| VOCATION, subst. fém. I. − RELIGION A. − BIBLE. Appel particulier venant de Dieu. Synon. élection (v. ce mot B 1 a).Le quatrième évangéliste connaissait mieux que les autres (...) ce qui concerne la vocation des apôtres (Renan, Vie Jésus, 1863, p. 483). − Vocation d'Abraham. Appel que Dieu lança au patriarche Abraham pour qu'il soit le père des croyants. L'Eucharistie (...) annonce l'abolition des sacrifices sanglans; elle est aussi l'image de la vocation d'Abraham, et de la première alliance de Dieu avec l'homme (Chateaubr., Génie, t. 1, 1803, p. 48). − Vocation de Moïse. Appel que Dieu lança à Moïse pour qu'il soit le libérateur et le législateur du peuple hébreu. Tout un mouvement de pensée religieuse a en effet voulu assigner une fonction médiatrice aux prophètes de l'Ancien Testament, à Moïse en particulier. Plusieurs textes de l'Ancien Testament même décrivent en ce sens la vocation de Moïse, sans toutefois prononcer le mot « médiateur » (Philos., Relig., 1957, p. 36-5). − Vocation des Gentils. Appel que Dieu lança aux païens pour les inviter à connaître l'Évangile et à entrer dans l'Église. Origène parle de l'ange de la vocation des Gentils, de l'ange de la Grace (Dupuis, Orig. cultes, 1796, p. 60). B. − Mouvement intérieur par lequel l'être humain se sent appelé par Dieu et voué à la vie religieuse. Vocation ecclésiastique, monacale, sacerdotale, religieuse; vocation contrariée, forcée, tardive; suivre sa vocation; répondre, résister à sa vocation; avoir, ne pas avoir la vocation. Son père désirait en faire un prêtre. Mais le vieil abbé n'a pas voulu, le petit manquant tout à fait de vocation (Zola, Rêve, 1888, p. 48).Il m'a demandé: « Pourquoi n'entrez-vous pas dans les ordres? Comment se fait-il que vous n'ayez pas quitté le monde? » Je lui dis qu'on n'entre pas dans les ordres sans vocation (Green, Journal, 1947, p. 111). C. − Vieilli. ,,Ordre extérieur de l'Église, par lequel les évêques appellent au ministère ecclésiastique ceux qu'ils en jugent dignes`` (Ac. 1835, 1878). Vocation extérieure (Ac. 1835, 1878). II. A. − Inclination, penchant impérieux qu'un individu ressent pour une profession, une activité ou un genre de vie. Vocation artistique, militaire, musicale; vocation pour le commerce, le théâtre, la peinture; vocation pour le célibat; se sentir une vocation d'historien, de romancier, de poète; rater sa vocation; se détourner de sa vocation. Quoiqu'il n'eût aucune vocation pour le mariage, on l'avait conduit, le couteau sur la gorge, devant le prêtre (About, Grèce, 1854, p. 200).Il me fit part de sa vocation littéraire. Ce gamin de sixième composait des tragédies en vers! De véritables tragédies, en plusieurs actes, comme dans ses livres de classe (Martin du G., Souv. autobiogr., 1955, p. XLII). ♦ Vocation de + inf.Avoir la vocation de gouverner, de régner. D'un mauvais compositeur acharné à produire, on pourrait dire qu'il a la passion, mais non la vocation d'écrire des œuvres musicales (Lal.1968). ♦ P. iron. Au fond, sa véritable ambition eût été d'être joli garçon; j'ai peu vu de vocations plus manquées que celle-là! (Goncourt, Journal, 1863, p. 1254). − En partic. Inclination, penchant marqué pour une profession exigeant dévouement et désintéressement (enseignement, médecine, recherche scientifique). Les Écoles régimentaires n'ont donné jusqu'ici que de très-médiocres résultats. Cela tient à ce que l'on n'improvise pas un professeur; l'enseignement demande une vocation et une aptitude particulières (Davout, Réorg.milit., 1871, p. 19). − Loc. Par vocation. Par goût, par inclination très prononcée. J'entrai par vocation dans le métier des armes, j'appris les lettres par plaisir (Camus, Dév. croix, 1953, 1rejournée, p. 532). B. − Destination individuelle de chaque être humain. Synon. destinée, mission.Le protestantisme (...) prend au sérieux l'enseignement de la Genèse: la vocation de l'homme n'est-elle pas de dominer la terre, d'y assurer le règne de l'homme? (Univers écon. et soc., 1960, p. 64-14). C. − DR. ,,Droit, en général conféré par la loi, auquel son bénéficiaire ne peut renoncer avant l'événement qui l'actualise (ouverture de la succession, survenance de l'état de besoin), mais qui existe dès avant à l'état de virtualité, d'éventualité`` (Juridique 1987). La vocation successorale ou héréditaire: droit pour le successible d'être appelé à la succession; la vocation alimentaire : droit pour une personne de réclamer des aliments à un parent, en cas de besoin (Juridique1987). − Locutions ♦ Avoir vocation à, pour + subst. ou inf.Être qualifié pour. Le parti a vocation normale pour constituer le cabinet s'il est au pouvoir, le contrôler s'il est dans l'opposition (Meynaud, Groupes pression en Fr., 1958, p. 37).Les géographes universitaires sont appelés à reconnaître qu'ils ont vocation à former non seulement des professeurs, voire des chercheurs, mais aussi des cadres pour l'économie (Colloque géogr. appl., 1962, p. 161).Chaque corps groupe les fonctionnaires soumis au même statut particulier et ayant vocation aux mêmes grades (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p. 241). ♦ Ouvrir vocation à + subst. ou inf.Donner droit à (v. droit3II A 1 b). La commission départementale d'admission établit la liste des élèves admis sans examen dans les classes de 6e, cette admission ouvrant éventuellement vocation à l'attribution d'une bourse (Encyclop. éduc., 1960, p. 135). III. − Destination à laquelle un établissement, une région, un pays paraît être voué de par ses caractéristiques intellectuelles ou matérielles. Vocation agricole, industrielle, maritime, touristique d'une région. Le problème reste l'institution de cours à plein temps, problème compliqué par la vocation du CNAM [Conservatoire National des Arts et Métiers] à être « cours du soir », parallèle à une activité professionnelle (Encyclop. éduc., 1960, p. 275).Le Gouvernement, en se prononçant pour une vocation du Sud-Ouest aux activités aéro-spatiales, a décidé l'installation de divers établissements scientifiques ou d'enseignement supérieur dans cette région (Amén. terr., 1964, p. 15). − En partic. ♦ Aptitude que présente un sol à une production déterminée. Vocation céréalière, horticole d'un sol, d'une terre. On conçoit très bien les compagnies papetières créant (...) des filiales ayant pour objet l'acquisition et le boisement de terres à vocation forestière (Industr. fr. bois, 1955, p. 25). ♦ Vocation d'un magasin. ,,Politique commerciale d'un magasin en fonction de son positionnement sur le marché`` (Wellhoff Comm. 1977). Chaque magasin a donc une vocation (...). Avoir un assortiment étroit et profond (spécialiste) ou (...) privilégier un département alimentaire, non alimentaire (WellhoffComm.1977). REM. Vocationnel, -elle, adj.,hapax. L'esprit d'indépendance sera entretenu non seulement par l'étude, mais par une éducation que Gandhi nomma « vocationnelle » (Rolland, Gandhi, 1923, p. 37). Prononc. et Orth.: [vɔkasjɔ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1200 « appel de Dieu à lui » (Dialogue Grégoire, éd. W. Foerster, p. 155); 2. a) ca 1470 « destin vers lequel une personne semble être portée de par sa nature même » (Jean de Bueil, Jouvencel, éd. C. Favre et L. Lecestre, t. 2, p. 25); 1656 (Pascal, Lettre à Mademoiselle de Roannez, sept. ds
Œuvres compl., éd. J. Chevalier, p. 506, VIII, I); b) 1676 « mouvement intérieur par lequel on se sent porté à la vie religieuse » (Maintenon, Lett. à l'abbé Gobelin, t. II, p. 51 ds Pougens ds Littré); 3. 1467 « situation, condition » (ds Lettres de Louis XI, éd. J. Vaesen, t. 3, p. 143); 1673 « inclination pour un état, talent » (Mmede Sévigné, Corresp., éd. R. Duchêne, t. 1, p. 632). Empr. au lat.vocatio, -onis « action d'appeler », « invitation » d'où en b. lat. eccl. « appel fait par Dieu » vies. ds Blaise Lat. chrét., « invitation de Dieu à la foi » iers., ibid., « appel à tel genre de vie, état » ives., ibid. formé sur le supin vocatum de vocare « appeler », dér. de vox, vocis « voix ». Fréq. abs. littér.: 1 154. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 832, b) 1 190; xxes.: a) 1 498, b) 2 658. Bbg. Blochw.-Runk. 1971, p. 127 (s.v. vocationnel). − Goug. Mots. t. 3 1975, p. 231. − Quem. DDL t. 34. |