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* Dans l'article "TENDRE1,, verbe trans."
TENDRE1, verbe trans.
I. − Empl. trans. dir.
A. −
1. [Le compl. d'obj. désigne une chose susceptible de déformation]
a) [Un objet élastique, extensible] Faire prendre une forme plus allongée ou rebondie en exerçant une traction. Synon. distendre, étirer; anton. relâcher.Tendre un ressort. Les Luxembourgeoises, (...) exactement moulées, tendaient de toute la force de leur chair opulente les courbes pures des costumes tailleur (Hamp, Champagne, 1909, p. 220).Il s'agit (...) de donner à la tige la courbure qui détermine la force de propulsion. Cela s'appelle tendre l'arc ou bander l'arc (Jeux et sports, 1967, p. 1471).
Loc. fig. Tendez trop l'arc*, la flèche dévie.
Empl. pronom. La Goulue (...) montrait son pantalon cocassement brodé d'un cœur qui se tendait sur son postérieur, lorsqu'elle s'inclinait en saluts irrespectueux (Hist. spect., 1965, p. 1545).
b) [Un(e) (partie du) corps] Faire prendre des formes plus pleines, bombées, un relief plus accusé, sous l'effet d'un effort particulier, d'une cause physiologique, pathologique. Synon. arc-bouter, arquer, arrondir, cambrer, contracter1, courber, enfler, gonfler.Tendre ses muscles. La peau du front était tellement tendue par le poids de la pendaison, que son visage (...) ressemblait à la concrétion pierreuse d'une stalactite (Lautréam., Chants Maldoror, 1869, p. 258) Tendre le jarret*.
Empl. pronom., plus fréq. Les membranes du fœtus, soumises au toucher, se tendent, et sont poussées légèrement en avant (Baudelocque, Art accouch., 1812, p. 191).Cette marche aisée qu'ont les hommes parfaitement sains de corps, dont les muscles se tendent et se détendent en même temps, sans qu'un seul soit en retard (R. Bazin, Blé, 1907, p. 92).
En partic.
♦ Domaine amoureux, vieilli.[Le suj. désigne un homme] Être ou mettre en érection. Tendeur, s.m., homme qui tend (Richepin, Chans. gueux, 1881, p. 290).Vieux faune en l'air guettant ton dû, As-tu vraiment bandé, tendu L'arme assez de tes paillardises? (Verlaine, Œuvres compl., t. 2, Parall., 1889, p. 170).Empl. pronom. Le mâle se tendait, la femelle s'ouvrait, et dans la fusion des sources créatrices s'éveillait le premier frémissement de la vie (Louÿs, Aphrodite, 1896, p. 76).
♦ Domaine vocal, rare.En tendant trop fréquemment et avec excès les cordes vocales pour émettre ces notes, on doit finir par les fatiguer (Holtzem, Bases art chant, 1865, p. 125).
2. Au fig. [Le suj. désigne une pers., son état d'esprit ou une chose abstr.]
a) Concentrer toutes les/ses facultés d'attention, de réflexion, etc. pour les appliquer fortement à tel objet. Tendre son/l'attention. Yves regarde partout, essayant de tendre son intelligence vers le passé, s'efforçant de se souvenir (Loti, Mon frère Yves, 1883, p. 61).On ne peut pas toujours tendre sa volonté et toujours se raidir, et c'est un bonheur que de délier enfin, dans l'effusion, cette gerbe de forces dressées pour la lutte (Camus, Peste, 1947, p. 1449).
Empl. pronom. Sans variété dans le travail, le cerveau se tend et s'use trop (Amiel, Journal, 1866, p. 305).
P. méton. [Le compl. d'obj. désigne un aspect extérieur de la pers.] Faire exprimer une attention aiguë, une volonté opiniâtre. Son front rouge, la vigilance semble le tendre et l'arrondir (Frapié, Maternelle, 1904, p. 82).Empl. pronom. Il leva une main (...). Il la contracta (...) tandis que l'expression de son visage se tendait avec une sorte d'énergie farouche (Vercors, Sil. mer, 1942, p. 76).
b) Mettre dans un état de grande tension nerveuse. Synon. angoisser, énerver, inquiéter, préoccuper; anton. apaiser, calmer, décontracter, détendre.L'eau froide, loin de relâcher les fibres trop tendues et les nerfs agacés, les tend et les resserre encore (Geoffroy, Méd. prat., 1800, p. 488).J'étais oppressé par l'étrange sentiment qu'(...)un monstre inconnu me surveillait de quelque cachette (...). Toutes les fibres de mon corps étaient tendues par l'attente (Milosz, Amour. init., 1910, p. 143).
Empl. pronom. Le dégoût que m'inspirent mes contemporains, les nerfs qui se tendent trop, la cinquantaine sonnée et les inquiétudes d'avenir, voilà mon bilan (Flaub., Corresp., 1872, p. 450).
P. méton.
[Le compl. d'obj. désigne un aspect extérieur de la pers.] Faire exprimer la nervosité. Il se haussa (...), son visage et ses mains s'animèrent, la colère et l'ironie tendirent sa bouche fatiguée (Aymé, Jument, 1933, p. 85).Empl. pronom. Il errait (...), devinant les brocards derrière son dos, voyant les visages soudain se tendre et se fermer quand on l'apercevait (Montherl., Célibataires, 1934, p. 765).
[Le compl. d'obj. désigne une situation, des rapports humains] Tirailler entre des forces contradictoires jusqu'à susciter l'hostilité et mener au bord de la rupture. Tendre l'atmosphère. Favoriser ou défavoriser les liens collectifs, resserrer ceux-ci, tendre, briser ceux-là (Traité sociol., 1967, p. 93).Empl. pronom. Tandis que se tendent les relations entre le pouvoir politique et l'organisation professionnelle, les jeunes agriculteurs poursuivent leurs tâches de réflexion (Debatisse, Révol. silenc., 1963, p. 178).
FIN., empl. pronom. [Le compl. d'obj. désigne les cours de la Bourse] Les cours [de l'or] se sont légèrement tendus sur toute la ligne (Le Monde, 19 janv. 1952, p. 11, col. 1).
c) Péj., peu fréq., empl. pronom. Prendre un caractère contraint, trop rigide, manquant de souplesse, de naturel. Synon. se guinder.Je sentais, comme malgré moi, mon être tout entier se tendre, se raidir, se durcir; je devenais mauvais contre moi-même (...). Parfois (...), je rêvai (...) de m'abandonner à moi-même (Gide, Journal, Feuillets, 1896, p. 104).
P. méton., empl. pronom. [Le compl. d'obj. désigne un aspect d'une œuvre artist.] Marquer l'effort, une recherche excessive. Son style (...), en affectant plus de couleur, s'est tendu par endroits et s'est altéré: il est moins pur qu'autrefois (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 6, 1852, p. 80).
B. −
1.
a) [Le compl. d'obj. désigne une chose souple] Étaler et fixer par ses deux extrémités, par son pourtour ou par toute sa surface, de façon à éviter les plis, les affaissements et à donner une apparence plane. Tendre une corde, un fil, une peau, une voile. Elle vint découvrir le grand lit. (...) la place du Joseph est encore formée (...). Elle tira le drap, le tendant pour effacer (Giono, Gd troupeau, 1931, p. 50).Souhaitable de tendre quelques rangs de barbelé, et de déplier quelques accordéons de réseau Brun (Romains, Hommes bonne vol., 1938, p. 151).
Empl. pronom. La toile se tend sur châssis (Arts et litt., 1935, p. 30-1).
b) En partic. [Le compl. d'obj. désigne du papier, du tissu, etc.] Recouvrir un/des mur(s) en étalant bien et en fixant (la matière de revêtement). Dans une petite pièce (...), on avait tendu un papier vert, mis des vitraux coloriés (A. Daudet, R. Helmont, 1874, p. 98).
P. anal. L'heure grise qui tend ses crêpes d'ombre sur la campagne (Pergaud, De Goupil, 1910, p. 7).
P. méton.
[Le compl. d'obj. désigne des murs, une pièce, etc.] Recouvrir de papier, de tissu, etc., fixé au support ou garnir de tapisseries, de voiles suspendus. Synon. tapisser.Elle rafraîchit quelques parties de son mobilier, tendit à nouveau son appartement, l'embellit de fleurs (Balzac, Employés, 1837, p. 30).On eût dit qu'un immense réseau de tapis et de broderies tendait les murs, recouvrait les arcades (Faure, Hist. art, 1912, p. 260).
P. anal. De lents flocons éparpillés (...) tendaient tout l'horizon d'une étrange hermine (Lorrain, Sens. et souv., 1895, p. 250).Empl. pronom. Le ciel se pommelait d'ouates éclatantes, se tendait (...) de bleus tendres (Châteaubriant, Lourdines, 1911, p. 49).
[Le compl. d'obj. désigne des murs, des fenêtres, des portes, la façade d'une maison, d'un édifice public] Garnir de tentures mobiles en signe d'apparat (fête ou deuil). Aux processions, les Sauviat tendaient soigneusement leur maison de draps chargés de fleurs, et contribuaient à l'ornement (...) du reposoir, l'orgueil de leur carrefour (Balzac, Curé vill., 1839, p. 9).Cette pièce (...) avait été tendue de noir. Une banquette, couverte d'un drap de même couleur, y servait de sièges à une demi-douzaine de personnes également vêtues de noir (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 540).
Absol., rare. Le ciel devient noir. Les flocons de neige le sèment de larmes blanches. Dieu semble vouloir tendre aussi [lors des funérailles de Napoléon] (Hugo, Choses vues, 1885, p. 14).
2. [Le compl. d'obj. désigne un(e) (partie du) corps] Déployer au maximum jusqu'à donner une apparence tout à fait rectiligne. Anton. plier, replier.Le poids du seau tendait et roidissait ses bras maigres (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 470).
Empl. pronom., plus fréq. On dégage à terre, la jambe (...) fléchie; cette jambe, en se tendant, favorise le saut (Brillant, Probl. danse, 1953, p. 96).
C. −
1. [Le compl. d'obj. désigne une chose concr.] Dresser un dispositif pour servir à un certain usage. Synon. dérouler, éployer, établir, étaler1.On avait dressé au bord de la rivière (...) une enceinte de pieux, où des pavillons avaient été tendus (...) pour le roi (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 225).Qu'on nous tende un lit de camp dans un coin de cette chambre et qu'on nous serve une légère collation (Gautier, Fracasse, 1863, p. 433).
Vieilli. Tendre une inondation. Répandre des eaux sur tel territoire (généralement avec un objectif stratégique). Le débordement de l'armée anglaise mettait en danger nos lignes de communication (...). Il était grand temps de tendre les inondations, et de replier les dépôts voisins de la frontière (Joffre, Mém., t. 2, 1931, p. 306).
Empl. pronom. Le bras des poulies à foin se tendait au dessus de la porte pourrie des greniers (Nizan, Conspir., 1938, p. 19).
2. [Le compl. d'obj. désigne un piège] Disposer à tel endroit pour attraper le gibier. Tendre des lacets, des pièges. Un homme tendait des nasses. (...) il descendait la berge vaseuse (...) et posait l'engin parmi les roseaux (R. Bazin, Blé, 1907, p. 203).Nous avons tendu des collets à l'orifice de quelques terriers mystérieux (...). Je m'en vais d'abord vérifier les pièges (Saint-Exup., Terre hommes, 1939, p. 225).V. embûche A ex. de Chateaubriand, lacs B ex. de Crèvecœur.
Absol. Va-t-en braconner (...), on ne pourrait même plus tendre, avec ces chaumes tondus (...). Dans les temps, (...) on dressait son filet au débouché des sillons (Genevoix, Raboliot, 1925, p. 141).
Tendre à + subst. (désignant le gibier).Confectionner des collets pour tendre aux lièvres (Hémon, M. Chapdelaine, 1916, p. 115).
P. anal. Araignées qui tendent leurs toiles (Toepffer, Nouv. genev., 1839, p. 196).P. métaph. L'ingrate (...) n'(...)aura-t-elle pas mélangé tous les fils de satin les plus inextricables que ses doigts d'Arachné auront pu tendre autour d'une pauvre victime? (...) Je suis pris (Nerval, Filles feu, Dédic. à A. Dumas, 1854, p. 501).
Au fig. Utiliser un stratagème destiné à tromper, séduire, surprendre, mettre en tort. Tendre une embuscade, une souricière. Cette petite fille (...) savait être, à ses heures, coquette, innocemment: alors, elle tendait ses lignes aux petits jeunes gens (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1567).Venez donc faire un tour, la nuit est si belle, et entre ses sourires il tendait ses filets (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 238).Tendre ses filets trop haut. V. filet3.
D. −
1. [Le compl. d'obj. désigne un(e) (partie du) corps] Porter dans une direction donnée. Il dresse ses oreilles, il relève ses lèvres (...), tend sa tête au vent, et flaire l'inconnu qui le flatte (Lamart., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 72).Elle tendait sa poitrine en avant, se renversait la nuque en arrière (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p. 45).
Empl. pronom. Un enfant puni qui, du fond de sa chambre noire, se tend vers la chaleur et les lumières de la fête (Gracq, Syrtes, 1951, p. 81).
Loc. Tendre l'échine. V. échine1.Tendre le front, les lèvres. [Pour les offrir au baiser] V. front ex. 1, lèvre A 1 a ex. de Zola.Tendre la joue*, l'autre joue*, la joue* gauche. Tendre la main*, la main* droite, la main* à qqn. Tendre le poing*.
Tendre le bras. [Pour offrir, prendre qqc., indiquer une direction] [Ils] tendaient le bras pour prendre leur verre (Ramuz, Gde peur mont., 1926, p. 118).Il tendit le bras: « Regarde: (...) je fais toute une fête vénitienne » (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p. 170).Tendre les bras* à, vers. Empl. pronom. Seigneur, nous ne prenons pas les trains qui passent (...), c'est pourquoi j'élève vers vous, au-dessus de ma tête, des bras qui se tendent, qui s'allongent (Noailles, Visage émerv., 1904, p. 6).
Tendre le cou. [En signe de vive curiosité] Il ne connaît personne (...). Il a beau tendre le cou et quêter éperdument de l'œil une tête de connaissance (Barbusse, Feu, 1916, p. 158).[Pour s'offrir au coup mortel] Soixante Arabes furent poignardés, dans le dos, comme des civilisés (...). Les autres n'étaient plus assez. Voilà pourquoi, sans bouger, ils tendirent le cou. Il n'y a personne comme ces gens-là pour tendre le cou, quand ils se savent perdus (Mille, Barnavaux, 1908, p. 148).P. métaph. Loin de se révolter contre les violations de la loi, nos représentants en sont venus à tendre le cou pour les subir (Clemenceau, Vers réparation, 1899, p. 1).
Tendre le dos*. Au fig. Appréhender un événement fâcheux, s'inquiéter. L'homme (...) le regardait avec une sourde méfiance, tendait le dos à une catastrophe, se demandait in petto à quelle averse de jours de boîte allait aboutir tout à l'heure ce déluge d'amabilités (Courteline, Train 8 h. 47, 1888, p. 234).
Tendre l'oreille. [En signe d'attention soutenue] On percevait un bredouillement. Antoine qui tendait l'oreille parvint à saisir plusieurs mots (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1283).
2. [Le compl. d'obj. désigne une chose concr.] Présenter à bout de bras. Tendre un billet, une cigarette, une lettre, un papier, un plat, un verre. Le Corfiote (...) lui tendit une coupe de vin, qu'elle repoussa fièrement (About, Roi mont., 1857, p. 125).Décidée à piller le prêtre de ses grâces, la mère Guillerm lui tendait le bébé, lui présentait ses autres enfants (Queffélec, Recteur, 1944, p. 223).
Tendre la perche à qqn qui se noie. V. perche2.Au fig. Tendre la perche à qqn. V. perche2.
P. anal. [Le liseron] tend toujours son petit bol Afin que l'averse l'emplisse (Rollinat, Névroses, 1883, p. 164).P. métaph. Ma mémoire est plus fidèle (...) au souvenir réussi elle a laissé son goût d'amour. Elle conserve mes bonheurs et me les tend au moindre appel, avec leur douceur, leur saveur (Géraldy, Toi et Moi, 1913, p. 93).
II. − Empl. trans. indir. Tendre à/vers + subst. ou pron., tendre à + inf.
A. − [Avec une idée d'intention délibérée, d'effort volontaire]
1. [Le suj. désigne une pers.] Porter ses pas vers tel endroit. Synon. s'acheminer, s'orienter vers.Que tout ton être tende en bas; trépigne pour descendre; tu trépigneras pour remonter (Nerval, Sec. Faust, Examen analytique, 1840, p. 208).[Une dépression] se dirigeait vers le nord et faisait donc une bonne route pour la colonne qui tendait (...) vers l'Oued (...), Maxence suivit la molle vallée (Psichari, Voy. centur., 1914, p. 21).
2. Au fig. Orienter volontairement ses forces affectives, morales, intellectuelles vers tel but. Synon. aspirer, s'attacher, prétendre, viser à.
a) [Le suj. désigne une pers., son esprit] Tendre à un but, à un idéal, à la perfection. Bien loin d'entretenir ses passions par l'idée que cette volupté fût en elle-même un bien, le sage ne devait tendre qu'à diminuer cette nécessité, et à vivre de plus en plus en repos (P. Leroux, Humanité, 1840, p. 74):
Aime ne me dit quelque chose que lorsque j'associe à ce son (...) le son du mot britannique aim qui veut dire but. (...) « Je t'aime » signifierait ainsi: « Je tends vers toi, tu es mon but! » Laforgue, Moral. légend., 1887, p. 185.
Empl. pronom. Il faut que le sujet percevant (...) se tende vers des choses dont (...) il porte en lui-même le projet, s'ouvre à un autre absolu (Merleau-Ponty, Phénoménol. perception, 1945, p. 376).
b) [Le suj. désigne une chose abstr.] L'effort tend vers. Nos désirs, nos sollicitudes, nos affections deviennent ridicules, si ces actes ne tendent pas au plaisir, si ces affections ne se le proposent pas (Senancour, Obermann, t. 2, 1840, p. 73).Les prodigues ne recherchent pas la compagnie des avares (...). Il n'y a donc que les différences d'un certain genre qui tendent ainsi l'une vers l'autre; ce sont celles qui (...) se complètent mutuellement (Durkheim, Divis. trav., 1893, p. 18).
B. − [Avec une idée de passivité] Avoir tendance à.
1. [Le suj. désigne une chose concr.] Se rapprocher de telle position, de tel état, sous l'influence d'une certaine cause. Tendre à se confondre, se déplacer, disparaître, s'écarter, s'effacer, s'élever, se former, se rapprocher, se répandre. L'attraction du soleil (...) est répandue dans toutes les parties de notre globe, qui tendent vers leur centre commun, et qui s'attirent les unes les autres (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p. 343).Il faut faire une part (...) aux changements de teinte que subissent les surfaces colorées (...) sous l'influence d'une lumière (...). À mesure que la source lumineuse se rapproche, le violet prend une teinte bleuâtre, le vert tend au jaune (Bergson, Essai donn. imm., 1889, p. 49).
2. (Sembler devoir) évoluer par nature dans tel sens, vers telle fin.
a) [Le suj. désigne une pers., son esprit] Synon. incliner à, pencher vers.L'esprit est un feu (...). Comme la flamme, il tend naturellement à s'élever. On travaille à le ravaler (Joubert, Pensées, t. 1, 1824, p. 151).Le sujet et l'objet d'une tendance tendent non seulement à se rejoindre, mais à s'identifier. (...) celui qui aime tend à imiter l'objet aimé (Mounier, Traité caract., 1946, p. 67).
b) [Le suj. désigne une chose abstr.] Synon. amener, conduire, mener, tourner à.La sagesse elle-même consiste à voir ou à prévoir la direction où tendent les choses, selon l'ordre le plus naturel (...) et à marcher dans cette direction (Maine de Biran, Journal, 1816, p. 148).La grâce divine (...) donne à l'âme une impulsion sensible vers Dieu. Autant la jouissance est grande, autant le mouvement passionné qui tend vers cette jouissance est violent (Bremond, Hist. sent. relig., t. 4, 1920, p. 341).
SYNT. Tendre à (s')accroître, (s')accumuler, améliorer, assurer, augmenter, considérer, constituer, créer, détruire, (se) développer, devenir, diminuer, donner, égaliser, s'établir, faire, se généraliser, maintenir, mettre, modifier, obtenir, placer, prendre, prévaloir, produire, ramener, réaliser, réduire, remplacer, rendre, rétablir.
Locutions
Tendre à/vers sa fin. Être près de se terminer. Synon. tirer/toucher à sa fin.Ces arts, que nous avons portés à une si haute perfection, semblent tendre à leur fin (...) L'art dramatique périt sous la multitude des nouveautés (Bonald, Législ. primit., t. 1, 1802, p. 228).
Tendre à dire, à montrer, etc. Concourir à appuyer une thèse, une interprétation, sans pouvoir apporter une certitude absolue. Les faits tendent à prouver que. On obtient sa disparition définitive [de la péripneumonie] dès que l'on a supprimé tous les malades (...). Tout tend donc à démontrer que le virus ne saurait avoir une vie saprophytique (Nocard, Leclainche, Mal. microb. animaux, 1896, p. 255).Un jeune homme (...) me débite (...) une trentaine de lieux communs très-ramassés, tendant à me prouver charitablement que je ne suis pas dans la bonne voie (Bloy, Journal, 1905, p. 252).V. apologétique ex. 2.
Tendre vers + subst. quantitatif (exprimant une donnée numérique).Prendre des valeurs de plus en plus voisines de telle quantité. Tendre vers une limite, une valeur. À la suite illimitée des nombres entiers, qui augmentent indéfiniment (...), qui tendent vers l'infini, correspondent des inverses qui de-viennent de plus en plus petits et qui tendent vers zéro (E. Borel, Paradoxes de l'infini, 1946, p. 20).
Rem. Pendant la 1remoit. du xixes. surtout, tendant à/en peut encore prendre la marque du fém. et du plur. (selon l'anc. usage qui accordait le part. prés.): J'ai rappelé mes anciennes idées (...) et j'ai fait de nouvelles réflexions tendantes à les confirmer (Lagrange, Fonctions analyt., 1797, p. 5). J'écarte avec grand soin toute conversation tendante à une entière confiance (Cottin, Cl. d'Albe, 1799, p. 203). Notre argent, chose pesante de soi, tendante en bas! (Courier, Pamphlets pol., Au réd. du « Censeur », 1820, p. 32).
REM. 1.
Tendage, subst. masc.,technol. Action de tendre; résultat de cette action. On travaille le devant au moyen du fer, par le tendage ou le rentrage (Dreyfus, Manuel apiéceur, av. 1953, p. 56).
2.
Tende de tranche, subst.,bouch. ,,Muscles cruraux internes, à la face interne de la cuisse détachée du quartier postérieur du bœuf`` (Alim. animale, 1973 ds Clé Mots). Bœuf bourguignon. 1 kg de bœuf (gîte à la noix, tende de tranche) (La Véritable cuis. de famille par tante Marie, Paris, Taride, 1966, p. 145).
3.
Tendière, subst. fém.,bât. ,,Dans un échafaudage: pièce horizontale parallèle au mur, maintenant les écoperches à distance les unes des autres. Barres horizontales maintenant les côtés du fût d'une sapine`` (Peyroux Techn. Métiers 1985). Les maçons élèvent (...) les échafaudages (...). Ils comprennent: des pointiers, perches de sapin, dressées verticalement (...); des tendières horizontales écartées verticalement de 2 m. environ, et reliant les pointiers entre eux (Ancien Memento Barré. Notes et formules de l'architecte, Paris, Albin Michel, t. 2, 1920, p. 1133).
4.
Tendine, subst. fém.,rare, vx. Rideau, tenture. Lorsque ces péristyles sont ornés de pots de fleurs et de tendines de jonc, ils ont un aspect à la fois élégant et sévère (Sand, Hiver à Majorque, 1842, p. 51).Il la tenait cachée (...). De mon appartement, je n'apercevais rien de ce qui se passait dans le sien; une tendine de soie fermait son balcon (Sand, Ma Sœur Jeanneds R. des Deux Mondes, 15 janv. 1874, p. 252).
Prononc. et Orth.: [tɑ ̃:dʀ ̥], (il) tend [tɑ ̃]. Homon. et homogr. tendre2. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Verbe trans. 1. fin xes. « tendre quelque chose à quelqu'un, présenter » (Passion, éd. d'Arco Silvio Avalle, 280); 2. id. « avancer une partie du corps » (ibid., 146); ca 1225 tendre l'oreille (Reclus de Molliens, Miserere, 52, 9 ds T.-L.); 1697 tendre le dos (Regnard, Le Distrait, 183); 3. ca 1100 tendre un arc (Roland, éd. J. Bédier, 780); 4. ca 1100 tendre un tref « dresser une tente » (ibid., 159); 1176 tendre une voile (Chrétien de Troyes, Cligès, 254 ds T.-L.); 1258 tendre les cortines « étendre des tapisseries » (A. du Pont, Mahomet, éd. Y. G. Lepage, 761); 5. ca 1175 « disposer des pièges » (Chroniques Ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 14873); 1462 fig. tendre ses filletz (Villon, Testament, éd. J. Rychner et A. Henry, 1463); 1611 voy quel piege est tendu à tes pieds (Larivey, Fidelle, éd. Viollet-le-Duc, t. VI, 356); 1643 le piège est bien tendu (Corneille, Polyeucte, V, 1); 6. 1338 part. passé fém. subst. « action de tendre des filets » et « filets pour prendre les oiseaux aux pièges » (Information, dans le rouleau Debat au sujet du droit de chace, Arch. Côte-d'Or ds Gdf.); 1885 « ligne de fond que l'on place sur le sable à marée basse » (H. de La Blanchère, La Pêche et les poissons, p. 775); 1964 « ligne ou ensemble de lignes de fond disposées à partir d'un bateau » (Lar. encyclop.); 7. 1580 exacte et tendue apprehension de la raison (Montaigne, Essais, II, 12, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 492); 1664 avoir l'esprit tendu à (Ablancourt, Apoph. ds Rich. 1680); 1849 situation tendue (Sand, Corresp., t. 3, p. 137); 1948 atmosphère tendue (Sartre, Engrenage, p. 62); 8. 1933 phonème tendu (Mar. Lex.). B. Verbe trans. indir. 1. 1174-76 fig. tendre a « aspirer à » (Guernes de Pont-Sainte-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 2355); 2. 1176 tendre a (qqc.) (Chrétien de Troyes, op. cit., 180 ds T.-L.); ca 1200 tendre a + inf. (Escoufle, 10, ibid.); ca 1275 vous savez bien a quoi la chose tent (Adenet le Roi, Enfances Ogier, éd. A. Henry, 794); 3. ca 1175 tendre à sa fin (Chroniques ducs de Normandie, 8444); 1690 tendre à ses fins (Fur.); 4. ca 1225 « se diriger, aller vers » (Reclus de Molliens, op. cit., 14, 10 ds T.-L.); 5. 1538 tendre à dire « viser certain but en parlant d'un discours, d'une discussion » (Est.); 6. 1759 tendre à « se rapprocher de plus en plus d'une valeur limite » (D'Alembert, Élém. de philosophie, XV, XIV ds Œuvres, t. 1, pp. 288-289 ds Rob.); 1901 tendre vers zéro (Hadamard, Géom. ds espace, p. 124). Du lat. tendere « tendre, étendre, déployer », « tendre des pièges à quelqu'un », « se diriger », « tendre vers, viser à », « dresser une tente ». Fréq. abs. littér. Tendre: 8 322. Tendant: 941. Fréq. rel. littér. Tendre: xixes.: a) 8 695, b) 11 336; xxes.: a) 12 799, b) 14 247. Tendant: xixes.: a) 1 081, b) 1 563; xxes.: a) 1 547, b) 1 310.
DÉR. 1.
Tendelle, subst. fém.,chasse. Piège à collet pour attraper les grives et autres petits oiseaux. La grive et ses congénères pourront être pris au moyen de piéges dits tendelles, usités dans le pays, à condition que l'appât soit exclusivement composé de genièvre (Arr. du préfet de la Lozère du 5 août 1875 dsGaz. des Trib., 14 avril 1876, p. 366, 2ecol. ds Littré Suppl. 1877). [tɑ ̃dεl]. 1reattest. 1875 id.; de tendre1, suff. -elle*.
2.
Tenderie, subst. fém.a) Chasse. Forme de chasse qui utilise des pièges (notamment pour attraper des oiseaux). La capture, sans filet mais avec des lacets de crin (tenderie), des grives en Belgique, et d'autres plus petits oiseaux en France, est (...) tolérée (T. Burnand, Connaissance et prat. de la chasse, Paris, Denoël, 1967, p. 408).P. méton. Lieu où l'on a tendu des pièges pour pratiquer cette chasse. (Dict. xixeet xxes.). b) Hist. Action de tendre avec des tapisseries les façades des maisons situées sur le passage d'un cortège solennel, en signe d'apparat. Lors des entrées solennelles, il était d'usage de tendre des tapisseries dans les rues que devait emprunter le cortège (...). Cette opération s'appelait la tenderie (Lar. 20e). [tɑ ̃dʀi]. 1resattest. a) 1334 mestier de tendrie « métier de tendeur de draps » (1ermai, Reg. aux public., Arch. Tournai ds Gdf.), b) 1435 « action de tendre des tapisseries, des tapis dans les rues que devait emprunter un cortège solennel » (Chron. des Pays-Bas, de France, etc., Rec. des Chr. de Fland., III, 537, Chron. belg., ibid.); c) α) 1446 tenderiez aux oyseaulx de rivière « chasse avec des filets tendus » (Arch. du Nord, B 19514, fol. 12 rods IGLF), β) 1803 « terrain où l'on a tendu des pièges » (Boiste), γ) 1834 « ensemble d'une installation de pièges et filets destinés à capturer les oiseaux » (Baudr. Chasses); de tendre1, suff. -erie*.
3.
Tendoir, subst. masc.,technol. a) ,,En tissage: tige de bois qui empêche la poitrinière du métier à tisser de se dérouler`` (Peyroux Techn. Métiers 1985; dict. xixeet xxes.). b) Perche sur laquelle ,,on fait sécher les étoffes, après qu'elles ont reçu leurs divers apprêts`` (Havard 1890; dict. xixeet xxes.). [tɑ ̃dwa:ʀ]. 1resattest. a) 1718 tendoires « perches sur lesquelles on étendait les étoffes pour les faire sécher » (Lett. pat., 21 août ds Littré), 1823 tendoirs « id. » (Boiste), b) 1765 « pièce d'un métier à tisser qui maintient la poitrinière » (Encyclop.); de tendre1, suff. -oir*.