| TONNE, subst. fém. A. − 1. TECHNOL. Très grand tonneau, large et renflé. Mettre une tonne en perce. Oh! ce petit port de pêche de mon enfance (...) Comme j'aimais ses quais empuantis et grouillants avec ses barils de saumure, ses harengs en tonne et ses bateaux de pêche perpétuellement en partance (Lorrain, Sens. et souv., 1895, p. 156).Les vendanges sont terminées. À la saint Cyprien, on a soufré les tonnes, nettoyé le pressoir, lavé les cuves (Bosco, Mas Théot., 1945, p. 318). ♦ P. méton. Contenu d'une tonne. L'idée lui vint de mettre en bouteilles deux tonnes de vin du Rhin qu'il avait achetées l'automne précédent (Erckm.-Chatr., Ami Fritz, 1864, p. 76). ♦ P. compar. On se gavait de raisin depuis l'aube, le gosier poissé de sucre, la panse enflée et ronde comme une tonne (Zola, Terre, 1887, p. 352).La mère Pannetier, ronde comme une tonne, dans son capuchon et ses sabots, dévalait le faubourg (Guéhenno, Journal homme 40 ans, 1934, p. 89). ♦ P. métaph. Madame, on ne communique pas ainsi, dit le bon vieux Gault. Et il arrêta lui-même au passage cette tonne de moire noire et de dentelles (Balzac, Splend. et mis., 1847, p. 571).Ragueneau: Montfleury joue! Lignière: En effet, cette tonne va nous jouer ce soir le rôle de Phédon (Rostand, Cyrano, 1898, I, 2, p. 23). − En partic. Réservoir cylindrique, le plus souvent métallique, monté sur un châssis de remorque, servant à transporter de l'eau, du purin, du lisier. Des fermiers apportaient dans des tonnes à purin, recouvertes de sacs ruisselants par un ultime souci de réalisme, du blé et des pommes de terre (Van der Meersch,Invas. 14,1935,p. 84). 2. P. anal. (de forme), MAR. Bouée de signalisation de forme cylindrique, en bois ou en métal. On gouvernait vers les bouées, de grosses tonnes noires goudronnées, dansant au flot la danse du ventre et se dandinant (Van der Meersch,Empreinte dieu, 1936, p. 137). ♦ Tonne d'amarrage. Bouée métallique en forme de cylindre couché, mouillée dans une rade, une embouchure, un port, pour permettre aux navires de s'y amarrer (d'apr. Merrien 1958). Droit de tonnes. Droit perçu sur les navires pour l'entretien des tonnes d'amarrage. (Dict. xixeet xxes.). 3. ARMUR. Armure à tonne. Armure dont la braconnière est évasée en jupe. Les armures à tonne (...) habits de guerre que revêtirent des princes français, espagnols, italiens (A. France, Anneau améth., 1899, p. 98).Au XVIesiècle, furent importées d'Allemagne, vers 1520, des armures dites à tonne. Ce sont des armures de combats en champ clos (Leloir1961). 4. ZOOL. Mollusque gastéropode, à coquille univalve arrondie, qui se nourrit des oursins dont il perce le test. (Dict. xixeet xxes.). B. − 1. MÉTROLOGIE a) Unité de mesure de masse valant 1 000 kilogrammes (symb. t). Une tonne de charbon. Un sous-chef de manœuvres annonçait trois wagons à ajouter. − Je ne les prends pas, dit Daret, j'ai déjà quinze tonnes de surcharge (Hamp, Marée, 1908, p. 50).La production d'or, en tonnes métriques, n'a cessé de s'élever: on estime que 50 000 tonnes d'or ont été extraites dans le monde de 1850 à 1956. La moyenne annuelle d'extraction était de 383 tonnes en 1900, de 705 tonnes en 1915 (Lesourd, Gérard, Hist. écon., 1966, p. 476). − P. métaph. Une visite. C'est quelqu'un qui vient me parler de qui? (...) Question absurde. Il vient me parler de son moi à lui! Or, il a un moi qui pèse une tonne (Green, Journal, 1954, p. 246). b) MAR. Unité de poids de 1 000 kilogrammes servant à évaluer le déplacement ou le port en lourd d'un navire. Le paquebot Mongolia, de la Compagnie péninsulaire et orientale, steamer en fer à hélice et à spardeck, jaugeant deux mille huit cents tonnes et possédant une force nominale de cinq cents chevaux (Verne, Tour monde, 1873, p. 23).Un croiseur de quatorze mille tonnes et un porte-avions de quatre-vingt-six mille tonnes, ont procédé à leurs premiers essais en mer en fin 1961 (Goldschmidt, Avent. atom., 1962, p. 181). c) Mesure de poids des véhicules, particulièrement des poids lourds et des trains. Deux ou trois robustes camions Packard cinq tonnes, choisis aux stocks américains (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 465).Des chars de 30 tonnes du type B, dont les premiers exemplaires existaient depuis quinze ans et dont on fabriquait, enfin! trois centaines, armeraient ces divisions (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 24). − Un x tonnes, subst. masc. Le camion Sovel 6 tonnes, équipé en 1936 avec deux moteurs attaquant les roues arrière par chaîne, comporte en 1948 deux moteurs formant pont arrière. Le modèle 2 T 5 de la même marque est devenu un 3 tonnes en 1948 (Tinard, Automob., 1951, p. 377). d) ASTRONAUT. Unité de poussée d'une fusée égale à 1 000 kilogrammes. Une fusée de 6 tonnes lancée par un bâtiment (Le Masson, Mar., 1951, p. 68). 2. TRANSPORTS ♦ Tonne fret. Unité de base servant de base au calcul du fret soit par tonne, soit par mètre cube. (Dict. xixeet xxes.). ♦ Tonne kilométrique. Unité de calcul du prix de transport correspondant au transport d'une tonne sur un kilomètre. Le rendement kilométrique de certaines lignes est si faible qu'il ne justifie qu'un personnel réduit. Il est plus sérieux de tenir compte du nombre de cheminots au wagon chargé ou à la tonne kilométrique (Pineau, S.N.C.F. et transp., 1950, p. 21).Le poids accru des moteurs joue en sens inverse de l'économie sur le planeur, et la charge payante peut diminuer. Au total, le prix de revient de la tonne kilométrique varie assez peu dans de très grandes limites (Rougeron, Aviat., 1951, p. 219).Tonne transport. Prix de revient du transport d'une tonne d'un produit donné. Cela (...) met la tonne transport par bateau et par fer anglais, à 41 fr. 67, soit 11 fr. 52 meilleur marché qu'au tarif régulier (Hamp, Champagne, 1909, p. 200). 3. Au plur., fam., p. exagér. Énorme quantité (de quelque chose). Synon. fam. masse1, tas.Chaque fois qu'il te parle, c'est d'une chose grosse comme un pois. Ah! Il n'a pas besoin d'en voir des tonnes, lui (Giono, Batailles ds mont., 1937, p. 199).Il a lu des tonnes de livres, au petit bonheur (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p. 139). Prononc. et Orth.: [tɔn]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1283 « large tonneau » (Philippe de Beaumanoir, Coutumes Beauvaisis, éd. A. Salmon, t. 2, p. 37, var. de tonneau); b) 1690 « ce que contient une tonne » (Fur.); 2. 1676 « coquille univalve de forme arrondie » (Félibien, p. 443); 3. 1842 « unité de poids valant mille kilos » (Ac. Compl.). Du lat. tardif tunna, tonna att. au viiies. au sens de « vaisseau pour garder l'huile, le blé; jarre, tonneau » (Alcuin ds Du Cange), également att. ds les Gl. de Cassel. On admet gén. une orig. celt. du mot, le rattachant à l'a. irl. tonn « peau »: du sens de « peau » on serait passé à « sac en cuir, outre pour le vin » et de là à « tonneau » (v. FEW t. 13, 2, p. 417). Fréq. abs. littér.: 357. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 264, b) 381; xxes.: a) 233, b) 948. Bbg. Vincent (A.). Les N. d'objets creux comme n. de lieux. Mél. Dauzat (A.) 1951, p. 395. |