| TÂCHE, subst. fém. A. − 1. Travail défini et limité, imposé par autrui ou par soi-même, à exécuter dans certaines conditions. Synon. ouvrage.Assigner, donner une tâche à des écoliers, des ouvriers; s'imposer une tâche; accomplir, achever, remplir sa tâche; se remettre à la tâche; s'acquitter de sa tâche; des tâches ardues, fastidieuses, pénibles; femme dure à la tâche. On eût dit qu'elle prenait plaisir aux tâches les plus ingrates, des copies dans les bibliothèques, des traductions de livres insipides (Rolland, J.-Chr., Amies, 1910, p. 1143).L'école soumet l'enfant à la tâche, et la tâche, c'est l'adaptation à une discipline ainsi que la constance dans cette discipline (Mounier, Traité caract., 1946, p. 540). ♦ Proverbe. À chaque jour suffit sa tâche. Synon. à chaque jour suffit sa peine (v. jour II B 2 b α).Dans cette phase, la plus rude de notre rude existence de peuple, à chaque jour suffit sa tâche, mais une tâche doit remplir chaque jour (De Gaulle, Mém. guerre, 1956, p. 549). − Loc. À la tâche. À un prix fixé d'avance et correspondant à un travail déterminé (et non calculé à l'heure ou à la journée). Être payé, travailler à la tâche; donner un ouvrage à la tâche; travail exécuté à la tâche. Je ne suis rien moins qu'un homme à la tâche, travaillant dix-huit heures sur les 24; j'y suis obligé; mon temps n'est pas à moi (Balzac, Corresp., 1836, p. 29).Le seul homme de Chitry qui veuille bien casser les pierres à la tâche (Renard, Journal, 1905, p. 987). ♦ Fam. Ne pas être à la tâche. Avoir la possibilité de prendre son temps, de s'organiser au mieux pour accomplir un travail. Synon. actuel ne pas être aux pièces (v. pièce I B 2).On n'est pas à la tâche! (Dict. xxes.). ♦ Crever (fam.), mourir, succomber à la tâche. Travailler durement et sans relâche jusqu'à la mort; succomber à une entreprise. C'est la bonté même que cette douce femme aux grands yeux honnêtes et aimants. Mais elle n'est pas heureuse et mourra à la tâche (Amiel, Journal, 1866, p. 367).Il avait la suprême consolation de pouvoir se dire qu'il mourrait à la tâche, fidèle au devoir, ayant refusé de quitter cette terre sainte où il avait trouvé tant d'amertume (Grousset, Croisades, 1939, p. 76). 2. Spécialement a) INFORMAT. ,,À l'intérieur d'un programme, partie représentant un ensemble logique de fonctions, pouvant s'exécuter le cas échéant en même temps que d'autres tâches du même programme`` (Ging.-Lauret 1982). b) PÉDAG. Analyse des tâches. ,,Décomposition par éléments, permettant un apprentissage par étapes, graduant les difficultés`` (Graw. 1981). B. − Souvent au sing. Mission généralement valorisante qu'on se donne ou qu'on accepte par devoir; p. ext., ce que l'on doit accomplir. Synon. fonction, rôle.S'assigner une tâche; se donner pour tâche de; c'est une noble, rude tâche; une tâche difficile de/que de + inf.; ne pas être à la hauteur de sa tâche; faciliter la tâche de. Il s'était donné la tâche agréable de faire de Jeanne, qui aimait l'étude, une jeune fille au sens droit, un esprit ferme et judicieux (Verne, 500 millions, 1879, p. 20).Qu'il ait manqué cette occasion de se justifier − tâche facile à ses yeux (...) − cela m'étonne beaucoup (Bernanos, Journal curé camp., 1936, p. 1125). − Loc., vieilli ou littér. Prendre à tâche de (faire qqc.). S'appliquer à, s'efforcer de. Synon. s'attacher à, avoir à cœur de.Prendre à tâche de faire réussir un projet. [Le trinitaire] la mania [cette âme] (...) la maltraita avec une sorte de colère, une impitoyabilité presque jalouse, prenant à tâche de l'abaisser, de la ravaler à l'avilissement et à l'amertume (Goncourt, MmeGervaisais, 1869, p. 226).C'est l'heure où ceux qui ne font rien se risquent sur les boulevards. La plupart semblent avoir pris à tâche de conjurer la peste par l'étalage de leur luxe (Camus, Peste, 1947, p. 1315). ♦ Vx. Prendre à tâche qqn. ,,Se charger de ses intérêts`` (Littré). Prononc. et Orth.: [tɑ:ʃ]. Ac. 1694, 1718: tasche; dep 1740: tâche. Étymol. et Hist. 1. 1176-81 tasche « quantité de travail qu'on s'est engagé à faire dans un temps et pour un prix déterminé » (Chrétien de Troyes, Chevalier Charrette, éd. M. Roques, 6753); ca 1393 euvrer en la piece ou en tache (Ménagier de Paris, éd. G. E. Brereton et J. M. Ferrier, p. 125, ligne 11); 1606 à la tâche (Crespin); 1866 mourir à la tâche (Amiel, loc. cit.); 2. a) 1640 prendre à Tasche de (Oudin Curiositez); b) 1782 [éd.] « chose qu'on a le devoir ou la charge d'accomplir » (Dider., Claude et Nér., I, 46 ds Littré). Empr. au lat. médiév.tasca, tascha (issu du lat. class. taxare, v. taxer) « redevance consistant en une part de fruits, souvent un onzième, que le tenancier doit au propriétaire pour des champs obtenus par la mise en valeur de terres vierges » 1028 (D. Roberti reg Fr., Gall. Chr.2VIII instr. col. 295 ds Nierm.), lat. médiév. bien att. déjà dans le Midi de la France, 802, tascas et decimas (Hist. de Lang.3, II pr. no. 15 col. 64 [Minervois], ibid.) d'où l'a. prov. tasca 1192 (Arch. du Roy, Toulouse, J. 322 ds Rayn.). Fréq. abs. littér.: 3 054. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2 536, b) 3 961; xxes.: a) 4 502, b) 6 002. Bbg. Gemmingen Arbeit 1973, pp. 138-140. |