...)! C'est absurde plus encore qu'odieux, n'est-il pas vrai? (Ferry,1887ds Fondateurs 3eRépubl., p. 147).[En tête de prop. ou en incise, le plus souvent dans un dialogue, pour appeler une réponse ou pour susciter une réaction à ce qu'on est en train de dire] Elle est si triste depuis quelques jours, que je suis fort aise de trouver cette occasion de la forcer à s'amuser. N'est-il pas vrai, madame, il faut que les jeunes femmes se dissipent (Fiévée, Dot Suzette, 1798, p. 165).− L'abbé Sancerre vous a toujours produit, n'est-il pas vrai, l'impression d'un homme d'une rare élévation d'intelligence et de caractère? − Certes! (Billy, Introïbo, 1939, p. 15).P. ell., fam. Pas vrai. [En incise, dans le discours dir., celui qui parle n'attend pas obligatoirement une réponse] S'il s'en ressentait pour se battre, il n'avait qu'à y aller lui-même, au lieu de me prendre mon filon et de m'envoyer me faire casser la gueule pour lui... Seulement, ça fait bien, pas vrai, engagé, à son âge (Dorgelès, Croix de bois, 1919, p. 180).[En fin ou plus rarement en tête de prop., celui qui parle attend une confirmation de ce qu'il dit, gén. exprimée par sûr, pour sûr, juste, je t'assure] Allons, la mère, dit-il en baisant la main de sa femme, ce n'est rien, va: nous avons fait la paix. Pas vrai, fifille? Plus de pain sec, tu mangeras tout ce que tu voudras. Ah! elle ouvre les yeux (Balzac,E. Grandet,1834,p. 215).− (...) Dans les H.L.M. (...), y en a plus [de l'amitié], y a plus de conversations, plus rien. Les types se voient pas, se connaissent pas, leur reste que la famille, et c'est pas toujours primesautier, pas vrai? − Sûr, approuva Civadusse (Fallet, Paris au mois d'août, 1982 [1964], p. 44).V. convenance ex. 7, persuasif ex. 2. ♦ Vieilli ou littér. Est-il vrai que. [Suivi de l'ind.] Est-il vrai que Diane a un enfant et que l'homme avec lequel elle vit depuis quinze ans l'ignore? (Jacob, Cornet à dés, 1923, p. 156).[Suivi du subj. pour atténuer le caractère abrupt d'une question] − Nous avons, mon cher Armand, à causer de choses sérieuses. − Je vous écoute, mon père (...). − Est-il vrai que tu vives avec une femme nommée Marguerite Gautier? − Oui. − Sais-tu ce qu'était cette femme? − Une fille entretenue (Dumas fils, Dame Cam., 1848, p. 213).[Suivi du cond., pour exprimer le doute, l'incrédulité] Jupiter: Parlons sérieusement, Alcmène. Est-il vrai que tu préférerais te tuer, plutôt que d'être infidèle à ton mari? Alcmène: Tu n'es pas gentil d'en douter! (Giraudoux, Amphitr. 38, 1929, ii, 2, p. 92).N'est-il pas vrai que. [Suivi de l'ind.] − Voyons, ma chère dame, ne donnez pas des idées fausses à cet enfant... − N'est-il pas vrai que vous vous obstinez à ne le pas enrichir, alors que vous admettez vous-même le bon aloi de mon entreprise? (Adam, Enf. Aust., 1902, p. 68).[Suivi de l'ind. ou du cond.] Synon. de n'est-ce pas?N'est-il pas vrai, ma bien-aimée, n'est-il pas vrai que nous y serions bien [dans le lit moelleux de la terre]? (Musset, Confess. enf. s., 1836, p. 366).Elle sera princesse en Allemagne un jour ou l'autre. N'est-il pas vrai qu'elle fera une jolie princesse? (About, Roi mont., 1857, p. 257).P. ell., fam. [Dans un dialogue] Pas vrai que. Pardon, excuse, monsieur, mais on ne donne point son enfant comme ça à un passant. Pas vrai que j'ai raison? (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 504). ♦ S'il est vrai que + ind.S'il est vrai que Gounod admirait Bach (...) le caractère le plus net de son génie très divers est d'être si personnel qu'il suffit d'une phrase ou d'un thème pour le reconnaître immédiatement et sans erreur possible (Dumesnil, Hist. théâtre lyr., 1953, p. 148).
γ) [En combinaison avec il y a] Il y a (quand même/tout de même) qqc. (un peu/une part/beaucoup) de vrai (dans des paroles). Je jurerais qu'il n'y a pas un mot de vrai dans ce que tu viens de dire (Bernanos, Joie, 1929, p. 650). 2. [En parlant d'une pers.] a) Vieilli. Synon. de véridique. − Digne de foi. Mon lecteur comprendra que ceci est indescriptible; un témoin vrai et sérieux m'a raconté la chose (Baudel., Paradis artif., 1860, p. 332). − Qui dit ce qu'il pense. − Vous êtes cruel, dit Leuwen. − Je suis vrai quand on m'interroge, c'est à prendre ou à laisser (Stendhal, L. Leuwen, t. 3, 1835, p. 102). b) Fam. [À la forme nég., dans un dialogue, exprime le doute sur le jugement, la crédibilité de qqn] − (...) Il m'a juré que j'étais différente des autres. Les filles du Lover [un bar] sont vulgaires, qu'il dit. Moi, j'ai la classe. − Il n'est pas vrai, ce mec! − Qu'est-ce que tu insinues? (Chr. Aventin, Le Cœur en poche, 1989, p. 210). B. − [Précédé de l'art. déf. ou d'un poss.; traduit la reconnaissance par l'esprit qu'un être ou un objet parmi d'autres est le plus conforme à la vérité, à la réalité] 1. [En parlant d'une chose] Synon. de réel, véritable. a) Qui apparaît comme le plus juste sous les apparences et fait l'objet d'une recherche, d'une découverte. Depuis trois cents ans environ, les Français ont été instruits à méconnaître la vraie nature de la poésie et à prendre le change sur des voies qui conduisent tout à l'opposé de son gîte (Valéry, Variété III, 1936, p. 34).Toute la vie d'un héros consiste en effet à chercher sa vraie figure, à la rectifier, à l'amender (Morand, Excurs. immob., 1944, p. 37). SYNT. Apparaître sous son vrai jour; montrer son vrai visage; trouver sa vraie vocation; prendre la vraie mesure de qqc.; peser qqc. à son vrai poids; réduire qqc. à sa vraie portée; estimer qqc. à son vrai prix; dégager la vraie signification de qqc.; apprécier qqc. à sa vraie valeur. b) Qui convient le mieux parmi d'autres possibles. Synon. adéquat, approprié.Trouver la vraie méthode, le vrai remède, la vraie solution (à qqc.); prendre les vrais moyens (pour/de faire qqc.); suivre la vraie route. Aristote, dans son Histoire des animaux, situe l'homme à sa vraie place, c'est-à-dire en tête de la série animale, le considérant comme le plus perfectionné des animaux (Hist. sc., 1957, p. 1347).V. faire1ex. 5. − [P. ell. du subst.] Ceux qui ont établi le principe de l'inamovibilité l'entendaient d'une manière qui était la vraie, la bonne (Gambetta,1878ds Fondateurs 3eRépubl., p. 325). c) Qui est important ou essentiel (par opposition à ce qui est marginal ou simplement apparent). Synon. fondamental, principal, profond.Je voyais bien qu'entre tant d'actions dangereuses, il choisissait la pire. Comme tant d'autres; et par un juste mouvement d'homme. Il renvoyait toute délibération au lendemain du combat. Attention là; c'est le vrai péril (Alain, Propos, 1921, p. 227).Rien ne prouve que les jouets les plus désirés soient automatiquement les meilleurs et les plus aptes à répondre aux exigences vraies de l'enfant (Le Nouvel Observateur, 7 déc. 1966, p. 27, col. 1). SYNT. Apprécier les vrais besoins de qqn ou de qqc.; atteindre le vrai but de qqc.; occulter le vrai débat sur qqc.; dégager les vraies causes des faits; comprendre le vrai motif d'un refus; chercher les vraies origines de qqc.; maintenir les vrais principes d'une institution; poser, masquer les vrais problèmes, les vraies questions; avoir le sens des vraies valeurs. − [P. ell. du subst.] Il suffisait qu'elle parût, ou fît à l'un des deux une allusion discrète (indiscrète) à leur amitié, pour que Christophe et Grazia prissent un air glacé et parlassent d'autre chose. Colette cherchait à leur réserve toutes les raisons possibles, hors une seule, la vraie (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1507). − Expr. fam. [Dans la lang. parlée, pour exprimer que la chose dont on parle est la seule importante] Il n'y a que cela/ça de vrai, y'a qu'ça de vrai. − En ce cas-là écoute, je vais te dire une bonne chose: faut nous tirer des galipettes! − Y a qu'ça d'vrai! et au trot, encore! (Courteline, Train 8 h. 47, 1888, p. 124).Le lit, les victuailles, le gâteau de manioc, l'homme, la danse et le tabac, il n'y a que ça de vrai (Maran, Batouala, 1921, p. 56). 2. [En parlant d'une pers.] Qui, seul parmi d'autres, est reconnu comme correspondant justement à sa dénomination. Le vrai fondateur, le vrai précurseur (d'un mouvement); le vrai chef, le vrai patron (d'un parti, d'une entreprise). Les socialistes, vrais maîtres de cette Chambre. Du premier coup d'œil, on voit que la vie et le commandement sont là (Vogüé, Morts, 1899, p. 244).Certains spécialistes le considèrent [Benz] comme le vrai père de l'automobile (P. Rousseau, Hist. transp., 1961, p. 490). − [P. ell. du subst.] On est peut-être trois mille, pas plus, à s'en être servi [du couteau], sur tous les fronts. C'est ces trois mille-là les vainqueurs, les vrais! Les autres n'avaient qu'à ramasser, derrière! (Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 220). − P. ext. La vraie patrie (de qqn). Tu as l'air tout malheureux, mon Ludo... C'est fou ce que tu es sensible et délicat... N'hésite pas à venir me parler quand ça ne va pas... Et rappelle-toi que nous sommes ta famille, à présent, ta vraie famille (Y. Queffélec, Les Noces barbares, 1988 [1985], p. 201). 3. [Dans un cont. moral ou relig.; avec art. déf.] Qui seul est reconnu, considéré par un groupe, une communauté comme conforme à la vérité, à l'idéal et reçoit l'assentiment général ou fait l'objet d'une croyance unanime. La vraie Église; la vraie foi; la vraie religion; le vrai peuple. En dissipant les préjugés qui corrompaient la source de toutes les vertus, ou qui leur donnaient des bases incertaines, ils [des philosophes] ont préparé le règne de la vraie morale (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 1, 1808, p. 3).Dis-moi, mon fils, à Genève, montes-tu aussi à la Maison de l'Éternel? Tu devrais, je t'assure. Notre Dieu est très grand, tu sais, et c'est un Dieu saint, c'est le vrai Dieu, il nous a sauvés du Pharaon, c'est un fait connu et la Bible le dit (A. Cohen, Le Livre de ma mère, 1974 [1954], p. 23).− [Figé dans un juron] Vrai Dieu! Vrai Dieu! Barraou, vous êtes bien fatigant! (Borel, Champavert, 1833, p. 51).V. dieu 2eSection II B 3 a ex. de Benoit. C. − Domaine de la création littér. et artist. 1. [En parlant d'une œuvre; p. oppos. à académique, conventionnel1, faux1] Qui est en accord avec la réalité ou avec l'idée qu'on s'en fait. a) Qui est la reproduction précise et vivante de son modèle. Plus vrai que nature. Le Nabab surgit avec sa bonne face tout heureuse d'être portraiturée, et si vrai, tellement « nature » que Paul eut un cri d'admiration (A. Daudet, Nabab, 1877, pp. 253-254).Rogier Van Der Weyden, dans la Nativité (Berlin) (...), nous montre à droite de la crèche une rue qui semble si vraie, qu'on l'a identifiée immédiatement (P. Lavedan, Urban., 1926, p. 210). b) Dont l'intensité, la richesse, le mouvement manifeste le souci, la recherche de la conformité avec la réalité. Toutes ses images [décrites par Rousseau dans l'Émile] me parurent frappantes d'une vérité que je n'avais rencontrée nulle part (...). Tout ici était vrai, original et pittoresque (Chênedollé, Journal, 1809, p. 47).Ses figures [de Puvis de Chavannes] restent fixées en des attitudes majestueuses et vraies (Hourticq, Hist. art, Fr., 1914, p. 421). − [En parlant d'un personnage] Qui possède une force, un naturel, une sincérité qui le rendent vivant, présent. Lorsque je trouve ce volume [Manon Lescaut] sous ma main (...), je l'ouvre et pour la centième fois je revis avec l'héroïne de l'abbé Prévost. Or, cette héroïne est tellement vraie qu'il me semble l'avoir connue (Dumas fils, Dame Cam., 1848, p. 22).[P. méton.; en parlant d'un interprète au théâtre, au cinéma] Je ne l'ai pas vu dans le dernier rôle qu'il [Talma] a créé dans la démence de Charles VI. Tout le monde s'accorde à dire que c'est celui où il a été le plus vrai, le plus profond, le plus pathétique (Delécluze, Journal, 1826, p. 349). c) Expr. Rien n'est vrai que le beau; rien n'est vrai sans beauté. [Principe romant. énoncé par Musset en réponse au principe de l'esthét. class. exprimé par Boileau: Rien n'est beau que le vrai, le vrai seul est aimable (v. infra 2eSection I B)] C'est pour nous la montrer [la beauté] qu'est faite la clarté. Rien n'est beau que le vrai, dit un vers respecté; Et moi, je lui réponds, sans crainte d'un blasphème: Rien n'est vrai que le beau, rien n'est vrai sans beauté (Musset, Poés. nouv., Après une lecture, 1923 [1842], p. 290). 2. [En parlant d'un écrivain, d'un artiste, d'un musicien] Qui privilégie l'expression de la vérité, de la vie et refuse les conventions, les artifices. Soyez vrais (...) Mais cela ne signifie pas: soyez platement exacts (Rodin, Art, 1911, p. xiii).Grétry [pour Richard Cœur-de-Lion (1784)] a fait effort pour être vrai, tout en essayant de donner à sa musique un aspect suffisamment archaïque (Dumesnil, Hist. théâtre lyr., 1953, p. 105). − [P. méton.; en parlant de sa manière de travailler] Style, ton vrai; modelé vrai; couleur vraie. [L'École] tend à dépouiller un art plastique [la peinture] de sa matérialité, en l'affranchissant des conditions de lumière réelle, de gestes vrais (Mauclair, De Watteau à Whistler, 1905, p. 77).Sous toutes ses formes, la musique de Maurice Jarre s'affirme comme la recherche d'un langage vrai, direct, et de moyens d'expression nouveaux (Serrière, T.N.P., 1959, p. 124). ♦ En partic. Qui s'inspire de la réalité humaine, concrète, quotidienne. Synon. vériste.Antonio [personnage de la pièce de C. Zavattini], qui commence à avoir du succès, voudrait faire du cinéma vrai, à partir de la vie réelle, les ouvriers, les grèves, la puissance de l'argent, la guerre (L'Express, 6 juin 1966, p. 68, col. 3). II. A. − Lang. cour. 1. [P. oppos. à imaginaire, légendaire, rêvé] Qui existe indépendamment de l'esprit qui le conçoit. Synon. réel, véritable.Scène vraie. − Zazie (...), si ça te plaît de voir vraiment les Invalides et le tombeau véritable du vrai Napoléon, je t'y conduirai (Queneau, Zazie, 1959, p. 18).V. illusion ex. 14, réalité I A 3 ex. de Baudry des Lozières: 2. Le rêve, être une autre fille. Portée par le merveilleux langage de Lisette le jeudi, de Suzette le mardi (...), je m'éloignais... L'épicerie-café, mes parents n'étaient certainement pas vrais, j'allais un soir m'endormir et me réveiller au bord d'une route, j'entrerais dans un château, un gong sonnerait, et je dirais « bonjour, Papa! » à un élégant monsieur servi par un maître d'hôtel stylé.
A. Ernaux, Les Armoires vides, 1989 [1984], p. 80. ♦ (Petit) fait vrai. Fait réel, dont la vérité ne fait aucun doute et qui est particulièrement évocateur. Le document seul importe, précis, daté, vérifié, authentique. L'œuvre d'imagination est bannie, parce qu'inventée... (Le public) a besoin, pour croire à ce qu'on lui raconte, d'être sûr qu'on ne le « lui fait pas »... Plus rien ne compte que le petit fait vrai (Sarraute, Ère soupçon, 1956, p. 60). − [P. ell. du subst.] Parfois, Marguerite chantait. Je l'accompagnais en pensée, attentif à ce que mon chant restât intérieur, pour ne point me trahir. J'évitais de regarder Marguerite, la vraie, la vivante. C'est en moi seulement que je la contemplais, en moi seulement que j'élevais vers elle une oraison silencieuse (Duhamel, Confess. min., 1920, p. 195). 2. Qui est tel effectivement, en dépit des apparences, des suppositions. Le vrai métier, la vraie identité, le vrai domicile de qqn; le vrai coupable dans une affaire. Cette tombe n'est pas la tombe d'Aziyadé. La vraie tombe, personne ne sait où elle est (Farrère, Homme qui assass., 1907, p. 155).Où donc était Micho [le mari de sa mère] ?... Il entendait l'harmonium, revoyait les huit doigts courir sur le clavier. Et son vrai père, où était-il?... Est-ce que ça n'était pas lui qu'il avait vu la veille avec Nicole?... Est-ce que son père était revenu? (Y. Queffélec, Les Noces barbares, 1988 [1985], p. 316). − En partic. Qui est celui/celle à qui/ce à quoi on pense (sans erreur sur la personne ou sur l'objet). La rédaction était sous les ordres d'un ancien reporter de l'Auto, François Janson, que Schiessle avait pris pour le « vrai Jeanson », celui du Canard Enchaîné (Coston, A.B.C. journ., 1952, p. 57).L'enquête se poursuit pour identifier le vrai exhibitionniste qui aurait été vu à plusieurs reprises dans le quartier durant les dernières semaines (L'Est Républicain, 10 mai 1990, p. 3, col. 7). 3. [Avec valeur intensive] Qui seul, au delà des apparences, correspond à la réalité profonde d'un être ou d'un objet et constitue son identité. Abandonnée depuis le départ de Giovan à sa conduite personnelle, son humeur et ses fantaisies venaient enfin de rompre la bride (...). Plus de ménagements, plus de contrainte; c'était la vraie Émilia, toute d'élans, d'extravagances (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p. 92).À côté de ce Montparnasse de terrasses, de tangos, de cacahuètes et de boissons originales, existe dans l'air, comme une mélodie, le vrai Montparnasse, celui qui n'a ni murs ni portes et qui, plus que tout autre sanctuaire, pourrait revendiquer le célèbre mot de passe, un peu retouché: « Nul n'entre ici s'il n'est artiste. » (Fargue, Piéton Paris, 1939, p. 152). − [P. ell. du subst.] Nous voguions vers l'Afrique, la vraie, la grande; celle des insondables forêts, des miasmes délétères, des solitudes inviolées (Céline, Voyage, 1932, p. 140). − [P. méton.] Réduit à son village et à sa famille, envahi et borné par son grand amour, il livra le plus vrai de lui-même à des étrangers, à des amis lointains (Colette, Sido, 1929, p. 88). B. − Lang. des sc. 1. ASTRONOMIE a) [En parlant d'une donnée; p. oppos. à moyen1] Qui est la valeur effectivement constatée (par opposition à la valeur moyenne qui est la constante obtenue en faisant la moyenne sur une année). Heure vraie; équateur, pôle, point vrai; position vraie du soleil; latitude, longitude vraie. En habiles astronomes qu'ils étaient [les Chaldéens], ils s'aperçurent de bonne heure que leur année de 360 jours ne correspondait pas à l'année solaire vraie, dont ils avaient découvert la durée, et ils ajoutaient, tous les six ans, un treizième mois intercalaire de 30 jours (Chauve-Bertrand, Question calendrier, 1920, p. 17).Les jours solaires vrais sont variables, car la vitesse du déplacement apparent sur l'écliptique n'est uniforme qu'en première approximation. Aussi, par définition, la moyenne arithmétique de tous les jours solaires vrais d'une année tropique est un intervalle de temps appelé jour solaire moyen (V. Lespinard, R. Pernet, J. Gauzit, Math., Classe de sc. exp., t. 2, 1952, p. 30). ♦ Midi vrai. Passage effectif du soleil au méridien d'un lieu donné. Chaque jour, à midi vrai, on observe le passage du soleil à l'aide d'un cercle méridien (Danjon, Cosmogr., 1948, p. 113).Temps (sidéral, solaire) vrai. V. temps I A 3 métrol. b) [En parlant d'une mesure; p. oppos. à apparent] Dont on a corrigé les erreurs dues aux instruments ou aux méthodes de mesures. Coordonnées vraies, hauteur vraie d'un astre; nord, sud vrai. [Le phénomène de la réfraction astronomique] provoque encore une différence entre la direction « vraie » A de l'astre (direction hors de l'atmosphère ou en absence de celle-ci) et la direction A' suivant laquelle on l'observe effectivement (direction « apparente ») (Kourganoff, Astron. fondam., 1961, p. 76). − NAV. AÉRIENNE ET MAR. Cap vrai. ,,Cap corrigé de la variation du compas`` (Gruss 1978). [Lorsque] l'angle (...) compris entre le méridien et la direction de l'axe de l'aéronef (...) est pris par rapport au méridien géographique il est dit cap géographique ou vrai (A.-B. Duval, Hébrard, Nav. aér., 1928, p. 25).Route* vraie. 2. TECHNOL., loc. En vraie grandeur. En représentant l'objet à ses dimensions réelles (échelle un), par le dessin ou par une maquette. Tous les autres projets [de construction d'une usine marémotrice], dont quelques-uns étaient ingénieux et intéressants, quelquefois même rentables, ne furent suivis ni d'essais en vraie grandeur ni encore moins d'exécution (Romanovsky, Mer, source én., 1950, p. 83). − [Dans un cont. fig.] Sans modifier quoi que ce soit d'un projet initial. [Nos leaders de l'opposition] ont oublié jusqu'ici de manifester leur sympathie à celle [Margaret Thatcher] qui, contre vents et marées, applique en vraie grandeur son programme libéral (Le Figaro Magazine, 7 avr. 1990, p. 58, col. 1). III. − Qui est bien ce qu'il paraît. Synon. authentique, véritable. A. − 1. Lang. cour. a) [En parlant d'une chose] Qui correspond à sa définition. Il arrive que des peuplades capables de se construire de vraies maisons occupent temporairement des cavernes (Lowie, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 103).V. axiomatiser ex. 1. b) [En parlant d'une pers.] Dont l'apparence correspond complètement à sa qualité. Je n'en revenais pas de commander à de vrais militaires, d'organiser une vraie défense [l'auteur était commandant dans la Résistance]. Je me revois encore défilant en bras de chemise, à la tête de la compagnie, sur la place (J. Dutourd, Le Demi-solde, 1983 [1965], p. 18). 2. Lang. des sc. et des techn. [Marque la correspondance complète, l'adéquation stricte d'une chose, d'un phénomène avec sa dénomination, souligne l'absence de mélange, de variation, d'altération] Quand on refroidit brusquement le laitier par l'opération de granulation, il n'y a pas changement d'état, le laitier reste à l'état vitreux, (...) état pseudo-solide; la chaleur de fusion (...) reste à l'état potentiel dans le laitier, elle ne se dégagera que lorsque le laitier passera à l'état solide vrai (Cléret de Langavant, Ciments et bétons, 1953, p. 37). − MÉD. Anorexie, aphasie, atrophie musculaire, céphalée, constipation, exophtalmie, obésité vraie. À côté de la grippe vraie, dite épidémique, tout un groupe d'affections hivernales para-grippales a été récemment identifié (R. Schwartz, Nouv. remèdes et mal. act., 1965, p. 134).ANAT. Vraies côtes. V. côte1ex. 1.BIOL. Vrais jumeaux. V. jumeau I A 2 a. − ANTHROPOL. La migration qui atteignit l'île de Pâques doit avoir passé par les îles Tonga, Hervey, de la Société et Paumotu, peut-être par les Marquises. Ces caractères [mélanésiens nets] peuvent être dus, non pas à une migration de Papous vrais, mais à une migration de Mélanésiens appartenant peut-être à la classe dominante à peau claire (Haddon, Races hum., trad. par A. Van Gennep, 1930, p. 235). B. − Qui est effectivement ce qu'on déclare être. 1. Qui n'est l'objet d'aucune contrefaçon avouée ou non. a) [En parlant d'une chose]
α) [P. oppos. à artificiel, faux1, imité] Vrai mocassin; vrai bronze, croco, cuivre; vraies perles; vrais bijoux. Les vrais et les faux diamants ont les mêmes facettes, la même transparence; mais il y a, dans la lumière des premiers, une liberté, une joie qui ne se trouvent pas dans la lumière des seconds: le vrai y manque (Joubert, Pensées, t. 1, 1824, p. 332).Voici le portail de chez nous. Il est vieux et en vraie pierre et non point en ciment comme tout ce qui se fait aujourd'hui (Duhamel, Suzanne, 1941, p. 103). − En partic. [P. oppos. à ersatz] Vrai sucre; vraies cigarettes. Le curé boit et pose la tasse dans sa soucoupe avec une grimace. Il devait être amateur de vrai café avant la guerre et il n'a pas l'air de s'habituer aux ersatz (J. Joffo, Un Sac de billes, 1987 [1973], p. 72). − [Associé à faux1; exprime de manière paradoxale la qualité de l'imitation avec une chose naturelle ou produite par l'homme] Le savant: Oh! Oh! Bizarre! Bizarre! Vous n'êtes pas un prêtre, l'ami. Vous n'en êtes pas un. Madame l'aubergiste: Cours à la signature, Mathieu! Regarde s'il est tonsuré! L'aubergiste: Je n'y vois rien. Il a trop de cheveux. Une vraie fausse perruque! (Audiberti, Ampélour, 1937, p. 93).
β) [P. oppos. à factice ou à miniature] − Qui répond à son usage, à sa vocation normale. Vraie montre; vraies armes. La nature seule. C'est moi qui serai le gardien. Pas avec un képi vert comme en France, avec un vrai fusil qui part, pour chasser les mauvais garçons! (Claudel, Échange, 1954, i, p. 738). − Qui a une taille normale et peut être utilisé conformément à sa fonction. − (...) comme grand-père m'adorait et qu'il était fier de moi, il m'a fait construire L'Albatros. − Un vrai bateau? − Comme tu le dis Papadakis, un vrai et un fameux! C'était chic, hein! pour mes dix ans? (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 217).
γ) Synon. naturel. − Conforme à l'ordre de la nature. La rivière avait redessiné son vrai cours [dans un parc à l'abandon] ; la vase et les roseaux s'occupaient des bras morts ou mourants, ils effaçaient l'artifice (J.-L. Bory, Ma moitié d'orange, 1978 [1973], p. 14). − [En parlant des attributs d'une pers.] ♦ Qui n'est pas une prothèse ou un postiche. Vraies dents. Il portait un gros pull à manches retroussées et un de ses bras lançait des reflets et se terminait par une grosse pince (...). Je l'ai vu soulever le matelas de sa seule vraie main (...). Ensuite il a envoyé son poing dans le matelas et la pince est passée au travers, faisant rouler des petits bouts de kapok sur le trottoir (Ph. Djian, 37o2 le matin, 1989 [1985], p. 167).Vrais cheveux. Cheveux humains. Une immense poupée (...) qui avait de vrais cheveux et des yeux en émail (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 464). ♦ Vraie couleur (de cheveux). Couleur naturelle. Un afflux vert partait de l'attache des feuilles de bananiers et poussait la sève jaune vers le haut de la feuille, comme dans une chevelure teinte la vraie couleur (Giraudoux, Suzanne, 1921, p. 96).P. méton. Vraie blonde. Elle s'est renversée en arrière, les jambes pendantes, c'était une vraie rousse, elle entortillait ses doigts dans ses cheveux (Ph. Djian, Zone érogène, 1984, p. 60). b)
α) [En parlant du comportement d'une pers.; p. oppos à feint, imité, simulé] Quand la petite Paule Chastel, qui jouait Aglante, en vint à dire: « Prenez garde, madame, l'amour sait se venger des mépris qu'on fait de lui », elle éclata en sanglots, en vrais sanglots vivants qui n'étaient pas de théâtre (Duhamel, Suzanne, 1941, p. 244).Il fallait vraiment qu'il me prît pour un imbécile, moi, vétéran des dortoirs de pension, pour me croire incapable de distinguer un vrai d'un faux sommeil (A. Jardin, Bille en tête, 1988 [1986], p. 187).
β) [En parlant d'une pers., de sa qualité] Un vrai bossu dans une comédie ne serait pas supportable; c'est déjà trop qu'un gros homme y soit réellement gros (Alain, Beaux-arts, 1920, p. 169).Un jour [dans un studio de télévision], j'ai vu deux soldats romains qui fumaient des cigarettes en attendant l'ascenseur: ils avaient des lances, le bouclier, la petite jupe, comme de vrais Romains (P. Cauvin, Monsieur papa, 1988 [1976], p. 161). 2. En partic. Qui ne peut être suspecté d'aucune intention de tromperie, de fraude ou de malhonnêteté. a) [En parlant d'une chose] Vrais dés, billets de banque, papiers, passeports. Mentaient-ils ceux qui, ayant été prévenus que la pièce était fausse, la donnèrent comme vraie, après avoir promis sur leur parole d'honneur, de ne pas s'en servir? (Clemenceau, Vers réparation, 1899, p. 161).V. authentiquer ex. 2. − [Associé à faux1; en parlant gén. d'un document officiel: vrai parce que délivré par les services compétents, faux parce qu'établi avec une fausse identité] Vrai faux. Jacques Laffaille, dit « Carcassonne », devenu truand et écroué vendredi à Nantes sous l'inculpation de vol aggravé, détenait « une vraie fausse carte » d'inspecteur de police (L'Est Républicain, 15 avr. 1990, p. 22, col. 7).P. anal. [Exprime qu'une imitation est parfaitement réussie] Leurs bandes annonces honteusement refabriquées et leur « vrai faux » journal télévisé [des Nuls sur la chaîne Canal Plus] sont déjà, pour l'histoire de la télé, des morceaux d'anthologie (Le Figaro TV Magazine, 3 mars 1990, p. 10, col. 2). − En partic. Dont l'origine et la nature sont bien établies. ♦ [P. oppos. à copié, faux1] Qui est de façon certaine l'œuvre, la production de tel auteur, artiste, créateur ou fabricant. J'examine, tout en écrivant, mon stylo Mont-Blanc, depuis que je sais qu'il existe des « Blancs » et autres « Laban » asiatiques. Mais ouf, il est vrai, sur sa plume, est bien gravée « 4810 » la hauteur du Mont Blanc (D. Brodbeck, J.-F. Montgibeaux, Chic et Toc, 1990, p. 10).[P. méton.] Un vrai Dali, Gallé; un vrai Levi's, Vuitton; une vraie Rollex. C'est un Pradel, un vrai Pradel, un six lames. Et vous pouvez même ouvrir les huîtres (Y. Queffélec, Le Charme noir, 1988 [1983], p. 67).V. authentique ex. 10. ♦ Dont le lieu d'origine, de fabrication ou dont l'époque ne font aucun doute. Vrai cuir de Cordoue; vraie violette de Toulouse. Le fruit sec n'était tenu en gros que par une certaine madame Angélique Madou, demeurant rue Perrin-Gasselin, seule maison où se trouvassent la véritable aveline de Provence et la vraie noisette blanche des Alpes (Balzac, C. Birotteau, 1837, p. 119).[P. méton.] Vrai Louis XV; vrai Saxe. Ce porte-liqueurs où l'eau de coing impatiente attend l'heure du dimanche qui la portera à ses lèvres... du vrai Baccarat... du vrai coing... car tout est vrai, chez elle, et sans mélange (Giraudoux, Intermezzo, 1933, iii, 3, p. 171). ♦ [P. oppos. à falsifié, frelaté, imité] Conforme à des règles déterminées de fabrication. Le vrai cassoulet. Souvent on l'imite [le sirop de violettes] avec des infusions d'autres fleurs, comme la fleur de pensée tricolore, le pied-d'alouette et autres, auxquelles on ajoute un peu d'iris de Florence; falsification qu'on ne peut guère découvrir qu'en comparant ces sirops avec du sirop vrai (Kapeler, Caventou, Manuel pharm. et drog., t. 2, 1821, p. 672).[P. ell. du subst.] De sa poche revolver, il sortit une gourde. − C'est de l'eau de Vichy? demanda l'étudiante. − Du whisky, fit l'homme, du vrai, du White Label (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 47). b) [En parlant d'une pers.]
α) Qui peut légitimement revendiquer sa qualité; qui n'est pas suspect de trahison, de tromperie. Un vrai croyant, malade, patriote. Ma foi, vous le comprenez, la curiosité m'a saisi et me tient encore; je suis passé ce matin chez le prétendu comte. Si c'était un vrai comte, vous comprenez qu'il ne serait pas si riche (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 681).Madame, (...) Votre Majesté saura toujours où sont ses vrais amis (Benoit, Atlant., 1919, p. 220). − [Associé à faux1; pour exprimer paradoxalement le fait que qqn n'assume pas la qualité qu'il affiche] Faux-vrai. Et vous, faux-vrai écolo qui laissez filer de vos multiples siphons des villes les polluantes lessives, phosphatées ou non. De quel droit donnez-vous des leçons? (L'Est Républicain, 2 mars 1990, p. 2, col. 6).
β) [P. méton.; en parlant d'un comportement, d'une attitude, d'un sentiment; p. oppos. à affecté1, convenu, faux1, feint] Vrai désespoir, repentir; vraie affection, émotion; amitié, attachement, douleur vraie. Le bon Dieu reconnaîtra que mes larmes étaient vraies, ma prière fervente, mon aumône sincère (Dumas fils, Dame Cam., 1848, p. 295).V. amour ex. 173, facticité A ex. de Bourget. C. − [Avec valeur intensive] 1. [En fonction d'épith., antéposé, le plus souvent précédé d'un art. indéf.] a)
α) [En parlant d'une chose] Qui correspond pleinement à sa définition. Un vrai cours magistral; un vrai dîner de famille; une vraie démocratie; une vraie épidémie; une vraie lettre d'amour; vivre une vraie passion; avoir de vrais soucis. On m'a livré hier la table que j'ai trouvée dimanche à la foire aux puces; une vraie table de ferme en bois rugueux, un peu rapiécée, lourde et vaste (Beauvoir, La Femme rompue, 1972 [1967], p. 143): 3. Il adorait la musique, savait toucher du piano, jouer du violon; il adorait la peinture, savait trousser en deux coups de pinceau des aquarelles ravissantes (...). Mais la musique, la peinture, est-ce de vrais métiers? Comme la poésie, la littérature? Peut-on avec ça gagner sa vie? Peut-on, sur ça, fonder une famille?
J.-L. Bory, Ma moitié d'orange, 1978 [1973], p. 66. − [Avec redoublement de vrai] Le vrai lit à soi, le sien, vrai de vrai, celui du bon trou pour en finir (Céline, Mort, 1932, p. 449). − [Renforce un autre adj.] Il avait osé tout à coup: « Florentine, ça peut te paraître drôle, mais pour mon cadeau avant que je parte, veux-tu que je t'achète une robe, une vraie belle robe? (...) » (Roy, Bonheur occas., 1945, p. 402). − [P. ell. du subst.] Ils passèrent la journée cramponnés à la radio. Enfin, enfin, un débarquement, un vrai! Et chaque jour qui suivit apportait sa bonne nouvelle (Triolet, Prem. accroc, 1945, p. 236). − Domaine concr. ou sensible.[Pour amplifier, renforcer une affirm., une opinion] Un vrai bric-à-brac, coupe-gorge, régal. Toute la nuit, le ciel s'était fondu en eau, un vrai déluge (Zola, Terre, 1887, p. 452). ♦ [À propos d'un événement, d'une situation] Un vrai carnage, coup de théâtre, crève-cœur, désastre, gâchis, scandale, succès, suspense, triomphe; une vraie bénédiction, catastrophe, misère, révolution, rigolade; être saisi d'une vraie panique; avoir une vraie peur. Il songeait: « Voilà une vraie pitié... Une chose pareille... Le pauvre gars, il a dû en voir!... » (Genevoix, Raboliot, 1925, p. 325). − [Dans des cont. évoquant qqc. de rare qu'on désire, qu'on attend, dont on a la nostalgie ou dont on rêve] Manger de la vraie viande; faire un vrai repas; prendre un vrai repos; s'accorder de vraies vacances. Figurez-vous que Louise a un lit! un vrai lit. Du linge blanc! des repas réguliers (Frapié, Maternelle, 1904, p. 251).− C'est pas tout ça, fit Goubi, mais je vais me coucher. Demain faut que j'aille aux champignons. − Aux champignons! soupira Lerche. Marcher sur de la vraie terre, voir de la vraie herbe, des vrais arbres (Fallet, Un Idiot à Paris, 1990 [1966], p. 219).
β) [En parlant d'une pers.] Qui correspond complètement à un type donné. Très sec et fort jeune encore, il était brun comme le diable, un vrai Maure! Et l'on eût dit qu'il venait de prendre un bain de suie (Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 133).[Les éditeurs] contribuent à la création de postes de vente que l'incompétence de leurs gérants rend trop souvent improductifs et qui enlèvent aux vrais libraires une partie de leur clientèle (Civilis. écr., 1939, p. 18-4). − P. anal. [En parlant d'un animal] Le docteur J.-B. Charcot affirme (...) que les vrais et les seuls pingouins sont ces oiseaux de l'antarctique, que nous appelons manchots (A. France, Île ping., 1908, préf., p. 7). − [Pour amplifier un jugement de valeur] [Dans un cont. laud.] Un vrai cavalier, chevalier, copain, loup de mer, marin, montagnard, peintre, professionnel, savant, sportif; un vrai militant, patriote, républicain, soldat; se conduire en vrai gentilhomme, gentleman, monsieur; une vraie demoiselle, jeune fille, parisienne, maîtresse de maison; les vrais adeptes, amateurs, connaisseurs (d'une spécialité). J'ai la plus grande admiration pour Sagan. La femme m'émeut étrangement. Rarement, j'ai connu quelqu'un d'aussi féminin... Une vraie femme... avec une générosité, une bonté, une tendresse (R. Hossein, La Sentinelle aveugle, 1985 [1978], p. 252).V. fidélité ex. 1.[Dans un cont. péj.] Un vrai imbécile; une vraie brute, chipie. Je fixai ma voisine et, soudain, je la reconnus. C'était une certaine Brigitte, (...) une vraie salope, en tout cas, que j'avais un peu pratiquée dix ou quinze ans auparavant (Audiberti, Mal court, 1947, i, p. 144). − En/comme un(e) vrai(e)... qu'il/qu'elle est. De guerre lasse, le Tarasconnais jeta l'ustensile par terre, et se coucha dessus, en jurant comme un vrai Provençal qu'il était (A. Daudet, Tartarin de T., 1872, p. 70). − [Précédé d'un art. indéf.; qualifie un nom propre] Qui porte bien son nom. C'était une excellente femme, une vraie La Bertellière (Balzac, E. Grandet, 1834, p. 36). − [P. ell. du subst.] Les toubibs t'ont trié les bancals et les poitrinaires. C'est à toi de trier les lâches, les vrais, ceux de naissance! (Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 188).Fam. [Dans des expr.; pour amplifier un jugement de valeur] − Ah! répétait Harbert, qu'ils ramènent M. Smith, qu'ils le retrouvent, et nous n'aurons plus qu'à remercier le ciel! − Oui! murmurait Pencroff. C'était un homme celui-là, et un vrai! (Verne, Île myst., 1874, p. 36).Pour une garce c'en était une vraie (Céline, Voyage, 1932, p. 78).[Avec redoublement de vrai] Une cloche de première, une vraie de vraie, qui flaire le gros rouge, le pissat de bouquetin et la merde humaine (J.-L. Degaudenzi, Zone,1987, p. 111). ♦ Au masc., arg. Un vrai. Homme qui présente au plus haut degré, les qualités de courage, de loyauté, d'honnêteté. Synon. dur (v. ce mot III C 2).[Un sergent, au troupier blessé à qui le duc d'Aumale, voulant combattre, demande son uniforme:] Donne lui tes frusques (...) c'est un vrai (D'Esparbès, Folie épée, 1927, p. 85).Arg. du milieu. [Avec redoublement de vrai] Un vrai de vrai. Homme digne d'estime, de respect selon le code du milieu. [Raymond Roussel] était le vrai de vrai par excellence, celui qu'on ne rencontre ni au bagne, ni à la Légion, ni à Marseille, lieux officiels où le type du vrai de vrai se lègue, s'enseigne et se joue (Cocteau, Poés. crit. I, 1959, p. 139).Plus rarement au fém. Sont pas démunis de culot les jeunes d'aujourd'hui!... Venir la draguer devant la Grande Porte et lui faire joli cœur! à elle! une vraie de vraie que les braves gens avaient jugée, marquée, muselée pour se protéger de la rage! (B. Blier, Les Valseuses, 1978 [1972], p. 277). b) [Pour renforcer la justesse d'une affirm., pour amplifier un jugement de valeur] Qui a tous les caractères de sa dénomination sans que celle-ci corresponde obligatoirement à une réalité. Synon. véritable.
α) [À propos d'une chose concr. ou dans le domaine sensible; le plus souvent dans un cont. métaph. ou fig.] Un vrai champ de bataille; une vraie débauche (d'objets); un vrai temps de Toussaint; un vrai travail de bénédictin. − (...) Un médecin les visite deux fois par semaine; et, quand ils sont vieux, ils reçoivent des pensions, bien qu'on ne fasse aucune retenue sur les salaires. − Une Thébaïde! un vrai pays de Cocagne! murmura le monsieur, ravi (Zola, Germinal, 1885, p. 1223).Risquait-il un œil dans le tiroir du bureau, il tombait sur des coquillages et des peaux de bananes semi-fossilisées camouflant livres scolaires et cahiers. « Un vrai garde-manger, ton bureau! » (Y. Queffélec, Les Noces barbares, 1988 [1985], p. 119). − [À propos d'un phénomène, d'une situation, d'un événement] Un vrai panier de crabes, puzzle, raz de marée, sac de nœuds. Les arrangements n'avaient jamais été faits entre le frère et les deux sœurs (...). Un vrai cassement de tête cette succession! (Cl. Duneton, Le Diable sans porte, t. 1, 1982 [1981], p. 138). ♦ P. exagér. Un vrai calvaire, martyre, miracle, supplice; une vraie corvée, plaie. On est mal nourri... on n'a pas de liberté... on est accablé de besogne... Et des reproches, tout le temps, des criailleries... Un vrai enfer, quoi! (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p. 59).
β) [À propos d'une pers.] C'était une vraie mère pour les matelots, cette madame Creachcadec; tous ceux qui la connaissaient pouvaient bien le dire (Loti, Mon frère Yves, 1883, p. 23).À Madrid, durant les derniers jours de la monarchie, je me souviens d'avoir dîné chez un Grand d'Espagne, vrai modèle du Greco (Mauriac, Journal 2, 1937, p. 198). − P. exagér. Un vrai bébé, colosse, fou, tyran. Entre la gare et le village il y a un type qui loue des brouettes, des carrioles, un vrai voleur qui fait fortune sur notre dos (P. Cauvin, Povchéri, 1988 [1986], p. 33). ♦ [En parlant d'une pers. dont la façon d'agir, le comportement ressemblent à ceux d'un personnage connu ou historique] Une vraie Messaline. Je baissai la tête comme un vaincu: Oscar sourit, en vrai Machiavel, et caressa les poils de sa barbe orange (Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 337). − [Ds un cont. métaph.] Un vrai démon, petit diable, fléau, sauvage, sorcier; un vrai rayon de soleil; une vraie perle, furie, peste, soupe au lait, tête brûlée. Celle-là, M. Maigret, permettez à la Popine de vous le dire c'est une vraie gale... Et, s'il est arrivé quelque chose de mauvais, je suis sûre que c'est par sa faute (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p. 72).[Souvent dans des métaph. animalières] Un vrai butor, caméléon, cochon, coq, coq en pâte, dragon, faucon, lion, mouton, singe, tigre; une vraie peau de vache, punaise, vipère; une vraie tête de linotte, de mulet. Tu es fin, sagace, un vrai renard (Bernanos, Joie, 1929, p. 651). 2. [En fonction d'épith., antéposé, précédé de l'art. déf.] Qui correspond parfaitement ou idéalement à son nom; p. ext., qui parachève sa dénomination. Synon. authentique, pur.Le vrai bonheur, génie, talent; la vraie beauté, démocratie, liberté, littérature, nature. La vraie justice, qui veut que la marchandise et le prix soient égaux, comme les deux côtés d'une balance (Erckm.-Chatr., Ami Fritz, 1864, p. 139).Quand, venant des dunes, on pénètre dans le désert de pierre des hamadas, on éprouve une impression étrange: il semble qu'on sort d'un territoire assez hospitalier et qu'on affronte pour la première fois le désert par excellence, le vrai désert (Brunhes, Géogr. hum., 1942, p. 238).V. amour ex. 65, faux1I B 1 b ex. de Green. − [P. ell. du subst.] C'est extrêmement rare, la bonté: la vraie, la naturelle (Martin du G., Thib., Épil., 1940, p. 858). − En partic. La vraie vie. La vie dans toute sa plénitude, dans ce qu'elle a de meilleur. Que c'est donc doux!... cette musique!... cet éclat des fleurs et des lumières!... Ce parfum de jolies femmes (...) Ah! que c'est bien la vraie vie, la bonne!... la seule! (Sardou, Rabagas, 1872, iii, 8, p. 136).[Dans un cont. relig.] La vie après la mort, meilleure que la vie terrestre, et qu'on juge seule digne d'être vécue. Terre vallée de larmes; vie terrestre bref passage qui ne se justifiait que par l'épreuve préparant à la vraie vie, la céleste, où l'âme évaporée du corps ferait l'ange tandis que le corps, enfoui dans la terre comme une ordure, ferait la bête en attendant le taratata du Jugement Dernier (J.-L. Bory, Ma moitié d'orange, 1978 [1973], p. 39). 3. [En fonction d'épith. ou d'attribut, postposé] a) [En parlant d'une pers.] Qui, dans son caractère, sa manière d'être, de se présenter, dans ses propos, ses actes, fait preuve de simplicité, de droiture, d'honnêteté. Elle se mit à sauter autour de lui, tapant des mains, chantonnant, sur un air de flûte (...) Et la colère de l'oncle ne put tenir davantage. Il leva la tête, il sourit. Elle était trop saine, trop vivante, trop vraie (Zola, Faute Abbé Mouret, 1875, p. 1453).J'irais sur la Grand-Place un dimanche? Je leur dirais: « Il n'y a plus de M. le maire, plus de magistrat municipal, rien qu'un homme, un homme tout vrai, tout sincère, un homme tout neuf, qui va vous raconter ses misères... » (Bernanos, M. Ouine, 1943, p. 1440). ♦ Vrai avec qqn. Synon. de sincère.Xavier de Maistre est humain. Il est vrai avec lui-même; il est vrai avec les autres (A. France, Génie lat., 1909, p. 244). − [P. méton.] [La petite fille] avait une tournure italienne, de grands yeux noirs sous des sourcils bien arqués; une noblesse native, une grâce vraie (Balzac, Vendetta, 1830, p. 140).Tout à l'heure chez Stanislas Fumet (...). Ses deux filles, sa femme toute blanche. Leur accueil me touche beaucoup plus qu'ils ne s'en doutent, car leur cordialité est vraie (Green, Journal, 1945, p. 253). b) Littér. [En parlant d'une chose] Qui est intrinsèquement, éminemment pur, authentique. Je suis sûr de mon cœur qui est tout à la justice, tout à l'idéal, tout à la raison, tout à ce qui est grand, généreux, beau et vrai (Hugo, Corresp., 1862, p. 387).Qui n'a senti, en face d'une fleur qui s'épanouit, d'un ruisseau qui murmure, d'un oiseau qui veille sur sa couvée, d'un rocher au milieu de la mer, que cela est sincère et vrai? (Renan, Avenir sc., 1890, p. 441).V. authentique ex. 17. 2eSection. Subst. masc. sing. I. − [Corresp. à supra 1reSection I] A. − 1. PHILOS., lang. des sc. a) [Avec valeur de neutre; p. oppos. à faux1] Ce qui satisfait aux lois de l'esprit et mérite un plein assentiment. À toutes les époques de la philosophie, les sceptiques se sont prévalus de cette règle du bon sens pour nier la possibilité de discerner le vrai du faux (Cournot, Fond. connaiss., 1851, p. 107).V. faux1III A 1 ex. de Valéry, probabilité ex. 1, proposition ex. 6, réalité II A 1 ex. de Lacroix. b) Vérité conçue comme le souverain bien de l'esprit, constituant un but, un absolu, un idéal. Culte, recherche, quête, découverte du vrai; aller, se tourner vers le vrai; poursuivre, atteindre le vrai. La science dans l'homme est la contemplation intérieure du vrai. Le vrai ne saisit notre intelligence qu'à l'aide d'un mécanisme qui semble l'étendre, l'agencer, le mouler, lui donner un corps et un visage (Proudhon, Syst. contrad. écon., t. 2, 1846, p. 78).N'arriverai-je donc jamais à me tenir éveillé? À chaque instant, je marche vers le vrai. Je crois le saisir, je l'exprime, mais ce n'est que pour me distinguer de la lumière qu'il répand (J. Bousquet, Trad. du sil., 1935, p. 24). − [Chez Platon] Une des trois idées primitives qui, avec le beau et le bien, forme une trilogie. Trois choses inséparables, le vrai, le bien, et le beau, sollicitent l'âme de l'homme à la fois par le sentiment de leur absence actuelle et par l'espoir d'un rapprochement possible (Ozanam, Philos. Dante, 1838, p. 55). − Expr. Le beau est la splendeur du vrai. [P. allus. à l'expr. traditionnellement attribuée à Platon; exprime que le vrai est la beauté par excellence] La déclaration du 16 septembre, (...) page souveraine [du général de Gaulle] qui ne vise pas à l'effet, qui ne relève pas d'une certaine littérature; pas le moindre grain de poudre pour les yeux. En politique aussi, le beau est la splendeur du vrai (Mauriac, Nouv. Blocs-Notes, 1959, p. 247). − [Dans un cont. métaph.] A-t-on planté dans l'homme, au plus profond de l'âme, L'arbre du vrai, croissant de l'erreur qui décroît? (Hugo, Année terr., 1872, p. 260). − Rare. [Précédé d'un art. indéf.] L'effort de l'intellect ne peut plus être regardé comme convergent vers une limite spirituelle, vers un Vrai. (...) tout savoir auquel ne correspond aucun pouvoir effectif n'a qu'une importance conventionnelle ou arbitraire (Valéry, Variété III, 1936, p. 145). − En partic. [Suivi d'un adj. spécifiant le vrai] Le vrai formel, cohérence de la pensée abstraite avec elle-même, dans l'ordre logique. − Le vrai mathématique, d'un caractère déjà synthétique. − Le vrai physique, adéquation approximative et perfectible de la pensée semi-concrète à ses objets (...). − Le vrai psychologique, explication du contenu de la conscience (...). − Le vrai moral (...) − Le vrai métaphysique (Lal.1962, p. 1223). 2. Lang. cour. [P. oppos. à erreur, invention, mensonge] Ce qui est conforme à ce qui existe ou qui a existé. Je me demande si les journaux de chantage relatent des faits inexacts parce qu'ils les apprennent de quatrième main, ou s'ils faussent le vrai par une profonde connaissance du public (Cocteau, Crit. indir., 1932, p. 17).V. falsificateur ex. de Vigny, faux1ex. 16, sincère D ex. de Milosz. − P. méton. Information non déformée, non truquée. Nous (...) plaignons l'embarras de nos pauvres confrères, ayant à satisfaire à la fois les lecteurs qui demandent du vrai, et le gouvernement qui prétend que nulle vérité n'est bonne à dire (Courier, Pamphlets pol., Gazette du village, 1823, p. 176). ♦ [Figé dans des tours du type voilà le vrai ou le vrai est que/le vrai, c'est que] Ce qui est conforme à la réalité à propos d'un événement précis. On a essayé de faire passer Napoléon pour un homme terrible, implacable; le vrai, c'est qu'il était étranger à toute vengeance, et ne savait pas conserver de rancune, quelque mal qu'on lui eût fait (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 370).Il se conduit comme un ours, voilà le vrai (Renard, Lanterne sourde, 1893, p. 169). − [Avec compl. prép. de] Le vrai de qqc. La juste vision de quelque chose. Ce ne fut pas sans de nouveaux efforts que madame de Vaubert parvint à le ressaisir, à le ramener et à le maintenir dans le vrai de la situation (Sandeau, Mllede La Seiglière, 1848, p. 146).P. méton. Caractère vrai de quelque chose. Votre exposé de la situation morale des chrétiens en tous lieux est à merveille, et d'une vue tout à fait haute et mâle; je sens le vrai de tout cela (Sainte-Beuve, Corresp., t. 3, 1839, p. 77). − Expr. Il y a du vrai dans (une information). [Pour exprimer qu'on accorde une part de vérité à une affirm.] − « Je n'écris plus (...) Des articles, soit: ça se consomme sur place; mais un vrai livre, je ne peux plus. » Il ne pouvait plus: il y avait donc du vrai dans les divagations de Paule (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 190). Plaider* le faux pour savoir le vrai. − Locutions ♦ Loc. verb. À dire le vrai, pour dire le vrai. [En incise ou au déb. d'une prop.; introduit une restriction, une précision] Pour dire le vrai, j'ai toujours tenu pour fort peu de chose la soi-disant amitié que je portais au prince (Milosz, Amour. init., 1910, p. 65).Il était trop maître de lui, et même, à dire le vrai, il s'amusait bien trop pour se laisser aller à la colère (Genevoix, Raboliot, 1925, p. 146).Plus cour. À dire vrai, à vrai dire. V. dire1II C 5 a.Pour dire vrai. Synon. de sans mentir*, pour être franc (v. franc3II A 1).Pourquoi celui-là [un automobiliste en colère] ne l'avait-il pas traité de sodomite, comme tout le monde? Pourquoi (...) « besogneux » et pourquoi « populiste »? Henri ne savait pas trop bien ce que signifiait ce mot. Pour dire vrai, pas du tout. Mais ce devait être sérieux (Fallet, Paris au mois d'août, 1982 [1964], p. 58).Être dans le vrai, paraître dans le vrai. Anton. de être dans l'erreur*, être dans le faux (v. faux1III A 1).De ce que ceux qui croient trop à la théorie sont dans le faux, il ne faut pas croire être dans le vrai par cela qu'on fait profession d'absence de théorie (Cl. Bernard, Princ. méd. exp., 1878, p. 226).Avoir une opinion, faire une analyse qui est conforme à la réalité d'un phénomène, d'un événement ou qui s'en approche. Synon. avoir raison*.Un fils de Taine, rencontrant Léon Daudet au manège, lui fait presque une tête colère. MmeDaudet attribue ce refroidissement, cette impolitesse et toute cette mauvaise humeur à l'article que Daudet a fait dans le Figaro sur mon Journal, et il ne serait pas impossible que MmeDaudet fût dans le vrai (Goncourt, Journal, 1888, p. 741).Avoir une juste vision, une vision raisonnable des choses. Monique et son transistor, Simone et ses magazines, Sylvestre et ses haltères perfectionnés... Un peu de soleil là-dessus, trois grains de sable et ça leur mijote de bonnes vacances, c'est eux qui sont dans le vrai sans doute, moi [qui n'aime pas le camping à la mer], je suis trop compliqué (P. Cauvin, Huit jours en été, 1988 [1979], p. 11). ♦ Loc. adv. [En incise ou au déb. d'une prop.] Au vrai ou, plus rarement, de vrai. Synon. en vérité, au fond.La géographie dite économique est une sorte d'épanouissement normal et de part complémentaire indispensable de cette « géographie humaine » qui est au vrai l'« initiale » et la « fondamentale » (Brunhes, Géogr. hum., 1942, p. 168).Synon. de en fait, en réalité, à dire vrai (v. dire1II C 5 a).On reproche (...) à Rochefort d'être avide, et, de vrai, il l'est peut-être un peu (Sand, Beaux MM. Bois-Doré, t. 2, 1857, p. 14).Le jeune homme prétendait manquer des documents essentiels. Au vrai, de souffle court, il n'allait jamais jusqu'au bout d'aucune étude (Mauriac, Baiser Lépreux, 1922, p. 179).Comme de vrai (pop). Synon. de en fait.Bonne sainte! avait-elle dit à sa Santa Lucia de plâtre, je vais commettre un grand péché, mais vous êtes si puissante au ciel..., et le pauvre homme est si malheureux! Comme de vrai, il en était à se traîner aux genoux de sa maîtresse, et à lui protester par les plus solennels serments qu'il l'épouserait (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p. 92).Dans le vrai (vieilli). À la réflexion. Synon. en fait, à dire vrai/à vrai dire (v. dire1II C 5 a).Si j'ai parlé sans distinction des maladies que nous devons immédiatement à nos crimes personnels et de celles que nous tenons des vices de nos pères, le tort est léger; puisque, comme je vous disois tout à l'heure, elles ne sont toutes dans le vrai que les châtimens d'un crime (J. de Maistre, Soirées St-Pétersb., t. 1, 1821, p. 84).Ainsi, dans le vrai, Louis XVIII a dû à peu près sa couronne au parti de l'usurpation (Mmede Chateaubr., Mém. et lettres, 1847, p. 56). B. − Domaine de la création littér. et artist.Réalité particulière, vivante, historique; expression fidèle, sincère de cette réalité, de ce qui fait son caractère ou constitue son âme. Le désir du vrai, l'horreur de l'emphase et du faux idéalisme (...) conduisirent les impressionnistes à substituer à la beauté une nouvelle notion, celle du caractère (Mauclair, Maîtres impressionn., 1923, pp. 33-34).V. naturel I A 5 ex. de Joubert, réalisme ex. 3: 4. Il s'agit donc, en premier lieu, d'examiner s'il est bon quelquefois d'accommoder les faits à la leçon qu'on veut donner, à l'effet que l'on veut produire. Il y a pour l'ame deux sortes de plaisirs, la lumière et le mouvement, et l'un et l'autre peut lui venir, ou du vrai ou du vraisemblable, ou du réel ou du possible.
Marmontel, Essai sur rom., 1799, p. 352. − P. méton. Caractère sincère d'une description. Peut-être blâmera-t-on la crudité de cette peinture, et trouvera-t-on les éclats du caractère de la Rabouilleuse empreints de ce vrai que le peintre doit laisser dans l'ombre? (Balzac, Rabouill., 1842, p. 428). − [P. allus. littér.] ♦ [à Boileau, Épîtres, IX, 43: Rien n'est beau que le vrai, le vrai seul est aimable (l'un des princ. de l'esthét. class.)] Le faux sous toutes ses formes, dans la vie et dans l'art, dans la parole et dans les choses, devient notre bête noire comme la fausseté. Rien n'est beau que le vrai, le vrai seul est aimable. Et avec le goût pour la vérité, s'augmente l'attrait pour la simplicité, amie et alliée naturelle de la grandeur, de la beauté et de la perfection (Amiel, Journal, 1866, p. 435). ♦ [à Boileau, L'Art poétique, III, 48: Le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable] V. vraisemblable I A 2. − Loc. adv., rare. Au vrai. Fidèlement à la réalité et à ce qui fait son originalité. [Maurice de Guérin] a fait sur ce thème [la pauvreté de la nature bretonne] des vers bien pénétrants et où l'âpreté du pays est rendue au vrai: il la comprend si bien, cette âpreté, il la serre de si près qu'il en triomphe (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 15, 1860, p. 13).Sur le vrai. D'après la réalité vivante. Vu Paulin Ménier dans le Courrier de Lyon. Le plus grand comédien de ce temps-ci, le plus admirable créateur d'un type; un jeu d'observation, comme les romans d'observation. Le jeu moderne, où tout est fait d'étude, saisi sur le vrai (Goncourt, Journal, 1860, p. 723). II. − [Corresp. à supra 1reSection II] A. − [P. oppos. à imaginaire, légende, rêve] Ce qui existe indépendamment de l'esprit qui le conçoit. Peut-être est-ce le néant qui est le vrai et tout notre rêve est-il inexistant (Proust, Swann, 1913, p. 350).Ce rêve, ces choses de brouillard qui étaient restés en moi et dont je me disais: c'est un rêve, c'était du vrai dans lequel j'étais entré comme ivre, avec ma tête pleine de soleil (Giono, Baumugnes, 1929, p. 175). − [Avec compl. prép. de] Le vrai des choses. La réalité concrète. La chanson du petit filet d'eau au milieu du jardin, le remit dans le vrai des choses (A. Daudet, Tartarin Alpes, 1885, p. 40). − Loc. adv., fam. ♦ En vrai. En chair et en os. Ça les éléphants je donnerais cher pour en voir parce que, c'est quand même bizarre, j'en ai jamais vu en vrai. Souvent au ciné ou à la télé, mais en vrai, jamais (P. Cauvin, Monsieur papa, 1987 [1976], p. 112).Dans la réalité et pas seulement en imagination. Synon. réellement.Les prologues de l'amour ont ceci d'évasif que chacun s'y montre plus beau qu'il n'est en vrai (Y. Queffélec, Le Charme noir, 1988 [1983], p. 220).Effectivement, contrairement aux apparences. − La Tasse? s'étonna Goubi. − C'est mon nom de guerre. (...) Je m'appelle en vrai Léontine, Léontine Vigouroux. Tu me vois avec un blaze pareil dans les rues? (Fallet, Un Idiot à Paris, 1990 [1966], p. 137). ♦ Pour de vrai. Pop. ou lang. des jeunes. [P. réf. au monde ludique, imaginaire; p. oppos. à pour du beurre*, pour de rire (v. rire1)] Synon. de vraiment, réellement, sérieusement, pour de bon (v. bon1II A).Depuis quelques jours, j'avais l'impression d'être emportée dans un wagon plombé vers une destination inconnue, une sorte de train fantôme, mais je n'étais pas à la foire du Trône. Je ne pouvais plus dire: « Pouce, je ne joue plus. C'est pour du beurre. » C'était pour de vrai. Pour la première fois de ma vie, c'était pour de vrai! (A. Francos, Sauve-toi, Lola!1984 [1983], p. 90).V. beau ex. 5.[Dans un dialogue, en interr. ou en réponse dir.] − Que faites-vous dans la vie? (...) − Je suis ministre (...). − Pour de vrai? Il sourit, amusé. − Oui, pour de vrai (A. Jardin, Bille en tête, 1988 [1986], p. 43).[Avec valeur d'adj.] Ah il y en a qui vont au Théâtre pour se faire des émotions! Mais je vous le dis il est ici le Théâtre! Il est ici [dans cette maison], Docteur! Il est là-haut! Et un Théâtre pour de vrai! Pas un semblant seulement! (Céline, Voyage, 1932, p. 396).V. pour I B 1 ex. de Sartre. B. − [Avec compl. prép. de; avec valeur intensive] Ce qui, seul au delà de toutes les apparences, correspond à la réalité profonde, à l'identité d'un être ou d'un objet. Voyez les gens qui m'estiment et qui peut-être feront sur moi une notice après ma mort... Qu'y aura-t-il de plus faux? De loin, on ne sait pas le fond, ni les détails. On sait quelques traits qui ont sailli sans raison et qui ne sont pas le vrai d'un homme (Dupanloup, Journal, 1852, p. 158).Il est (...) facile au peintre de se mentir à soi-même; et c'est par là qu'une forte tête et un sévère jugement sont nécessaires aussi au peintre. Mais il n'en use pas comme le sculpteur, dont le travail ressemble plutôt à l'investigation, car il va au vrai de la chose (Alain, Beaux-arts, 1920, p. 245). III. − [Corresp. à supra 1reSection III] A. − [À propos d'une chose; p. oppos. à copie, faux1, imitation, toc (fam.)] Ce qui n'est l'objet d'aucune contrefaçon. Vague bruit d'une déconfiture de Solar et à ce propos, ce fameux mot de lui, achetant chez Bourguignon une parure fausse de 1 500 francs à sa maîtresse (...) et lui disant: « Tu peux porter ça... On sait que tu es ma maîtresse, tout le monde croira que c'est du vrai » (Goncourt, Journal, 1860, p. 769). B. − En partic. Ce qui n'est pas suspect de fraude. 1. [À propos d'une chose] Mets-toi ça dans la tête qu'entre le vrai et le faux il n'y a jamais eu de différence. Pourquoi, en vertu de quoi un biffeton de cent balles est-il vrai? Si on le baptise faux dans l'Journal Officiel, le lendemain, il est faux (Fallet, Pigalle, 1981 [1949], p. 71). 2. [À propos d'une action ou du comportement d'une pers.] Yoyo rit de voir les yeux du catcheur s'emperler sous l'assaut brutal de l'alcool. « Ça, c'est pas comme sur le ring, hein? C'est du vrai, s'agit plus de faire semblant » (P. Cauvin, Pourquoi pas nous?1989 [1978], p. 118). 3eSection. Adverbe I. A. − 1. Conformément à la réalité des faits, sans se tromper, sans mentir ou sans chercher à le faire. Puissiez-vous dire vrai! Quand nous repassâmes devant les deux sœurs, ma chère maman me les montra gravement du doigt. − Vois; elles ne rient plus. Et maman disait vrai. Les sœurs avaient changé d'expression, elles ne riaient plus (A. France, Pt Pierre, 1918, p. 91).V. faux1II A 1 ex. de Chateaubriand et ex. 16. − [Le groupe verbal est empl. comme subst.] Le parler vrai. Où êtes-vous, les vieux intransigeants, les vieux qui disiez qu'une pensée sincère valait mieux que tous les atermoiements, que le difficile c'était d'essayer de penser vrai, le dire vrai allait ensuite de soi? (L. Schwartzenberg, La Société hum., 1989 [1988], p. 22). 2. Conformément à la logique, d'une manière exacte. Synon. juste.Il est également évident qu'on voit plus vrai d'en haut que d'en bas, et qu'on pense plus juste sur la montagne que dans les quatre murs d'une cellule de la ville (Amiel, Journal, 1866, p. 216). B. − Domaine de la création littér. et artist.En respectant la réalité historique, vivante; d'une manière sincère, naturelle. Chanter, jouer vrai. Un très grand dessinateur de la forme qui voit ample, sûr et vrai, et qui voit simple (Focillon, Maîtres estampe, 1930, p. 40).La lecture de Father and Son d'Edmund Gosse est pour moi un plaisir exceptionnel (...). Que j'aime cette économie de mots, cette rigueur dans le choix de l'expression, ce souci perpétuel de dire vrai! (Green, Journal, 1949, p. 295). ♦ Faire vrai. Donner une plus grande impression de réalité. Au Théâtre libre, Antoine, pour faire vrai, faisait jouer ses acteurs dos au public, ou plutôt à ce quatrième mur invisible à travers lequel le public était admis à voir (Serrière, T.N.P., 1959, p. 145). II. − [Dans le style dir., dans des tours exclam.] Synon. de vraiment. A. − [Pour renforcer ce qu'on est en train de dire ou de penser] Vos aventures en Orient me charment. Racontez-moi bien toute votre vie. J'aime à participer aux souffrances ressenties par un homme de courage, car je les ressens, vrai! (Balzac, Langeais, 1834, p. 256).Non, je ne suis pas plus difficile qu'une autre, j'ai touché à du linge bien dégoûtant dans ma vie; mais, vrai, celui-là, je ne peux pas (Zola, Assommoir, 1877, p. 508). − [Avec redoublement de vrai] Quand Bougras voyait son jeune ami bien habillé, il sifflait entre ses dents et disait: « Peste! » ou « Mazette! » ou encore: « Vrai de vrai, c'est un lord! » avec un rien d'ironie dans la voix (R. Sabatier, Les Allumettes suédoises, 1986 [1969], p. 284). B. − 1. [Manifeste l'émotion ou l'ironie] Non mais vrai! Qu'est-ce que vous leur racontez encore aux Parisiens? Vrai, il faut qu'ils aient bon caractère. Leur en faites-vous assez gober de ces blagues! (Céard, Soir. Médan, Saignée, 1880, p. 158).Il paraît même que la Légion en serait [d'une attaque] (...). Enfin, on a tout prévu: les brancardiers pour nous ramasser et les aumôniers pour la messe des morts. Je suis resté une minute interloqué (...). « Non, il faut encore aller faire les fous dans la plaine? Eh bien vrai... » (Dorgelès, Croix de bois, 1919, p. 80). ♦ Non* vrai. 2. [Dans des tours à valeur interr.; exprime l'étonnement, le doute] Vous m'aimez donc un peu? Vrai? Eh bien, c'était une de mes ambitions. Je suis très ambitieux (Hugo, Corresp., 1864, p. 474).− Qui est celui-ci? demanda Suzanne en se penchant vers Philippe. Philippe haussait les épaules. Il répondit en riant: − C'est un fou, vous le voyez bien. − Comment, reprit le jeune homme aux longs cheveux en secouant la tête, vrai! vous ne nous connaissez pas? C'est incroyable (Duhamel, Suzanne, 1941, p. 52). Prononc. et Orth.: [vʀ
ε]. Ac. 1694, 1718: vray; -aye; dep. 1740: vrai, -aie. Étymol. et Hist. A. Adj. 1. a) ca 1100 « conforme à la vérité (par opposition à la fiction, l'imitation...) » (Roland, éd. J. Bédier, 3368); b) ca 1200 (1reContinuation de Perceval, éd. W. Roach, t. 1, p. 74: li vrais Jhesus; p. 228: li verais Dieu); c) déb. xives. (Ovide moralisé, éd. C. de Boer, t. 4, p. 34: se c'est statue ou femme vroie); d) ca 1370 (Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, p. 349: et ne dison pas que elle [enbulie c.-à-d. rectitude de conseil] est vraie ou fausse, mais que elle est bonne ou male); e) 1377 (Oresme, Ciel et Monde, éd. A. D. Menut et A. J. Denomy, p. 332: le vrai midi immobile; p. 436: la vraie cause de fredeur; p. 514: la vraie solucion ou responce a ceste question); 2. impers. a) 1349 (Guillaume de Machaut, Alerion, éd. E. Hoepffner, 2063: il est vray c'un propos formay; 4281: il est vray [en incise]); b) ca 1460 (Pathelin, éd. J. C. Aubailly, 1306: vray com messe); c) 1625 tant il est vrai que (J. Camus, Palombe, p. 379); 3. a) ca 1165 « sincère, loyal » (Benoît de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 13509: Mon cuer aureiz toz jorz verai); b) fin xiie-déb. xiiies. amour veraie (Chansons attribuées au Châtelain de Couci, éd. A. Lerond, IV, 27); c) ca 1220 vrais amis (Gautier de Coinci, Mir., éd. V. F. Koenig, I Mir 21, 182); d) 1306 (Joinville, Saint Louis, éd. N. L. Corbett, p. 92: Se il meurt en vraye foy; p. 97: ceulz qui [...] moururent vrais croisiez); e) 1340 (Guillaume de Machaut, Roy de Behaingne, 146: Car il estoit vrais, loiaus et secrez); 4. a) 1377 (Id., Chanson, éd. Chichmareff, p. 613, 40: Vous estes le vray saphir Qui puet tous mes maux garir); b) 1547 (N. Du Fail,
Œuvres, éd. J. Assézat, t. 1, p. 106: il regnoit en son quartier comme un petit demy dieu et vray coq de paroisse); 5. 1478-80 vrais moyens (Guillaume Coquillart,
Œuvres, éd. M. J. Freeman, p. 37); 6. 1660 arts (Corneille, Discours du poëme dramatique ds
Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 1, p. 15: Il n'est ni vrai ni vraisemblable qu'Andromède, exposée à un monstre marin, aye été garantie de ce péril par un cavalier volant). B. Subst. 1. 1342 savoir de vray (Guillaume de Machaut, Dit dou Lyon, 269); 2. 1349 (Id., Alerion, 3079: J'en responderoie briefment Le vray un po couvertement); 3. 1349 affermer pour vray (Id., Roy de Navarre, 1520); 4. 1368 au vrai considerer (Froissart, Orloge amoureus, éd. P. F. Dembrowski, p. 83, 6); 5. 1657 (Aubignac, La Pratique du Théâtre, p. 76: le vrai n'est pas le sujet du théâtre). C. Adv. fin xives. a vray dire (Jean Gerson, Sermon pour la Noël, éd. L. Mourin, t. 1, p. 308). Du lat. pop. *veracus, forme issue, par renforcement expr., de verus « vrai » (cf. viiies. veragos homines « témoins dignes de foi », v. Du Cange, s.v. veragus, cartam veracem et legitimam « charte vraie et légitime », veraciter adv. « conformément à la vérité », v. Nierm.); dans les lang. rom. on retrouve des types de renforcement pour lesquels il faut prob. supposer des modèles différents (v. FEW t. 14, p. 274). Issues du lat. verus les formes voir, veir, ver « vrai » sont att. du xeau xvies. (v. Gdf., s.v. voir; FEW t. 14, p. 329), v. aussi voire. Fréq. abs. littér.: 35 669. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 42 966, b) 49 091; xxes.: a) 50 833, b) 58 160. Bbg. Bertrand (D.). C'est vrai? C'est bien vrai? Actes sémiot. B. 1984, t. 7, no30, pp. 54-58. − Grundt (L. O.). Ét. sur l'adj. invarié en fr. Bergen-Oslo-Tromsø, 1972, p. 46, 360; pp. 372-376. − Henschel (B.). Qq. dat. nouv. du 18es. Fr. mod. 1969, t. 37, p. 131. − Kleiber (G.), Riegel (M.). Les « Grammaires floues ». B. jeunes Rom. 1978, no21/22, pp. 67-123. − Martin (J.). Entreprise sém. et entreprise philos. Modèles ling. 1984, t. 6, no2, pp. 141-166. − Quem. DDL t. 19, 38. |