| TURLUPIN, subst. masc. A. − HIST., le plus souv. au plur. Membre d'une secte qui se répandit au xives. en France, en Allemagne et dans les Pays-Bas et qui soutenait qu'on ne doit avoir honte de rien de ce qui est naturel (d'apr. Littré). À partir de ce moment [1255], persécutions sans nombre dans Paris (...) en 1372, contre les turlupins (Hugo, Paris, 1867, p. 27). B. − 1. Subst. masc. et adj., vieilli ou littér. [P. allus. à Turlupin, surnom de l'aut. de farces Henry Legrand] (Personne) dont les écrits ou les paroles sont de mauvais goût, qui fait des plaisanteries grossières. Synon. mauvais plaisant*.Un marchand de couleurs, épigrammatique et turlupin, se signalait entre tous. La pauvre femme ne pouvait passer devant sa poudre à punaises, sans qu'aussitôt il engageât quelque colloque facétieux avec les compères (Bloy, Femme pauvre, 1897, p. 261).Des esprits contraires (...) Traitaient Ibsen de turlupin, Disant que son « Canard sauvage » Dont on faisait si grand tapage, N'était, en somme, qu'un... lapin (Ponchon, Muse cabaret, 1920, p. 293). 2. Comédien médiocre, bouffon. Un turlupin émiettait, dans une sauce rebattue de musique, du patriotisme et de l'amour (Huysmans, Sœurs Vatard, 1879, p. 316).Le nez de Breuce était un peu trop long, et rond du bout (...). Le profil s'aiguisait à la renarde, à cause du front oblique et de la toison, qui formait bonnet. La mobilité de cet ensemble tenait un peu du clown, du turlupin (La Varende, Roi d'Écosse, 1941, p. 26). C. − TEXT. ,,Petit chardon très flexible, qui servait à effectuer le lainage des draperies nouveauté`` (Lar. encyclop.). Prononc. et Orth.: [tyʀlypε
̃]. Att. ds Ac. dep. 1718. Étymol. et Hist. A. 1. 1374 Turlupins « membres d'une secte hérétique du xives. » (Comptes de Nicolas Mauregard ds Du Cange, s.v. Turlupini: en faisant poursuitte contre les Turlupins et Turlupines); fin xives. Turelupins (Chron. des règnes de Jean II et de Charles V, éd. R. Delachenal, t. 2, p. 162: la secte, le abit et les livres des Turelupins, autrement nomez la Compaignie de povreté, condempnez de heresie [le 4 juillet 1372]); 2. 1378 turlupin fig. « faux-dévôt » (Miracle de Pierre le Changeur, 596 ds Miracles de N.D. par personnages, éd. G. Paris et U. Robert, t. 6, p. 249). B. 1. 1618 surnom de l'auteur de farces Henry Legrand (1583-1634) réputé pour ses mauvais jeux de mots (Le Tocsin des filles d'amour ds Variétés hist. et littér., t. 2, p. 273: Signé: Turlupin et Pierre Dupuis); 2. 1653 « homme qui fait de mauvais jeux de mots, des plaisanteries de mauvais goût » (D'Assoucy, Le Ravissement de Proserpine, p. 50). C. 1876 text. (Lar. 19e). Orig. inconnue. Fréq. abs. littér.: 15. DÉR. Turlupinade, subst. fém.,le plus souvent au plur., vieilli ou littér. [Corresp. à supra B] Plaisanterie de mauvais goût. Au temps où il faisait sa cour à Sylvie, elle [Annette] fut son alliée; plus d'une fois, elle vint à son secours, quand il était en butte aux turlupinades de sa fiancée, trop sûre de son pouvoir pour ne pas en abuser (Rolland, Âme ench., t. 2, 1925, p. 118).P. méton. Ma chambre était inondée de volumes malpropres empruntés au cabinet de lecture voisin: M. Dupont, André le Savoyard, Sœur Anne, et que sais-je encore! Malvina dévorait ces turlupinades (Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 9).P. anal. J'en suis las, moi, des enterrements, et des catastrophes soudaines, et des ruptures d'anévrisme, et des gouttes qui remontent au cœur [prétextes aux absences d'un employé], et de toute cette turlupinade de laquelle on ne saurait dire si elle est plus grotesque que lugubre ou plus lugubre que grotesque! (Courteline, Ronds-de-cuir, 1893, p. 36).− [tyʀlypinad]. Att. ds Ac. dep. 1718. − 1reattest. 1646 (F. de Boisrobert, Epistres en vers, t. 1, p. 220); de Turlupin, nom propre (v. supra), suff. -ade*. BBG. − Spitzer (L.). Turlupin. Mod. Lang. Notes. 1946, t. 61, pp. 104-108. |