| TERRE-NEUVE, subst. masc. inv. A. − Chien de grande taille, à longs poils, originaire de Terre-Neuve, réputé pour sa disposition à se jeter à l'eau pour sauver les personnes en difficulté. Synon. terre-neuvien (v. ce mot B), terre-neuvier (v. ce mot rem.).Jamais un sculpteur de talent n'essaiera un terre-neuve, animal tout voilé et tout embarrassé dans ses poils frisés (Goncourt, Journal, 1856, p. 283).Mouton, le chien de M. Courcelles l'épicier, Mouton, un terre-neuve (...) n'aurait fait de Caire qu'une bouchée (A. France, Pt Pierre, 1918, p. 209). ♦ En appos. Pas un batelier, pas un chien Terr'-Neuve (Laforgue, Poés., 1887, p. 164). ♦ Au fém. À la porte d'un café une grosse terreneuve si affectueuse qu'elle se laissait choir tout entière du côté de la caresse (Giraudoux, Suzanne, 1921, p. 33). − [P. réf. à l'affection, au dévouement caractéristiques de cet animal] Mon cœur si simple s'abreuve De vos vilaines rigueurs, Avec le regard bon d'un terre-neuve (Laforgue, Imit. Lune, 1886, p. 232).Millière était un homme sage, au poil et au cœur de terre-neuve (Vialar, Clos Trois Mais., 1946, p. 17). − P. anal., fam. Personne toujours prête à se dévouer, à porter secours aux autres. À supposer que le petit infirme se fût trouvé en danger, Philip aurait mis tout en œuvre pour sauver cette misérable existence. Et Rigaud pareillement (...). Tous, tous... Partout où il reste une parcelle de vie, le devoir est indiscutable. Race de terre-neuve (Martin du G., Thib., Consult., 1928, p. 1123).Je lui demandai, un soir: − As-tu réfléchi à ce que tu risquais? Il haussa les épaules: − Je n'ai jamais trouvé de pépin sans savoir où aller le prendre... Et puis, occupe-toi donc d'apprendre à nager, mon vieux. Après, tu feras le terre-neuve! (Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 92). B. − MAR., PÊCHE, rare. Bateau pour la pêche à la morue. Synon. terre-neuvas (v. ce mot A). − (...) Je n'ai pas pu fermer l'œil avec cette damnée sirène.Puis, la brume, je n'aime pas dormir quand on marche à cette allure sans voir devant (...). − Et si nous tombons sur quelque chose, un terre-neuve, qu'est-ce qu'il en restera? (Peisson, Parti Liverpool, 1932, p. 141). Prononc. et Orth.: [tε
ʀnœ:v]. Att. ds Ac. 1935. Rob. 1985: ,,On disait aussi terre-neuvien, terre-neuvier``. (Voir Littré: ,,On dit aussi chien terre-neuvier et terre-neuvier``; sous la forme terreneuvien, v. terre-neuvien ex. de Reybaud). Plur. des terre-neuve (Ac., Rob. 1985), des terre-neuves (Feuillet, Journal femme, 1878, p. 40). Prop. Catach-Golf. Orth. Lexicogr. Mots comp. 1981, p. 274 : terreneuve, plur. des terreneuves. Forme soudée supra A ex. de Giraudoux. Étymol. et Hist. 1. 1837 désigne un chien (J. Lecomte, Les Let. de Van Engelgom, p. 64 ds Quem. DDL t. 15); d'où 2. 1881 « personne très dévouée » (Vallès, Le Bachelier, p. 215, ibid., t. 14). De Terre-Neuve, île d'Amérique du Nord, près de l'embouchure du Saint-Laurent, d'où ce chien est originaire; cf. angl. newfound « récemment inventé ou découvert » (att. dep. ca 1496, v. NED), épith. de land « terre » pour désigner les contrées récemment découvertes en partic. en Amérique (dep. 1509) d'où Newfoundland comme nom propre de cette île (dep. 1626); newfoundland est att. comme adj. s'appliquant à des poissons pêchés dans la proximité de Terre-Neuve (dep. 1611) et à une espèce de chiens originaires de cette région, réputés pour leurs qualités de bons nageurs et leur force physique (dep. 1824), d'où, p. ell. newfoundland désignant le chien (dep. 1845, ibid.). Fréq. abs. littér.: 32. Bbg. Quem. DDL t. 15, 25. |