| TAQUINER, verbe trans. A. − [Le suj. désigne une pers.] 1. [Le compl. d'obj. désigne une pers.] Contrarier par jeu et malice quelqu'un par des gestes ou des paroles sans importance mais répétés; provoquer quelqu'un par jeu pour lui faire perdre son calme. Synon. agacer, asticoter (fam.), faire enrager, mécaniser (pop., vx), tracasser.Lorsque Lazare la négligeait un instant (...), elle devenait si malheureuse, qu'elle se mettait à le taquiner, à le provoquer, préférant le danger à l'oubli (Zola, Joie de vivre, 1884, p. 942).Il était taquin. C'est parce qu'il avait de l'amitié pour ma mère qu'il exerçait de préférence sur elle son humeur contrariante. On ne taquine que ceux qu'on aime (A. France, Vie fleur, 1922, p. 471). ♦ Taquiner qqn au sujet de, sur qqc. Il la taquinait sur sa paresse et lui faisait d'affectueuses agaceries (Rolland, J.-Chr., Matin, 1904, p. 210). − Empl. abs. Il ne fait que taquiner (Ac.1798-1935).C'est parce que j'attends, Que j'aime à taquiner; ça fait passer le temps (Ponsard, Honn. et argent, 1853, II, 3, p. 25). − Empl. pronom. Réfl. (rare). Je suis d'un caractère taquin, voyez-vous, et je... j'ai l'habitude de me taquiner. Mais je... je ne peux pas me taquiner sans répit: là-bas il y avait les nuits. Je dormais (Sartre, Huis clos, 1944, 1, p. 118).Réciproque. Bernard et Peters se montrent bourgeois égrillards, qui disent beaucoup de polissonneries, et se taquinent mutuellement, au sujet de leurs femmes (Rolland, Beethoven, t. 1, 1937, p. 584). 2. [Le compl. d'obj. désigne un inanimé] a) Toucher légèrement ou nerveusement. Elle (...) regardait, avec une feinte distraction, le bout de son pied taquiner la frange d'un tapis (Martin du G., Thib., Consult., 1928, p. 1098).Il me poussa sur le visage et sur la nuque des boutons que je taquinais avec nervosité (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p. 103). b) Utiliser, manier par jeu, par distraction ou en amateur. Taquiner un instrument de musique. Rodolphe, entiché d'alchimie et de magie, s'entourait d'une cour véritablement « hermétique ». Chacun, jusqu'aux valets de pied, y taquinait matras et cornues (Caron, Hutin, Alchimistes, 1959, p. 56). − Loc. fam. Taquiner le goujon. V. goujon1.Taquiner la muse. V. muse1B 1 ex. de Romains.Taquiner les pinceaux; la palette. ,,Peindre en amateur`` (Rob. 1985). B. − [Le suj. désigne un inanimé] 1. Causer un désagrément à quelqu'un en le tourmentant, en l'irritant légèrement mais de façon constante. Synon. agacer, picoter.C'est mon mal de gorge qui me taquine: le docteur dit qu'avec un peu de créosote j'en viendrai à bout (Daniel-Rops, Mort, 1934, p. 467). 2. Inquiéter, troubler l'esprit. Synon. tourmenter.Il y a là-bas quelque chose qui me taquine, un problème qui fait le fond de toutes mes journées (Larbaud, Barnabooth, 1913, p. 259). REM. 1. Taquinant, -ante, part. prés. en empl. adj.Qui taquine, agace, tourmente. Par les sentiers battus, qui font mille zigzags taquinants, il fallait un bon quart d'heure (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 594).La pensée taquinante d'un temps d'arrêt dans le succès (Goncourt, Journal, 1884, p. 335). 2. Taquineur, -euse, subst.,rare. [Corresp. à supra B 1 b] Celui, celle qui taquine, qui a l'habitude de taquiner. La première fois qu'il leva la tête, le taquineur de goujons aperçut mon drapeau blanc (Vialar, Pt jour, 1947, p. 331). Prononc. et Orth.: [takine], (il) taquine [-kin]. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1. 1660 intrans. « être avare, lésiner » (Oudin Fr.-Esp.), empl. isolé; 2. a) α) 1790 trans. « s'amuser à contrarier quelqu'un pour des vétilles » (d'apr. Brunot t. 6, 2, p. 1312); 1798 empl. abs. (Ac.); 1893 taquiner le goujon (v. goujon1); 1907 taquiner la muse (Lar. pour tous);
β) 1864 (avec un sujet de chose) « être la cause d'une irritation, d'une douleur » (Mérimée, Lettres ctessede Montijo, t. 2, p. 260); b) 1866 « s'amuser à contrarier quelqu'un dans de petites choses, sans y mettre de méchanceté » (Amiel, Journal, p. 453). Dér. de taquin*; dés. -er. Au sens 1, uniquement att. ds Oudin, loc. cit., il s'agit prob. de la trad. de l'esp. taca ear d'apr. taquin « avare » (esp. taca o), taquinerie « avarice » (esp. taca eria)). Fréq. abs. littér.: 296 (taquinant : 18). Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 123, b) 563; xxes.: a) 572, b) 505. DÉR. Taquinage, subst. masc.,rare. Action de taquiner. Synon. taquinerie.Vous en êtes encore aux petits taquinages, aux jalousies à faux, aux brouilles, aux coups d'épingles. À quoi cela sert-il? (Balzac, Ptes mis., 1846, p. 202).− [takina:ʒ]. − 1reattest. 1838 (Id., Mais. Nucingen, p. 612); de taquiner, suff. -age*. BBG. − Darm. 1877, p. 84 (s.v. taquinage). − Quem. DDL t. 20; 22 (s.v. taquinant); 28 (s.v. taquinage). |