| * Dans l'article "THÉÂTRAL, -ALE, -AUX,, adj." THÉÂTRAL, -ALE, -AUX, adj. A. − Qui se rapporte au théâtre. 1. Qui est propre, adapté à l'art du théâtre. a) [En tant que spectacle, représentation] Synon. dramatique.Action théâtrale; conventions théâtrales. Ce charme répandu au vol sur un vers, ces gestes instables perpétuellement transformés, ces tableaux successifs, c'était le résultat fugitif, le but momentané, le mobile chef-d'œuvre que l'art théâtral se proposait et que détruirait en voulant le fixer l'attention d'un auditeur trop épris (Proust, Guermantes 2, 1921, p. 52).La fiction théâtrale se sert (en dehors du geste et de la parole récitée ou chantée, de la musique et de l'éclairage) de trois éléments pour éveiller l'imagination du spectateur: le décor, le costume et l'accessoire (Arts et litt., 1936, p. 64-8). − En partic. [En parlant d'une pers., d'un groupe de pers.] Dont le passe-temps ou la profession consiste à monter, à jouer des pièces de théâtre. Jacques s'est mis à travailler sérieusement mais bientôt il a imaginé de fonder une troupe théâtrale (Queneau, Loin Rueil, 1944, p. 219).La Compagnie théâtrale de l'Est, le Grenier de Toulouse, etc., sont soutenus par un public ouvrier (Cacérès, Hist. éduc. pop., 1964, p. 102). b) [En tant que genre littér.] Juge, chère sœur (...), ce que coûtent les compositions théâtrales, où il faut les trois unités, point d'invraisemblance, etc. (Balzac, Corresp., 1819, p. 63).Le Directeur du Théâtre National Populaire doit représenter au cours des spectacles qu'il est tenu d'organiser des œuvres théâtrales lyriques ou dramatiques appartenant au répertoire classique et moderne français et étranger (Théâtres nat. Fr., 1954, p. 28). 2. Qui est consacré au théâtre. Émission, retransmission théâtrale (à la radio, à la télévision). Vous les conduisez [vos enfants] aux matinées théâtrales pour qu'on vous voie au milieu d'eux, qu'on dise: « Quel bon père » (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Inutile beauté, 1890, p. 1149).Les manifestations théâtrales qui étaient presque de règle dans les soirées mondaines fournissaient au comédien une source de revenus accessoire mais importante (Arts et litt., 1936, p. 88-5). ♦ Année, saison théâtrale. Période de l'année pendant laquelle les théâtres donnent des représentations régulières. Je me mets au courant de toutes les anecdotes de coulisses, de toutes les aventures comiques, tragiques et burlesques qui ont eu lieu pendant l'année théâtrale (Jouy, Hermite, t. 3, 1813, p. 194).Je t'en prie, n'attends rien de mon article sur la saison théâtrale (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1906, p. 110). 3. Qui a le théâtre pour sujet, pour objet d'étude. Presse, revue théâtrale; enseignement théâtral; recherche théâtrale; lire les chroniques, les critiques théâtrales. Critique théâtral du journal Le Temps, il tournait cette meule d'annoncer tous les huit jours la pièce, le gros drame, le vaudeville, le clown, l'étoile, la danseuse, l'éléphant savant, le farceur délirant, l'actrice en fleur, le succès (...) et la gloire de la semaine (Goncourt, Ch. Demailly, 1860, p. 174).Ni à la section théâtrale de l'Université de Columbia ni à la N.-Y. Library, je n'ai découvert un seul bon livre sur l'histoire du théâtre proprement new-yorkais (Morand, New-York, 1930, p. 167). B. − Qui présente les caractéristiques du théâtre. 1. Qui est conçu pour produire un effet sur le public. Synon. scénique.Effet, style théâtral; comique théâtral; intrigue théâtrale. Pierre Corneille est le poète même de l'illusion théâtrale. Car rien n'est jamais vrai de ce qu'on nous représente (Brasillach, Corneille, 1938, p. 134): ... je remarque que dans notre théâtre qui vit sous la dictature exclusive de la parole, ce langage de signes et de mimique, cette pantomime silencieuse, ces attitudes, ces gestes dans l'air, ces intonations objectives, bref tout ce que je considère comme spécifiquement théâtral dans le théâtre, tous ces éléments quand ils existent en dehors du texte, sont pour tout le monde la partie basse du théâtre...
Artaud, Théâtre et son double, 1938, p. 49. − [En parlant d'un acteur, de sa façon de jouer] N'est pas « théâtral » qui veut et ce mot, déconsidéré à tort, recouvre toute une esthétique et toute une morale. La moitié d'une vie d'homme se passe à sous-entendre, à détourner la tête et à se taire. L'acteur est ici l'intrus. Il lève le sortilège de cette âme enchaînée et les passions se ruent enfin sur leur scène. Elles parlent dans tous les gestes, elles ne vivent que par cris (Camus, Sisyphe, 1942, p. 111). − Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. Le théâtre ne se trouve rien tant éviter que le théâtral, le roman le romanesque, la poésie le poétique. Et la littérature en général, le littéraire (Paulhan, Fleurs Tarbes, 1941, p. 31). 2. P. anal., souvent péj. [En parlant d'une action, d'un comportement, d'un propos] Qui dénote l'artifice, l'ostentation. Synon. affecté, emphatique, exagéré, grandiloquent, pompeux; anton. discret, naturel, simple.Attitude, manière théâtrale; geste théâtral; déclaration, voix théâtrale; faire une entrée théâtrale. Tout à coup Rodolphe prit une pose théâtrale (Murger, Scène vie boh., 1851, p. 85).V. décubitus, ex. d'Aragon. − Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. La prétention des poses, le théâtral des attitudes (Goncourt, Journal, 1895, p. 777). Prononc. et Orth.: [teɑtʀal], [tea-], plur. masc. [-o]. Att. ds Ac. dep 1694. Étymol. et Hist. 1. 1520 « qui concerne le théâtre » danses theatralles (G. Michel, tr. Suétone, VI, 196a ds Hug.); 2. 1690 « qui a le côté artificiel, emphatique, outré du théâtre » des passions théâtrales (Fur.); 3. 1750 « qui a les caractères spécifiques du théâtre » (Volt[aire], Oreste, Épitre à la Duchesse du Maire ds
Œuvres compl., Paris, Garnier, 1877, t. 5, p. 82). Empr. au lat. class.theatralis « id. », dér. de theatrum, v. théâtre. Fréq. abs. littér.: 521. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 548, b) 619; xxes.: a) 925, b) 859. DÉR. 1. Théâtralement, adv.[Corresp. à supra B] a) D'une manière conforme aux caractéristiques, aux règles du théâtre. Comme j'avais pris l'habitude, pendant six semaines, de voir les choses théâtralement, de penser par le dialogue, ne voilà-t-il pas que je me suis mis à construire le plan d'une autre pièce (...)? (Flaub., Corresp., 1873, p. 39).Théâtralement le drame ne compte et ne peut plus compter... Il s'agit là d'un monde que la représentation théâtrale ne peut qu'affaiblir ou animer d'une façon trompeuse (Mauriac, Journal 2, 1937, p. 168).b) P. anal. D'une manière théâtrale.
α) En produisant un effet digne d'une représentation théâtrale. Irène, dans sa grande robe sombre, majestueuse, les yeux mal accoutumés à l'obscurité, se tenait toute droite, le loup de soie noire mêlant théâtralement son visage à la nuit (Gracq, Beau tén., 1945, p. 168).
β) Souvent péj. Avec affectation, emphase. Agir, s'exprimer théâtralement. Les généraux (...) sont venus théâtralement défendre l'infaillibilité de l'uniforme devant le jury de la Seine (Clemenceau, Iniquité, 1899, p. 316).Alvear se leva à demi (...) et regarda Scali un peu théâtralement, comme pour souligner ce qu'il disait (Malraux, Espoir, 1937, p. 701).− [teɑtʀalmɑ
̃], [tea-]. Martinet-Walter 1973 [teɑ-], [tea-] (12, 5). Att. ds Ac. dep. 1878. − 1reattest. 1764 (Volt[aire], Commentaire sur Corneille, Puchérie ds DG); de théâtral, suff. -ment2*. − Fréq. abs. littér.: 23. 2. Théâtralisme, subst. masc.a) Psych. Tendance ,,(fréquente dans les crises d'hystérie) aux manifestations émotives spectaculaires`` (Piéron 1973). Synon. histrionisme (rem. s.v. histrion).b) Psychol. Comportement d'un individu assimilé au jeu d'un acteur de théâtre. Reich, visant au travers de la famille le pouvoir établi, croit devoir mettre en question la valeur structurante du complexe d'Œdipe, n'y voulant voir qu'un théâtralisme restreint à trois personnages: le père, la mère et l'enfant (La Nef, janv. 1971, p. 228).− [teɑtʀalism̭], [tea-]. − 1reattest. 1951 psychol. (Piéron, p. 284); de théâtral, suff. -isme*. 3. Théâtralité, subst. fém.Qualité théâtrale d'une œuvre dramatique; conformité de cette œuvre aux caractéristiques, aux règles de l'art théâtral. Il est une autre conception, tout aussi exclusive de la théâtralité, selon laquelle relève de la sémiotique théâtrale tout ce qui se passe sur la scène au moment du spectacle, c'est-à-dire tous les langages de manifestation qui concourent à la production du sens, à l'exception du texte verbal lui-même (Greimas-Courtés1979).− [teɑtʀalite], [tea-]. − 1reattest. 1842 (J.-B. Richard, Dict. des mots nouv. ds Quem. DDL t. 25); dér. sav. de théâtral, suff. -(i)té*. |