| VERROUILLER, verbe trans. A. − [Le compl. d'obj. désigne un inanimé] 1. Fermer au moyen d'un verrou. Verrouiller une fenêtre. On entend au dehors le bruit de plusieurs verrous. (...) Je suis enfermé; on verrouille la porte en dehors (Musset, Quenouille Barb.,1840, II, 5, p. 314).Nous avons la conscience des suspicions blessantes qui (...) devant nous, verrouillent les portes, cadenassent les tiroirs, ferment à triple tour les serrures, marquent les bouteilles (Mirbeau, Journal femme ch.,1900, p. 261). − Empl. pronom. passif. Une seule retraite s'offrait où je pouvais espérer au moins cinq minutes de calme. J'en écartai tout aussitôt l'image comme trop peu noble et même trop peu sûre, car la porte se verrouillait mal (Duhamel, Jard. bêtes sauv.,1934, p. 95). − [P. méton. du compl. d'obj.] Verrouiller un local. L'église où je vais aussitôt, non sans avoir très-soigneusement verrouillé notre maison (Bloy, Journal,1905, p. 270).V. clore ex. 3. 2. Au fig. ou p. métaph. Fermer, bloquer, rendre impénétrable. Cette infranchissable et secrète barrière que la nature incompréhensible a verrouillée entre les races, je la sentais soudain (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Allouma, 1889, p. 1315).Susceptible, souvent amer et caustique, il verrouille sa solitude (Mounier, Traité caract.,1946, p. 331). 3. Spécialement a) TECHNOL. Bloquer les éléments d'un mécanisme ou d'une commande dans la position qui en assure le fonctionnement. Verrouiller une arme. Verrouiller la table d'une machine (Boissier 1975). − CH. DE FER. Bloquer un signal, une aiguille, un organe dans une position déterminée. Verrouiller une aiguille. Lorsqu'on applique d'une manière rigoureuse le système des sections fermées, chaque signal reste normalement non seulement fermé, mais verrouillé (Bricka, Cours ch. de fer,t. 2, 1894, p. 180). − INFORMAT. Limiter l'accès à l'ensemble ou à une partie d'un ordinateur, d'une banque de données, ou en restreindre l'emploi. Verrouiller l'accès au Kiosque sur les Minitels des employés? Impossible: la banque utilise ce réseau pour des services à finalité professionnelle, et pour une messagerie interne (boîte aux lettres) (Le Monde,19 sept. 1986, p. 11, col. 4). b) DÉFENSE. Bloquer le passage de l'ennemi sur un point du front avec un dispositif de défense (Dict. xxes.). Verrouiller une position (Quillet 1965). P. anal. Verrouiller un quartier. On commença à laisser des piquets qui devaient s'écarter en tirailleurs au commandement à partir d'un point situé à une lieue du village. Ce point-là verrouillait trois vallons qu'il faudrait ensuite remonter en battant les aires (Giono, Roi sans divertiss.,1947, p. 118). − P. anal., SPORTS. CYCL. Verrouiller la course. Contrer les tentatives d'échappée des concurrents dangereux (d'apr. Petiot 1982). RUGBY. Verrouiller la touche. [Le suj. désigne le joueur placé en serre-file] Fermer l'alignement de la touche (d'apr. Petiot 1982). B. − [Le compl. d'obj. désigne un animé] Emprisonner, enfermer. On nous verrouille ici, nous autres, afin que nous ne les voyions pas aller ainsi [tout nus] dans la maison (Boylesve, Leçon d'amour,1902, p. 208).Ici, le surveillant ne se couche pas, et l'on n'éteint pas l'électricité. Malgré qu'ils soient bien verrouillés, ces petits polissons-là seraient capables d'un mauvais coup (Martin du G., Thib.,Pénitenc., 1922, p. 686). − Empl. pronom. Arrivé à l'heure précise, il s'enfermait en son bureau, s'y verrouillait à double tour (Courteline, Ronds-de-cuir,1893, p. 161). ♦ Au fig. ou p. métaph. Les silences capricieux où il se verrouillait parfois à triple tour (Rolland, J.-Chr.,Amies, 1910, p. 1188). Prononc. et Orth.: [veʀuje], [vε-], (il) verrouille [-ʀuj]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1200 veroillier « fermer au verrou » (Aliscans, éd. F. Guessard, 3641, épisode propre au ms. a, cf. éd. E. Wienbeck, W. Hartnacke et P. Rasch, p. 209); xives. veroullier (Vie S. Greg., ms. Ars 3527, fo163c ds Gdf. Compl.); 2. 1718 se verrouiller « s'enfermer au verrou » (Ac.); ca 1780 « enfermer (quelqu'un) en prison ou ailleurs » (Mirabeau, Lett. orig., t. II, p. 326 ds Littré). Dér. de veroil, forme anc. de verrou*; dés. -er. Fréq. abs. littér.: 134. DÉR. Verrouillable, adj.,technol. Qui peut être verrouillé. Porte verrouillable. L'orifice de remplissage [du réservoir] est parfois verrouillable grâce à une clé pour éviter le vol du bouchon ou du carburant (Chapelain, Techn. automob., 1956, p. 131).− [veʀujabl̥], [vε-]. − 1resattest. a) fig. 1840 « qu'on peut emprisonner » (Gautier, Hist. art dram. Fr. 2, p. 71 ds Quem. DDL t. 31), b) 1956 « qui peut être verrouillé » (Chapelain, loc. cit.); de verrouiller, suff. -able*. BBG. − Quem. DDL t. 27. |