| TRUIE, subst. fém. A. − 1. ZOOL. Femelle du porc, domestiquée et élevée pour la reproduction. Synon. vieilli coche4.Énorme, grosse, vieille truie; truie grasse, pleine; la truie et ses petits, la truie et ses porcelets; le groin de la truie. Les porcelets ne se trompent jamais sous le ventre de la truie, et chacun reconnaît, dès le premier soir, la mamelle qui est à lui (Renard, Journal, 1905, p. 979).Une truie est là qui fouille dans la terre, et arrache, et mange (Giono, Gd troupeau, 1931, p. 252). ♦ P. compar. [Avec l'aspect physique de la truie] Avoir une bouche, un nez de truie. Thérèse vit de tout près cette figure plate et grise où brillaient des yeux de truie (Mauriac, Fin nuit, 1935, p. 187).[Avec les habitudes de la truie] Être sale comme une truie. Il y a de la truie et du singe dans ses coquetteries (Goncourt, Journal, 1862, p. 1088). ♦ P. métaph. Une hydre se traînait dans l'univers hideux; L'homme était une tête et la femme était l'autre. Rome était la truie énorme qui se vautre (Hugo, Légende, t. 1, 1859, p. 113).En ce moment elle [la Jondrette] parut à Marius plus redoutable encore que son mari. C'était une truie avec le regard d'une tigresse (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 909). − En partic. Femelle du sanglier (appelé aussi parfois cochon). Synon. laie.C'étaient les cochons et les truies, suivis d'une ribambelle de marcassins, qui jubilaient à se rouler dans la mare (Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 135). − Peau, cuir de truie. Peau tannée de la truie, employée autrefois dans la confection de divers objets, notamment de certaines reliures de luxe. Coffre couvert de cuir de truie; malle en peau de truie. Les dos en bois et les reliures en peau de truie des antiques manuscrits des vieux siècles (Goncourt, Journal, 1876, p. 1128.P. ell. Ses lunettes en doublé, sa robe de chambre en faux poil de chameau, sa valise en fausse truie (Giraudoux, Siegfried et Lim., 1922, p. 182). 2. P. anal., péj. a) Femme grosse et malpropre; femme de mauvaise réputation. Synon. souillon.Les goujats de la brochure lui préféraient [à Céline] ces énormes truies dont les soies craquent sur les chairs massées et qui gouaillent, le bec en l'air, avec des rires qui leur secouent la gargoulette et leur font danser le ventre (Huysmans, Sœurs Vatard, 1879, p. 49).Une nuit, il est venu avec une de ses femmes... Et elle était ivre, la vieille truie! (Lenormand, Simoun, 1921, 7etabl., p. 69). b) [Interj. injurieuse lancée à une femme] Elle s'écria: « Ce n'est pas assez! Tiens! voleuse! truie! fille à matelots! » (Louÿs, Aphrodite, 1896, p. 158). B. − BALIST. Catapulte, bélier lançant des pierres et des boulets. (Dict. xixeet xxes.). C. − ICHTYOL. Truie ou truie de mer. Poisson acanthoptérygien de la famille des Scorpènes (Dict. xixeet xxes.). Prononc. et Orth.: [tʀ
ɥi]. Ac. 1694, 1718: truye; dep. 1740: truie. Étymol. et Hist. 1. 1155 « sorte de catapulte » (Wace, Brut, 3035 ds T.-L.); 2. ca 1180 « femelle du porc » (Marie de France, Fables, 21, 3, ibid.); 3. a) 1558 désigne un poisson (Guill. Morelius, Verb. latin. Comment. ds Gdf. Compl.); b) 1611 truye de mer (Cotgr.). Du b. lat. troja (viiies. Gl. de Cassel, éd. P. Marchot, 80: troia: suu), d'orig. obsc. Il était tentant de rapprocher le mot de porcus Trojanus relevé une seule fois chez Martial, Saturn., III, 13, 13, formé d'apr. equus trojanus, pour désigner un porc farci, bourré de petit gibier (porcum Trojanum mensis inferant, quem illi ideo sic vocabant quasi aliis inclusis animalibus gravidum ut ille Trojanus equus gravidus armatis fuit); de porcus Trojanus, aurait été tiré [porcus de] Troja; cependant, il s'agit plus vraisemblablement d'un mot de création plaisante que de l'appellation habituelle d'un mets, Ern.-Meillet; FEW t. 13, 2, p. 314 b. L'examen de l'aire géogr. de truie (dom. gallo-rom.; Italie du Nord; de la Catalogne et Sicile), ainsi que la forme troga, relevée par Du Cange, s.v. troga, suggèrent à G. Breuer, ds Z. fr. Spr. Lit. t. 87, 1977, p. 170, un étymon gaul. *trogja, formé du rad. *trŏgh « tirer » (dont sont issus, notamment en a. et m. irl. des termes signifiant « fertile, productif ») et du suff. gaul. -jā
. Fréq. abs. littér.: 119. Bbg. Breuer (G.). Zur Etymologie von nfrz. truie. Z. fr. Spr. Lit. 1977, t. 87, pp. 170-173. - Darm. Vie 1932, p. 57, 95, 109. - Möhren (Fr.). Le Renforcement affectif de la négation par l'expr. d'une valeur minimale en anc. fr. Tübingen, 1980, p. 228. - Rohlfs (G.). Rom. Haustiernamen aus affektiver rom. Urschöpfung... In : Von Rom zur Romania. Tübingen, 1984, pp. 49-52. - Schmitt (Ch.). Gräkomane Sprachstreitschriften als Quelle... In: [Mél. Wandruszka (M.)]. Tübingen, 1979, t. 2, p. 608. |