| SYMPHONIE, subst. fém. MUSIQUE A. − Vieilli. Union de sons, ensemble consonant. Synon. accord.Isidore de Séville ne compte que cinq symphonies ou accords: l'octave, la quarte, la quinte, l'octave et la quinte, et la double octave (Coussemaker, Hist. harm. Moy. Age, 1852, p. 9).Le chœur [dans les drames du moyen âge] chante aussi un ou plusieurs versets qui font symphonie (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 3, 1862, p. 367). − P. méton. Formation de musiciens, orchestre. La symphonie est en général composée d'une flûte et d'un tambour, ou de deux violons. S'il y a quatre violons, c'est grand luxe, orchestre philharmonique, et l'on s'émerveille (Brasillach, Corneille, 1938, p. 57). B. − Composition musicale. 1. [Aux xviieet xviiies.] Pièce polyphonique destinée aux instruments. Synon. sinfonia. a) Suite instrumentale; ritournelle, intermède instrumental inclus dans l'opéra. Les symphonies de Monteverdi (Écorcheville, Suites orch., 1906, p. ii).Dans le cours de l'action, les symphonies dramatiques sont les préludes, les interludes et aussi certains accompagnements (Hist. de la mus., t. 1, 1960, p. 1682 [Encyclop. de la Pléiade]). b) Ouverture d'opéra exécutée comme morceau de concert. Il faudrait retrouver les sources de cette page de « symphonie » qui précédait les opéras et qui était reprise presque invariablement après le prologue (Hist. de la mus., t. 1, 1960, p. 1585). 2. [Du mil. du xviiies. à nos jours] Composition musicale, généralement de grande dimension, composée de trois ou quatre mouvements, pour certains de forme sonate, dont l'instrumentation, qui réunit toutes les familles d'instruments de l'orchestre, s'est modifiée au cours des siècles, dans sa richesse et sa variété. Symphonie classique, romantique; symphonies de Brückner, de Haydn, de Mozart; les neuf symphonies de Beethoven; la symphonie « Jupiter » de Mozart, la symphonie « pastorale » de Beethoven, la symphonie « inachevée » de Schubert. Ce sont presque les mêmes mots que ceux du finale de la IXesymphonie, que le vers de Schiller: « Alle Menschen werden Brüder! » Tous les hommes deviennent frères (Dumesnil, Hist. théâtre lyr., 1953, p. 115): À vingt-cinq ans, et alors que Mozart était déjà l'auteur de la symphonie en si bémol, et des plus purs chefs-d'œuvre, l'archevêque de Salzbourg, à qui il appartenait, le traitait de polisson et le faisait dîner avec ses valets de chambre.
Mauriac, Journal 2, 1937, p. 135. Rem. L'usage est de nommer p. ell. les œuvres les plus connues: « la Cinquième » de Beethoven, « l'Inachevée » de Schubert, « la Fantastique » de Berlioz... ♦ Symphonie concertante. Composition orchestrale, généralement en deux mouvements, d'une grande variété mélodique, écrite pour instruments solistes. Lorsque, dans le même siècle [le XVIIIe], les progrès de la virtuosité le permirent, on vit se multiplier les concertos et les « symphonies concertantes » dans lesquels un ou plusieurs I[nstruments] à vent, jouaient en solo, soutenus par un accompagnement de clavecin ou d'orchestre (BrenetMus.1926, p. 208). ♦ Symphonie à programme. Composition orchestrale dont l'idée extramusicale (poétique ou descriptive) qui l'inspire, l'apparente au poème symphonique. L'action extérieure à la musique [triomphe] dans la « symphonie à programme » de Berlioz (Lalo, Esthét. mus. sc., 1907, p. 307). C. − P. anal. 1. Ensemble de sons, de bruits formant une harmonie. Symphonie des cris de la rue. Le soir, quand recommençait la symphonie nocturne, où les rainettes du marais voisin faisaient aussi leur partie, il demeurait à l'écart, et il rêvait toujours (Murger, Nuits hiver, 1861, p. 189).Sous les tropiques, la symphonie des oiseaux a lieu un quart d'heure avant l'aube (Cendrars, Lotiss. ciel, 1949, p. 320). 2. [Dans une perspective esthét.] Ensemble de couleurs, de parfums, etc. qui produisent sur les sens une forte impression d'harmonie, un grand effet d'équilibre. Depuis la mort du monde antique et après la cathédrale, la plus puissante symphonie de pierre est là (Faure, Hist. art, 1914, p. 427).L'éclatante symphonie des grenats, des rouges et des ors du salon (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 307). 3. Ensemble de choses organisées qui figurent dans un ensemble donné. À partir de 1953, le thème de la productivité domine la symphonie économique (Chenot, Entr. national., 1956, p. 35).Dans la vaste symphonie du monde, les lois des astres avaient leur répercussion sur toute la destinée et enchaînaient la liberté humaine (Barbault, De psychanal. à astrol., 1961, p. 31). REM. Symphoniette, subst. fém.Morceau de musique au caractère léger et naïf. Orgues contenant tous les ramages, la musique des sphères, « Noël! Noël! », la symphoniette des anges et des bergers qui se réjouissent (Cendrars, Lotiss. ciel, 1949, p. 157). Prononc. et Orth.: [sε
̃fɔni]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist 1. 1120-50 siphonie désigne un instrument de musique (Grand mal fist Adam, I, 103c ds T.-L.); 1155 symphonie « id. » (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 10551), seulement en a. m. fr., le mot désignant tantôt un instrument à cordes, tantôt une sorte de vielle, v. Dick, Bezeichnungen für Saiten - und Schlaginstrumente in der afr. Literatur, pp. 83-86; Brücker, Die Blasinstrumente in der altfranzösischen Literatur, p. 49; FEW t. 12, pp. 488-490; 2. a) 1357 « harmonie, accords agréables à l'oreille » (Guillaume de Machaut, Confort d'ami, éd. Hœppfner, 505: la douceur de la symphonie et la très douce melodie de tous les genres de musique); b) 1625 (Naude, Apologie pour grands hommes, p. 151: l'admirable ordre et symphonie de la nature); c) 1672 fig. en parlant d'une réunion de personnes (Mmede Sévigné, Corresp., éd. R. Duchêne, t. 1, p. 517); 3. 1673 « morceau de musique pour un ensemble d'instruments, pièces d'orchestre » v. sinfonia (Id., ibid., t. 2, p. 630: On répète souvent la symphonie de l'opéra [de Lulli]: c'est une chose qui passe tout ce qu'on a jamais ouï); 4. a) 1751 « grande œuvre pour orchestre à plusieurs mouvements, formée de morceaux de genres différents » (Fr. Martin, Symphonies et ouvertures, opus 4 d'apr. Mus. 1976); b) 1786 symphonie concertante (Journ. polytype, partie des arts agreables, I, 291 ds Quem. DDL t. 21). Empr. au lat.symphonia « harmonie de sons », « groupe de musiciens, de chanteurs, orchestre », désignant également différents instruments de mus. (v. FEW t. 12, pp. 490-491), transcrivant le gr. σ
υ
μ
φ
ω
ν
ι
́
α de σ
υ
́
ν « ensemble, en accord » et φ
ω
ν
η
́ « voix », « harmonie des sons », « accord musical (entre deux sons, comme l'intervalle entre la quarte, la quinte et l'octave) », « union harmonieuse de voix ou de sons, concert », au fig. « harmonie » et également au sens concr. « orchestre » et « instrument de musique ». Fréq. abs. littér.: 635. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 378, b) 762; xxes.: a) 1 265, b) 1 208. DÉR. Symphoniste, subst.,mus. a) Compositeur; en partic., auteur de symphonies. Le symphoniste qui orchestra le Capriccio espagnol a donné un modèle de science instrumentale (Dumesnil, Hist. théâtre lyr., 1953, p. 177).P. anal., peint. Les symphonistes de Venise pourront naître quand Vinci, Michel-Ange, Raphaël, achevant l'effort des mélodistes toscans Angelico, Ghirlandajo, Lippi, Signorelli, Piero della Francesca, auront coulé dans le moule de leur énergie spirituelle la forme italienne parvenue à sa plus implacable réalité (Faure, Espr. formes, 1927, p. 41).b) Musicien qui joue dans un orchestre symphonique. On voit apparaître (...) le nom de celui-ci, en 1713, parmi ceux des symphonistes de l'orchestre de l'Opéra (La Laurencie, Éc. fr. violon, t. 2, p. 374).− [sε
̃fɔnist]. Att. ds Ac. 1740-1878. − 1resattest. a) 1690 « celui qui joue des instruments ou qui compose des pièces musicales » (Fur.), b) 1800 « celui qui compose des symphonies » (Boiste); de symphonie, suff. -iste*; cf. lat. symphoniacus « de concert » et « esclave symphoniste, musicien d'orchestre », traduisant le gr. σ
υ
μ
φ
ω
ν
ι
α
κ
ο
́
ς de même sens. BBG. − Quem. DDL t. 21. |