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TANGUER, verbe intrans.
A. − MAR. [Le suj. désigne un bateau] Être soumis au tangage, se balancer d'avant en arrière. Navire qui roule et qui tangue. Mon bateau (...) n'a pas bonne réputation sur la côte. On dit qu'il roule affreusement. Mais on ajoute que son capitaine est arrivé à placer la cargaison de telle façon qu'il tangue moins, ce qui est exact (Morand, Paris-Tombouctou, 1929, p. 241).La barque (...) tanguait (...) et tombait en avant comme un vieillard aux membres las qui s'agenouille (...) pour se soulever au-dessus de l'eau comme un animal ombrageux (Queffélec, Recteur, 1944, p. 53).
B. − Se balancer d'avant en arrière; se balancer dans tous les sens.
1. [Le suj. désigne un véhicule, un moyen de transp.] Avion, train, voiture qui tangue. Le char repartait, roulant, tanguant, gémissant d'ornière en ornière (Pesquidoux, Livre raison, 1925, p. 131).De vastes tramways tanguaient sur la chaussée et dansaient dans les glaces (Arnoux, Gentilsh. ceinture, 1928, p. 206).
2. [Le suj. désigne une partie du corps] Synon. chanceler, tituber, vaciller.Marcher en tanguant. La masse épaisse d'un infirmier dont les lourdes épaules tanguent comme un sac porté transversalement (Barbusse, Feu, 1916, p. 313).Le soir ils vont au cabaret, d'où ils ressortent, ivres souvent à ne pouvoir se diriger, roulant, tanguant et parfois vomissant (Gide, Journal, 1940, p. 33).V. diable I C 3 c β ex. de A. Daudet.
3. P. anal. Donner l'impression de se balancer d'avant en arrière, dans tous les sens. Chambre, lit qui tangue. Tu ne crois pas qu'il est bien tard, que nous avons bu beaucoup de punch (...) dit Robert. Demain matin les murs ne tangueraient plus, les meubles et les bibelots seraient bien en ordre (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 42).
Prononc. et Orth.: [tɑ ̃ge], (il) tangue [tɑ ̃:g]. Homon. tangue. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1. a) 1654 « (en parlant d'un bateau) être soumis à un mouvement d'oscillation dans le sens de la longueur » (Du Tertre, S. Christophe, 92 ds Fr. mod. t. 26, 1958, p. 58); b) 1911 « (en parlant d'un véhicule quelconque) présenter un mouvement de balancement dans le sens latéral ou des mouvements plus ou moins désordonnés » (Châteaubriant, Lourdines, p. 257); 2. 1872 « (en parlant d'une personne) tituber, aller de droite et de gauche en marchant » (Littré). Orig. incertaine. Selon FEW t. 17, pp. 306-307, tanguer serait dér. de l'a. fr. tengre « partie du couteau qui entre dans le manche » (2equart du xiiies., Dou vrai chiment d'amours, éd. A. Långfors, 131 ds Romania t. 45 1918-19, p. 212), lui-même empr. à l'a. nord. tangi, de même sens; le mouvement de la proue d'un bateau qui tangue aurait été comparé à la manière dont le tengre entre dans le manche; cette hyp. se heurte à la rareté du mot en a. fr. (un seul ex. car celui de Venus ds T.-L. n'est qu'une reprise textuelle du précédent) et à l'écart chronol. considérable entre tengre et tanguer, et elle n'est pas convaincante du point de vue sém. L'hyp. de Gamillscheg ds EWFS, selon laquelle tanguer serait empr. à un frison tüngeln « se balancer en avant et en arrière, pendre », qui connaît des var. en -a-, est sémantiquement plus satisfaisante. Fréq. abs. littér.: 71.
DÉR.
Tangueur, -euse, adj. et subst. masc.a) Adj. et subst. masc., mar. (Navire) qui tangue beaucoup. Navire tangueur; un fort tangueur (Merrien 1958). b) Adj. Qui se balance d'avant en arrière, dans tous les sens. Les chameaux tangueurs, aux rognures bleues, et les ânes patients emportaient des feuilles vers Temacin (Jammes, Rom. du lièvre, Notes sur Alger, 1903, p. 288). [tɑ ̃gœ:ʀ], fém. [-ø:z]. 1resattest. 1812 subst. (Mozin-Biber), 1813 adj. (Gattel); de tanguer, suff. -eur2*; le rapport avec tanqueur « portefaix qui charge et décharge un navire » (1584, édit in Pardessus, Col., IV, 321 ds Fr. mod. t. 26 1958, p. 58), tangueur « id. » (1611, Cotgr.), n'est pas éclairci.
BBG.Kemna 1901, p. 92 (s.v. tangueur).