| SURVENIR, verbe intrans. A. − Qqn survient 1. Arriver de manière inopinée, dans une situation ou une affaire en cours. Synon. fam. débarquer.Le sel qui tombe sur la table, le couteau et la fourchette en croix sur l'assiette, la treizième personne qui survient à dîner, font pâlir (...) plus d'une maîtresse de maison (Jouy, Hermite, t. 1, 1811, p. 255).Le tête-à-tête commença dans un petit salon; mais l'Impératrice survint, tout fut manqué. Je vis presque aussitôt l'Empereur ressortir avec une figure longue comme cela! (Goncourt, Journal, 1871, p. 840). − En constr. impers. Si il survenait un client, ma mère planquait vite sa cuvette, tous ses tampons, d'un coup prompt, dessous le divan du milieu (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 348). 2. Arriver, se présenter après d'autres. Nous avons, sur ce point, offert des témoignages. De nouveaux témoins pourront survenir (Clemenceau, Iniquité, 1899, p. 446).Ce fut l'affaire de deux générations. L'aïeul entama le vieux patrimoine, le fils l'acheva; quand survint le petit-fils, il ne restait pas une miette (Pesquidoux, Livre raison, 1928, p. 178). B. − 1. Qqc. survient a) Se produire après d'autres événements et donc modifier une situation de fait. Synon. s'ajouter.C'est bien [une soi-disant expérience de la vie et des affaires] plutôt une routine, limitée à un très petit nombre de cas très faciles. Que survienne un cas imprévu, où il faut prendre parti promptement et vigoureusement, les voilà désarmés (Rolland, J.-Chr., Antoinette, 1908, p. 844).[Des savants] font accepter leur petit roman durant quelques années, puis des faits surviennent qui ne rentrent pas dans leur système, il en faut inventer un autre... telle est la science (Barrès, Cahiers, t. 8, 1910, p. 254). − En constr. impers. − Malade? Non... fatiguée tout au plus... Depuis notre dernière rencontre, il est survenu tant d'événements! (Estaunié, Ascension M. Baslèvre, 1919, p. 226): ... mais qu'il survienne dans cette évolution une simple erreur de date, de tour, comme il est arrivé à ta mère, dont le cœur ne s'est éveillé qu'à l'été de sa vie, patatras, l'édifice de paix s'écroule!
H. Bataille, Maman Colibri, 1904, IV, 8, p. 31. b) Se produire brusquement, brutalement, de manière inopinée. Ce fut l'heure. On siffla le départ qui survint dans un branle énorme en catastrophe de ferraille, à la minute bien précise (Céline, Voyage, 1932, p. 544).Enfin un complice (...) abouché à divers cheminots devait le prévenir si survenait un changement de dernière heure (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 128). − En constr. impers. Le Chaptal [un navire] était entré dans l'Adriatique lorsqu'il survint un gros temps (About,Grèce,1854,p. 222).Il survient que.Il survenait aussi que M. Baslèvre se plaignît d'avoir été trop longtemps délaissé (Estaunié, Ascension M. Baslèvre, 1919, p. 164). − Pop., rare. C'est survenu + compl. de temps.Cela a eu lieu, cela s'est produit (à tel moment, telle époque). [Bébert] est tombé malade (...) [la tante] m'a demandé de le soigner quand même son neveu, sans doute parce que j'étais le moins cher parmi les autres médecins qu'elle connaissait. C'est survenu après Pâques (Céline, Voyage,1932, p. 342). 2. Qqc. survient à qqn a) Affecter quelqu'un de manière brusque, intempestive. Synon. tomber* dessus.Que de fois ne désira-t-il pas voir survenir à Mme de Rênal quelque affaire qui l'obligeât de rentrer à la maison et de quitter le jardin ! (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p. 53). − En constr. impers. J'aurais besoin pour le finir [Saint-Antoine] de l'enthousiasme que j'avais l'été dernier. Mais, depuis lors, il m'est survenu de fortes secousses. Que je suis démonté! (Flaub., Corresp., 1872, p. 377). b) Arriver de manière imprévue. L'argent me survient de deux côtés à la fois, et moi qui me plaignais d'en manquer (Flaub., Corresp., 1880, p. 217). − En. constr. impers. Le donateur a disposé du tiers de sa fortune, à un moment où il n'avait que deux enfants. Il ne pouvait alors légalement disposer que du tiers. Il lui survient un troisième enfant: il ne peut plus disposer que du quart (Jaurès, Ét. soc., 1901, p. 195). Prononc. et Orth.: [syʀvəni:ʀ], (il) survient [-vjε
̃]. Att. ds Ac. dep. 1718. Étymol. et Hist. 1. « arriver inopinément » a) en parlant d'une pers.
α) 1121-34 (Philippe de Thaon, Bestiaire, 411 ds T.-L.);
β) mil. xiies. [ms. xiiies.] part. prés. subst. « étranger » (Everart de Kirkheim, Distiques de Caton, éd. E. Stengel, ms. Brit. Mus. Arundel 292, fol. 62 c ds Ausgaben und Abhadlungen ...rom. Philol., t. 47, 1886, p. 121); 1176-81 les sorvenanz « les nouveau venus » (Chrétien de Troyes, Chevalier au lion, éd. M. Roques, 5147); b) ca 1175 en parlant d'une chose (Benoît de Ste-Maure, Chron. des ducs de Normandie, 1895, ibid.: con tonneires sorvient); 2. « arriver, venir en sus, sur les entrefaites » a) 1174-87 en parlant de pers. (Chrétien de Troyes, Perceval, éd. F. Lecoy, 3802: Que li Orguilleus de laLande [...] Ne sorveingne a cest assanblee); 1176-81 (Id., Chevalier de la Charrette, éd. M. Roques, 1663); b) fin xiies. en parlant d'une chose (Mainet, II, 123 ds T.-L.); 1370-72 part. prés. adj. (Nicole Oresme, Ethiques d'Aristote, éd. A. D. Menut, X, 7, p. 509, note 9: toutesvoies n'est elle pas [delectacion] la fin pour quoy est operacion [...] mais est comme fin seürvenante). Dér. de venir*; préf. sur-*. Fréq. abs. littér.: 1 317. Fréq. rel. littér. : xixes.: a) 2 002, b) 1 952; xxes.: a) 1 646, b) 1 854. |