| * Dans l'article "TRAFIQUER,, verbe" TRAFIQUER, verbe A. − Empl. intrans. 1. − Vieilli. Faire un commerce lointain. Trafiquer sur les mers, à Florence, en Orient; trafiquer avec les arabes. En 1225, le duc apprit que quelques uns de ses sujets, qui trafiquaient avec la Pologne et les autres pays slaves, avaient été volés et dépouillés (Montalembert, Ste Élisabeth, 1836, p. 98).Les ministères de l'Instruction publique et du Commerce et la Société de Géographie (...) m'ont en effet confié (...) le soin de reconnaître l'antique voie des caravanes qui, dès le IXesiècle, trafiquaient entre Tunis et le Soudan, par Tozeur, Ouargla (Benoit, Atlant., 1919, p. 56). 2. Se livrer à des opérations commerciales illicites, généralement clandestines. S'enrichir en trafiquant avec l'ennemi. Quelques Cantonnais étaient venus s'installer vers 1860 dans la Bowery (...) longtemps ils y trafiquèrent en paix, jouant aux osselets ainsi qu'à Macao, vendant leur opium fort cher (Morand, New-York, 1930, p. 80). B. − Empl. trans. indir. 1. Trafiquer de qqc.Faire trafic de quelque chose; acheter et vendre quelque chose, généralement de manière clandestine en réalisant des profits illicites. Trafiquer de l'or, des devises, des esclaves. Quand on trafique de la coco, quand on combine des départs pour Buenos Aires, quand les petites filles se prostituent (Montherl., Célibataires, 1934, p. 846).D'autres trafiquaient du tabac, à trente et quarante francs le paquet (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 52). 2. Trafiquer avec, dans, sur qqc.Tirer un profit illicite, malhonnête de quelque chose. Synon. spéculer, tripoter.Trafiquer avec l'argent des autres; commerçant qui trafique sur des denrées rares. On dit que Saccard trafique dans les démolitions, qu'il vole tout le monde (Zola, Ventre Paris, 1873, p. 758).Il trafiquait chaque fois que l'occasion se présentait, sur n'importe quoi. On avait trouvé à l'hôtel (...) plusieurs centaines de milliers de dollars, en espèce (Triolet, Prem. accroc, 1945, p. 147). 3. Trafiquer avec, de qqc.Tirer profit d'une chose qui n'est pas vénale. Trafiquer de sa conscience, de son crédit, de son influence. Jamais, entendez-vous? jamais, nous ne trafiquerons avec l'honneur de notre fille (Zola, Pot-Bouille, 1882, p. 348): Celles qui s'exhibent aux touristes dans les cuevas du Sacro Monte sont presque toutes castillanes, n'ont de la gitane que le costume du soir et trafiquent de leur corps aussi bien que de leurs danses.
T'Serstevens, Itinér. esp., 1963, p. 109. C. − Empl. trans. dir. 1. a) Fam. [Le compl. d'obj. dir. désigne un objet, un produit] Soumettre à des manipulations frauduleuses. Trafiquer un compteur, le moteur d'une voiture. Un des patrons de la brigade de lutte contre les fraudes se plaignait des difficultés rencontrées par ses inspecteurs dans leur travail: « (...) trier le vin trafiqué du vrai devient une gageure » (P.-M. Doutrelant, Les Bons vins et les autres, 1976, p. 8). b) Empl. pronom. réfl., pop. ,,Se faire avorter`` (Rob. 1985). 2. Fam. [Souvent dans des phrases interr.] Faire, fabriquer, organiser (quelque chose de plus ou moins louche ou mystérieux). Qu'est-ce qu'il trafique ici, celui-là? Que trafiques-tu donc? s'écria sa sœur; quinze à dîner, voilà quarante francs au moins à sortir de notre poche! (Balzac, Pts bourg., 1850, p. 99).Blaise l'entendait (...) trafiquer dans la cuisine (Arnoux, Solde, 1958, p. 237). − Empl. pronom. [En constr. impers.] Se faire, se passer. Il se trafique des choses louches ici. Elles savaient (...) tout ce qui se trame et qui se trafique (...) dans les arrière-magasins (Céline, Mort à crédit, 1932, p. 469). REM. 1. Traficotage, subst. masc.,fam. Action de traficoter (infra dér.); petit commerce malhonnête. Cette histoire sent sa comédie bourgeoise avec ses traficotages sordides et ses gros sous (La Croix, 14 févr. 1976ds Gilb. 1980). 2. Traficoteur, -euse, subst. et adj.,fam. (Personne) qui traficote (infra dér.). Les activistes ont toujours refusé (...) de bouter les traficoteurs hors des murs. Car les marchands de hasch ont droit d'asile (L'Express, 28 avr. 1981, p. 159). Prononc. et Orth.: [tʀafike], (il) trafique [-fik]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Intrans. 1. 1441 traffiguer « faire un commerce lointain » (Traité d'Emmanuel Piloti, éd. P.-H. Dopp, p. 156); 1601 traffiquer « gagner de l'argent » (P. Charron, De la Sagesse, l. III, chap. 2, éd. B. de Negroni, p. 571); 2. 1461-66 trafiquer « entretenir des relations, échanger des informations » (J. de Bueil, Le Jouvencel, éd. L. Lecestre, t. 2, p. 215); 3. 1579 « avoir des relations clandestines condamnables avec quelqu'un » ici, trafiquer avec les hommes, en parlant de femmes (P. de Larivey, Les Jaloux, III, 6, éd. Viollet-le-Duc ds Anc. Théâtre fr., t. 6, p. 57). B. Trans. 1. a) 1545 « acheter ou vendre quelque chose » (Le Maçon, trad. Decameron, II, 4 ds Hug.); b) 1581 « faire un commerce illicite, faire commerce de quelque chose qu'il est honteux de monnayer » (Du Bartas, La Semaine, 3eJour, éd. K. Reichenberger, p. 74, 447: Magistrats corrompus [...] Qui Trafiquant le droit profanez vos estats); 1615 trans. indir. (J.-P. Camus, Homélie des trois simonies ds Homélies des États Généraux, éd. J. Descrains, p. 242: trafiquer des choses spirituelles); 2. 1885 fam. « faire quelque chose de plus ou moins mystérieux » (Zola, Germinal, p. 1357: Je ne sais ce qu'il trafique); 3. 1904 « soumettre quelque chose à des manipulations frauduleuses » (Nouv. Lar. ill.). C. Pronom. réfl. 1. 1698 « faire l'objet d'un trafic » (J.-Fr. Regnard, Le Distrait, IV, 9: L'écriture est un art bien utile aux amants! Petits soins, rendez-vous [...], Tout cela se trafique avec l'écriture); 2. 1844 impers., fam. « se faire, se passer » (Balzac, Mmede la Chanterie, p. 260: Que veulent-ils de moi ici? que s'y trafique-t-il?). Empr. à l'ital.trafficare « pratiquer le cabotage » (dep. xives., M. Villani, Boccace ds Tomm.-Bell.), aussi ital. du Nord traffigare « négocier » (1380 d'apr. DEI), empr. au cat. trafegar « transvaser, décanter », qui, de même que l'esp. tras(h)egar et le port. trasfegar « id. », est prob. issu d'un lat. vulg. *tran(s)faecare, dér. du lat. faex, faecis « lie, résidu ». Voir Y. Malkiel ds Medioevo romanzo t. 10, 1985, pp. 305-338; cf. Cort.-Zolli. Fréq. abs. littér.: 161. DÉR. 1. Traficoter, trafiquotter, verbe intrans. et trans. indir.,fam. a) Se livrer à un petit commerce plus ou moins honnête. Petit truand qui traficote. Tous les agents qui trafiquottent avec le Kuomintang, foutez-les-moi à la porte (Malraux, Cond. hum., 1933, p. 236).b) Avoir des agissements troubles, mener un petit jeu malhonnête. Synon. fam. magouiller.Il passa discrètement la main sur les fesses musclées de cette ancille quoique à la suite de sa dernière déception il eût renoncé à l'amour, à ses pompiers et à ses manœuvres et traficotât désormais sur le plan de la renonciation (Queneau, Loin Rueil, 1944, p. 145).c) [Souvent dans des phrases interr.] Mener des activités plus ou moins mystérieuses ou secrètes, faire quelque chose en se cachant. Synon. fam. fabriquer, trafiquer (supra III B).Qu'est-ce qu'il traficote dans son coin? Jupil revient (...) il tourne dans la cour et traficote sous le hangar (Vialar, Fusil, 1960, p. 84).− [tʀafikɔte], (il) traficote, -quotte [-kɔt]. Lar. Lang. fr., Rob. 1985: -coter. − 1resattest. 1933 trafiquotter « faire quelque chose de plus ou moins secret et illégal » (Malraux, loc. cit.), 1944 traficoter « faire quelque chose de plus ou moins secret » (Queneau, loc. cit.); de trafiquer, suff. -ot(t)er*. 2. Trafiquable, adj.,rare. Qui peut faire l'objet d'un trafic (v. trafic1A). Je sais la valeur de tous les objets trafiquables (Maupass., Mt-Oriol, 1887, p. 204).Beaucoup de biens matériels ne sont pas trafiquables. Ainsi, à de rares exceptions près, les primitifs considèrent le sol comme inaliénable (Lowie, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 173).− [tʀafikabl̥]. − 1reattest. 1887 (Maupass., loc. cit.); de trafiquer, suff. -able*. 3. Trafiqueur, -euse, subst. et adj.,fam. (Personne) qui se livre à un trafic (v. trafic1B). Le même pinard (...) la même soumission enthousiaste aux besoins naturels, de la gueule et du cul, en referaient là-bas comme ici la même horde (...) titubante d'un bobard à l'autre (...) trafiqueuse, malveillante, agressive entre deux paniques (Céline, Voyage, 1932, p. 427).− [tʀafikœ:ʀ], fém. [-ø:z]. − 1reattest. a) fin xves. traficqueur « personne qui colporte des informations secrètes » (O. de La Marche, Mém., éd. H. Beaune et J. d'Arbaumont, t. 1, p. 136), b) 1541 traffiqueur « personne qui se livre à un commerce immoral ou illicite » (J. Calvin, Instit. de la religion chrét., III, 5, éd. J.-D. Benoît, t. 3, p. 133; cf. trafic); de trafiquer, suff. -eur2*. BBG. − Ciureanu (P.). Cf. bbg. trafiquant. − Hope 1971, p. 51. |