| TROUPE, subst. fém. A. − [À propos d'êtres humains] 1. Ensemble de personnes qui se déplacent dans un même lieu ou agissent de concert. Troupe de chasseurs, de curieux, de pèlerins, de touristes. Professant la chasteté, exclus du mariage sous des peines sévères, les évêques donnaient à leur troupe l'exemple de la dissolution la plus franche [au 16esiècle] (Stendhal, Hist. peint. Ital., t. 1, 1817, p. 163).Perelle a gravé une planche où il nous montre toute une troupe de paysans houspillant un malheureux (D'Allemagne, Récr. et passe-temps, 1904, p. 229). − Loc. En troupe. Les Joyeuse, inquiets de ne pas voir André descendre, montent le chercher en troupe (A. Daudet, Nabab, 1877, p. 199).Les sœurs de Saint-Vincent de Paul, avançant en troupe, semblaient de grands oiseaux bleus aux ailes blanches étendues (Estaunié, Empreinte, 1896, p. 2).Par troupe. Mais il suffit que cette hystérique (...) attaque le gouvernement pour que les curés viennent par troupe l'écouter bouche bée (A. France, Orme, 1897, p. 114). − Expr. fam. [Pour convier au départ, amicalement ou p. antiphr.] En avant/en route, mauvaise troupe! En route, mauvaise troupe! Partez, mes enfants perdus! (Verlaine, Jadis, 1884, p. 199). 2. Spécialement a) Domaine milit.Groupe d'hommes armés pour le combat; groupe régulier et organisé de soldats. Il était à craindre qu'un corps de troupes européennes ne se joignît à elles, et que le moment de l'agression ne coïncidât avec des troubles intérieurs (Gourgaud, 1815-21ds Rec. textes hist., p. 106).L'avant-garde fortement organisée que nous connaissons n'est pas seulement la troupe de reconnaissance que nous avons vu envoyer d'Oedenburg sur Kormend (Foch, Princ. guerre, 1911, p. 241). − P. méton. ♦ La troupe. L'ensemble des soldats par opposition aux officiers. Cette grande dame qui loge dans l'univers des galons nombreux, des particules et des étoiles, s'abaisserait-elle à la troupe (Arnoux, Solde, 1958, p. 208).Le cumul de ces inconvénients est, on le sait, très nuisible au « moral de la troupe » (Serv. milit. et réforme arm., 1963, p. 57). ♦ La troupe. La force armée. Faire appel à la troupe. (Dict. xxes.). ♦ Homme de troupe. Sous-officier ou soldat qui fait partie d'une armée. Il n'est pas certain que ce caporal-chef, ce sergent, ce sergent-chef ait accumulé (...) des qualités morales et intellectuelles qui l'autorisent à dominer, ainsi que c'est le cas actuellement, l'ensemble des activités des hommes de troupe dont on lui a confié la responsabilité (Serv. milit. et réforme arm., 1963, p. 57). ♦ Enfant de troupe. Fils de militaire élevé aux frais de l'État. Parti enfant de troupe, il était arrivé par sa bravoure, beaucoup plus que par son intelligence, au grade de chef de bataillon (Zola, Cap. Burle, 1883, p. 8). − En appos. Gauloises troupe. ,,Cigarettes de l'armée`` (Rob.). P. ell. (Paquet de) troupe. Fumer des troupes. Les prisonniers, on ne les a pas oubliés à Vichy (...) les envois de linge et de souliers (...) − à quoi se sont ajoutés jusqu'ici de luxueux paquets de « troupe » (...) − sont, depuis la fin de l'année dernière, régulièrement arrivés dans les camps et les Kommandos (L'Œuvre, 23 sept. 1941). − Au plur. Forces armées, divers corps de soldats composant une armée. Troupes aéroportées, alliées, d'assaut, à cheval, à pied, auxiliaires, coloniales, de choc, de débarquement, d'élite, étrangères, françaises, mercenaires, métropolitaines, d'occupation, régulières, de repli, de réserve, royales; concentration, déploiement, mouvement de troupes; lever, masser, recruter des troupes; le gros des troupes. L'artillerie de la division prend position. Devant ce déploiement, les Prussiens s'arrêtent; ils n'ont pas dépassé Niederbronn; puissance de l'impression causée par l'arrivée de troupes fraîches (Foch, Princ. guerre, 1911, p. 102). b) SCOUTISME. Regroupement de deux à six patrouilles d'éclaireurs, équivalant à la meute pour les louveteaux et au clan pour les aînés. Une sorte de libre concours permanent entre les troupes détermine celles qui méritent le titre de « Raiders » ou le « Trophée Bénakis » qui leur permet d'accéder à des formes plus exigeantes de vie scoute (H. Van Effenterre, Hist. du scoutisme, Paris, P.U.F., 1961, p. 122). c) SPECTACLES. Groupe de comédiens, d'artistes attachés à un théâtre ou qui se produisent ensemble. Bonne, mauvaise troupe; directeur de la troupe; monter une troupe; troupe d'acrobates, de ballets russes, de casino, de chanteurs, de cirque, de danseurs, d'opéra, du roi; troupe en tournée; engager dans une troupe; faire partie de la troupe. On allait chanter le chœur (...) Elle, qui accompagnait, s'était en outre réservé la partie de Valentine (...) car elle ne voulait pas introduire de femme parmi ces messieurs, dont elle conduisait la troupe résignée avec des rudesses de chef d'orchestre (Zola, Pot-Bouille, 1882, p. 90).Parmi les représentations de l'Odéon nous ne tenons compte que de celles qui y ont été données par la troupe de la Comédie-Française (Arts et litt., 1935, p. 76-2). − En partic., arg. de théâtre. Troupe d'argent. ,,Troupe de théâtre qui joue à tour de rôle sur deux scènes; par exemple à Montmartre et aux Batignolles`` (Rigaud, Dict. arg. mod., 1881, p. 377). B. − P. anal. ou au fig. 1. P. anal. a) [À propos d'animaux]
α) Groupe d'animaux de la même espèce vivant ensemble. Troupe d'éléphants. Mais, pour y parvenir comme instantanément, ainsi que cela arrive en un corps d'armée, en une troupe d'oiseaux, en un troupeau, nous avons trois moyens puissants (Maizière, Nouv. archit. nav., 1853, p. 63). − Loc. En troupe. [Les oiseaux] flottaient en grandes troupes dans le ciel comme un foulard chamarré d'or que le vent emporte (Giono, Que ma joie demeure, 1935, p. 286).
β) Ensemble d'animaux domestiques. Troupe de cochons, de chiens, d'oies. La troupe des mules qu'on attache par des liens de fleurs à son char (Arnoux, Roi, 1956, p. 161). b) [À propos de choses concr.] Et toi, maison brûlante, Espace, cher Espace Tranquille, où l'arbre fume et perd quelques oiseaux, Où crève infiniment la rumeur de la masse De la mer, de la marche et des troupes des eaux (Valéry, Alb. vers anc., 1900, p. 85). − BOT. Troupe d'arbres. ,,Ensemble de quelques arbres couvrant un are ou moins d'un are`` (Plais. 1969). 2. Au fig. Ensemble de, accumulation. Troupe des connaissances, de malheurs, de pensées, de rêves. Il souffrit autant que les grands hommes quand ils sont (...) chassés par la meute des gens médiocres et par la troupe des Vanités altérées de vengeance (Balzac, P. Grassou, 1840, p. 441). − Loc. En troupe. Les événements ont ceci de commun avec les oies qu'ils vont en troupe (Bloy, Désesp., 1886, p. 209). Prononc. et Orth.: [tʀup]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1178 « groupe important d'animaux » (Renart, éd. E. Martin, XIV, 861); 2. ca 1220 « rassemblement, fortuit ou organisé, d'un nombre important d'individus se déplaçant ensemble ou se livrant à la même activité » (Robert de Clari, Constantinople, éd. Ph. Lauer, p. 77); 1538 « groupe important d'individus assemblés, multitude » (Est. s.v. turba); 1553 en troupe (La Bible, s. 1., impr. J. Gerard, Esa 24d d'apr. FEW t. 17, p. 398a); 3. a) 1477 « réunion d'hommes en armes constituant une formation prête au combat » (G. Leseur, Hist. de Gaston IV, comte de Foix, éd. H. Courteault, t. 1, p. 89); 1636 au plur. « soldats, sous-officiers et officiers régulièrement organisés, qui constituent une armée ou une partie d'armée » (Monet); b) 1803 collectiv. la troupe (Boiste); c) 1825 « ceux qui, dans l'armée, ne sont ni officiers, ni sous-officiers » (Le Couturier, Dict. portatif et raisonné des connaissances militaires d'apr. FEW t. 17, p. 398a); 1833 enfant de troupe (Balzac, Méd. camp., p. 5); 1941 « cigarettes de l'armée » (L'Œuvre, 23 sept., cf. supra); d) 1862 « la force militaire ou la force publique qui a été chargée de maintenir ou de rétablir l'ordre » (Hugo, Misér., t. 2, p. 455); 4. 1662 « ensemble de comédiens, d'artistes jouant habituellement ensemble » (Poisson, Le Baron de la Crasse, 4 ds Littré); 5. 1928 scoutisme (J. Droit, Le Loup bavarde, Paris, p. 11). Dér. régr. de troupeau*. Les ex. de trope masc. relevés par le FEW t. 17, p. 397b et 399a sont à lire plutôt tropé, cf. notamment Eustache d'Amiens, Du bouchier d'Abevile, éd. J. Rychner, 101 et 525 [mêmes ex. que Littré et La Curne]. Fréq. abs. littér.: 6 092. Fréq. rel littér.: xixes.: a) 8 601, b) 6 779; xxes.: a) 6 071, b) 11 286. Bbg. Blochw.-Runk. 1971, p. 199 (s.v. troupes de choc). − Storm (J.). Trop, troupe, troupeau. Romania. 1872, t. 1, pp. 490-491. |