| VOULOIR1, verbe trans. I. − Empl. trans. dir. A. − [Le suj. désigne une pers.] 1. Avoir la ferme intention, le souhait, le désir de. a) Empl. abs. Avoir de la volonté, faire preuve de volonté. Art, faculté de vouloir; savoir et vouloir; il faut vouloir pour agir. Il ne suffit pas toujours de vouloir pour être heureux (Lemaitre, Contemp., 1885, p. 210).On pourrait se demander si la volonté, même lorsqu'elle veut pour vouloir, n'obéit pas à quelque raison décisive, et si vouloir serait vouloir librement (Bergson, Essai donn. imm., 1889, p. 126).V. acte1ex. 1, agir ex. 2, fonction I B 1 b ex. de Valéry, oser ex. de Hugo. − Loc. proverbiale. Vouloir c'est pouvoir. La détermination mène à la réussite (d'apr. Rey-Chantr. Expr. 1979). Pour réussir dans le monde, seigneur étudiant, retenez bien ces trois maximes: voir, c'est savoir; vouloir c'est pouvoir; oser, c'est avoir (Musset, Quenouille Barb., 1840, i, 2, p. 285). − Vouloir vouloir. « Il suffit de vouloir ». Mais on dit cela sans bien réfléchir, car à partir du moment où l'on se met à vouloir, le problème est résolu, quel qu'il soit. Aussi la vraie difficulté n'est-elle pas de vouloir, mais de vouloir vouloir (Green, Journal, 1945, p. 247). b) [Le compl. d'obj. dir. est un inf., une complét. ou un pron. neutre]
α) [Le compl. est un verbe à l'inf.] Synon. entendre (v. ce mot II B, C).Vouloir comprendre; vouloir épouser qqn; vouloir parler d'autre chose; vouloir partir; vouloir absolument s'amuser; vouloir à tout prix rester. Camus veut nous faire apparaître le néant intérieur de son héros, et, à travers lui, notre propre néant (Sarraute, Ère soupçon, 1956, p. 16).Gillou qui a dix-sept ans veut à toute force entrer dans la résistance (G. Marcel, Heure théâtr., 1959, p. 51).V. savoir1I A 2 ex. de Genevoix. − Expr. Si tu veux le savoir! V. savoir1I A 2. − Souvent à la forme nég. Je ne veux pas ennuyer plus longtemps mes lectrices (Léoty, Corset, 1893, p. 102).Elle me disait pour me consoler qu'elle n'aurait voulu pour rien au monde me rendre malheureux (J. Bousquet, Trad. du sil., 1936, p. 156). ♦ Locutions Ne pas vouloir abuser. Ne pas vouloir abuser du temps, de la patience de qqn. Demain, je passerai brièvement sur ces différents types de fédéralisme qui ne seraient pas très longs à expliquer, mais je ne veux pas abuser (Scelle, Fédéralisme eur., 1952, p. 22).Ne vouloir rien avoir à faire avec. Mais Malraux scandalise. Nos critiques sont des Cathares: ils ne veulent rien avoir à faire avec le monde réel (Sartre, Litt., 1948, p. 38).Ne vouloir rien entendre. V. entendre I B 2 a β.Ne pas vouloir en entendre parler. V. entendre I A 2 a.Ne/n'en rien vouloir savoir; ne pas vouloir savoir qqc. Décider d'ignorer quelque chose, refuser d'écouter les objections de quelqu'un. (Je ne) veux pas le savoir (fam.). V. savoir1I C 3 a. − [Suivi d'une tournure verbale en en] ♦ Vouloir en avoir le cœur net. V. en2II B 1 b ex. de Camus. ♦ Vouloir en finir. La France veut en finir avec la guerre civile (Thiers,1871ds Rec. textes hist., p. 65). ♦ Expr. Si vous voulez m'en croire. V. en2II B 2 b ex. de Bernanos. ♦ [Dans une interr. dirr. ou indir.] Où veux-tu en venir? Voilà où je voulais en venir; voilà quel rêve remplissait mes jours et troublait mes nuits (Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 175).V. où III A 1 b ex. de Dumas père. − [Au cond.] ♦ [Sert à exprimer un souhait de manière discrète, à exprimer un désir plutôt qu'une volonté] Il la regardait dormir, il aurait voulu la boire (L. Ménard, Rêv. païen, 1876, p. 98).V. que I C 2 a ex. de Gide.[Atténuation polie de je veux] Je voudrais dire un mot; je voudrais attirer votre attention sur; je voudrais vous parler en particulier. Je voudrais bien savoir, pensai-je en me rongeant les doigts, depuis quand et à quel propos on rend la justice à Greenock au nom de la reine de Saba (Nodier, Fée Miettes, 1831, p. 134).Littér. [Dans un discours, un raisonnement] Je voudrais commencer cette conférence en rappelant quelques-uns des traits les plus originaux du monde moderne (Berger, Homme mod. et éduc., 1962, p. 115). ♦ Je voudrais (bien) vous y voir. V. voir 1reSection I B 1. − Locutions ♦ Vouloir dire. Chercher à exprimer, à énoncer quelque chose (d'une certaine manière). Que veut dire cet homme? (Ac.).D'un tel processus, l'expérience quotidienne nous donne mille exemples dans la vie courante: que de fois nous arrive-t-il d'interrompre notre interlocuteur pour lui dire: « Je ne vous suis plus: que voulez-vous dire au juste... » (Marrou, Connaiss. hist., 1954, p. 91).V. comment ex. 13, dire1ex. 14, hasard I A 1 ex. de Lachelier.En incise. Voilà donc masqué ce grand fait d'histoire de l'alimentation, je veux dire, la diminution constante du nombre des plantes alimentaires récoltées sur place (L. Febvre, Entre Benda et Seignobos, [1933] ds Combats, 1953, p. 95). ♦ Vouloir rire. V. rire1I A 2 c.Vous voulez rire. V. rire1I A 2 c ex. de Courteline. − Vx. Être d'un caractère à demander ou à exiger (telle ou telle chose). Il y a des enfants qui veulent être menés par la crainte (Ac.1798-1878).
β) [Le compl. est une complét. en que, le suj. de la complét. étant différent de celui de vouloir] Souhaiter, avoir l'intention déterminée de faire faire quelque chose. Synon. entendre (v. ce mot III B, C).Vouloir que qqn obéisse, que qqn s'amuse. Je veux que tu me racontes ton roman (Salacrou, Terre ronde, 1938, i, 4, p. 166).V. quand I A 1 rem. 2 ex. de Peyré. − [Au cond.] Je voudrais tant que mon ménage ressemblât au vôtre... Je suis très ambitieux! (Bernstein, Secret, 1913, i, 6, p. 10). − [Dans une formule de politesse servant à engager une action, faire une proposition] Voulez-vous que nous discutions ensemble de ce problème? Voulez-vous que je vous offre quelque chose? (Van der Meerschds Lar. Lang. fr.).
γ) [Le compl. est un pron.] − [Le compl. est le pron. neutre le] ♦ [Pour signifier à qqn qu'il a bien mérité ce qui lui arrive, qu'il doit accepter les conséquences de ses actes] Tu l'auras voulu; vous l'avez voulu, vous l'aurez voulu. Ne m'échauffe plus les oreilles, fillette. Tu l'as voulu; je te garde ici jusqu'à demain (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 90). ♦ [Le suj. désigne une autorité, une pers. qui donne des ordres] Avec des ministres qui changent tous les dix-huit mois, rien n'est commode comme de répondre aux reproches les plus fondés: Le ministre l'a voulu (Stendhal, Mém. touriste, t. 1, 1838, p. 156).Expr. [Le suj. désigne Dieu] Si Dieu le veut. Enfin, il a vu l'impression de deux œuvres en prose, les Commentaires de Socrate, (...) et Claire Lobscure, titre principal de plusieurs nouvelles pour être l'une et l'autre continuées si le veut Dieu (Verlaine,
Œuvres en prose compl., Paris, Gallimard, 1972 [1884], p. 691).Dieu l'a voulu. Dieu l'a voulu. Et pour ce motif-là, j'accepterais aussi bien un monde qui ne serait que mal qu'une larme d'enfant (S. Weil, Pesanteur, 1943, p. 81). ♦ Loc. Sans le vouloir. Sans en avoir l'intention. Synon. par inadvertance, involontairement.[Arnauld] a fait une chose humainement grande: il a créé la secte janséniste, mais sans le vouloir, sans même y songer (Bremond, Hist. sent. relig., t. 4, 1920, p. 286).Il faut le vouloir. Il faut en avoir la volonté. L'amour est une fièvre, une maladie, et je suis guérie. Vous guérirez aussi, mais il faut le vouloir (Karr, Sous tilleuls, 1832, p. 142). − [Avec (tout) ce que] On trouve là tout ce qu'on veut. V. désirer II A 1 b ex. de Hugo.P. ext. Tout ce que tu voudras. Tout, tout ce qu'on peut imaginer. Tu connais ma tante Zulma?... Eh bien, étant enceinte, elle eut une envie de morue. C'était idiot, c'était grotesque, c'était tout ce que tu voudras, mais enfin elle eut cette envie (Courteline, Vie mén., Envie, 1890, i, p. 107). ♦ Faire ce qu'on veut; fais ce que tu veux, ce que tu voudras; faites ce que vous voulez, ce que vous voudrez. Les clients, une fois sortis, font ce qu'ils veulent (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 235).Faire de qqn (tout) ce qu'on veut. Avoir une grande emprise sur cette personne, sur sa volonté, ses actes (d'apr. Ac.). ♦ Savoir ce qu'on veut; ne pas savoir ce qu'on veut; ne savoir ce qu'on veut. V. savoir1I C 1.V. contradictoire ex. 6. ♦ Ce que femme veut. V. femme I B 2 l ex. de Goncourt.Expr. proverbiale, p. plaisant. Ce que femme veut, Dieu le veut. V. dieu 2eSection II B 1. − [Le compl. est un pron. interr. ou une loc. interr.] Qu'est-ce que vous voulez? Le tour est joué. L'histoire est faite. Que voulez-vous de plus? − Rien. Sinon: savoir pourquoi (L. Febvre, L'Hist. historisante, [1947] ds Combats, 1953, p. 118).Que veux-tu? V. que II A 1 a ex. de Giraudoux.
δ) [P. ell. de l'inf., de la complét. en que ou du pron. neutre] − [P. ell. de l'inf. ou du pron. neutre] ♦ [Dans une tournure avec qui suj. ou compl.] Le fasse qui voudra. N'est pas journaliste qui veut. Trousser un écho, rédiger une chronique, faire un article, c'est un art (Coston, A.B.C. journ., 1952, p. 95).V. qui I B 1 c ex. de Valéry et qui I B 1 d ex. de Malraux. ♦ Dans une loc. exclam. ou compar. Autant qu'on veut, tant qu'on veut, comme on veut, où on veut, quand on veut. Autant qu'on peut le souhaiter, à sa guise, à son gré. Comme tu voudras! Le gros des forces n'est pas libre d'agir où l'on veut et comme on veut (Foch, Princ. guerre, 1911, p. 165).Je descendrai jusqu'aux plaines, et je prendrai le courrier de Banon. Qu'est-ce que tu en dis, Ulalie? (...) − Fais comme tu veux (Giono, Colline, 1929, p. 190). − Loc. Quand tu voudras, quand vous voudrez. Quand tu seras prêt, quand vous serez prêt. V. quand II ex. de Staël. − [P. ell. du pron. neutre le ou de la complét. en que] Expr. pop. Ça va(-t-il) comme tu veux/vous voulez? Et ça va toujours comme vous voulez, madame Laure? (A. France, Crainquebille, 1905, 3etabl., 1). − [P. ell. de l'inf.] C'est comme ça! On ne fait pas ce qu'on veut! (Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 254).Ce que nous avons voulu dans ces pages, c'est présenter moins une défense qu'une illustration des jeunes paysans, faire saisir leurs difficultés (Debatisse, Révol. silenc., 1963, p. 263). ♦ (N')en vouloir pour exemple, pour preuve, pour témoin que... (Ne) vouloir citer, donner pour exemple, pour preuve, pour témoin de quelque chose, que... La guerre (...) reçoit sa forme (...) des rapports qui existent au moment où elle éclate. Je n'en veux pour exemple que les transformations originelles qu'eurent à subir les armées de l'Europe se battant avec Napoléon pour arriver à la victoire (Foch, Princ. guerre, 1911, p. 38).J'en veux pour preuve qu'on peut remplacer l'objet par une photographie (Warcollier, Télépathie, 1921, p. 340). c) [Le compl. d'obj. dir. désigne une chose; c'est un subst. ou un pron. neutre]
α) Qqn veut qqc.Avoir l'intention déterminée d'obtenir quelque chose, souhaiter vivement quelque chose. Vouloir l'impossible; vouloir la paix; vouloir le bonheur de qqn. Une bourgeoisie basse et jalouse, qui nous hait et veut notre ruine (Sandeau, Mllede la Seiglière, 1848, p. 117).Maxence veut avant tout la vérité (Psichari, Voy. centur., 1914, p. 93). − Proverbes ♦ Qui veut la fin veut les moyens. V. fin1B 1 ex. de Dumas père.[P. réf. au proverbe] L'essentiel est de vouloir la fin pour trouver les moyens (Capelle, Éc. demain, 1966, p. 71). ♦ Si tu veux la paix, prépare la guerre. V. paix I A. − Loc. Vouloir le mal pour le mal. V. mal3III A 1. − [Le compl. d'obj. dir. désigne un objet concr.] On veut des romans d'amour, de chevalerie et les policiers de l'époque où il y a des revenants et des voleurs (Civilis. écr., 1939, p. 18-5). ♦ [Le compl. d'obj. dir. désigne des avantages pécuniaires, soc.] Vouloir une augmentation, une promotion. V. dû ex. 7. ♦ [Le compl. d'obj. dir. désigne une denrée comestible] Voulez-vous un apéritif? « Je veux des asparges », dit Anthime; la mère rectifia: « asperges », dis: « des asperges, ou tu n'en auras pas! » « Je veux des asparges! » (Châteaubriant, Lourdines, 1911, p. 36).[Au cond.] Je voudrais un autre demi; pas vous? − Non, j'ai trop chaud, dit Anne (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 225). − [Avec un attribut du compl. d'obj. dir.] Souhaiter avoir, proposer une chose qui présente certaines qualités. Vouloir un steack saignant. La merluche se réduit en une espèce de crème. Si vous la voulez verte, vous pilez des épinards dont vous joignez le suc (Gdes heures cuis. fr.,Grimod de la Reynière,1838, p. 159): Cet art, il le veut conforme à ce qu'il appelle la réalité: c'est pourquoi il garde la nostalgie de certains aspects du réalisme. Il le veut agréable à sa sensibilité, brillant, luisant et quelque peu voluptueux...
Cassou, Arts plast. contemp., 1960, p. 16.
β) [Avec compl. prép. à/pour] Souhaiter que quelque chose arrive à quelqu'un. Vouloir un avenir brillant pour qqn. − Vouloir du bien, du mal à quelqu'un. Souhaiter qu'une personne soit heureuse ou malheureuse; avoir de bonnes ou de mauvaises intentions à l'égard de quelqu'un. Je ne te veux absolument aucun mal (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 108).Ne jamais vouloir de mal à quelqu'un, ne vouloir de mal à personne. V. mal3II A 2 a ex. de Barante. ♦ Un ami qui vous/te veut du bien. V. bien3I B 2 a. − [Dans une interr. dir. ou indir. à valeur exclam.; sert à exprimer le fait qu'une pers. craint qu'une autre pers. cherche à l'importuner] Qu'est-ce qu'il nous veut, ce gendarme, de nous examiner comme ça? (A. Daudet, Tartarin Alpes, 1885, p. 199).V. que ex. 11.
γ) Qqn veut qqc. de qqn.Attendre ou accepter quelque chose de la part de quelqu'un. Vous n'avez rien voulu de moi, dit Calyste, je rendrais votre fortune à vos héritiers (Balzac, Béatrix, 1839, p. 94).V. que II B 1 c ex. de Mauriac.
δ) [En parlant du prix d'une chose à vendre] Qqn veut qqc. de qqc.Demander tel prix pour tel objet. Vouloir tel prix de qqc. Que voulez-vous de ce cheval? (Ac.1835-1935).Je te l'achète cinq cents écus [ton bétail] ! et l'on tend la main pour « taper l'accord ». − Non, j'en veux six cents! (Menon, Lecotté, Vill. Fr., 2, 1954, p. 67). − [P. ell. du compl. prép.] Combien veux-tu? V. combien I A 1 b rem. d) [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.]
α) Qqn veut qqn.Rome veut un maître. − Désirer, posséder charnellement. Synon. désirer (v. ce mot II A 2 c).Vouloir une femme. Tu sais aussi que je te veux plus encore que tu ne peux me vouloir. Tout moi te veut. Je t'appartiens. Tu m'as demandée; je suis venue (Maran, Batouala, 1921, p. 122). ♦ P. anal. [Le suj. désigne une jument] Vouloir l'étalon. Être en chaleur. (Ds Lar. Lang. fr.). − [Le compl. d'obj. dir. désigne un enfant auquel on donne naissance] Vouloir, ne pas vouloir d'enfant. Elle aurait voulu un garçon, parce que les garçons se débrouillent toujours (Zola, Assommoir, 1877, p. 468). − [Avec un compl. circ.] Je te veux avec nous, Raboliot (Genevoix, Raboliot, 1925, p. 238). ♦ Loc., vx. Se faire bien vouloir, mal vouloir de qqn. ,,Gagner son affection, s'attirer son inimitié`` (Ac. 1835, 1878). − [Avec un attribut du compl. d'obj. dir.] Et si tu consentais à n'être qu'à moi, oh! Je te voudrais la plus belle, la plus riche, voitures, diamants, toilettes (Zola, Nana, 1880, p. 1335). ♦ Empl. pronom. réfl. Se proposer d'avoir telle ou telle attitude, tel ou tel caractère, et faire effort en ce sens. Se vouloir aimable, équitable; se vouloir témoin de son époque. Baudelaire, « l'homme qui s'est voulu grand poète sans être ni Hugo, ni Lamartine, ni Musset » (Guiraudds Langage, 1968, p. 442). ♦ [Introd. par pour] Je le veux pour époux. Voici des travailleurs non capitalistes: (...) Est-ce que vous les voulez pour ennemis? (L. Blanc, Organ. trav., 1845, p. 64).
β) Loc. pop. Vouloir la peau de qqn. V. peau B 2 p. méton. 2. Affirmer, prétendre, soutenir péremptoirement (quelque chose). Il veut absolument avoir déjà rencontré cet homme quelque part. Il y a eu, il y a encore des sociétés sans état, même s'il est vrai, comme voulait Hegel, que l'histoire ne commence qu'avec l'avènement de l'État (Traité sociol., 1968, p. 390). − Absol., loc. pop. [Pour renforcer une réponse, pour marquer une assertion, une approbation] Je veux! je veux mon neveu ! Je prétends absolument, cela ne fait aucun doute, c'est sûr et certain. Synon. et comment! plutôt! je te crois.Alors comme ça vous l'avez connu? − Je veux, dit Léonie. Ç'a été mon premier béguin (Queneau, Pierrot, 1942, p. 34).− Bon, ça va être la fête au 8 de la rue que je te parle. − Je veux, mon neveu (Sapho, Ils préféraient la lune, 1986, p. 85 ds Bernet-Rézeau 1989). 3. [À la 2epers., dans une phrase interr. ou exclam.; le compl. d'obj. dir. est une complét. Indique que le locuteur, résigné ou devant une situation insoluble, s'en remet à son interlocuteur ou le prend à témoin] Que voulez-vous que je vous dise? Comment veux-tu que je m'en sorte? Qu'est-ce que vous voulez que j'en sache? Mais qu'est-ce que tu veux que ça lui fasse, à bonne maman, de recevoir ou non une lettre de moi? (Gide, Si le grain, 1924, p. 376).V. comment I B 1 c ex. de Zola, qui I D 2 ex. de Claudel. − P. ell., parfois en incise. [Marque l'embarras ou la résignation] Que veux-tu, que voulez-vous. Qu'est-ce que vous voulez, mon garçon!... On m'a commandé de vous mettre dans le cachot de Bonnivard (...) Je vous mets dans le cachot de Bonnivard (A. Daudet, Tartarin Alpes, 1885, p. 209). 4. [Le compl. est un inf., une complét. en que ou un pron. neutre; souvent avec l'adv. postposé bien] a) Accepter quelque chose, concéder quelque chose à quelqu'un, consentir à quelque chose. Voulez-vous danser avec moi? Vous voulez bien que je vous embrasse? Dorothy oh! mais avec plaisir! (Bourdet, Sexe faible, 1931, ii, p. 402). − [Dans une réponse ell.; formule de politesse par laquelle on donne son accord] − « Encore un morceau? − Je veux bien (...) » (Flaub., Bouvard, t. 1, 1880, p. 77). − Loc. Que tu le veuilles ou non/Que vous le vouliez ou non. Avec ou sans ton/votre consentement. Car tu trembles! car j'ai senti, que tu le veuilles Ou non, le tremblement adoré de ta main (Rostand, Cyrano, 1898, iii, 6, p. 132).V. non I A 4 ex. de Mauriac. − [Formules servant à introduire un souhait dont on n'ose croire que le ciel accepte de le réaliser] Dieu veuille... Veuille le juste Ciel... Veuille le ciel n'avoir permis qu'à moi de le surprendre (Gide, Caves, 1914, p. 789).Dieu veuille vous garder à vous, ma Mère! (Bernanos, Dialog. Carm., 1948, ii, 4, p. 1590). b) Loc. ell., gén. en incise
α) Si tu veux, si vous voulez, si l'on veut − Si cela te/vous fait plaisir. Si vous voulez, madame, Cette bourse est à vous, cette autre, et celle-ci (Musset, Coupe, 1832, iv, 1, p. 313). − [Précédé de ou ou de et; formule empl. pour marquer une précision ou pour introduire une approximation par rapport à ce qui a été exprimé] Elle est, depuis 1875, ou, si vous voulez, depuis 1878, aux mains des Républicains déclarés (Challemel-Lacour,1888ds Fondateurs 3eRépubl., p. 154).Réserves de méthode et, si l'on veut, de principe (L. Febvre, Entre Benda et Seignobos, [1933] ds Combats, 1953, p. 78). − [Fréq. dans la conversation; formule par laquelle on cherche à associer l'interlocuteur au déroulement du raisonnement, du propos, à lui signifier qu'on tient compte de sa présence] Cherchons ensemble, si vous voulez, les lois de la société, le mode dont ces lois se réalisent, le progrès suivant lequel nous parvenons à les découvrir (Proudhon, Lettre à Marx, 1846ds Doc. hist. contemp., p. 235). ♦ Si vous le voulez. Un développement d'orchestre peignant, si vous le voulez, le passage tumultueux de la caravane, mais qui pourrait aussi bien peindre autre chose, ou ne rien peindre du tout (P. Lalo, Mus., 1899, p. 339).Il y a beaucoup à dire sur la Grande Bretagne et sur les Anglais, ce sera, si tu le veux bien, pour la revue (Nizan, Conspir., 1938, p. 157).
β) Si Dieu veut. Avec le consentement de Dieu. Et il faudra que je jette au monde beaucoup de petits tueurs, si Dieu veut, et avec l'aide des astres (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 573). c) [Avec une valeur impér.; dans une phrase interr. à valeur exclam., ou dans une phrase exclam.] Voulez-vous me suivre? Voulez-vous fermer la porte! Voulez-vous vous taire, voulez-vous bien en finir! (Ac.1835-1935).Qui va faire l'article?... Daudet, voulez-vous vous en charger? (L. Daudet, Brév. journ., 1936, p. 22). − [Au fut., exprime un ordre] Mademoiselle, vous voudrez bien aider un peu Alphonsine dans ses travaux de lingerie (Bazin, Vipère, 1948, p. 49). − [En fin de phrase] Veux-tu? voulez-vous? Hugo verse-moi à boire, veux-tu? (Sartre, Mains sales, 1948, 5etabl., 1, p. 180). ♦ [Pour s'assurer de l'accord de son interlocuteur] Je viendrai dîner chez vous demain, voulez-vous? (L. Febvre, G. Espinas, [1950] ds Combats, 1953, p. 405). − Loc. exclam., p. ell. Veux-tu! [Tournure par laquelle le locuteur exprime son opposition à ce que fait son interlocuteur; souvent en empl. hypocor.] − Yvonne! Yvonne! (Yvonne la frappe presque). Veux-tu! (Cocteau, Parents, 1938, i, 5, p. 211). − [Dans une formule de politesse, gén. avec bien; sert à tempérer l'ordre contenu dans l'inf. qui suit] Si Monsieur veut bien me suivre! Si sa Majesté voulait avoir la bonté d'agréer sa demande instante d'ordonner l'adoption de cette dernière solution (Affaire Dreyfus, 1900, p. 256). ♦ [Précédé de prier de] Bien vouloir. [Formule gén. considérée comme plus courtoise que vouloir bien] Je prie donc le lecteur de bien vouloir interdire que l'inconsistance de ce conte de fées nuise à ce qui précède (David, Cybern., 1965, p. 172).V. prier C 2 ex. de Farrère.Loc. Je vous prie de bien vouloir agréer. [Dans des formules épistolaires; exprime un « appel courtois au bon vouloir »; utilisé notamment lorsqu'on s'adresse à un supérieur hiérarchique (d'apr. Admin. 1972)] Je vous prie de bien vouloir agréer, Monsieur le Ministre, les assurances de ma haute considération (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 334).Vouloir bien. [Notamment dans des formules admin. et lorsqu'on s'adresse à une pers. d'un rang hiérarchiquement inférieur; tournure polie mais impér.] On le pria de vouloir bien en informer l'évêque (Billy, Introïbo, 1939, p. 113). ♦ [À l'impér. de politesse] Veuillez continuer, poursuivre votre déposition; veuillez préciser votre question; veuillez entrer, vous donner la peine d'entrer. Veuillez n'en rien dire à personne (Ac.1835-1935).[Dans des tournures épistolaires] Veuillez agréer, veuillez croire, chère Madame, à mes sentiments les meilleurs. V. agréer1ex. 16. ♦ [Au cond. de politesse] Merci mon ami. Voudriez-vous nous laisser seuls (Camus, Possédés, 1959, 3epart., 15etabl., p. 1079). d) [Avec une nuance concessive; le compl. est un inf., une complét. ou un pron. neutre] Admettre quelque chose, consentir à quelque chose. J'accuse le lieutenant-colonel du Paty de Clam d'avoir été l'ouvrier diabolique de l'erreur judiciaire, en inconscient, je veux le croire (Zola, « J'accuse »,1898ds Doc. hist. contemp., p. 60). − [Souvent renforcé par bien] Ce n'est pas aussi important que l'on veut bien le croire; je veux bien croire que vous avez dit la vérité. Dans les arts, dans les lettres, et même dans ce qu'on veut bien appeler la politique (Viollet-Le-Duc, Archit., 1872, p. 397).Les procédés photographiques de reproduction polychrome ne sont pas toujours aussi « mécaniques » qu'on veut bien le dire (Prinet, Phot., 1945, p. 72). ♦ [Avec une complét. en que + subj.] Je veux bien que vous ayez oublié cela. Fam. Je veux bien que cela soit. Je suppose que cela est ainsi, quoique je n'en convienne pas. (Ds Ac.). Pop. [Avec l'indic.] Et la nièce, donc, l'héritière! on ne l'a jamais vue ici, sa nièce. Je veux bien qu'il y a eu des brouilles. Alors pourquoi qu'elle hérite? (Bernanos, Crime, 1935, p. 818). − Expr. Je veux être pendu si..., je veux qu'on me pende si... . V. pendre I A 2. B. − P. anal. [Le suj. désigne une chose] 1. Loc. Vouloir dire a) [Le suj. désigne un mot, une expr., un texte] Signifier, avoir telle signification. Que veut dire cette clause? (Ac.). Expliquer veut dire: ramener à des termes connus, et en linguistique expliquer un mot, c'est le ramener à d'autres mots (Sauss.1916, p. 259). b) [Le suj. désigne une chose, un fait] Être le signe de quelque chose. Vouloir dire qqc. (v. dire1III A 3). J'apprends qu'ordre a été donné de traiter moins durement Dreyfus. Cela ne veut pas dire grand-chose... car les dernières nouvelles représentent le prisonnier comme mourant de fièvre et de dysenterie dans une cabane qui ressemble à la cage d'un fauve dans les jardins zoologiques (Affaire Dreyfus, 1900, p. 131).[À la forme interr., dans une formule par laquelle on exprime son étonnement ou sa réprobation] Mais que veut dire cela? Qu'est-ce que cela veut dire? (Ac.). − Loc. fam. Entendre ce que parler veut dire. V. entendre II A 1 b. 2. a) Vieilli ou littér. Exiger telle ou telle condition pour se développer ou être réalisé de façon satisfaisante. Synon. nécessiter.L'honnêteté, la politesse ne voudrait-elle pas que... Cette affaire veut être conduite avec ménagement (Ac.). − [Le compl. d'obj. dir. est un subst.] Les papiers [d'état civil] veulent beaucoup de temps, et je ne sais pas si, avec l'activité que tu sais, j'aurai les miens le 15 août à cause des légalisations (Balzac, Lettres Étr., t. 3, 1846, p. 354).Toute analyse veut d'abord, comme outil, un langage approprié (M. Bloch, Apol. pour hist., 1944, p. 79). ♦ [Le suj. désigne un végét.] Cette plante veut un terrain humide (Ac. 1878, 1935). Plante exigeante, le houblon veut des terres profondes, fertiles et fraîches (Industr. fr. brass., 1955, p. 4). b) Exiger de par sa nature, tendre à. Un pantalon à sous-pieds, mais flétri, dont la façon voulait des bottes vernies (Balzac, Début vie, 1842, p. 479).Quelques récitatifs qui veulent être « dits » sans emphase et non « posés » (Berlioz, À travers chants, 1862, p. 216). c) [Dans une phrase nég.; sert à renforcer la négation] Être capable de, ou être dans l'impossibilité de. La voiture ne veut pas démarrer. Ce bois ne veut pas brûler (Ac.). Cette machine ne veut pas marcher (Ac. 1935). d) Empl. pronom. réfl. Se vouloir + attribut.Se donner pour, prétendre être, avoir tel ou tel caractère. Ce journal se veut objectif; peintures qui se veulent décoratives. Le répertoire du TNP se veut donc un répertoire de haute culture (Serrière, T.N.P., 1959, p. 164).Faut-il tenter de rassembler tous ces traits dans une définition qui se voudrait parfaite? (Salleron, Comment informer, 1965, p. 11). 3. [Le suj. désigne une réalité qui s'impose ou que l'on prend pour réf.] a) [Le suj. désigne une puissance, une entité qui s'impose] Entraîner quelque chose, être responsable de quelque chose. C'est le siècle, c'est l'époque qui le veut. Si le malheur voulait que nous dussions subir une guerre (...) ce n'est pas pour une province que nous lutterions mais bien pour l'existence même de la patrie! (Clemenceau,1885ds Fondateurs 3eRépubl., p. 225).Antigone: Vous êtes odieux! Créon: Oui, mon petit. C'est le métier qui le veut (Anouilh, Antigone, 1946, p. 181).V. hasard I A ex. de Rolland. b) [Le suj. désigne une réalité que l'on prend pour réf.; le verbe de la complét. est au subj.] La coutume, la loi, la règle, la théorie, la tradition, l'usage veut que... Nos habitudes veulent que nous entassions dans nos salons plus de monde qu'ils n'en peuvent contenir (Viollet-Le-Duc, Archit., 1872, p. 296).Une légende orientale veut que de beaux yeux « pareils aux pétales de lotus épanouis » soient tombés dans une rivière où ils se sont miraculeusement multipliés (Metta, Pierres préc., 1960, p. 74). 4. [En fonction d'auxil. d'aspect; marque le fut. proche] Vieilli ou région. Rhumatismes ou fraîcheurs dont quelques-uns se ressentent encore quand le temps veut changer ([L'Héritier], Suppl. Mém. Vidocq, t. 1, 1830, p. xxxvj). Nous mettons il veut devant un infinitif, pour marquer le futur. Il veut pleuvoir, il veut faire beau (J. Humbert, Nouv. gloss. genev., 1852, p. 2). 5. Loc. À bouche(-)que(-)veux-tu − Vieilli. V. bouche II B 2 c.Au fig. V. bouche II A 3 d. − À pleine bouche, longuement. S'embrasser à bouche que veux-tu. V. bouche I B loc. − P. anal. et p. plaisant. Je me battais à poing que veux-tu (Zola, Contes Ninon, 1864, p. 264). II. − Empl. trans. indir. A. − [Le plus souvent à la forme nég.] Vouloir de 1. Vouloir de qqn.Être disposé à recevoir, à accepter quelqu'un. Ne plus vouloir de qqn. Ils savent que, pour jouer de façon à enchanter leur public, ils ont à peine besoin d'être dirigés; ils ne veulent pas d'un chef impérieux qui les contraindrait d'obéir et changerait leurs habitudes (P. Lalo, Mus., 1899, p. 347). − [Avec un compl. circ.] Le parti ne veut pas de Poincaré à l'Élysée (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 203). − [Avec un attribut de l'obj.] Ne pas vouloir de qqn pour esclave. Quant aux rédacteurs, c'est de singuliers pistolets, de petits jeunes gens dont je n'aurais pas voulu pour des soldats du train (Balzac, Illus. perdues, 1839, p. 259).Vouloir de qqn comme collaborateur, vouloir de MlleX pour épouse (Caput 1969). 2. Vouloir de qqc.[Souvent dans une phrase nég.] Être disposé à prendre, à accepter, à recevoir, à garder quelque chose. Ne vouloir de qqc. pour rien au monde. L'avenir m'effraye tant, que je ne veux pas de l'avenir, et le présent m'est insupportable (Balzac, Illus. perdues, 1843, p. 698).Vous avez tant de mérites réels, que vous devez être le premier à ne pas vouloir d'un mérite factice (Hugo, Corresp., 1862, p. 376). − [Avec un attribut de l'obj.] Je ne veux pas de cet argent comme aumône (Lar. Lang. fr.). − Loc. En vouloir pour son argent. V. argent II B loc. fig.Loc. adv. En veux-tu en voilà. V. voilà I A 1. B. − En vouloir à qqn, à qqc. 1. S'en prendre à quelqu'un, s'attaquer à quelqu'un. En vouloir à la vie de qqn (Ac. 1835-1935). Il en voulait au genre humain tout entier (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 458). − Vieilli, fam. Avoir des prétentions, des vues sur quelqu'un, désirer rencontrer quelqu'un. Il en veut à cette fille (Ac.). 2. En vouloir à qqn.Éprouver de l'hostilité, du ressentiment, de la rancune à l'égard de quelqu'un. Je lui en veux à mort (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 257). − [Avec un compl. prép. de cause] En vouloir à qqn de, pour, à cause de qqc.Éprouver du ressentiment contre quelqu'un à cause de quelque chose. En vouloir à qqn d'être méchant. Je ne sais si l'on ne nous en veut pas plus d'un espoir déçu qu'on ne nous sait gré d'une faveur (Balzac, Lys, 1836, p. 160). 3. Empl. pronom. réfl. a) S'en vouloir (de qqc.).Se reprocher quelque chose. Je m'en veux beaucoup, reprit-il en poussant le bateau à la mer (Sagan, Bonjour tristesse, 1954, p. 37). − [Avec un compl. prép. de] Il s'en veut de cet échec. Il s'en voulait d'avoir parlé trop vite (Gide, Faux-monn., 1925, p. 1144). − [Au cond.] Cette réforme s'impose tellement que je m'en voudrais de vous faire perdre votre temps et de perdre le mien à vous en entretenir davantage (Gambetta,1876ds Fondateurs 3eRépubl., p. 318). ♦ Expr. fam. [Exprime qu'à aucun prix on ne ferait ou n'accepterait telle chose] Je m'en voudrais! V. cucuterie ex. de Montherlant. b) Loc., vx. Se vouloir mal de qqc. Regretter quelque chose, s'en vouloir. Je me veux mal de ma faiblesse (Ac. 1878, 1935). 4. En vouloir à qqc.Vouloir profiter de quelque chose. En vouloir à l'argent, au porte-monnaie de qqn. Il en veut à cette charge (Ac.). C. − En vouloir.Loc. fam. Faire preuve d'une grande volonté, d'ambition. SPORTS. ,,Défendre sa chance avec acharnement`` (Petiot 1982). Le Racing qui en veut terriblement fait des efforts pour marquer (L'Auto-Vélo,23 déc. 1901,ds Petiot 1982). Rem. 1. Au subj. prés. les formes veuillions et veuilliez sont maintenant considérées comme arch. et sont remplacées par voulions et vouliez (d'apr. Hanse Nouv. 1983). 2. L'impér. s'exprime au moyen des formes veuille, veuillez + inf., qui, dans les tournures nég., peuvent faire place aux formes veux, voulez: on a ainsi ne lui en veux pas trop, ne m'en voulez pas, à côté des formes plus élégantes ne m'en veuille pas, ne m'en veuillez pas. Les formules de politesse telles Veuillez agréer, cher Monsieur, veuillez croire, ont contribué à affaiblir la valeur des impér. veuille, veuillez. REM. 1. Vouleur, subst. masc.,hapax. Ce vouleur terrible, ce travailleur à outrance, se bat nuit et jour avec une créature qui est sa compagne de foyer et de lit! (Vallès, J. Vingtras, Insurgé, 1885, p. 300). 2. Vouloir-, élém. de compos.entrant dans la constr. de subst. masc. formés sur le modèle de vouloir-vivre et exprimant la volonté de réaliser une action ou d'atteindre un état désigné par le 2eélém.a) Philos. [Chez Schopenhauer] Vouloir-vivre. -Ensemble des désirs subconscients qui constituent le fond de l'individualité et qui est à l'origine de la reproduction des individus et de la continuité de l'espèce (d'apr. Julia 1984). Antoine (...) expliquait (...) la difficulté d'extraire le projectile (...): « Oubliez ce pistolet!... Laissez, laissez la balle!... C'est le vouloir-vivre... qu'il faut... resurexciter! » (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 196). b) P. anal.
α) Vouloir-écrire. -On s'est moqué de son « vouloir- écrire » [de R. Barthes], de cette hésitation transie à l'orée d'une littérature dont les monstres − par lui adorés − appartiennent à une race évanouie (Le Nouvel Observateur, 4 sept. 1982, p. 71, col. 3).
β) Vouloir-être. -Une volonté opposée au vouloir-être (Théol. cath.t. 4, 11920, p. 1278).
γ) Vouloir-faire. -L'acquisition laborieuse d'un pouvoir par habitude, étude, gymnastique ou exercice, conditionne le passage du vouloir-faire au faire (Jankél., Je-ne-sais-quoi, 1957, p. 229).
δ) Vouloir-paraître, -ling. ,,Motivation psychologique de l'acte verbal par lequel un sujet déterminé se sert d'un niveau de langue autre que celui qu'il utilise habituellement, afin de se prévaloir du prestige qui lui est attaché`` (Lar. Lang. fr.).
ε) Vouloir-penser. -Je ne forme point de pensée sinon par ce pouvoir de penser − par ce vouloir-penser − qui est le cogito lui-même (Ricœur, Philos. volonté, 1949, p. 412). Prononc. et Orth.: [vulwa:ʀ], (il) veut [vø]. Att. ds Ac. dep. 1694. Conjug. Ind. prés.: je veux, tu veux, il veut, nous voulons, vous voulez, ils veulent ; imp.: je voulais... ; fut.: je voudrai...; passé-comp.: j'ai voulu...; p.-q.-parf.: j'avais voulu...; passé ant.: j'eus voulu...; fut. ant.: j'aurai voulu...; cond.: je voudrais...; cond. passé: j'aurais voulu.... Subj. prés. que je veuille, que tu veuilles, qu'il veuille, que nous voulions, que vous vouliez, qu'ils veuillent, rem. jusqu'au xviies., uniquement: que nous veuill(i)ons, que vous veuill(i)ez d'après les formes fortes veuille(s), veuillent; au xviies. les deux séries se concurrencent; auj. que nous voulions, que vous vouliez l'emportent mais au xixes. les aut. emploient encore volon-tiers les anc. formes que Littré jugeaient meilleures: ,,C'est un barbarisme assez récent et désormais autorisé par l'usage que de dire voulions, vouliez; mais c'est un meilleur usage de dire veuillions, veuilliez``; subj. imp.: que je voulusse, que tu voulusses, qu'il voulût...; subj. passé: que j'aie voulu...; subj. p.-q.-parf.: que j'eusse voulu...; impér.: veuille, veuillons (inus.), veuillez formés sur le subj., empl. dans les formules de politesse et veux, voulons, voulez, formés sur l'ind. pour exprimer la détermination. Littré n'admet que la 1resérie: ,,Les autres formes sont récentes et à peine intelligibles``. Mais selon Grev. 1964674: ,,Elles sont utiles, indispensables même pour exprimer à l'impératif l'idée de « faire acte de volonté » (veuille, veuillez, réduits au rôle d'auxiliaires, sont devenus impuissants à le faire)``. Rem. L'expr. en vouloir (à qqn ou qqc.) sous sa forme nég. se modèle sur le subj. dans la lang. soignée: ne m'en veuillez pas et sur l'ind. dans la lang. cour.: ne m'en voulez pas (cette forme est aussi att. dans la lang. littér.). Voir Grev., ibid. Part. prés.: voulant; passé: voulu, -ue. Étymol. et Hist. I. « Avoir la volonté, l'intention, le désir » A. 1. suivi d'un inf. a) 881 parfait 3epers. plur. (Ste Eulalie, 3-4 ds Henry Chrestomathie, p. 3: Voldrent la veintre li Deo inimi, Voldrent la faire diaule servir); 881 p.-q.-parf. 3epers. sing. [marque l'antériorité] (ibid., 21, ibid.: A czo noˑs voldrent concreidre li rex pagiens); 881 parfait 3epers. sing. (ibid., 24, ibid.: Volt lo seule lazsier); 2emoit. xes. ind. prés. 1re, 2e, 3epers. sing., 3epers. plur. vol, vols, volt, volunt (St Léger, éd. J. Linskill, 96, 94, 136, 60); ca 1050 imp. subj. 1repers. sing. volisse (St Alexis, éd. Chr. Storey, 202); ca 1100 vuleir meilz « préférer » (Roland, éd. J. Bédier, 536; 2738); 1370-72 part. prés. adj. (Nicole Oresme, Ethiques, V, 16, éd. A. D. Menut, p. 306: quant il fait telle chose non voulant); b) 1176-81 empl. pronom. réfl. (Chrétien de Troyes, Chevalier de la charrette, éd. M. Roques, 2101: Car qui se vialt antrer i puet); id. (Id., Chevalier au lion, éd. M. Roques, 1451: qui se vialt, si l'oie), v. éd. W. Foerster, 1447, p. 294, note; cf. lat. sibi velle « se proposer, avoir dessein de »; c) ca 1180 subj. prés. 2epers. sing., visée jussive (Marie de France, Fables, éd. K. Warnke, LIII, 44, De Eremita: Ne vueilles mes Adam blasmer Se le fruit de l'arbre manja), v. Moignet, p. 210; d) 1690 le suj. désigne une chose [à laquelle on prête une volonté] (Fur.: ce bois ne veut pas brûler); 2. suivi d'une complét. introd. par que suivi du subj. ca 1050 (St Alexis, 39: Or volt que prenget moyler; 249); ca 1200 subj. prés. 3epers. sing., visée optative (Guiot de Provins, Armeüre du chevalier, 434 ds
Œuvres, éd. J. Orr, p. 107: Li sire veuelle que...). B. Avec un nom, un pronom compl. 1. voleir aucune rien à aucun 2emoit. xes. voleir mal a « avoir de la haine pour » (St Léger, 101); 1174-87 voleir bien a (Chrétien de Troyes, Perceval, éd. F. Lecoy, 8514); av. 1630 pronom. réfl. se vouloir mal « se reprocher » (D'Aubigné, Sonnets, XII ds
Œuvres, éd. E. Réaume et Fr. de Caussade, t. 3, p. 252: Je me veus mal à moy qui te suis trop fidelle); 1713 empl. pronom. réciproque (Hamilton, Gram., 8 ds Littré: Deux personnes qui se voulaient tant de bien); 2. avec compl. indir. voleir d'aucune rien « accepter, s'intéresser à, se satisfaire de » ca 1050 (St Alexis, 49: Mais ç'ost tel plait dunt ne volsist nïent); ca 1200 (Guiot de Provins, Bible, 535, p. 26: Lou chateil lait et prent la monte Li sires, s'en vuet); 3. voleir aucune rien ca 1100 (Roland, 2523: Ki herbe voelt, il la prent en gisant); 1835 spéc. part. passé adj. « conforme à une volonté, requis » formalités voulues (Ac.); 4. le compl. désigne un animé, une pers. a) ca 1100 (Roland, 40; 87: S'il voelt ostages); b) α) 1remoit. xiies. « aimer quelqu'un, l'avoir en faveur » (Psautier de Cambridge, éd. Fr. Michel, XXI, 8: Il fuit al Seignur, salvet lui, delivret lui, kar il vuelt lui);
β) 1549 « désirer (une femme) » (Est.); 1920 en vouloir « vouloir de l'amour, aimer le plaisir ou l'amour » (Bauche, p. 230b); c) 1377 vouloir un oiseau « (en parlant d'un faucon) avoir envie de le poursuivre » (Gace de La Buigne, Deduis, éd. A. Blomqvist, 9684); 1845 vouloir [l'étalon] (en parlant d'une jument) (Besch.); 5. en vouloir à qqn a) 1549 « chercher à l'atteindre, le viser, le menacer » (Est.); 1646 en vouloir aux jours de qqn (Corneille, Héraclius, I, 4); b) ca 1590 en vouloir à qqn « éprouver de l'hostilité envers lui » (Montaigne, Essais, III, 12, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 1044); c) 1799 pronom. réfl. s'en vouloir de + inf. « se reprocher de » (L. B. Picard, Collatéral, V, 2 ds Littré); 6. 1643 vouloir qqc. à qqn « en attendre quelque chose » (Corneille, Polyeucte, IV, 1: Gardes, que me veut-on?). C. Avec un pron. neutre compl. (représentant un inf. ou une complét.) a) ca 1050 empl. pronom. réfl. (St Alexis, 614: Ço ad ques volt); ca 1100 (Roland, 3674: Ço voelt li reis par amur cunvertisset); id. (ibid., 3625: Paien s'en fuient, cum Damnesdeus le volt); b) ca 1050 avec ell. du compl. (St Alexis, 597: Voilent o non, sil laissent enfodir); ca 1100 (Roland, 258: Se li reis voelt; 2801: Se vos volez). D. 1553 empl. abs. « avoir une volonté agissante » (Bible, Sap., 2, 18, impr. J. Gerard d'apr. FEW t. 14, p. 216b). II. « Consentir, acquiescer » 1. a) 1remoit.xiies. avec un subst. compl. « approuver, acquiescer à » (Psautier de Cambridge, XXXVI, 23: Del Seignur li alemant de hume serunt confermet, e la veie de lui voldrat); b) ca 1208 un inf. compl. (Geoffroi de Villehardouin, Conquête de Constantinople, éd. E. Faral,182: Alexis [...] prist de son tresor ce qu'il en pot porter, et mena de ses genz avec lui qui aler s'en voldrent; si s'enfui); c) ca 1274 avec une complét. (Adenet le Roi, Berte, éd. A. Henry, 827: Vueilliez que cors et ame et quanque j'ai soit vo); d) 1579 spéc. exprime une concession de l'esprit je veux que + subj. « j'admets, je concède que » (Fauchet, Antiq., II, 10 ds Hug.); 2. voloir bien a) 1174-87 pron. neutre compl. (Chrétien de Troyes, Perceval, 3613: Mes se vos voleiez venir Avoec moi jel voldroie bien); b) 1635 inf. compl. (Corneille, Médée, III, 2: Veut-elle bien céder à la nécessité?). III. Le suj. désigne une chose (à laquelle on attribue une volonté) 1. suivi d'une complét. introd. par que + subj. « avoir pour conséquence, pour effet, entraîner que » ca 1200 (Guiot de Provins, Chans., IV, 5, p. 7: Et mainte fois veult amors ke je soie Mes et pensis, dolens et corresus); 1573 id. + ind. le malheur veut que... (Baïf, Poèmes, l. V [II, 252] ds Hug.); 2. suivi d'un inf. 1534 (Rabelais, Gargantua, XXIV, éd. R. Calder et M. A. Screech, p. 186, 57: Sont ce [...] influences des astres qui voulent mettre fin à tes ayzes et repous?); 3. avec un pron. neutre compl. id. (Id., ibid., XXVI, p. 178, 66: La raison le veult ainsi); 4. avec compl. désignant une chose « exiger, réclamer » 1640 (Corneille, Horace, V, 2: Un si rare service [...] Veut l'honneur le plus rare et le plus éclatant). IV. Auxil. d'aspect; exprime le fut. proche, probable ca 1100 (Roland, 3404: Bataille veit cil ki entr'els volt estre); fin xiies. (Raoul de Cambrai, éd. P. Meyer et A. Longnon, 3527: Chaoir voloit del destrier arabi Quant .i. borgois en ses bras le saisi); ca 1433 impers. il veult pleuvoir (Passion de Semur, 1014 ds E. Roy, Mystère de la Passion en France, 1905, p. 21a). V. « Affirmer » 1616-20 vouloir que + ind. « affirmer que » (Aubigné, Hist. universelle, VIII, 21 ds Hug.: Quelques-uns veulent que ces paroles intimidèrent les chefs chrestiens). Du lat. vulg. *volēre (relevé sous la forme du gérondif volendi: fin ive-déb. ves., Aug., Serm., 186, 1 ds Blaise Lat. chrét.; de l'ind. prés. 2epers.: si vis, si voles viiies., Gloss. Reich., 551 d'apr. Vään., § 315), réfection du class. vĕlle d'apr. les formes à rad. vol- (volo, volui) sur le modèle de habui-habēre, potui-*potere. Vĕlle exprime le désir, la volonté (velis, nolis « bon gré, mal gré »); constr. avec un subst. à l'acc. (aquam velim, Plaute; pacem volo, Cicéron; spéc. bene velle aliquem « diligere », Catulle, v. FEW t. 14, p. 219a, note 4, ainsi que Ps. XXI, 9: salvum faciat eum, quoniam vult eum); avec un inf., une prop. inf. (spéc. avec un attribut et ell. de esse: te salvum volunt, Cicéron), avec un subj. précédé ou non de ut ou de ne; vĕlle exprime aussi l'affirmation, l'opinion (cf. Cicéron, De Or., I, 235); avec pour suj. un nom de chose, il signifie « exiger, demander » (si volet usus, Horace); à basse époque, il forme une sorte de fut. périphrastique « aller, être sur le point »: ives., Actes, XX, 13 [codex e]: volentes suscipere; vies., Corripus: jam properare volent ds Blaise Lat. chrét. Fréq. abs. littér.: 116 875 (vouloir-vivre : 28). Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 160 169, b) 166 510; xxes.: a) 174 742, b) 166 072. Bbg. Anscombre (J.-Cl.). Voulez-vous dériver avec moi? Communications. 1980, no32, pp. 100-102. − Blumenthal (P.). Imperfekt und Perfekt der frz. Modalverben. Z. fr. Spr. Lit. 1976, t. 86, pp. 26-39. − Olsson (K.). La Constr.: verbe + obj. dir. Thèse, Stockholm, 1976, pp. 150-174. − Hanse (J.). Déplacements réels ou prétendus de la nég. en fr. Mél. Bal. (W.). Cah. Inst. Ling. Louvain. 1984, t. 10, pp. 77-85. − Perret (D.). Le Rôle du sujet de l'énoncé ds certaines assertions. Fr. mod. 1974, t. 42, pp. 108-120; Les Verbes pouvoir et vouloir ds les énoncés de prop. Lang. fr. 1974, no21, pp. 106-121. − Quem. DDL t. 19, 29; 1 (s.v. vouleur). − Rapin (R.), Pohl (J.). À propos de vouloir, auxil. du futur. Fr. mod. 1961, t. 29, pp. 62-64. − Roques (G.). La Conjug. du verbe vouloir en a. fr. Colloque Internat. sur le M. Fr. 4. 1982. Amsterdam, 1985, pp. 227-268. − Schnur (M.). Das d. und das frz. System der modalen Hilfsverben. Z. rom. Philol. 1977, t. 93, pp. 276-293. − Streri (A.). Énonciation et référenciation: [...] vouloir et dire. Paris, 1979, 129 p. − Valognes (J.). Les Verbes du désir en fr. Thèse, Strasbourg, 1977, pp. 24-41. − Wunderli (P.). L'Impér. de vouloir. Congrès Internat. de Ling. et Philol. Rom. 12.1968. Bucarest, 1970, t. 1, pp. 557-567 |