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TOUTEFOIS, adv.
Adverbe coordonnant ,,introduit un rectificatif destiné à empêcher qu'on ne généralise trop la portée de l'assertion précédente ou à la limiter en énonçant un fait qui en est exclu: toutefois pose deux faits qui s'opposent sans que le deuxième ait le pouvoir de détruire la valeur du premier`` (M.-A. Morel, Ét. sur les moyens gramm. et lex. propres à exprimer une concess. en fr. contemp., 1980, p. 736).
A. − [Dans une phrase grammaticalement indép., marque une relation d'oppos. restrictive avec la phrase ou la prop. précédente; ce qu'exprime la première prop. n'est pas une raison suffisante pour que ce qu'exprime la seconde soit exclu]
1. [Placé en tête de phrase] MmeSuzanne lui avait écrit une nouvelle lettre, courte et pressante, celle-là: « (...) j'ai comme un pressentiment qu'il te faut revenir tout de suite, si tu m'aimes... » Toutefois il ne partit pas (Ramuz, A. Pache, 1911, p. 205):
La brise était faible et tendait à calmir. Toutefois, on pouvait espérer que le lendemain, au point du jour, si l'estime était juste et si la direction avait été bonne, on aurait connaissance de l'île Tabor. Verne, Île myst., 1874, p. 340.
2. [Placé en fin de phrase] Des ennemis, qui nécessitaient des explications fatigantes, mais en général un vif sentiment de délivrance et la conviction que j'avais bien fait en changeant de plan de vie. Il ne faut pas agir légèrement toutefois. J'ai 35 ans passés (Constant, Journaux, 1803, p. 27).
3. [Placé à l'intérieur de la phrase]
a) [Entre le suj. et le verbe] Son orgueil reconnaît la nécessité de capituler avec la fortune. Son langage toutefois est plein de dignité (Constant, Esprit conquête, 1813, p. 262).Maintenant sa peinture présente les brusques alternatives saisissantes, un peu barbares, de cette âme espagnole tout entière résumée par le prosaïque Sancho et le visionnaire Don Quichotte. Le visionnaire toutefois domine (Barrès, Greco, 1911, p. 119).
b) [Entre l'auxil. et le part. passé] Les Rubens disséminés [dans le musée d'Anvers] perdent beaucoup. Je ne leur ai toutefois jamais trouvé à ce degré cette supériorité qui écrase tout le reste (Delacroix, Journal, 1850, p. 379).
c) [Entre le verbe et son compl.] Pendant les premiers mois de mon séjour à Versailles, je vis peu Lando et encore moins Raoul. J'acquis toutefois la certitude que Lucie n'avait pas été la maîtresse de Lando (Abellio, Pacifiques, 1946, p. 225).
Rem. Contrairement à cependant ou pourtant qui ont un sens concess., toutefois signifie plutôt la restriction. Ainsi on dira: Sa voiture est en rodage; cependant/pourtant il ne la ménage pas (« bien qu'elle soit en rodage... »). On accepte plus difficilement: Sa voiture est en rodage; toutefois il ne la ménage pas; la prop. il ne la ménage pas ne limitant pas la validité de la prop. qui précède − que cette prop. soit considérée en elle-même ou dans ses conséquences −, toutefois n'y a pas sa place.
B. − [Marque une oppos. entre deux mots, syntagmes ou prop., de même fonction gramm.]
1. [Deux adj.] J'écrivis, dans un bureau de poste, une lettre soignée, digne et toutefois persuasive, une lettre péremptoire, convaincante (Duhamel, Confess. min., 1920, p. 123).Nos pertes sont lourdes; moindres, toutefois, que celles de l'adversaire (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 38).
2. [Deux syntagmes prép.] Je suis parti de bonne heure, à l'heure solaire toutefois, pour assister à l'arrivée du lait (Pesquidoux, Livre raison, 1928, p. 213).
3. [Deux sub. rel.] Lui qui pleurait, qui riait toutefois, qui mêlait larmes et rires, ne savait vraiment plus où donner de la tête (Leblanc dsM.-A. Morel, Ét. sur les moyens gramm. et lex. propres à exprimer une concess. en fr. contemp.,1980,p. 736).
Rem. Les deux mots, syntagmes ou prop. peuvent être par ailleurs coordonnés. C'était le moment où l'édifice impeccable et faiblement parfumé des cheveux se penchait en arrière d'un angle très petit mais toutefois perceptible (Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 36). Plus nette est mon impression de quelque chose de modelé dans la nuit et qui rayonne toutefois d'une lumière presque surnaturelle (Green, Journal, 1941, p. 143).
C. −
1. [Sert à relier une sub. concess. à la princ. dans laquelle il figure] Bien qu'un secret de cette nature soit ordinairement gardé par une femme avec justice, je vous dirai toutefois qu'il m'a parlé d'amour (Musset, Quenouille Barb., 1840, ii, 6, p. 321).
2. [La relation concess. peut être exprimée par d'autres types de constr.]
a) [Une rel.] Simon, qui ne tient pas à plaire, aime toutefois à paraître (Barrès, Homme libre, 1889, p. 4).
b) [Un gérondif ou un part. prés.] [De Régnier] tout en reconnaissant, exaltant un peu ses mérites littéraires, déclare toutefois que chez lui [Paul Adam] l'occulte prime la littérature (Goncourt, Journal, 1894, p. 526).Rejetant le contenu du hégélianisme, Feuerbach en a toutefois conservé la forme (J. Vuillemin, Essai signif. mort, 1949, p. 291).
c) [La constr. sans + inf.] Le soir, sans hésiter, le doigt tremblant toutefois, je frappai à la porte du cabinet de mon père (Lacretelle, Silbermann, 1922, p. 127).
d) [Un part. passé ou un groupe adj.] Esprit délicieux et délié jusqu'à l'excès, amant passionné de ce qui fut de plus beau en tous les genres, et toutefois ami des hommes (Valéry, Variété IV, 1938, p. 47).
e) [Une prop. hyp. qui signifie « même s'il est bien vrai que... »] Mais s'ils voient nos passions à découvert, ils ignorent toutefois par quel art tant d'éléments opposés sont confondus dans notre sein (Chateaubr., Martyrs, t. 1, 1810, p. 188).
D. − [Dans une sub. hyp., présente l'hypothèse comme une restriction à ce qui, dans un premier temps, pouvait sembler vérifié dans tous les cas] Si toutefois... Si tant est que.
À (la) condition toutefois que. Elle exauce généralement les demandes qu'on lui formule, à condition toutefois qu'on les fasse suivre de présents de toutes sortes (Maran, Batouala, 1921, p. 145).
À (la) condition toutefois de. Lui qui (...) défait en un instant le travail de consolation si lentement tissé pendant le jour et nous ménage, la nuit, une rencontre avec celle que nous aurions fini par oublier à condition toutefois de ne pas la revoir? (Proust, Fugit., 1922, p. 538).
Pourvu toutefois que. Je tiens fort à la terre par ce côté [un bon souper], pourvu toutefois que la digestion ne vienne pas contre-balancer l'effet favorable de Cérès et de Bacchus (Delacroix, Journal, 1850, p. 400).
Si toutefois. Assurément le docteur Sarrasin ne pouvait manquer dans quelques années d'être en possession de cet héritage, si toutefois... hem!... hem!... ses titres étaient suffisants! (Verne, 500 millions, 1879, p. 54).
Rare, vx. [Dans une temporelle à valeur hyp.] Quand toutefois. On peut seulement donner plus de latitude à la loi d'affranchissement, quand toutefois toutes les manufactures dont la Louisiane est susceptible dans ses villes, seront en vigueur (Baudry des Loz., Voy. Louisiane, 1802, p. 109).
Prononc. et Orth.: [tutfwa], [-ɑ]. Ac. 1694, s.v. toutesfois, renvoie à fois et s.v. fois: toutefois; 1718: toutefois mais toutesfois dans le texte; dep. 1740: toutefois. Étymol. et Hist. A. Loc. conj. 1. ca 1180 totes les foiz que « chaque fois que » (Chrétien de Troyes, Yvain, éd. M. Roques, 2585); ca 1208 [ms. 2emoit. xives.] totes foiz que « chaque fois que » (Villehardouin, Conquête de Constantinople, 166) cf. Imbs, Prop., pp. 260-265. 2. ca 1230 toutes les fois que « aussitôt que » (Chevaliers as 2 espees, 2440 ds T.-L.). B. Adv. 1284 [ms. F] « pourtant, en revanche » (Brunet Latin, Trésor, éd. P. Chabaille, I, 176, p. 224: ja soit lïons de si haut corage [...], toutefoiz aime il home mervilleusement [éd. Fr. J. Carmody: totesvoies]); 1486 touteffois (Raoul de Presles, Cité de Dieu, VIII, Exp. sur le ch. II ds Gdf. Compl.). Comp. de tout1* et de fois* au plur. Le rapport adversatif est exprimé en a. fr. par totesvoies (ca 1175, Benoît de Ste-Maure, Chron. des ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 18261), comp. de tout1* et de voie* au pluriel. Fréq. abs. littér.: 4 440. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 6 976, b) 4 985; xxes.: a) 4 509, b) 7 547. Bbg. Blumenthal 1980, p. 121, 125, 130. − Bogacki (K.). Implication, représentation, sémantique... Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1986, t. 24, no1, pp. 59-65. − Gettrup (H.). Stratégies concess.: une ét. de six adv. fr. R. rom. 1984, t. 19, no1, pp. 40-45. − Morel (M.-A.). Ét. sur les moyens gramm. et lex. propres à exprimer une concess. en fr. contemp. Thèse, Paris III, 1980, pp. 708-736.