| STYLE1, subst. masc. I. A. − 1. Poinçon généralement de métal ou d'os, utilisé dans l'Antiquité et au Moyen Âge pour écrire sur des tablettes enduites de cire. Synon. stylet2(v. ce mot A 1).Du fer d'un style à la pointe acérée, Égratignant la cire impitoyable, il [Suétone] a Décrit les noirs loisirs du vieillard (Heredia, Trophées, 1893, p. 70).C'était une tablette à écrire, d'où pendait un style d'argent. La cire en était presque toute usée, mais on avait dû repasser plusieurs fois les mots tracés (Louÿs, Aphrodite, 1896, p. 35). 2. Instrument métallique pointu servant à dessiner, inscrire, inciser quelque chose. Synon. stylet2(v. ce mot A 2 et 3 b).Les (...) styles (...) dont les potiers romains se servaient pour finir leurs ouvrages (Al. Brongniart, Arts céram., t. 1, 1844, p. 424).[Dans les appareils à stencil] l'opérateur écrit, avec un poinçon métallique ou d'agathe, sur une feuille de papier ciré (...). La pointe du style (...) dessine les caractères par une quantité de perforations (Pethoud, Organ. industr. et comm., 1931, p. 188). 3. Petite tige pointue servant à tracer les courbes sur un cylindre enregistreur. Synon. stylet2(v. ce mot A 3 a).Le baromètre enregistreur [des ballons sondes] se compose d'un organe barométrique qui commande un style traçant les courbes sur un tambour qui tourne (Marchis, Nav. aér., 1904, p. 508). B. − Tige ou fil dont l'ombre indique l'heure en se déplaçant sur un cadran solaire. L'ombre des styles marquait quatre heures de relevée aux cadrans de tous les clochers (Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 346).La boussole (...) coïncide avec l'apparition des premières horloges solaires « modernes » (...). La surface permet d'observer la marche de la ligne d'ombre. Le style est soit un gnomon (...), soit un fil (Bassermann-Jordan, Montres, horl. et pend., 1964, p. 101).V. gnomon ex. II. − Catégorie de l'esthétique permettant de caractériser l'organisation des formes verbales, plastiques, musicales, que l'histoire de l'art a identifiées et décrites comme ayant fait époque ou comme étant marquées par un artiste particulier. A. − Domaine du lang. et de la ling. 1. a) Ensemble des moyens d'expression (vocabulaire, images, tours de phrase, rythme) qui traduisent de façon originale les pensées, les sentiments, toute la personnalité d'un auteur. Synon. écriture, plume.Style original, personnel, propre; style d'un auteur, d'un poète; caractère du style (de); travailler son style; former, imiter le style (de). Le caractère de l'homme (...) est son style. Dans le style de Dante, ferme, presque sans épithète, amer et mystique, qui ne sent le gibelin dévot? Dans celui de Montaigne, l'homme heureux, oisif, curieux et paisiblement soigneux de son éloquence (...)? (Vigny, Journal poète, 1854, p. 1317): 1. Pour que l'idée laissât des traces, je me proposais de la revêtir de toutes les ciselures de mon style, d'y prodiguer ces arabesques capricieuses qui sont le sceau de l'artiste, son cachet et son blason; je me promettais (...) de faire osciller ma phrase dans le balancier de l'antithèse, (...) de la faire bondir sur la cataracte de l'énumération, au milieu de substantifs bruyants et d'épithètes écumeuses.
Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 61. − P. méton. [À propos d'une œuvre littér.] Ensemble des traits expressifs qui dénotent l'auteur dans un écrit. Style d'une lettre. Le style d'une œuvre littéraire est le système d'oppositions par lequel des modifications expressives (intensification de la représentation, coloration affective, connotation esthétique) (...) sont apportées à l'expression linguistique, au processus de communication minimale (M. Riffaterreds Rom. Philol.t. 14 1960-61, p. 217). b) Absol. Manière d'écrire ou de parler très personnelle. Absence de style; travail du style. Le style est la volonté de s'extérioriser par des moyens choisis. On confond généralement comme Buffon langue et style, parce que peu d'hommes ont besoin d'un art de volonté (Jacob, Cornet dés, 1923, p. 13).Le style conserve la pensée (...). Mais c'est la pensée qui fait le style. C'est la pensée rude et serrée de Pascal qui donne à sa langue des traits de feu (Chardonne, Attach., 1943, p. 108). ♦ Avoir du style; faire du style (rare). Goncourt a du style, une certaine vie nerveuse (...). Le style, c'est la tournure, c'est le mouvement de l'âme, ses frémissements, ses hardiesses, son élan rendu sensible (Barrès, Cahiers, t. 7, 1908, p. 100).Un gamin des rues emploie des mots pittoresques et façonne ses phrases d'une manière imprévue et piquante; il fait du style sans le savoir (Bally, Lang. et vie, 1952, p. 27). ♦ (Être) dénué de style; sans style; manquer de style. Les Foules de Lourdes de Huysmans (...) un livre de faiseur, sans style et sans véritable émotion, sans forme, sans valeur (Alain-Fournier, Corresp. [avec Rivière], 1909, p. 112). ♦ Créer un style. C'est un des rares ouvrages [À rebours, de Huysmans] qui créent un style, un type, presque un art nouveau (Valéry, Lettres à qq.-uns, 1945, p. 11). − [P. allus. à Buffon et à son discours de réception à l'Académie française, prononcé en août 1753] Le style est l'homme même. Le style reflète l'individualité de son auteur et présente un intéret durable, à la différence du sujet traité. Le style c'est l'homme et l'œuvre l'expression d'une nature et d'une aventure, d'une expérience incommensurable à toute autre et qui, par conséquent, transcende toute catégorie normalisée (Guiraudds Langage, 1968, p. 440). 2. a) Mode d'expression verbale qui est spécifique de tel genre ou sujet littéraire, qui correspond ou non à certaines normes formelles. Il est un style qui n'est que l'ombre (...), le dessin de la pensée; (...) [il] convient à la métaphysique, où tout est vague et étendu, et aux sentiments de piété, qui ont quelque chose d'infini (Joubert, Pensées, t. 2, 1824, p. 63).Laisse à d'autres les ingéniosités de style, les hardiesses de syntaxe, la poursuite des épithètes rares (...): pour une œuvre (...) dont le fond seul importe, contente-toi d'un style clair, correct, dépouillé (Martin du G., Souv. autobiogr., 1955, p. lxxxv).V. académique ex. 13, ampoulé ex. 5, écrit ex. 3, épistolaire ex. de Joubert. SYNT. Style littéraire, oratoire, parlé; style admirable, exquis, médiocre; style didactique, énergique, pur; style allégorique, artiste, emphatique, épique, fleuri, lyrique, orné, pittoresque, pompeux, précieux, sublime; style élevé, soutenu; style familier, naïf, naturel, plat, simple; style biblique, chrétien, comique, philosophique, poétique, tragique; beau, haut, joli, mauvais style; écrit d'un/dans un style (+ qualificatif); beauté, charme, élégance, grâce(s), magie, négligence, perfection, pureté, qualité, raffinement, recherche du style (de). − GRAMM. Style direct, indirect. Synon. de discours direct, indirect (v. discours C 1 b).Il y a trop, beaucoup trop de dialogues. Pourquoi ne pas vous servir plus souvent de la forme narrative et réserver le style direct pour les scènes principales? (Flaub., Corresp., 1870, p. 103).Peut-être ne faisait-elle que répéter en style indirect les propos violents qu'elle avait entendus (Proust, Temps retr., 1922, p. 845). − Style figuré. V. figuré A 2 b et ex. de Stendhal.Style lapidaire. V. lapidaire2A et ex. de E. Leclerc.Style noble. V. noble1B 2 a et ex. de Stendhal, ex. 10.Style pressé. V. pressé II A 2 b et ex. de Sainte-Beuve. b) Absol. [Avec une valeur gén. favorable; beau, bon étant plus ou moins nettement sous-entendus] Mode d'expression verbale qui correspond idéalement à certaines normes formelles. Effet, étude, exercice, morceaux, procédé, tournure de style; art, règles, souci du style. Il avait le don naturel du style, comme si sa plume eût suivi le calque des plus grands écrivains. Il était naturellement antique dans le discours, poëte (...) dans les vers (Lamart., Confid., Graziella, 1849, p. 323): 2. Son exercice [de la lecture] enseigne, paraît-il, le style, la convenance et la façon de disposer, pour l'agrément du lecteur et la satisfaction de notre conscience, la masse informe que nous portons en nous, d'en aménager avec décence le tohu-bohu.
Arnoux, Roi, 1956, p. 33. ♦ Figure de style. V. figure I B 3 b et rem.Avoir du style, faire du style (avec une nuance iron.). Les filles publiques en écrivant font du style et de beaux sentiments (Balzac, Splend. et mis., 1847, p. 617).Mon père, il avait du style, l'élégance lui venait toute seule (...). Lempreinte, ce don l'agaçait (...). Il lui a fait recommencer presque toutes ses lettres (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 58). − P. iron. [Mis pour mauvais style] Ton patron nous écrit: J'ai reçu une lettre du général, comme vous, pas trop honnête. Il veut dire: comme celle que vous avez reçue. Tout le reste est de ce style (Courier, Lettres Fr. et Ital., 1806, p. 719). 3. Mode d'expression verbale propre à une école, à une nation, à une époque. Style français, moderne, romantique; style du temps, d'une époque, du XVIIesiècle. La liberté fort grande du style contemporain et parisien ne lui suffisait pas. Il [Balzac] prit celui de Rabelais et de Brantôme pour peindre avec la minutie du seizième siècle, les crudités du seizième siècle (Taine, Nouv. Essais crit. et hist., 1865, p. 11).Dès qu'un auteur (...) parvient à capter quelques mouvements de l'âme dans ces lignes pures, simples, élégantes et légères qui caractérisent le style classique, aussitôt on le porte aux nues (Sarraute, Ère soupçon, 1956, p. 85). 4. Mode d'expression verbale propre à une activité, à un groupe professionnel. Synon. jargon, langage, phraséologie, vocabulaire.Style administratif, diplomatique, télégraphique; style de publicité. Quel contraste je trouvois entre le style boursoufflé et vide des chancelleries de nos Cantons Suisses avec les formes brèves et tranchantes des hommes de la grande république! (Bonstetten, Homme Midi, 1824, p. 208).L'encyclique du Pape est bien belle, accusant Victor-Emmanuel d'établir « des maisons de débauche » (...). Quel bon style poncif que le style ecclésiastique! (Flaub., Corresp., 1860, p. 403).V. commercial A 2 ex. de Flaubert.Style de Palais. V. palais1C 2. ♦ En style de + subst.Selon la façon de s'exprimer de. Marthe très énervée (...) avait traité son époux de « cocu » avec tant de fréquence et de conviction que le malheureux n'avait plus douté de ce qu'on appelle, en style de reporter, « l'étendue de son malheur » (Colette, Cl. s'en va, 1903, p. 257).V. broutille ex. 2. B. − PEINT., SCULT. 1. Manière personnelle d'utiliser certains moyens artistiques (choix du sujet, des formes, des lignes, jeu des couleurs) qui permet de reconnaître un artiste à travers ses œuvres. Synon. facture1, griffe1, patte1, touche.Ses compositions, toujours étranges et inattendues, (...) étaient bien à lui et n'avaient d'autre style que le sien (...) son unique procédé consistait à peindre (...) en exaspérant la violence de ses reliefs de couleur (Bloy, Femme pauvre, 1897, p. 134).L'énergie morale, la puissance prophétique, la grandeur d'ailleurs convulsive du style de Michel-Ange (Faure, Espr. formes, 1927, p. 104). ♦ Dans le style de + n. propre.D'une manière propre à tel artiste ou qui évoque cet artiste. Les fauteuils (...) racontaient (...) des bergeries dans le style de Boucher et de Watteau (Murger, Scène vie jeun., 1851, p. 126). − P. méton. [À propos (d'un aspect) d'une œuvre] Qualité de ce qui manifeste le tempérament propre d'un artiste. Pour M. Decamps, la couleur était la grande chose (...). Sa couleur splendide et rayonnante avait de plus un style très particulier. Elle était (...) sanguinaire et mordante (Baudel., Salon, 1846, p. 139). 2. [Avec une valeur fortement laud.] Le (grand, haut, etc.) style. Qualité de celui/ce qui révèle une personnalité artistique très affirmée, de celui/ce qui exprime magistralement un sujet, en lui donnant du caractère, de la grandeur ou de ce qui répond idéalement à certaines normes esthétiques. Synon. allure, cachet.Aucun de nos peintres modernes (...) ne serait capable de peindre cette tête [de lady Harley] ; ils y voudraient placer l'imitation de l'antique ou le style, comme on dit à Paris, c'est-à-dire donner l'expression de la force et du calme (Stendhal, Rome, Naples et Fl., t. 1, 1817, p. 33).À la matière sans équivalent de Cézanne s'ajoute la majesté du dessin, qui parvient au style, au grand style, par l'intervention du trait qui (...) résume les inflexions essentielles (Lhote, Peint. d'abord, 1942, p. 131). − En partic. [Chez Nietzsche] La grandeur d'un artiste ne se mesure pas aux « beaux sentiments » qu'il excite (...)! Elle dépend de la mesure dans laquelle il approche du grand style (...). Ce style a ceci de commun avec la grande passion qu'il dédaigne de plaire, qu'il oublie de persuader, qu'il commande, qu'il veut (Fr. Nietzsche, La Volonté de puissance, trad. par G. Bianquis, t. 2, 1937, p. 338). ♦ De grand, haut style. C'est [le Partage de la tunique du Christ] une œuvre de grand style, splendide et pleine, toute ramassée autour de la noble tristesse du Christ (Barrès, Greco, 1911, p. 22).La Loge [par Renoir], conçue dans une harmonie sourde, dans une pénombre chaleureuse, est une œuvre d'élégance quintessenciée et de haut style (Mauclair,Maîtres impressionn.,1923,p. 136). ♦ Avoir du style; (être) sans style. Si l'on entend par style, l'idéal de ce qui est pur et beau transcrit en formules, il [Rubens] n'a pas de style (Fromentin, Maîtres autrefois, 1876, p. 48).Le Faust, d'Ary Scheffer, (...) les religiosités de M. Flandrin, sont (...) sans aucun style, attendu qu'aucun de ces deux hommes n'avait une palette qui lui appartînt (Huysmans, Art mod., 1883, p. 195). 3. P. anal. [À propos de l'aspect d'un paysage, d'une pers.] Qualité de ce qui évoque l'œuvre d'un maître. Ce pays (...) est rustique au possible, ce qui ne l'empêche pas d'avoir un grand style, à cause de ses beaux arbres et de ses verdures immenses (Sand, Corresp., t. 5, 1864, p. 36).Je trouve à la gare (...) un groupe d'une vingtaine de zouaves (...). Rien n'est beau, rien n'a du style, rien n'est sculptural, rien n'est pictural comme ces éreintés d'une bataille (Goncourt, Journal, 1870, p. 583). C. − ARCHIT., ARTS DÉCOR. 1. Ensemble des traits esthétiques qui caractérisent les œuvres d'une école, d'une nation, d'une époque et qui permettent de les dater, classer, évaluer. L'architecture monastique (...) passa successivement par toutes les variations de formes qui caractérisent les cinq grandes divisions de l'art chrétien: style latin, style byzantin, style roman, style ogival, et style classique ou de la renaissance (Lenoir, Archit. monast., 1852, p. xvi).L'art décoratif secoue le joug de la pesante ornementation Louis quatorzième. (...) vers 1730-1735 un nouveau style est né: le style Louis XV, triomphe de l'asymétrie et de la ligne sinueuse (Viaux, Meuble Fr., 1962, p. 82).V. gothique ex. 1, jésuite ex. 4, modern style ex. SYNT. Style ancien, barbare, baroque, colonial, décoratif, grec, rétro, rocaille, rococo, rustique, troubadour; style Henri II, Louis XIII, Louis XIV, Régence, Louis XVI, Directoire, Empire, 1900; vieux style; style d'architecture; mélange de styles; unité de style; de/d'un grand style. ♦ De/du/en style + déterminatif; de pur/du plus pur/beau style + déterminatif. Église, maison de style + déterminatif. La mosquée de Sultan Haçan est de pur style arabe (...) et d'une fort belle époque (1347-1361) (Du Camp, Nil, 1854, p. 34).Un salon propre et correct, de style Louis-Philippe, aux meubles froids et lourds (Maupass., Contes et nouv., t. 1, J. Romain, 1886, p. 1293).P. ext. Dans le/de/du style + déterminatif. D'une manière, d'un genre esthétique cherchant à reproduire un style authentique plus ancien. Ce lit, historié en toutes ses parties dans le style Renaissance, tel qu'on le traitait sous Louis-Philippe, présentait (...) un médaillon orné de perles (A. France, Pt Pierre, 1918, p. 280).Les docks de Sainte-Catherine sont du style grec d'il y a cent ans: colonnes antiques entourant des bassins; on dirait un entrepôt sur un temple (Morand, Londres, 1933, p. 308). 2. Absol. Ensemble des traits caractérisant tel genre esthétique particulier. Donner du style à. L'église, où il n'y a plus aucun style: ni la poésie gothique, ni le gracieux de la Renaissance, ni l'austérité janséniste (Michelet, Journal, 1839, p. 311).Le Continental conserve le style. L'électricité se cache sous les globes à gaz des lampadaires (Cocteau, Portr.-souv., 1935, p. 202). ♦ Meuble (de style). (Meuble) qui appartient à un genre esthétique défini, notamment ancien, ou qui imite un genre esthétique ancien sans être d'époque. Les jeunes filles apprenaient par des racontars que l'amour se consomme sur des canapés de style, dans des pièces du genre boudoir (Aymé, Jument, 1933, p. 186). ♦ Avoir du style; (être) sans style. Ce grand village est merveilleux. Il a du style, de l'allure (...). Les cases ne sont plus ces huttes (...) uniformément laides (...), mais vastes, de bel aspect (Gide, Voy. Congo, 1927, p. 768).La maison est sans style, l'appartement sans caractère (Green, Journal, 1946, p. 42). D. − 1. COST., MODE. Ensemble des traits esthétiques qui caractérisent les créations d'un couturier, les costumes d'une époque, la manière de s'habiller, de porter la toilette propre à telle personne. Style décontracté. Il existe dans la mode des vêtements, dans la manière dont une femme, célèbre par son goût, se tient et marche, un style indescriptible (...). Ce style est le cachet des classes (Balzac,
Œuvres div., t. 2,1830,p. 145).« (...) tu as un bien beau tailleur. − (...) il vient de chez Balmain. » Il n'y avait rien à dire contre cette coupe raffinée, (...) je n'étais pas habituée à son nouveau style (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 398). ♦ Fam. Le style + subst. en appos.Si tu avais les moyens, tu aimerais t'habiller comment? (...) Pas le style fille-à-papa-fourrure, pas le style collégienne-bleu-marine, pas le style dame-de-trente-ans (Le Nouvel Observateur, 29 déc. 1980, p. 39, col. 3).V. acerbe ex. 9. ♦ De (grand) style. La maîtrise consistait à alterner les mèches de la chevelure avec les plis brisés de luxueuses étoffes. Il entrait dans la confection de ces coiffures de grand style jusqu'à quinze mètres de linon (Stéphane, Art coiff. fém., 1932, p. 139). ♦ Avoir du style. Tout ornement libre est laid. C'est la raison pour laquelle les costumes ont presque toujours plus de style que les autres objets ornés, et pourquoi une broderie en couleurs plaît plus aisément qu'une peinture (Alain, Beaux-arts, 1920, p. 186). 2. ESTHÉT. VESTIM. ET INDUSTR. Synon. de stylisme (v. ce mot B).Le Centre de style crée un poste de documentaliste (...) chargé(e) de (...) gérer l'information concernant la création industrielle (Le Nouvel Observateur, 4 oct. 1976, p. 82).Elle (...) [a] fait ses premières armes avant de travailler dans une dizaine de bureaux de style. Collections (...), réalisation de cahiers de tendances − ils permettent de déterminer les couleurs, les formes, les matières qui deviendront à la mode et conditionnent les productions (Le Monde loisirs, 14 avr. 1984, p. xvi). E. − 1. MUS., CHORÉGR. Manière de composer particulière à un auteur, une école ou caractère distinctif d'une œuvre. Cette œuvre [symphonie en « ut » majeur], (...) par son style mélodique, par sa sobriété harmonique (...) se distingue (...) des autres compositions de Beethoven (Berlioz, À travers chants, 1862, p. 19).On parle de ses trois manières (...); à la vérité (...), le style de Verdi reste si personnel qu'il suffit d'entendre une phrase d'un de ses ouvrages, même du début de sa carrière, pour le reconnaître (Dumesnil, Hist. théâtre lyr., 1953, p. 162).V. comique ex. de Delacroix. ♦ De style. Une danse de style, comme le menuet, est une danse de politesse (Alain, Beaux-arts, 1920, p. 202). 2. P. anal. Manière personnelle d'interpréter une œuvre musicale, chorégraphique, théâtrale, cinématographique. C'était une assez décente pianiste [MmeOtto] (...) et d'un certain style, celui, en plus moelleusement fade, que lui avait légué feu Otto (Arnoux, Solde, 1958, p. 213).Dans Orphée le ton ne peut être ni familier ni « poétique ». Il doit correspondre à l'écriture d'un texte dur (...). Voilà le style que Jean Marais possède (Cocteau, Poés. crit. I, 1959, p. 248). III. A. − 1. Manière habituelle d'appréhender, d'apprécier les choses et de se comporter, propre à une personne ou un groupe. Les dimanches des stalags ressuscitèrent (...) les dimanches de n'importe quelle petite ville française. On y reconnaissait les habitudes familières de la race, son ingéniosité, son amour du bien-vivre, son style aimable et débraillé (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 156): 3. Le monde a son unité (...). Elle est comparable à celle d'un individu que je reconnais dans une évidence irrécusable (...), parce qu'il conserve le même style dans tous ses propos et dans toute sa conduite, même s'il change de milieu ou d'idées. Un style est une certaine manière de traiter les situations...
Merleau-Ponty, Phénoménol. perception, 1945, p. 378. − P. méton. [À propos d'un trait hum.] Synon. de genre, modalité.Ne parlons pas d'un nouveau type de sainteté (...). Mais les conditions historiques changeantes peuvent donner lieu à des modes nouveaux, à des styles nouveaux de sainteté. La sainteté de François d'Assise a une autre physionomie que celle des stylites (Maritain, Human. intégr., 1936, p. 134).On ne peut consentir à vivre qu'en ignorant tout du style de sa mort et des formes de son vieillissement (Nizan, Conspir., 1938, p. 110). − Locutions ♦ Fam. (Le) style + subst. en appos.; subst. + style + subst. en appos.; subst. + adj. + style; subst. + style + adj. (A) la manière caractéristique de. Il réalisait le type d'un de ces Allemands nouveau style qui affectent de répudier avec des railleries le vieil idéalisme de la race (Rolland, J.-Chr., Matin, 1904, p. 117).Ce que j'appelle, en fait de sortie, le style femme de ménage (Colette, Seconde, 1929, p. 255).Le carré de soie noire, style Pieds-Nickelés, qui protégeait son œil (Malraux, Cond. hum., 1933, p. 196). ♦ Dans le/de style + déterminatif; du style de + déterminatif. À la façon typique de. Quelle différence entre un Cruppi et une larve du style de Hanotaux, toujours biaisant (L. Daudet, Salons et journaux, 1917, p. 188).Je faisais aussi des colères dans le plus pur style Pasquier. La ressemblance était frappante (Duhamel, Nuit St-Jean, 1935, p. 81).Le paranoïaque de style persécuté (Mounier, Traité caract., 1946, p. 358). ♦ De grand style. De vaste envergure, avec des moyens importants. Offensive de grand style. Je proposais de monter une opération de grand style sur le front des armées (...) et de doter cette attaque du maximum de moyens qu'il serait possible de réunir (Joffre, Mém., t. 2, 1931, p. 349). ♦ Style d'action, d'existence, de vie. Manière personnelle d'agir, de se conduire dans la vie. Marie-Dorée découvrait en l'écoutant [la comtesse] un genre d'existence, une éducation, un style de pensée et de vie (...) qu'elle ne soupçonnait pas (L. de Vilmorin, Lit à col., 1941, p. 244). ♦ Être (bien) dans le style de + subst.; être (bien) dans son style de + inf. Être dans les goûts, dans les façons de faire habituelles de. Je n'aime pas beaucoup ça, ces visiteuses que l'on reçoit dans sa chambre. Ce n'est pas dans le style de la maison. Mais, pour une fois! (Bourget, Actes suivent, 1926, p. 159).Rien qui fût moins dans son « style » que d'être assise sur le tapis (Mauriac, Plongées, 1938, p. 18). 2. [Avec une valeur fortement laud.] Le (grand) style (de qqn/qqc.). Manière de se présenter, de se comporter qui marque un rang élevé, qui est empreinte de noblesse, de distinction. Arrivée en bas [de l'escalier], elle rejeta le pardessus. Dans ce rez-de-chaussée (...) d'une nudité pompéienne, Hedwige drapée à l'antique (...), quel style! (Morand, Homme pressé, 1941, p. 133).Pièce monumentale, avec colonnes de marbre, dallage de marbre (...). Tout respire le luxe et le grand style. Ravier: grand, mince, élégant (Montherl., Celles qu'on prend, 1950, i, p. 767). ♦ De (grand) style. C'est dans ma chambre qu'il recevait celle que nous appelions « la dame », une putain de style, (...) je n'ai gardé souvenir que du dégoût qu'elle me causait avec la distinction de son allure, son élégance et son afféterie (Gide, Si le grain, 1924, p. 572).Il avait entrevu d'abord une dispute de grand style, quelque chose de magnifique avec éclats de voix, tirades, agenouillements et sanctions. Il avait préparé des mots cinglants (Duhamel, Passion J. Pasquier, 1945, p. 226). ♦ Avoir, donner du style. Avoir, donner de la dignité, de l'allure, du panache. Myope et maladroit de son corps (...), il se tenait sous les injures, sous les agressions même, intrépide. Son orgueil lui donnait du style (Barrès, Appel soldat, 1900, p. 202).Cette demeure (...) tout ensemble historique et vivante, habitée par des descendants qui ont à la fois du « style » et de la vie (Proust, Chron., 1922, p. 51).Manquer de style. Manquer de classe, de grandeur. Elle avait dû se faire une instruction et une éducation, car elle ne manquait, à l'occasion, ni d'esprit, ni de style, ni de tenue (Zola, Paris, t. 1, 1897, p. 85). − En partic. [À propos d'un employé de maison] Manière élégante d'accomplir son service dans les formes. Le petit vieux saisit (...) le bouton d'une porte (...). Le domestique de haut style l'en décroche avec des précautions respectueuses, et lui dit d'une voix bien cultivée, sévère et douce à la fois: − J'en demande pardon à Monsieur (Renard, Lanterne sourde, 1893, p. 29).Les chauffeurs de grand style arrivent (...) en gants mousquetaires, pour vérifier si leurs Rolls ont été bien lavées (Morand, Londres, 1933, p. 177). B. − Spécialement 1. Arg., vx. Synon. de argent.Nous vendrons ce butin à la première occasion, et nos profondes auront le style qui leur manque (A. Camus, Bohèmes, 1863, p. 193). 2. DR., vx. ,,Manière de procéder en justice`` (Barr. Suppl. 1967, Barr. 1974). Le style du Châtelet. Le style du Parlement (...). Style de la Cour de Rome (Ac. 1798-1935). L'instruction commença sur-le-champ. Avec de si faibles éléments, il était impossible, en style de parquet, d'en tirer une condamnation à mort (Balzac, Splend. et mis., 1847, p. 560). ♦ Clause de style. V. clause A et ex. 2.Cette clause de style, servant d'ironique conclusion à la mise en demeure qui la contredisait (De Gaulle, Mém. guerre, 1956, p. 117). 3. HIST. ,,Point de départ de l'année`` (Fédou Moy. Âge 1980). En France, le style le plus courant était celui de Pâques (...). L'indication « nouveau style » (n. s. ou n. st.) portée à la suite d'une date signifie que celle-ci est exprimée après conversion en style actuel, c'est-à-dire en prenant pour point de départ le 1erjanvier. Ce style du 1erjanvier a été rendu obligatoire par une ordonnance de Charles IX (1564) (FédouMoy. Âge1980). ♦ Vieux style/nouveau style. ,,Vieux style, La manière dont on comptait dans le calendrier, avant sa réformation par Grégoire XIII, et qui est encore suivie en Grèce et en Russie. Nouveau style, La manière dont on compte depuis cette réformation. C'est aujourd'hui le quinze de janvier selon le vieux style, ou simplement, vieux style; et le vingt-six, nouveau style`` (Ac. 1835). Je donne les dates en style décadaire et en style grégorien. Quoique le dernier soit le seul employé maintenant, le premier étoit en usage à l'époque de notre voyage; j'ai dû le conserver parce que les éphémérides Françoises, dans cet invervalle, sont calculées suivant ce calendrier (Freycinet, Voy. terres austr., 1815, p. 469).C'est le 8 mars (style ancien), 20 mars (style nouveau) que Missolonghi (...) a succombé (Delécluze, Journal, 1826, p. 336). ♦ Vieux style. ,,Se dit aussi de l'ère chrétienne, par opposition à l'ère républicaine commencée le 22 septembre 1792`` (Littré). Je suis prisonnier des Anglais depuis le 14 thermidor an VI (ou le 2 août 1798, vieux style, qui, dit-on, redevient à la mode aujourd'hui) (Vigny, Serv. et grand. milit., 1835, p. 145). 4. SPORTS. ,,Manière d'utiliser la technique propre à telle (...) spécialité sportive, que le pratiquant assimile à l'entraînement, pour atteindre dans l'épreuve à l'efficacité et à l'élégance du geste`` (Petiot 1982). La technique du coureur et la maîtrise de ses skis, en un mot son style (...) apparaissent dans le slalom (Comment parlent les sportifsds Vie Lang.1952, p. 140).L'entraîneur corrige le style des rameurs et les amène progressivement à harmoniser leurs mouvements, à acquérir le rythme voulu (Jeux et sports, 1967, p. 1534). ♦ Avoir du style. Grand et bien taillé, Duncan (...) sut ce que c'est que d'avoir du style sur piste [vélocipédique] (Baudry de Saunier, Cycl., 1892p. 445). REM. Stylométrie, subst. fém.,ling. Science qui utilise les statistiques pour l'étude du style (supra II A). On peut mesurer le lexique et la syntaxe d'un style (...). La stylométrie usera de tous les moyens de mesurer: on pourra compter, calculer, faire des analyses factorielles, des prévisions statistiques, des comparaisons, (...) son objet global demeure cette propriété de l'ensemble sur laquelle s'exerce finalement le jugement esthétique (J.-M. Zembds Rech. de styl., Nancy, C.R.A.L., 1967, p. 36). Prononc. et Orth.: [stil]. Ac. 1694, 1718: stile, style; dep. 1740: style. Homon. style2. Étymol. et Hist. A. Ca 1290 estile « manière d'agir » (Gautier de Bibbesworth, Traité sur la lang. fr., éd. A. Owen, 278); ca 1350 stile (Gilles le Muisit, Poésies, I, 125 ds T.-L.); ca 1480 selon son stille « à sa manière » (Myst. Viel Test., 43204, éd. J. de Rothschild, t. 5, p. 295); 1540 changer le stille de sa vie « changer de manière de vivre » (B. de La Grise, L'Orloge des Princes [trad. du texte esp. de A. Guevara], L. III, foXIV ro). B. Ca 1393 « manière de parler » (Ménagier de Paris, éd. G. E. Brereton et J. M. Ferrier, p. 194, 36); spéc. 1870 gramm. style direct (Flaub., loc. cit.); 1913 style indirect (Péguy, Argent, p. 1233: conjonction latine de style indirect). C. 1. 1536 stile « manière de composer, d'écrire » (R. de Collerye,
Œuvres, éd. Ch. d'Héricault, p. 46); spéc. a) id. hault stille « manière la plus noble de s'exprimer par écrit » (Id., ibid., p. 258); b) 1538-58 stille bas (Mellin de Saint-Gelais,
Œuvres, t. 2, p. 2); 2. 1699 Beaux-Arts (R. de Piles , Abrégé de la Vie des Peintres, Idée du Peintre parfait, p. 4 ds Brunot t. 6, p. 707, note 7: Que le peintre dessine correctement et d'un stile varié); 3. a) 1671 « caractère propre à une langue » (Bouhours, Les Entretiens d'Ariste et d'Eugène, p. 86 ds Quem. DDL t. 21: stile Asiatique); b) 1734 « caractère général des œuvres des écrivains ou artistes d'un même pays, d'une même époque, etc. » ici, litt. (Voltaire, Lettres philos., t. 2, p. 125: la licence impétueuse du stile anglais); 1742 (J.-B. Dubos, Hist. crit. de l'établissement de la monarchie fr. dans les Gaules, t. 2, p. 367: enseignemens [...] écrits dans le style du sixieme siecle). D. 1346 jur. stille « règlement coutumier » (Arch. JJ 75, fo59 vods Gdf.); 1564 être de style « relever du droit coutumier » (Thierry); 1765 clause de style « clause se trouvant ordinairement dans tous les actes d'une même espèce » (Encyclop.). E. 1. Fin xives. stille « poinçon à écrire » (B.N. lat. 13032, 11800 ds Roques, p. 395); 1546 style (Rabelais, Tiers Livre, chap. 25, éd. M. A. Screech, p. 178, 32); 2. 1562 p. ext. stile « tige dont l'ombre portée sur un cadran solaire indique l'heure » (Bullant, Horolog., p. 10 ds Gdf. Compl.); 3. 1672 « instrument de chirurgie long et pointu » (J. Scultet, L'Arcenal de Chirurgie [ouvrage trad. du lat. par Fr. Deboze], p. 17). F. 1457-66 stille « manière de compter les jours de l'année et de fixer le début de celle-ci » (Ch. des comptes, reg. no6301, A. du royaume de Belgique ds Gdf. Compl.); av. 1630 nouveau stile « manière de fixer le début de l'année postérieure à la réforme de 1582 » (A. d'Aubigné, lettre ds
Œuvres, éd. Réaume et de Caussade, t. 1, p. 530); 1802 nouveau style « manière de compter les jours selon le calendrier révolutionnaire » (Nouv. dict. fr.-all. et all.-fr., Basles, S. Flick d'apr. FEW t. 12, p. 266b). Empr. au lat.stilus« tout objet en forme de tige pointue; poinçon pour écrire » (d'où E), puis « manière, style », « œuvre littéraire » en lat. d'époque impériale (d'où A, B, C), « coutume, mœurs » et « règlement, formule juridique » en lat. médiév. (xiiies. et xives. ds Du Cange, s.v. stillus; d'où D), aussi « manière de fixer le début de l'année » (xives. d'apr. Nierm.; d'où F). La graph. avec -y- est due à l'infl. du gr. σ
τ
υ
̃
λ
ο
ς « colonne; pointe » (v. style2). Voir FEW t. 12, pp. 266b-268. Bbg. Delbouille (P.). Les Art. style et stylistique dans les nouv. dict. fr. de ling. Cah. d'analyse textuelle. 1976, t. 18, pp. 7-37. −Klinkenberg (J.-M.). Essai de redéfinition sémiol. du concept de style. Fr. mod. 1985, t. 53, pp. 242-245. −Quem. DDL t. 11 (s.v. style de révolution), 27, 31 (s.v. style télégraphique), 36, 37. − Reimann (R.). Obs. sur l'us. contemp. du mot style. B. Inform. Lab. Anal. Lexicol. 1961, t. 5, pp. 43-53. −Rohr Geldbezeichn. 1987, p. 247. −Sayce (R. A.). The Definition of the term style. In: Congrès de l'Assoc. internat. de Litt. comp. 3. 1962, pp. 156-166. −Sempoux (A.). Note sur l'hist. des mots style et stylistique. R. belge Philol. Hist. 1961, t. 39, pp. 736-746. |