| URNE, subst. fém. A. − 1. ANTIQ. Vase de dimensions variables, généralement de forme oblongue, à col étroit et à corps renflé, qui servait à divers usages. Urne de terre cuite; urne d'albâtre, de marbre, de porphyre; urne lacrymale; urne à puiser l'eau. De l'urne embaumée L'esclave (...) versait les vins mielleux (Bouilhet, Melaenis, 1857, p. 47).Les irisations que les siècles (...) ont su donner aux petites urnes de verre qu'on enfermait dans une tombe, pleines de larmes versées par les pleureuses funèbres (Arts et litt., 1935, p. 84-16). 2. a) Littér. Vase, récipient. Les parfums les plus précieux (...) doivent être renfermés dans des urnes de cristal d'une forme nouvelle (Jouy, Hermite, t. 1, 1811, p. 322).Le goupillon, qui trempait dans l'urne de cuivre (Moselly, Terres lorr., 1907, p. 289). b) Vase dans lequel sont conservées les cendres d'un mort. Urne funéraire, cinéraire. Des urnes sépulcrales rangées dans une espèce d'ossuaire (Hugo, Rhin, 1842, p. 234).L'incinération d'un corps est autorisée par le maire de la commune après vérification de la cause du décès. Les cendres sont recueillies dans une urne, scellée et plombée, qui est déposée dans un columbarium ou inhumée (GDEL, s.v. incinération). c) Vase, boîte servant à recevoir les numéros d'un tirage. Le monde des rêves n'est jamais qu'une urne de loterie, où se trouvent, pêle-mêle, d'innombrables billets blancs et des lots sans valeur (Béguin, Âme romant., 1939, p. 159). − STAT. Urne (de Bernoulli). Urne idéale censée contenir un nombre grand ou petit, connu ou inconnu, de boules d'égale grosseur et d'égale consistance, qui ne se distinguent entre elles que par un caractère qualitatif (couleur ou autre marque) que la main du joueur ne peut percevoir au moment du tirage (d'apr. Ch. Muller, Initiation à la stat. ling., 1968, p. 19). Prenant pour exemple un texte de Pouchkine (Eugen Onegin) il montre que si le rapport des fréquences entre voyelles et consonnes est à peu près constant, il est cependant impossible de se représenter les fluctuations autour de cette moyenne comme résultant du « simple hasard » que donne l'urne de Bernoulli − par contre si l'on imagine deux urnes dont l'une servira à tirer le successeur d'une voyelle et l'autre celui d'une consonne − le modèle devient beaucoup plus satisfaisant (Traité sociol., 1967, p. 128).Schéma* d'urne(s). d) Boîte dont le couvercle est pourvu d'une fente dans laquelle les électeurs glissent leurs bulletins de vote. Urne électorale; installer, transporter, vider les urnes; mettre son bulletin dans l'urne. Les bureaux de vote recueillirent les bulletins en deux urnes, l'une pour le référendum, l'autre pour l'élection des députés (De Gaulle, Mém. guerre, 1959, p. 269). − P. méton. ♦ L'urne électorale (vieilli), les urnes. Les élections. Sanction, verdict des urnes. Oubliez-vous donc que vous avez pour contraindre à ce qu'on vous écoute (...) l'urne électorale (...)? (Lamennaisds L'Avenir, 1830, p. 171).Dans les mauvais quartiers les femmes étaient plus « rouges » que les hommes; si elles accédaient aux urnes, la bonne cause en pâtirait (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p. 254). ♦ Loc. verb. Aller, se rendre à l'urne (vieilli)/aux urnes. Aller voter. Si vous me dites que la franc-maçonnerie est une usine à élections, (...) qu'elle n'a d'autre fonction que de berner le bon peuple, de l'enrégimenter pour le faire aller à l'urne (...), je serai de votre avis (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Oncle Sosthène, 1882, p. 23).Si (...) vous n'avez pu vous rendre dimanche dernier aux urnes, je vous engage à vous joindre à ce vaste mouvement (L'Est Républicain,Suppl. spéc. élections, 13 juin 1988, p. 128, col. 4).Bouder les urnes. S'abstenir de voter. Déjà lors du premier tour, de très nombreux Français avaient boudé les urnes, et avec un taux de 34 % d'abstention on avait aussi atteint le record de la plus faible participation depuis la Libération (L'Est Républicain,Suppl. spéc. élections, 13 juin 1988, p. 135, col. 1). e) BEAUX-ARTS − [Surtout au xixes.] Vase cinéraire vide destiné à orner un monument funéraire; motif caractéristique de l'art funéraire représentant un vase cinéraire. La lune (...), entre deux urnes cinéraires à moitié brisées, me montroit tous les pâles tombeaux (Chateaubr., Génie, t. 1, 1803, p. 423). − Grand vase, à panse arrondie, monté sur un pied. Louis XIV ne se borna point à faire refondre les urnes d'argent, qui ornaient son palais; (...) il interdit aux orfèvres d'en fabriquer à l'avenir (Havard1890, col. 1480). − GRAV., PEINT., SCULPT. Vase renversé symbolisant l'eau qui coule, attribut des divinités des fleuves et des fontaines. Une maison lourdement chargée de chevaux marins, de Neptunes barbus armés de tridents (...), de Fleuves appuyés sur leurs urnes « murmurantes » (Du Camp, Hollande, 1859, p. 212). ♦ P. métaph. Si des fleuves fameux et fiers de leurs berceaux Tombent de la montagne, et sont nés près des nues Combien d'autres, cachant leurs urnes inconnues, Habitent sous la terre (Fontanes,
Œuvres, Maison rustique, t. 1, 1821, p. 201). B. − BOTANIQUE 1. ,,Partie creuse et renflée du sporogone des mousses`` (Gatin 1924). 2. Synon. de ascidie.V. ce mot A ex. 1. Prononc. et Orth.: [yʀn]. Att. ds Ac. dep. 1718. Étymol. et Hist. A. 1. a) 1374 [ms.] « grand vase » (J. Goulain, Trad. du Ration. de G. Durant, Bibl. nat. fr. 437, fol. 13 a ds Gdf. Compl.: estoit gardee la manne en une cane appelee urne); b) 1503 « vase antique servant à puiser un liquide » (d'apr. FEW t. 14, p. 63 b); 1549 (Est.); c) 1551 antiq. « mesure de capacité » (Cotereau, tr. Columelle, XII, 20 ds Hug.); d) 1673 ameubl. (Invent. des meubles de la Couronne ds Havard 1890 col. 1480: une urne ou vase d'argent, de forme antique avec son couvercle); 2. 1487 « vase où l'on dépose les cendres des morts » (Voc. lat.-fr., Genève, L. Garbin d'apr. FEW, loc. cit.); 1611 (Cotgr.); 3. a) 1549 antiq. « vase servant à recueillir les suffrages ou à tirer au sort » (Est.); b) 1845 urne du scrutin (Besch.). B. 1798 bot. « enveloppe qui contient les organes de la fructification des mousses » (E.-P. Ventenat, Tabl. du règne végét., Paris, J. Drissonnier, t. 1, p. 546). Empr. au lat.urna « grand vase à puiser l'eau; urne de vote, de tirage au sort; urne cinéraire; mesure de capacité ». Fréq. abs. littér.: 527. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 161, b)1 032; xxes.: a) 735, b) 255. |