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TRAVAIL1, -AUX, subst. masc.
I. − OBSTÉTR. Ensemble des phénomènes mécaniques de l'accouchement qui permettent la dilatation du col de l'utérus et l'expulsion du fœtus. Travail d'enfantement. On la fera faire du bras [la saignée] lorsque le travail sera long; que les douleurs se succéderont avec force et sans beaucoup de succès (Baudeloque, Art accouch., 1812, p. 196).À minuit les douleurs cessèrent et le travail s'interrompit. On avait d'autant plus sujet d'inquiétude que ma mère avait accouché précédemment d'un enfant mort et failli mourir (A. France, Pt Pierre, 1918, p. 6).
Salle de travail. Pièce aménagée pour les accouchements dans un hôpital, une maternité. (Dict. xxes.).
En travail. En train d'accoucher. Vous reviendrez sachant qu'il n'y a nulle part un pauvre petit coin de terre où votre femme en travail puisse enfanter son premier né (Lammennais, Paroles croyant, 1834, p. 121).Au fig., vx ou littér. Dans les périodes douloureuses qui accompagnent une création, une mutation. L'entrelacs de données intérieures sentimentales qui sont en travail (Du Bos, Journal, 1927, p. 269).
II.
A. − [L'accent est mis sur l'activité]
1. Activité humaine exigeant un effort soutenu, qui vise à la modification des éléments naturels, à la création et/ou à la production de nouvelles choses, de nouvelles idées. Travail créateur, intellectuel, manuel, qualifié, scientifique, spécialisé, technique; travail des mains, de la pensée, de la réflexion; se mettre au travail; se plonger dans le travail; travail individuel, en commun, en équipe, en groupe; travail à la machine, à la main; travail agricole, industriel. Le travail améliore nos facultés morales ou intellectuelles; le hasard les donne, et souvent il les développe (Senancour, Obermann, t. 2, 1840, p. 2):
1. C'est la formule célèbre d'Économie Politique et Philosophie: « Toute la prétendue histoire du monde n'est rien d'autre que la production de l'homme par le travail humain. » Et Marx a bien reconnu que telle était déjà la position hégélienne (...) puisqu'il a félicité Hegel d'avoir découvert dans le travail l'acte par lequel l'homme se produit lui-même. Lacroix, Marxisme, existent., personn., 1949, p. 32.
[Pour encourager ou enjoindre qqn ou soi-même à entamer une tâche] Au travail! Le pèlerin (...) courut à la commune. On y visa ses papiers, et bientôt il en sortit muni d'une autorisation signée, parafée par M. le Maire. En avant! au travail, houp! (Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 115).
De travail
[En parlant d'inanimés] Qui concerne le travail, utilisé pour le travail. Cabinet, document, gants, salle, table, vêtements de travail; capacité, habitude, méthode, puissance de travail. Son pays, d'où il n'avait rapporté qu'un ardent désir de réussir, une faculté de travail exceptionnelle (G. Leroux, Parfum, 1908, p. 5).
Langue de travail. Langue utilisée pour la communication dans les réunions professionnelles ou scientifiques internationales. En 1900, beaucoup d'auteurs étrangers (...) faisaient suivre leur publication dans la langue nationale d'un résumé en une des trois langues de travail (Furonds R. gén. sc., t. 63, 1956, p. 32).
[En parlant de pers.] Qui fait le travail. Les études de sociologie industrielle, par exemple, montrent bien la multiplicité des appartenances qui sollicitent l'individu: membre d'une équipe de travail, il est aussi lié à sa famille, affilié à un syndicat ou à un parti, parfois à une église (Traité sociol., 1968, p. 393).
Groupe de travail. Groupe restreint de personnes chargé par une collectivité d'étudier une question particulière, de soumettre des propositions dont elle débattra par la suite. Le groupe de travail qui s'est occupé de l'ameublement au sein de la commission des industries de transformation (Industr. fr. bois, 1955, p. 6).
Travail de + subst.
[Le compl. désigne une matière] Action de modifier une matière, de la rendre utilisable. Travail des métaux, du bois, du sol. Ah! ce paysan voué au travail de la terre, qui porte si courageusement le poids du jour (Gambetta, 1871ds Fondateurs 3eRépubl., p. 237).On trouve de nombreux produits de l'industrie de l'homme néolithique. Le travail de la pierre s'est perfectionné (Boule, Conf. géol., 1907, p. 209).
[Le compl. désigne un outil] Technique d'utilisation de cet outil. Je pensai que le goût du travail de l'aiguille l'emportait, dans l'esprit d'une fille (Restif de La Bret., M. Nicolas, 1796, p. 87).
P. anal. Activité utile des animaux domestiques. Le preneur profite seul des laitages, du fumier et du travail des animaux donnés à cheptel (Code civil, 1804, art. 1811, p. 328).
Bête de travail. Animal domestique élevé pour l'utilité de sa force. Les bêtes de travail ont été recrutées parmi les chevaux et les bœufs, accessoirement parmi les ânes et les mulets (Wolkowitsch, Élev., 1966, p. 22).
2. Effort, exercice physique ou intellectuel, réalisé en vue de l'acquisition, de l'apprentissage ou de la réussite de quelque chose. Travail scolaire. Le travail des hanches développe les muscles d'attache de la cuisse au bassin (Arts et litt., 1935, p. 44-7).On a créé des symboles, il existe des machines qui dispensent de l'attention, qui dispensent du travail patient et difficile de l'esprit (Valéry, Variété III, 1936, p. 225).
3. Activités ou ensemble d'activités utiles qu'il est nécessaire d'accomplir. Cette heure passée paisiblement avec Dieu en me promenant me fera grand bien (...). Puis mon travail pastoral, paisible: chaque chose l'une après l'autre (Dupanloup, Journal, 1857, p. 191).Ce sont ces demoiselles (...) incapables de s'assurer la santé, la gaieté, de se servir elles-mêmes, de participer au travail commun de la cuisine et du nettoyage (Frapié, Maternelle, 1904, p. 201).
Travail social. Par « travail social » nous entendons d'abord toute action organisée qui vise à réduire une inadaptation quelconque ou qui est (explicitement ou implicitement) préventive de l'inadaptation d'un individu ou d'un groupe (Esprit, avr.-mai 1972, p. 547 ds Foulq. Sc. soc. 1978).
4. Activité contraignante qui occupe. Je suis comme le temps, sombre et sans soleil. Maintenant que je n'ai plus de travail suivi, je ne sais que devenir. Je rêvasse et je patauge (Flaub., Corresp., 1862, p. 32).
5. Besogne, tâche. Se tuer, se crever au travail; être accablé, débordé, écrasé, submergé de travail; abattre du travail. Le flot d'une population dense a pu atteindre ses extrêmes limites sur les flancs de l'Apennin, des Alpes méridionales et des Cévennes. Ces hauteurs, elle les délaisse aujourd'hui, rebutée par le travail minutieux et pénible qu'exigent les terrassements en gradins (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum., 1921, p. 88).
Avoir du travail par-dessus la tête. Avoir beaucoup de tâches à accomplir. À deux reprises depuis trois heures, il s'était entendu rabrouer sévèrement et il n'osait pas importuner de nouveau des gens qui avaient du travail par-dessus la tête (Exbrayat, On se reverra petite, 1964, p. 42).
B. − [L'accent est mis sur le résultat du travail]
1. Ouvrage réalisé par l'activité humaine de modification des éléments naturels ou de production de nouveaux biens. Beau, bon, grand travail; travail personnel, collectif, d'équipe; travail utile. C'était mon fabricant de la Salpêtrière, il apportait le travail de quinze jours, et à son air timide on voyait qu'il tremblait d'être refusé (Janin, Âne mort, 1829, p. 171).J'attends avec impatience parfois le travail commandé qui ne vient pas vite (Valéry, Corresp.[avec Gide], 1895, p. 253).
En partic., dans le domaine intellectuel. Travail analytique, synthétique; travail de comparaison, de compilation, d'élaboration, d'érudition, d'interprétation, de recherche. Personne n'a entrevu que ma volonté était de faire un travail purement philologique, que je crois d'un vif intérêt historique et social (Zola, Assommoir, 1877, préf., p. 373).Le curé aurait voulu que Jean Péloueyre se remît au travail d'histoire locale, entrepris avec passion mais depuis une année interrompu (Mauriac, Baiser Lépreux, 1922, p. 179).
♦ Dans le domaine scol.Travail à la maison. Devoirs à la maison. Juger le temps réellement disponible pour le travail à la maison ou pour trouver l'explication des difficultés rencontrées à certains moments de la vie scolaire (Encyclop. éduc., 1960, p. 133).
2. Qualité de cet ouvrage; manière dont il a été réalisé. Travail bâclé, régulier, sérieux, soigné, suivi; travail d'amateur, de bénédictin. Une paire de pendants d'oreilles tout en or, d'un travail absolument artistique (Mallarmé, Dern. mode, 1874, p. 713):
2. On comprend que des gens comme Lanson et Brunot méprisent le travail du Dictionnaire de l'Académie, et le but de ce très vain travail, et les méthodes, ou le manque total de méthode, de ces amateurs et de ces ignorants. Larbaud, Journal, 1935, p. 339.
C'est du) beau travail! Le travail! (pop.) [En bonne ou en mauvaise part suivant la situation] Sacrée andouille! Pas fichu seulement de fabriquer une verte selon les principes! En voilà un beau travail! Oui, c'est du joli! c'est du propre! (Courteline, Train 8 h. 47, 1888, p. 45).Du beau travail! Faux-marbre sur les murs, faux-chêne sur le comptoir. Les vieux de l'hôtel n'en revenaient pas (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p. 130).
C. − [L'accent est mis sur l'exécution et les conditions du travail]
1. Activité, ensemble d'activités coordonnées, d'une ou de plusieurs personnes, en vue de la réalisation de quelque chose. Il est possible, par un travail d'analyse, de discerner des correspondances entre les rassemblements humains et les conditions physiques (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum., 1921, p. 10).Le salut de la galère qui porte vos espoirs réclame un dur travail. Vous l'accomplirez avec fierté parce que vous travaillerez à votre délivrance (Aymé, Vogue, 1944, p. 130).Travaux d'approche*. Travail préparatoire. V. ce mot I C 1 ex. 2.
Travail de longue haleine. Travail dont l'exécution demande du temps. Fénelon en a été témoin en Espagne, où il a décrit ce travail de longue haleine, avec entr'aide, emploi de salariés, parfois de bulldozer (Meynier, Paysages agraires, 1958, p. 94).
Travail de bœuf, de cheval, de bagnard, de forçat, d'Hercule, de nègre, de Romain, de titan. Travail dont l'exécution exige beaucoup d'énergie et de temps. Au prix d'un travail de titan qui a pris plus de quinze ans et coûté la vie à un grand nombre de Chinois et de Pakistanais, la route a été taillée dans une montagne en perpétuel mouvement (Le Monde loisirs, 17 mai 1986, p. 12, col. 1).
Travail de fourmi. Travail généralement long, dont l'exécution demande de la minutie et de la persévérance. Il est évident que la vie et ce qu'il en tire l'intéressent bien plus que ce travail de fourmi qu'est l'élaboration d'une œuvre. Il a trop de générosité pour cette vocation d'égoïste et d'avare (J. Dutourd, Pluche, 1967, p. 263).
Travail de force. Travail dont l'exécution exige une grande énergie physique. L'extraction demandait un travail de force, tandis que l'appareillage (assemblage des pierres dans la construction) requérait une minutie dont nous n'avons plus idée (Lambertie, Industr. pierre et marbre, 1962, p. 61).
Au plur. Travaux d'aiguille, de dame. Travaux de couture, de tricot ou de crochet. Joséphine pensa alors à ces longues veillées si monotones, consacrées à des lectures et à des travaux d'aiguille (Karr, Sous tilleuls, 1832, p. 205).
2. Dans le domaine intellectuel
a) Souvent au plur. Recherche, ensemble de recherches dans un domaine particulier. Ensemble des travaux de; grâce aux travaux de; attendre, connaître, citer les travaux de qqn; poursuivre des travaux. Je m'étonne qu'un homme illustre, comme vous, par des travaux si considérables perde ses loisirs à une littérature si légère! (Flaub., Corresp., 1863, p. 76).Un des avantages des atlas linguistiques, c'est de fournir des matériaux pour des travaux de dialectologie (Sauss.1916, p. 277).
En partic.
♦ Dans le domaine universitaire.Travaux dirigés (T.D. V. dirigé B.Travaux pratiques (T.P.). V. pratique2A 1.
♦ Dans le domaine littér.Ensemble d'activités intellectuelles qui se rapportent à la production d'une œuvre; cette œuvre. S'il est pauvre [l'homme de lettres], qu'il sache combiner avec ses travaux littéraires l'exercice d'une profession qui subvienne à ses besoins (L. Blanc, Organ. trav., 1845, p. 190).Deux poètes (...) voulurent bien penser que je m'intéressais au sort de leurs beaux travaux poétiques: ils ont vu qu'ils ne s'étaient pas trompés (Chateaubr., Mém., t. 3, 1848, p. 210).
b) Délibérations, (textes issus des) discussions d'une assemblée, d'une commission. Travail législatif, parlementaire. Songez-y bien, si les travaux de la Convention nationale sont manqués, vous n'avez plus à attendre qu'anarchie, misère et désolation (Marat, Pamphlets, Aux amis de la Patrie, 1792, p. 309).La journée du mercredi et les matinées des autres jours sont consacrées aux travaux des commissions (Lidderdale, Parlement fr., 1954, p. 121).
3. Dans le domaine manuel.Opération, suite d'opérations nécessitant du matériel technique, du temps et l'activité physique d'une ou de plusieurs personnes. Travaux d'assainissement, d'assèchement, de construction, de défense, de défrichement, d'entretien, d'irrigation, de réfection, de réparation, d'urbanisme; conducteur de travaux; achèvement des travaux; entreprendre, faire, financer des travaux; accélérer, faire avancer, pousser, surveiller les travaux; inspecteur* des travaux finis (p. plaisant.). Bonne occasion de se renseigner sur les travaux du canal (Vogüé, Morts, 1899, p. 288).Le mauvais entretien des fossés qui compromet les travaux de drainage (Forêt fr., 1955, p. 8).
[Dans l'agric.] Travaux agricoles, champêtres, de la campagne. Chez les Havasupaï les femmes prennent part aux travaux des champs et à l'occasion plantent pour leur propre compte (Lowie, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 290).
[Dans le bât.] Travaux de ravalement, de terrassement. Pendant les travaux de restauration, on avait dû consolider l'édifice avec des poutrelles en fer (Duhamel, Suzanne, 1941, p. 26).
[Dans la constr. d'ouvrages d'art] Travaux maritimes, portuaires, souterrains. Les ciments pour travaux à la mer ne sont pas à proprement parler des ciments « spéciaux » (Cléret de Langavant, Ciments et bétons, 1953, p. 140).
Expr. Ralentir*! travaux!
Grands travaux. Chantiers d'intérêt public ayant trait aux transports, à la production d'énergie, à l'aménagement des villes et des campagnes. On supposait que la ville, qui avait entrepris de grands travaux dans les quartiers excentriques, aurait besoin de ces terrains (Becque, Corbeaux, 1882, ii, 9, p. 135).
Travaux publics
ARM., vieilli. Peine correctionnelle du code de justice militaire consistant en un travail forcé dans des chantiers civils ou militaires, actuellement supprimée. Il avait été condamné par le conseil de guerre à cinq ans de travaux publics pour avoir volé la caisse de sa compagnie (G. Leroux, Parfum, 1908, p. 58).
[Avec ou sans majuscule] Chantiers d'utilité générale mis en œuvre pour le compte d'une personne morale publique; p. méton., le ministère des Travaux publics (T.P.). École des Travaux publics d'État (T.P.E.); entrepreneur de travaux publics. À côté de ces divers fonctionnaires, se trouvent ceux à qui sont confiés des pouvoirs spéciaux: pour les travaux publics, les ingénieurs en chef, ingénieurs ordinaires, conducteurs (Vivien, Ét. admin., t. 1, 1859, p. 73).Un banquier. Il a des intérêts dans les entreprises de travaux publics. Un vrai républicain (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 203).
DR. PÉNAL. Travaux forcés. Peine de droit commun, temporaire ou perpétuelle, effectuée au bagne de Guyane, abolie en 1936. Le nommé Chavard a été condamné à cinq ans de travaux forcés et à la marque, pour avoir volé, avec effraction, escalade nocturne et à main armée, cinq choux et un lapin blanc (Sue, Atar-Gull, 1831, p. 11).Travail d'intérêt général. Peine de substitution à l'emprisonnement dans certaines conditions. Michel expurgera sa peine en consacrant quarante heures de sa vie à effectuer un travail d'intérêt général (« TIG » pour les initiés) dans le musée de la Résistance et de la Déportation situé dans la citadelle de la vieille ville [à Besançon] (L'Événement du jeudi, 13 déc. 1984, p. 42, col. 2).
Travaux d'utilité collective (T.U.C.). ,,Activité ouverte à tout jeune sans emploi de 16 à 21 ans, susceptible de contribuer à l'amélioration de la vie sociale, organisée par une collectivité territoriale, une association (..) et rémunérée par l'État`` (GDEL). Imaginés il y a tout juste un an, les TUC (travaux d'utilité collective) marchent bien, trop bien peut-être (Le Monde, 24 août 1985, p. 13).
Gros travaux. V. gros1III A.
Travaux domestiques, ménagers. Ensemble des travaux nécessaires à l'entretien du ménage et du linge. Sa mère occupée aux travaux domestiques (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 213).Les travaux ménagers pour une femme sont parfois astreignants. Bien souvent, à l'époque actuelle, ils deviennent un fardeau (Mathiot, Éduc. mén., 1957, p. 23).
IMPR. Travaux de ville. Le nom de travaux de ville ou « bilboquets » s'applique aux impressionsen dehors des labeurs et journauxayant un caractère d'utilité passagère (É. Leclerc, Nouv. manuel typogr., 1897, p. 347).
D. −
1. Activité humaine laborieuse exercée en échange d'un bien, d'un service ou plus généralement en échange d'argent, dans le but de subvenir à ses besoins. Synon. pop. boulot2, turbin.Maintenant, il était lancé, les mots venaient tout seuls. Par moments, il s'écoutait avec surprise, comme si un étranger avait parlé en lui (...). Il disait leur misère à tous, le travail dur, la vie de brute, la femme et les petits criant la faim à la maison (Zola, Germinal, 1885, p. 1320).J'attendrais, je chercherais ailleurs; je vivrais provisoirement du travail de ma mère (Duhamel, Confess. min., 1920, p. 155).
SYNT. Travail à domicile, en usine, de bureau; travail indépendant; travail de jour, de nuit; travail à temps complet, à plein temps, à mi-temps, à temps partiel; travail journalier, mécanique, régulier; camarade, compagnon, collègue de travail; travail par équipe, par poste (v. poste2); travail posté (v. poster2), continu; poste, horaire, journée de travail; instrument, outil, vêtement de travail; conditions de travail; durée, organisation, produit du travail; avoir, chercher, trouver du travail; donner, fournir, distribuer du travail; vivre de son travail; division du travail; bourreau de travail (v. bourreau2).
Travail à façon. Travail rémunéré, exécuté pour autrui qui fournit la matière première. Le producteur (...) peut, (...) par des contrats de travail à façon, transformer les minerais (Traité euratom, 1957, p. 342).
Travail à la chaîne. Travail parcellisé qui ne demande qu'un nombre limité de gestes et d'opérations. La mutilation de la personnalité entraînée par le travail à la chaîne de nature automatique et parcellaire (Jeux et sports, 1967, p. 176).
Travail aux pièces, à la tâche. Travail rémunéré en fonction de la tâche accomplie et non en fonction du temps passé à l'effectuer. V. pièce I B 2 ex. de Sorel.
Travail pénitentiaire. Travail rétribué auquel sont soumis les détenus de droit commun. Le travail pénitentiaire ne doit pas être considéré comme une peine additionnée mais comme un moyen de faciliter la réadaptation des détenus (R. pénitentiaires et de dr. pénal, mars 1956, p. 168).
Organisation scientifique du travail. Taylorisme. Quoi qu'il en soit, l'O.S.T. (Organisation scientifique du travail) (...) ne devait pas mourir avec son inventeur, tout au contraire (Sociol., 1970, p. 510).
ÉCON. POL. Cette activité considérée comme le facteur essentiel de la création des richesses. Sur le produit du travail ouvrier et paysan, elle [la classe capitaliste et propriétaire] prélève tous les ans et indéfiniment une part notable (...). Ainsi, dans la société d'aujourd'hui, le travail des prolétaires ne leur appartient pas tout entier (Jaurès, Ét. soc., 1901, p. 126).En éliminant le travail « vivant » pour faire des économies de salaires, les capitalistes tarissent la source de la valeur ajoutée. C'est la « matière première » même de leur profit qu'ils détruisent. Car c'est sur l'homme que l'on gagne de l'argent. Pas sur la machine (Le Nouvel Observateur, 12 janv. 1976, p. 44, col. 3).Force* de travail. Marché* du travail.
Moyens de travail. Ensemble de ce qui est nécessaire pour accomplir une activité productive. Seul le socialisme, en absorbant toutes les classes dans la propriété commune des moyens de travail, résoudra cet antagonisme [des classes] (Jaurès, 1904ds Doc. hist. contemp., p. 64).
2. Activité humaine laborieuse rétribuée, exercée au sein d'une entreprise et régie par des lois, par des codes. Code, droit, législation du travail; droit au travail; durée, liberté du travail; inspection, médecine du travail; aménagement, limitation du temps de travail. Dès le milieu du XIXesiècle, en France et en Grande-Bretagne, on avait interdit ou limité le travail des enfants trop jeunes, celui des femmes pendant la nuit (Lesourd, Gérard, Hist. écon., 1966, p. 441).Convention* collective du travail; accident*, conflit*, inspecteur*, médecin* du travail; carte* de travail; fête* du travail.
Arrêt de travail. Interruption de travail pour cause de grève ou de maladie; p. méton., formulaire de mise en congé pour cause de maladie. L'introduction de l'automation dans les processus continus de production rend les arrêts de travail techniquement catastrophiques (Univers écon. et soc., 1960, p. 44-12).Les arrêts de travail prescrits à l'occasion d'une cure thermale ne donnent pas lieu à indemnité journalière (Réforme Sécur. Soc., 1968, p. 46).Certificat de travail. Document délivré par l'employeur à un salarié à l'expiration du contrat de travail ou en cas de rupture de ce contrat. Procure lui un état civil de Rocroi (...), carte enregistrée, acte de naissance, certificat de travail (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 8).Cessation de travail. Grève. Une loi de juillet 1963 (...) soumet toute cessation de travail à un préavis de cinq jours (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p. 235).Contrat de travail. Convention entre employeur et employé qui règle les modalités du travail salarié. La grève ne constitue plus en France (...) une rupture du contrat de travail. Sauf faute lourde du salarié, le contrat est seulement suspendu (Reynaud, Syndic. en Fr., 1963, p. 139).Travail intérimaire, temporaire. Travail à durée limitée exercé dans une entreprise par un travailleur. On a répertorié, dans une ville de l'Ouest atlantique, jusqu'à 70 « points de vente » de travail temporaire (L'Express, 23 févr. 1976, p. 57, col. 2).S'en tenir, dans toute la mesure du possible, à des embauches de caractère provisoire: travail intérimaire ou, plus simplement, contrats de travail à durée déterminée (L'Express, 27 nov. 1981, p. 101, col. 2).Travail noir. V. noir I B 2.Travail au noir. V. noir II B 2.
3. P. méton.
a) Lieu où s'exerce cette activité. Synon. atelier, bureau, chantier, usine.Aller, être au travail; sortir du travail. À 9 heures précises j'ai quitté le travail pour me rendre chez Mmela baronne Micou (Delécluze, Journal, 1827, p. 434).C'était tout simplement comme s'il eût oublié quelque chose, et qu'il fût revenu du travail, un peu vite, pour réparer l'oubli qu'il avait fait (Genevoix, Raboliot, 1925, p. 338).
b) Temps pendant lequel s'exerce cette activité. Il y a, après le travail, un besoin de dépense, de grosse et niaise plaisanterie (Goncourt, Journal, 1861, p. 898).Ce même homme et cette même femme se sont connus un jour, et l'homme a souri sans doute à la femme: il lui a, sans doute, après le travail, apporté des fleurs (Saint-Exup., Terre hommes, 1939, p. 259).
c) Ensemble des personnes qui exercent cette activité. Confédération française démocratique du travail (C.F.D.T.); Confédération générale du travail (C.G.T.); Organisation internationale du travail (O.I.T.); monde du travail:
3. L'entreprise, a-t-on dit, résulte de la collaboration du capital et du travail. Formule incomplète, parce que si par capital on entend capitalistes et par travail travailleurs, ceux-ci et ceux-là sont tellement hétérogènes qu'une collaboration entre eux est impuissante à résoudre les problèmes les plus élémentaires. Wilbois, Comment fonct. entr., 1941, p. 7.
Bourse du travail. V. bourse2.
4. En partic. Activité professionnelle. Le travail pour une femme est si difficile à trouver et rapporte si peu de chose (Becque, Corbeaux, 1882, iii, 8, p. 189).Le cœur d'un employé de métro n'est pas rempli par les billets qu'il perfore. Sa vraie vie commence là où son travail finit (Mauriac, Journal 2, 1937, p. 158).
En compos. Sans-travail*.
5. Activité de production, imposée et obligatoire, généralement pénible. Camp de travail. Une nation à qui ne sont offertes, comme solution et comme espérance, que le travail forcé pour le compte de l'ennemi (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 632).Service du travail obligatoire* (S.T.O.).
III.
A. −
1.
a) Action continue, progressive, de quelque chose (élément ou phénomène naturel) qui aboutit à une modification observable. Travail d'érosion. Tous les monuments de la nature portent l'empreinte d'un grand travail des eaux agissant par déchirements, secousses, etc. (Maine de Biran, Journal, 1816, p. 158).En d'autres pays c'était déjà le renouveau, le travail ardent de la sève, la poussée des bourgeons et bientôt des feuilles (Hémon, M. Chapdelaine, 1916, p. 44).
b) Modification interne que subit un élément, une matière. Les trépidations de la route, les manœuvres et même le travail du bois provoquaient des dislocations qui dégénéraient en avaries plus importantes (Bailleul, Matér. roulant ch. de fer, 1951, p. 97).
2. Action progressive, continue de quelque chose sur quelqu'un. Travail de l'amour, de la haine. Le travail efficace de la philosophie révolutionnaire n'est possible que par une liaison (...) du philosophe et de la classe qui porte la révolution (Nizan, Chiens garde, 1932, p. 238).Comme c'est étrange que l'amour le plus fervent ne puisse se défendre contre le travail du temps! (Martin du G., Thib., Épil., 1940, p. 880).
PSYCHANAL. Travail du deuil. ,,Processus décrit par la psychanalyse et qui permet de se détacher de l'objet perdu en choisissant de rompre le lien`` (Pel. Psych. 1976). Travail du rêve. ,,Ensemble des opérations qui transforment les matériaux du rêve en un produit: le rêve manifeste. La déformation et l'effet de ce travail`` (Méd. Biol. t. 3 1972).
3. Action continue, volontaire d'une personne ou d'un groupe de personnes qui vise à une transformation sociale, à un changement politique. Travail politique, social, révolutionnaire. Il y a dix fois plus d'hommes qui comprennent qu'ils feront chez nous du travail utile contre le fascisme, que nous ne pouvons en organiser (Malraux, Espoir, 1937, p. 562).
B. − Action de produire un effet utile; résultat de cette action. Travail cérébral, musculaire; travail du cœur, du foie, des organes. J'ai connu quelques personnes qui, ne fermant presque pas l'œil depuis plusieurs années, étaient par conséquent dans l'impossibilité de se soustraire entièrement (...) au travail de la mémoire et de l'imagination (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 1, 1808, p. 165).Peu à peu un travail cicatriciel s'établit qui rétracte les lésions en bourrelets ou en plaques fibreuses (Calmette, Infection bacill. et tubercul., 1920, p. 181).
C. − MÉCAN., PHYS. ,,Produit de l'intensité d'une force par la projection du déplacement de son point d'application sur la direction de la force`` (Dew. Technol. 1973). Unité de travail; travail d'une machine; travail produit par un moteur. V. puissance B ex. de Champly.
Prononc. et Orth.: [tʀavaj], plur. [-o]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. 1130-40 traval d'enfant « douleurs de l'accouchement » (Wace, Vie de Ste Marguerite, éd. E. A. Francis, 645); 2. ca 1140 « tourment » (Gaimar, L'Estoire des Engleis, éd. A. Bell, 16); 3. fin xiies. « fatigue, peine supportée » (Moniage Guillaume, éd. W. Cloetta, II, 5205). B. 1. a) Ca 1130 « peine que l'on se donne, efforts » (Lois de Guillaume, éd. J. E. Matzke, 28); 1209 (Guiot de Provins, Bible, éd. J. Orr, 2305); b) mil. xiiies. « peine que l'on se donne dans l'exercice d'un métier artisanal » [associé à painne] (G. Fagniez, Doc. rel. à l'hist. de l'industr. et du comm. en France, t. 1, p. 204 ds Gemmingen Arbeit, p. 104); 2emoit. xiiies. (Dit des Fevres ds Jongleurs et trouvères, éd. A. Jubinal, 129 ds T.-L.: De lor labor, de lor travail Vivent les fevres lëaument); 2. a) 1362-63 désigne le résultat de l'activité accomplie (Dehaisnes, Doc. [...] concernant l'hist. de l'art dans la Flandre, t. 1, p. 445 ds Gemmingen Arbeit, p. 107); b) 1676 « qualité de l'exécution d'un ouvrage » (Félibien, p. 760); 3. 1600 « activité professionnelle quotidienne nécessaire à la subsistance » (doc. ds H. Hauser, La Liberté du comm. et la liberté du travail sous Henri IV, p. 289 ds Gemmingen Arbeit, p. 109). C. Au plur. 1. 1611 désigne des actions difficiles, périlleuses, qui sont un titre de gloire pour leur auteur (J. Bertaut, Œuvres poét., p. 20); 2. 1616 « ensemble des recherches effectuées dans un domaine intellectuel donné » (A. d'Aubigné, Les Tragiques ds Œuvres, éd. E. Réaume et de Caussade, t. 4, p. 150: je veux [...] Me livrer aux travaux de la pesante histoire); 3. 1721 « activités propres à un domaine technique déterminé » (Montesquieu, Lettres persanes, p. 99: travaux des mines);1741 travaux domestiques (A.-C. Caylus, Féeries nouvelles, p. 571); 4. 1727 travaux publics (A.-M. de Ramsay, Les Voyages de Cyrus, p. 92); 5. 1768 travail forcé (Voltaire, L'Homme aux quarante écus, p. 72: Il faut effrayer le crime, oui sans doute; mais le travail forcé et la honte durable l'intimident plus que la potence); 1795 travaux forcés (Code pénal, tit. I, art. 6 d'apr. Brunot t. 9, p. 1042, note 3). D. 1. 1769 « modification interne que subit une matière, une substance » (Lemierre, La Peinture, p. 221: C'est elle [la nature] qui [...] Nuance au vaste sein de la terre en travail Le jaspe, le porphyre); 2. 1783 « action progressive exercée par un élément, un phénomène naturel » (Buffon, Hist. nat., Minéraux, t. 1, p. 152); 3. 1829 mécan. (G. Coriolis, Traité de la mécanique des corps solides..., Avertissement à la 1èreéd., p. IX ds Quem. DDL t. 41: je désigne par le nom de travail la quantité qu'on appelle assez communément puissance mécanique, quantité d'action ou effet dynamique). Déverbal de travailler*. Jusqu'au déb. du xvies. travail est souvent associé à peine (v. Gemmingen Arbeit, pp. 104-105) car le sens dominant est « fatigue, peine » qui peut avoir pour contrepartie une rétribution. Le sens de « activité professionnelle » devient très rare au xvies. pour revenir en force au xviies. sous l'infl. de travailler*. FEW t. 13, 2, p. 298, 290a; Gemmingen Arbeit, pp. 103-109. Fréq. abs. littér.: 22 597. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 27 946, b) 31 865; xxes.: a) 33 587, b) 34 983. Bbg. Baldinger (K.). Vers une sém. mod. Paris, 1984, pp. 232-236; Vom Affektwort zum Normalwort. Mél. Wartburg (W. von) 1958, pp. 59-93. − Darm. Vie 1932, p. 49, 193. − Dub. Pol. 1962, p. 431. − Furukawa (N.). Le Nombre gramm. en fr. contemp. Tokyo, 1977, pp. 60-70. − Gohin 1903, p. 291. − Goug. Mots. t. 1. 1962, pp. 201-203. − Krupp (M.). Wortfeld « Arbeit ». In: Europäische Schlüsselwörter. München, 1964, t. 2, pp. 258-286. − Lew. 1968, p. 74. − Ostrá (R.). Le Champ conceptuel du travail dans les lang. rom. Ét. rom. de Brno. 1967 t. 3, pp. 7-84; Struct. du signe ling. et chang. sém. Beitr. rom. Philol. 1972, t. 11, no1, pp. 118-131. −Quem. DDLt. 9, 21, 24, 25, 26, 30, 32, 33, 41. − Spitzer (L.). Fr. travail. Rom. R. 1944, t. 34, pp. 374-379. − Tournier (M.). Un Vocab. ouvrier en 1848... Thèse, St-Cloud, 1975, pp. 92-100, 104-105, 136-140. − Vardar Soc. pol. 1973 [1970], p. 312.