| TEMPORALITÉ, subst. fém. A. − [P. réf. à temporel] ,,Pouvoir temporel`` (Littré). DR. Juridiction du domaine temporel d'un évêché, d'un chapitre, d'une abbaye, etc. Il était juge de la temporalité (Ac.). B. − [P. réf. à temps] 1. Caractère de ce qui est dans le temps, de ce qui appartient au temps. Anton. éternité.La temporalité est sans doute la mesure de notre distance à Dieu; et l'on ne voit pas qu'elle puisse complètement s'évanouir sans que nous cessions d'être humains (Lacroix, Marxisme, existent., personn., 1949, p. 119). − PHILOS. [Dans la phénoménol. et dans l'existent. contemp.] Conscience du temps. Selon le caractère de notre activité (jeu, travail) la temporalité peut ne pas être la même pour un intervalle de temps identique (Julia1980). ♦ [Chez Husserl] Caractère de toute activité spirituelle. Constitué et constituant, empruntant son nom au constitué, renvoyant vers une origine radicale de la constitution, le temps retient les prédicats contradictoires de l'éternité et du devenir, prédicats que la subjectivité transcendantale qui est temps ou mieux, temporalité constituante, assume aussi nécessairement (Hist. de la philos., t. 3, 1974, p. 544 [Encyclop. de la Pléiade]). ♦ [Chez Heidegger] ,,Essence de notre être, voué à la finitude dont l'existence est d'être-pour-la-mort et le souci de cette finitude la pensée dominante`` (Morf. Philos. 1980). ♦ [Chez Sartre] ,,Mouvement qui fait basculer l'avenir dans le passé pour aboutir au moment où il n'y a plus d'avenir, la mort`` (Foulq.-St-Jean 1969). La temporalité n'est pas un temps universel contenant tous les êtres et en particulier les réalités humaines (Sartre, Être et Néant, 1943, p. 188). ♦ [Chez Merleau-Ponty] ,,Essence du moi, de l'être-là (Dasein) qui consiste en ce que la conscience de nous-même ne fait qu'un avec l'expérience interne du temps`` (Morf. Philos. 1980). Je ne suis pas une série d'actes psychiques, ni d'ailleurs un je central qui les rassemble dans une unité synthétique, mais une seule expérience inséparable d'elle-même, une seule « cohésion de vie », une seule temporalité qui s'explicite à partir de sa naissance et la confirme dans chaque présent (Merleau-Ponty, Phénoménol. perception, 1945, p. 466). 2. LING. Expression du temps, valeur temporelle d'un mot, d'une désinence. Dès lors qu'ils sont enregistrés et énoncés dans une expression temporelle historique, ils se trouvent caractérisés comme passés. L'intention historique constitue bien une des grandes fonctions de la langue: elle y imprime sa temporalité spécifique (E. Benveniste, Problèmes de ling. gén., Paris, Gallimard, 1966, p. 239).V. temporalisation dér. s.v. temporaliser ex. de Greimas-Courtés 1979. Prononc. et Orth.: [tɑ
̃pɔ
ʀalite]. Att. ds Ac. 1694-1878. Étymol. et Hist. 1. a) Fin xiies. « ensemble des choses temporelles, terrestres » (Sermons St Bernard, éd. W. Foerster, p. 6, 17); b) 1275-80 « condition d'homme mortel (par opposition à l'éternité de Dieu) » (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 19045); 2. a) 1283 « juridiction laïque (par opposition à celle du pouvoir ecclésiastique, v. spiritualité) » (Philippe de Beaumanoir, Coutumes Beauvaisis, éd. A. Salmon, t. 1, p. 153); b) 1335 « biens, propriétés » (Roisin, Franchises, lois et coutumes de Lille, éd. Brun-Lavainne, p. 245 cf. Drüppel Afr. Urk., p. 34); 3. 1943 philos. (Sartre, loc. cit.). Empr. au lat. chrét.temporalitas « caractère de ce qui est éphémère, par opposition à l'éternité » et « circonstances » qui a pris à l'époque médiév. le sens de « biens, possessions matérielles du clergé » (xiiies., v. Nierm.). Fréq. abs. littér.: 67. Bbg. Drüppel (Ch. J.). Altfrz. Urkunden und Lexikologie... Tübingen, 1984, pp. 108-109. |