| VAILLANT, -ANTE, adj. I. − Adjectif A. − [Implique une idée de combat] 1. [En parlant d'un animé] Qui, face au danger, fait preuve de bravoure, de courage. Synon. brave, courageux, intrépide, valeureux.Or il était arrivé que le bailli de Blois, homme vaillant et sage, chevalier dans les armes et dans les lois, avait eu quelque avis de ce traité qu'on voulait faire signer à son vieux maître (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 2, 1821-24, p. 36).Chaque gradé a actuellement son rôle indispensable dans l'action; il ne suffit plus qu'il soit tenu par un vaillant soldat parfaitement discipliné, il faut qu'il le soit par un chef sachant son métier, et capable d'initiative (Foch, Mém., t. 1, 1929, p. XXIV). − Empl. subst. masc. Un brave. Ils portent tous au front le sceau Des vaillants sans peur ni reproche; Ils ont ta jeunesse, ô Marceau! Ils ont le dévoûment de Hoche! (Glatigny, Fer rouge, 1870, p. 63).Ah! nous savons tout ce qui manque aux vaillants d'Indochine en fait de moyens matériels, car c'est jusqu'à présent notre lot, dans cette cruelle guerre, de ne pouvoir nulle part, après le malheur initial, retourner à la bataille qu'avec un tronçon d'épée ou bien avec un glaive d'emprunt (De Gaulle, Mém. guerre, 1959, p. 490). 2. [En parlant d'un inanimé] Qui révèle la bravoure, le courage. La science, le calcul et la routine remplaçaient pour lui [Corneille] la contemplation directe et personnelle des grandes émotions et des actions vaillantes (Taine, Philos. art, t. 1, 1865, p. 18). B. − [Implique une idée de lutte contre l'adversité, les difficultés de la vie] Qui fait preuve, qui témoigne d'une force d'âme, d'une grande énergie, d'un solide caractère. La médiocrité de votre condition n'est pas dorée comme celle du poète latin, et vous luttez d'un cœur vaillant contre la fortune adverse (A. France, Servien, 1882, p. 187).Jamais il [Edouard III] ne pardonnerait à Mortimer d'avoir réduit sa mère, si belle et si vaillante dans l'adversité (Druon, Lis et lion, 1960, p. 200). C. − Qui montre une grande ardeur au travail. Synon. actif, diligent.Domestique forte et vaillante. Ah! sans grand'mère, alors, qu'est-ce qu'on serait devenu, sans grand'mère et son vaillant petit crochet (A. Daudet, Évangéliste, 1883, p. 8). − Vaillant à.Il semblait s'en exciter davantage, comme du coup de reins d'une bonne femelle, vaillante à la besogne; et les fléaux s'abattaient toujours, le grain sautait, pleuvait en grêle, sous le toc-toc haletant du couple de batteurs (Zola, Terre, 1887, p. 281).Jacques (...) d'Arc (...) vivait d'un gagnage ou petite ferme (...) Ses voisins et voisines le tenaient pour bon chrétien et vaillant à l'ouvrage (A. France, J. d'Arc, t. 1, 1908, p. 3). D. − [Qualifie favorablement un état de santé] Qui est en bonne santé, robuste. Je suis à Nohant, je me porte bien, tout le monde aussi, excepté ma fille, qui n'est guère vaillante (Sand, Corresp., t. 4, 1856, p. 91).Pour la première fois, il voyait madame Hédouin en toilette de soirée (...) une femme superbe, à la santé vaillante (Zola, Pot-Bouille, 1882, p. 83). − En partic. [En parlant d'un cheval] Plein de vigueur, d'allant, d'énergie. (Dict. xixeet xxes.). II. − Expr. [En parlant de l'argent] Que l'on possède, disponible. Il a dix mille francs vaillant (Littré). ♦ N'avoir pas un sou, un denier vaillant. Être totalement démuni. Je n'avais pas un sou vaillant, et je savais que dans mes cent mille francs il n'y avait pas un louis que ne fût marqué! (Sand, Meunier d'Angib., 1845, p. 340). ♦ Sans un sou vaillant. Totalement démuni. − Possible, mais peut-être est-il juste que nous pâtissions aussi, car tous les torts ne sont pas du côté de Laurence, et nous en avons notre part. − Vraiment! s'écria Germain avec ironie, et lesquels? Serait-ce de l'avoir prise sans un sou vaillant et de lui avoir donné une maison confortable où elle vivait comme une reine? − C'est, repartit lentement Hyacinthe, de l'avoir prise par égoïsme et non par affection (Theuriet, Mais. deux barbeaux, 1879, p. 134). III. − Subst. masc., vx. Ensemble des biens que l'on possède, capital. Un ami sensé lui indique [au vieux père] le bon moyen de se faire soigner et respecter: c'est de s'en venir chez lui, de s'y faire apporter, au su et vu de tous, un coffre-fort bien lourd (...). Les gendres croiront qu'il a encore du vaillant et reviendront lui faire la cour (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 6, 1852, p. 485). Prononc. et Orth.: [vajɑ
̃], fém. [-ɑ
̃:t]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1050 vailant « de grande valeur, d'un haut mérite, précieux » (Alexis, éd. Chr. Storey, 8: ja mais n'ert [li secles] si vailant; 19: prist muiler vailante ed honurede); 2. a) ca 1100 vaillant « valeureux, courageux, brave » (Roland, éd. J. Bédier, 2657: oiez ore, franc chevaler vaillant); ca 1464 proverbe (R. Lefèvre, Rec. des hist. de Troyes, éd. M. Aeschbach, 40, 3 ds Di Stefano, Dict. des loc. en m. fr., p. 181: a ceur vaillant rien impossible); b) ca 1100 subst. (Roland, 3020: de noz meillors vaillanz); 3. a) 1626 « robuste, vigoureux, en bonne santé » (Ch. Sorel, Francion, éd. E. Roy, t. 2, p. 185, var.: j'estois si vaillant que je la caressois autant qu'a l'ordinaire); rare av. le xixes. 1856 (Sand, loc. cit.); b) 1765 cheval vaillant (Encyclop.); 4. 1600 « actif, diligent, qui a de l'ardeur au travail » (O. de Serres, Théâtre d'agric., VIII, 1, p. 818: Salomon [...] Dit, que la femme vaillante, est la coronne de son mari [= Proverbes 12, 4]); rare av. le xviiies. 1766 [éd.] (Desgrouais, Gasconismes corrigés, p. 249: cette fille est vaillante [au lieu de: adroite, soigneuse, diligente, active]). B. 1. a) Ca 1100 « en fait de valeur » (Roland, 1962: N'en vanteras [...] Vaillant a un dener que m'i aies tolut); b) 1618 loc. (Bruscambille, Fantaisies, p. 204: n'eurent oncques vaillant denier ny maille); 1649 (Scarron, Virgile travesti, III, 146b ds Richardson: mon père [...] n'eut jamais vaillant un liard); 1690 (Fur.: un Gascon qui n'a pas un sol vaillant); 2. a) 1160-74 subst. « valeur, équivalent » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 1697: mez li duc n'en vout prendre vaillant un esperon); 1170 (Horn, éd. M. K. Pope, 2865: Ja nen avrai de vus le vaillant d'un butun); b) fin xiiies. « bien, avoir, capital » (Livre Roisin, éd. R. Monier, § 11: l'escassera on de tout son vaillant); ca 1300 (Vie de Saint Eustache, éd. H. Petersen, 309 ds Romania t. 52, p. 56: Lors n'eut Eustasse plus vaillant [...] Fors çou qu'il avoient viestu). Anc. part. prés. de valoir*. Au sens B 2, cf. le lat. médiév. valens subst. « prix, valeur ». Fréq. abs. littér.: 866. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 156, b) 2 286; xxes.: a) 1 166, b) 770. Bbg. Goug. Mots. t. 1 1962, pp. 115-116. − Hollyman 1957, p. 134. − Paquot (A.). L'Évol. d'un champ sém. du lat. à l'anc. français... In: Congrès Internat. de Ling. et Philol. Rom. 13. 1971. Québec, 1976, t. 1, pp. 797-807. − Schuchard (B.). Valor... Bonn, 1970, pp. 103-115. − Van Emden (W. G.). Rom. Philol. 1980, t. 33, no3, pp. 429-434. |