| STUPÉFIANT, -ANTE, part. prés., adj. et subst. masc. I. − Part. prés. de stupéfier*. II. − Adj. et subst. masc. A. − 1. Adj. Qui provoque l'engourdissement, l'hébétude. Les quatre becs de gaz donnent une chaleur étouffante. C'est l'atmosphère stupéfiante d'un bain maure. La pensée s'engourdit et on reste comme somnolent (Goncourt, Journal, 1860, p. 688).Sans le fumer, je respire la stupéfiante odeur du haschich que fument les autres, dans une grande pipe à réservoir dont chacun ne tire qu'une bouffée puis passe (Gide, Corresp.[avec Valéry], 1895, p. 236). 2. a) Adj. et subst. masc., PHARM. (Substance toxique) qui agit sur le système nerveux en provoquant un effet analgésique, narcotique ou euphorisant dont l'usage répété entraîne une accoutumance et une dépendance. De ce produit [l'opium] on extrait divers alcaloïdes, morphine, codéine, thébaïne, poisons stupéfiants à forte dose (Plantefol, Bot. et biol. végét., t. 2, 1931, p. 367).Je l'ai prié [le prêtre] de me dire comment il espérait entrer en rapport avec l'âme d'un mourant auquel des stupéfiants avaient fait perdre conscience (Green, Chaque homme, 1960, p. 403). − [P. méton.,] [en parlant de l'action d'une substance] Narcotique ou euphorisant. Les Indiens sudaméricains ont étudié systématiquement les diverses espèces de leur flore dans le but d'utiliser leur pouvoir stupéfiant (Lowie, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 31). − P. méton. Auquel on a mêlé une substance stupéfiante. On saisit aussi dans la cellule une bouteille à moitié vidée qui contenait le reste du vin stupéfiant avec lequel le soldat avait été endormi (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 176). b) Subst. masc., gén. au plur., domaine admin. et jur.Produit naturel ou synthétique dont l'usage est sévèrement réglementé tant dans sa prescription médicale que dans son emploi, afin de contrôler et d'interdire le trafic de ces produits et leur usage conduisant à la toxicomanie. Synon. drogue (cour.), stup (arg., fam., infra rem.).Des policiers trafiquaient de l'opium au Siam. Ils étaient spécialisés dans la répression du trafic des stupéfiants (L'Humanité, 19 janv. 1952, p. 6, col. 7).Pourtant les policiers du groupe de répression du trafic illicite des stupéfiants finirent par localiser le laboratoire de Césari (A. Jaubert, Dossier D... comme drogue, Paris, Le Livre de poche, 1984 [1973], p. 278). − En partic. Service administratif ou judiciaire chargé de la répression ou de la prévention de l'usage et du trafic des stupéfiants. « Il est évident que les toxicomanes aujourd'hui sont moins intéressants », observe M. André Solères, chef de la brigade des stupéfiants à la préfecture de police de Paris (Le Monde, 6 févr. 1980, p. 1, col. 4). − P. métaph. En 1925, chacun sa drogue; j'avais pour stupéfiant le voyage: arrivant de Moscou, je repartais pour Pékin (Morand, Eau sous ponts, 1954, p. 211). B. − Adjectif 1. Qui provoque un étonnement extrême, une grande surprise. Cette intelligence supérieure, inouïe, de science psychologique et riche d'observations fines et profondes, passait du sévère au plaisant avec une mobilité stupéfiante (Sand, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 208).Tout à coup, alors qu'ils allaient sortir, Dieutegard lui sauta au cou et l'embrassa avec l'audace stupéfiante des jeunes gens très timides et très émus (Boylesve, Leçon d'amour, 1902, p. 132). − [Dans une exclam.] Extraordinaire, incroyable. Tu n'es pas d'ici, évidemment. Tu as l'air d'une bonne femme des mosaïques d'Égypte... ou d'un serpent debout... ou d'une jarre en grès fin... Stupéfiant! (Colette, Cl. s'en va, 1903, p. 96). 2. [En parlant d'une chose abstr. ou concr.] De grandes proportions, qui atteint une grandeur inimaginable. Mémoire stupéfiante; dimensions stupéfiantes. Quelque surprenante que cette affirmation puisse nous paraître après les stupéfiantes grandeurs que nous venons d'apprécier, ce globe immense, plus d'un million de fois supérieur à la Terre en volume et plus de trois cent mille fois plus lourd qu'elle, n'est qu'un point dans l'univers! (Flammarion, Astron. pop., 1880, p. 378).On se rappelle les chiffres stupéfiants donnés par notre confrère Félix Méténier (...) sur les étrangers qui campent à Paris et dans le département de la Seine (Barrès, Cahiers, t. 9, 1911, p. 48). 3. P. exagér., fam. [En parlant d'une pers. ou d'une chose] Qui est hors du commun, extravagant, époustouflant. Voici encore du nouveau! (...) Cette fois, c'est la Médecine qui va nous éblouir. Écoutons! Un stupéfiant praticien, le Dr T. Chavassus, vient de trouver un traitement radical des Bruits, Bourdonnements, et tous autres troubles du canal auditif (Villiers de L'I.-A., Contes cruels, 1883, p. 346).On ne parlait que (...) de ses stupéfiantes chemises de soie aux couleurs les plus tendres (Carco, Montmartre, 1938, p. 243). REM. Stups, subst. masc. plur.,arg., fam. Stupéfiants (supra II A 2 b). Edie Sedgwick est morte, par abus de « stups », peu après la fin du tournage (Le Nouvel Observateur, 4 oct. 1976, p. 28, col. 4).En partic. Service chargé de la répression du trafic et de l'usage des stupéfiants. Brigade des stups. « Une grande quantité d'héroïne est arrivée ainsi, brusquement, à la disposition d'une clientèle toxicomaniaque potentielle déjà mise en appétit et conditionnée par les drogues dites douces et qui cherchait sa voie vers des plaisirs plus radicaux », dit, avec une prudence savante, un commissaire des « stups » (Le Nouvel Observateur, 2 mai 1977, p. 66, col. 2). Prononc. et Orth.: [stypefjɑ
̃], fém. [-ɑ
̃:t]. Ac. 1694: stupefiant; dep. 1835: -pé-. Étymol. et Hist. 1. 1588 méd. (Lucas Tremblay, Macer Floride, 15 rods Fonds Barbier: choses du tout contraire au faict de la vie, sont ou congelantes ou stupefiantes ou estourdissantes); 1761 empl. subst. (A. Lewet, L'Art des accouchemens, 375, ibid.); 2. 1840 fig. chose stupéfiante (Land.); 1844 en parlant d'une personne (Balzac, Splend. et mis., p. 304). Part. prés. adj. et subst. de stupéfier*. Fréq. abs. littér.: 181. Bbg. Terminol. de la santé et de la méd. Meta. 1979, t. 24, no4, p. 478. |